mercredi 31 octobre 2018

My Josephine : « Out of the blue »



My Josephine, venu de Montpellier, remporte l'adhésion avec ce copieux EP de huit titres, frais, enlevé et plein de charme où même les maladresses sont touchantes. La formation a un grand atout dans sa manche : celui de savoir transcender les limites matérielles. Ainsi le groupe ne compte que deux membres : Marie qui chante et joue de la contrebasse et John, guitariste de son état. Un minimalisme transcendé qui fait la force du duo. Loin de marteler l'auditeur, la musique du duo procure une sensation d'intimité immédiate, on ferme les yeux et on ressent, presque physiquement, les doigts des musiciens attaquer les cordes. Et surtout, les arrangements rêches et près de l'os, laissent l'espace nécessaire à l'auditeur pour faire travailler l'imagination : on se prend à imaginer le duo enregistrer au fin fond d'une grange ou dans une cave, une ampoule nue pendant au bout d'un fil électrique. L'engagement du duo est total, tout juste si les enceintes ne transpirent pas en même temps que les musiciens, infusant un esprit rock'n'roll 50s (cf. « Savage child », « Twist of fate ») dans un univers marqué par le jazz, le blues et le maloya réunionnais (cf. le chant en créole). Dans une sorte de grand mouvement circulaire, le duo réunit ainsi l'élégance du jazz swing (« Crazy World »), le feeling de la note bleutée (« Out of the blue ») et un soupçon de créolité (« J'aspire ailleurs », « Mama ou la pa tonm byin ») constituant un trait d'union rêvé entre la Réunion et la Nouvelle-Orléans. Charmant duo. 

Www.myjosephine.net
https://www.facebook.com/myjosephineduo/


mardi 30 octobre 2018

Anne Darban : « Plutôt me rendre »



Il fut un temps où chanter en français relevait d'une certaine classe, une idée où l'élégance de la langue se fondait avec bonheur dans des arrangements audacieux digne des anglo-saxons. C'était les années 1970. Une époque révolue dont Anne Darban, dont le deuxième EP sort ces jours-ci, adopte les contours pour mieux les détourner. Point de revivalisme ici, mais plutôt une visée à plus long terme ; l'intemporalité qui donne naissance à une œuvre. Anne Darban chante en français, des textes un peu cryptique où l'on sent pointer à l'arrière-plan une pointe de romance frustrée et mélancolique. Sa voix éthérée, caresse l'oreille et se fond à merveille dans des arrangements classieux, classiques : guitares, un piano léger et émouvant, une batterie sourde, mate, et une basse pleine et ronde psyché 60s. Le tout dessine une toile enchanteresse, hypnotique et planante, progressive voire menaçante à l'occasion (la baroque « Un dimanche à la mer », « Les couleurs »), où le timbre délicat de la chanteuse apporte la touche finale. Emouvant. 
Sortie le 9/11https://fr-fr.facebook.com/annedarban/
https://twitter.com/annedarban

En showcase le 9/11 à Paris (Le Walrus) et en concert le 15/11 à Paris (Le Motel)

lundi 29 octobre 2018

The Morlocks : « Bring on the mesmeric condition »



Intimement lié aux années 60 et 70, le rock garage, marotte habituelle de l'auteur de ces lignes, a une longue et riche histoire dont l'écriture se continue bien au-delà de son supposé âge d'or. Formation méconnue du genre, The Morlocks, en est le parfait exemple. En voici donc le nouvel effort, le septième, huit ans après le précédent et trente trois ans après le premier, sorti en 1985, bien après les sixties donc époque fantasmée dont ils revêtent élégamment tous les attributs. Pochette superbe entre psychédélie, op et pop art où un œil, apparaissant en filigrane, semble nous contempler depuis le passé. Une nostalgie dont le quintet fait ses choux gras en en épousant les contours. Le disque aurait aisément pu sortir il y a cinquante ans et rivalise sans peine avec les classiques du genre. Guitares acides et abrasives, chant écorché, un soupçon de groove (cf. « Time to move » sous influence Stones) pour relever le tout, voici le genre d'album que l'on a entendu mille fois et dont il est pourtant impossible de se lasser. Au travers de fulgurances aériennes des guitares, l'urgence se fait ressentir sur tous les titres. Avec un feeling imparable en sus qui fait ralentir le groupe à bon escient (« No one rides for free ») ou ressortir les guitares acoustiques (« Heart of Darkness ») et l'harmonica (« Down Underground »la touche bleue toujours de bon goût) pour contrebalancer et apporter un semblant d'équilibre à l'album. Le reste n'est qu'éclair électrisant, le Graal du rock rock’n’roll euphorisant (« High Tide Killer », « Easy Action »), parfaitement incarné ici en une grosse demie-heure. Du miel pour nos oreilles… 

https://fr-fr.facebook.com/MORLOCKS777/
https://mortbe.wixsite.com/themorlocksusa


dimanche 28 octobre 2018

Bordelophone, Le Studio de l'Ermitage, 27 octobre 2018.

(c) RG

Sur la scène du studio de l'Ermitage, Bordelophone fête la sortie de son premier album en ce samedi soir. Bordelophone signe la rencontre entre une guitare rock (flirtant avec le métal) et une section rythmique transpirant le swing et le jazz par tous les pores. Un trombone, instrument assez inhabituel dans le rock s'il en est, assure la transition. Bordelophone sur scène c'est le grand huit assuré, d'une extrême à l'autre, entre swing (« 445 ») et guitare saturée, attaque frontale (citant Led Zeppelin ou Rage Against The Machine) saturée de décibels et envolées progressives délicates et pleines de grâce (cf. « Apollo 13 »). Le swing en ligne de mire surtout lorsque la contrebasse et de sortie et qu'un percussionniste vient se joindre aux agapes le temps d'un formidable duels de cogneurs avec la batterie. L'énergie circule ainsi telle un vers rampant s'incrustant dans des recoins inattendus, se nichant dans les accélérations fulgurantes de la guitare ou de la batterie. En dépit de son nom évocateur, l'affaire est parfaitement structurée et les musiciens, soudés, particulièrement inspirés, créatifs, offrant des versions lives sensiblement différentes de celle du disque ainsi que quelques nouveaux morceaux. Sur « Jambon de Bruxelles » le public est en délire et saute en rythme avec le trombone, signant ainsi une magnifique démonstration de rock groove qui, pour une fois, ne singe pas les années 70 mais les recycle avec habileté (cf. le riff de Led Zeppelin recrée avec inventivité). Quelle soirée ! 

https://fr-fr.facebook.com/bordelophone/
https://soundcloud.com/bordelophone

samedi 27 octobre 2018

The Sore Losers : « Gracias Señor »



Redoutable formation belge, The Sore Losers nous avait estomaqués avec son formidable « Skydogs », sorti en 2016, sorte de grand écart entre Black Sabbath et le garage psychédélique. Deux ans après les Belges sont de retour avec ce nouvel effort et, si les influences des années 1970 constituent toujours le cœur de l'affaire, on ne peut que constater une évolution notable dans le son et la démarche du groupe. Ainsi, avouons-le, nous avons été plutôt désarçonnés par « Dark Ride », le premier single dévoilé, un titre hybride disco/pop et un spectaculaire contre pied de la part d'un groupe ayant fait du gros son lourd son mètre étalon. Le reste de l'album n'offre pas un bouleversement aussi spectaculaire mais la tendance globale reste tout de même dans l'effacement progressif des watts, d'une baisse générale des décibels, au profit d'une démarche plus policée et pop. Ce qui le grand mérite de remettre la mélodie et le geste musical au centre des débats et nous offre quelques magnifiques moments tels que l'accrocheur boogie d'ouverture « A little more », qui constitue une sublime entrée en matière, l'abrasif « Little Baby », dans la lignée de l'album précédent ou « Denim on Demin » pop ensoleillée aussi douce qu'un couché de soleil californien dans un film des années 70. Un effort d'excellente facture de la part d'une formation qui a su évoluer en douceur en restant fidèle à sa ligne directrice. Et qu'est-ce qu'on dit ? Merci, messieurs. 

https://thesorelosers.com/
https://www.facebook.com/thesorelosers
https://twitter.com/TheSoreLosers

vendredi 26 octobre 2018

Ponteix : « J'orage »



D'ici (cf. le chant en français) et d'ailleurs (le Canada), d'hier et d'aujourd'hui, les Canadiens de Ponteix débarquent avec un EP aux contours flous et multiples où les influences du passé sont transcendées par une production contemporaine au soin maniaque. Une proposition musicale forte, tourbillonnante et labyrinthique, symbolisée par une affirmation étrange au sens mystérieux : « J'orage »… Et si l'orage bouillonnait dans l'esprit de nos musiciens ? Et si derrière les ambiances éthérées, progressives, nourries de nappes synthétiques et d'arpèges de guitares (magnifique « J'orage »), pointait une angoisse sourde ? Une cocotte-minute sur le point d'imploser ? Dans la lignée de Karkwa ou des enregistrements solo de Louis-Jean Cormier, Ponteix réussit à marier harmonieusement envolées lyriques de synthés, une guitare aux lignes déliées et chant (en français sur trois titres) évanescent. De la belle ouvrage, comme ils l'affirment eux-mêmes : « Je pars à la dérive » à l'écoute du disque… 

http://www.ponteixmusic.net/
https://www.facebook.com/ponteixmusic
https://twitter.com/ponteix_



jeudi 25 octobre 2018

Clelia Vega : « Slanting Horizon »



A peine posé sur la platine, ce nouvel EP, enserre l'auditeur dans sa toile enchanteresse et, au final, hypnotique (cf. « Silencio »). Un voix s'élève, un arpège nous caresse les tympans et nous voilà totalement pris au piège, coincés dans ce charmant dédale. Mettant en exergue des instruments tels que le piano, le violoncelle et la guitare folk, six cordes qui constituent le cœur de sa démarche artistique, la jeune Clelia Vega peint, titre après titre, un toile rêveuse et un tantinet mélancolique à la saveur automnale éthérée, qui colle à merveille avec son timbre de voix à la rondeur mélodique et délicate. La justesse de l'interprétation, la délicatesse générale qui se dégage de la chose et le soin porté à l'écriture et aux arrangements parfois étonnants (cf. « Wywlaimt ») classe immédiatement ce « Slanting Horizon » dans le haut du panier, celui des intemporels. Un avant-goût précieux dont on attend la confirmation sur le nouvel album de la chanteuse dont la parution est prévue pour début 2019. 

https://www.difymusic.com/cleliavega
https://www.facebook.com/cleliavega/



mardi 23 octobre 2018

Nana Adjoa : « A tale so familiar »



Nous avions quitté Nana Adjoa sur un entre-deux un peu frustrant, entre tentations électroniques et soul acoustique, le temps d'un EP touchant de maladresse. Quelques mois ont passés et la chanteuse hollando-ghanéenne est de retour avec une proposition musicale nettement mieux aboutie au charme vénéneux. Remarquable de constance et d'unité cette nouvelle livraison de quatre titres fait montre d'un univers en pleine maturation. Produit avec soin, ces nouveaux titres mettent particulièrement en valeur la voix de Nana qui vient nous caresser les oreilles avec délicatesse. Entre passé et présent, la démarche de Nana s'affine et pourrait se traduire comme une écriture classique enluminée par des arrangements électroniques cotonneux et une dynamique contemporaine. Le base, le cœur, la soul reste humaine et acoustique (cf. « Dooa ») mais le tout déborde d'inventivité dans les arrangements. Des petits bip bip foisonnants et qui font basculer le tout dans une autre dimension sans pour autant altérer la substantifique moelle folk intimiste de la chose (« Simple Things », « Simmer Down »). Un disque que l'on écoute comme on feuillette un album photo de famille en constatant, attendri, que les enfants grandissent. Emouvant. 

https://fr-fr.facebook.com/Nanaadjoamusic/
http://nanaadjoa.com/
https://twitter.com/nanaadjoamusic/

lundi 22 octobre 2018

MNNQNS : « Advertisement »



Les voyages forment la jeunesse et ce n'est certainement pas Adrien, leader de MNNQNS (mannequins sans les voyelles) qui nous contredira, lui qui a lancé son groupe au retour d'un échange universitaire à Cardiff (Pays de Galles) plongé dans l'effervescente scène rock locale. Aujourd'hui, fait rarissime et exceptionnel pour un groupe français, MNNQNS est signé sur un label de la perfide Albion (FatCat). Et à l'écoute, le groupe ne manque pas d'arguments pour remporter l'adhésion. Il se dégage de ces quatre titres une urgence, entre Bloc Party et les Strokes des débuts (attention, hein!) qui se fait sentir à travers un chant écorché (faux accent cockney impeccable) et des guitares abrasives (« If only they could », « Bored in this town »). Un petit air cold se fait également sentir dans les arrangements au clavier (« Tiger on a leash »). Évidemment la nostalgie du début des années 1980 est tentante. Mais la qualité d'écriture et la fièvre qui se dégage de ces quatre plages place le groupe au-delà dans la catégorie du dessus, celle des intemporels. Des débuts prometteurs à confirmer sur le long terme… 

https://fr-fr.facebook.com/mnnqns/
https://twitter.com/mnnqnsband

dimanche 21 octobre 2018

Belako : « Render me numb trivial violence »



Ils furent, l'été dernier, l'un des rares motifs de satisfaction de la dernière édition de Rock en Seine. Le groupe basque Belako débarque donc dans nos contrées avec cet album, mature et étonnant, aux multiples surprises (cf. le reggae électro « Strangers in a box »). Dans une époque où ranger la musique dans des tiroirs est la norme, Belako ne rentre dans aucun en particulier. Et pourtant les influences, pour résumer de My Bloody Valentine aux Cure, sont là, pas forcément reconnaissables, noyées dans un croisement expérimental géant où des guitares bien senties (« Two faced simulation »), entre noise et attaque métal, croisent des nappes glaçantes de synthés cold wave flirtant avec l'électro («Stumble / Stumble 2»). Le tout sous la houlette d'une section rythmique, remarquable en toute circonstance, et de la voix, charmeuse, de la chanteuse Cristina. Dans ces meilleurs moments il se dégage une véritable euphorie d'écoute, résultante directe du plaisir de jouer (cf. « Over the edge ») alors que, parfois, le disque se pare d'atours à la fois planants et glacés (« Stumble / Stumble 2 »). Une manière de souffler le chaud et le froid qui fait tout le charme de la formation qui, fidèle à ses racines, se fend ça et là de quelques titres chantés en langue basque (« Hegodun Baleak 2 »). Une pointe d'originalité exotique (du moins vu de ce côté-ci des Pyrénées) et de charme supplémentaire, et au final, une excellente surprise. 

https://twitter.com/belakoband
https://www.facebook.com/belakomusic

samedi 20 octobre 2018

Barton Hartshorn : « Twelvemonth »



Moins d'un an après nous avoir estomaqués avec son, remarquable, premier album, l'Anglais exilé en France, Barton Hartshorn (du nom de sa ville natale) est de retour avec un deuxième album surprenant. En effet, dès son deuxième disque, Barton se permet un pas de côté avec ce deuxième effort, la bande originale d'un livre (« Necessary to life » de Louisa Leontiades), destiné à devenir un film pas encore tourné et inspiré par le séjour du musicien sur une île suédoise au large de Gothenburg, un endroit sauvage ou du moins tel que l'on s'imagine à l'écoute. Première surprise, le disque commence par deux morceaux instrumentaux, et on commence à saisir l'enjeu se cachant derrière. L'album est un effort introspectif, enregistré quasiment en solitaire (ou presque) et inspiré par une nature balayés par des vents sauvages que l'on entend d'ailleurs en filigrane. Ajoutons-y un soupçon d'expérimentations (« Drive your moped across the sea », « I give to you » sous influence new wave eighties, « Middlepoint ») et on obtient un album déroutant, à mille lieues de la pop californienne 70s de son premier disque. Seulement deux titres, « You can't help what you turn into » et « Out of my reach », retrouvent, un peu, les accents ensoleillés de « I died of boredom and came back as me ». Mais le reste, pour peu que l'on accepte de se laisser bercer, ne manque pas de charme. Car, à l'écoute, l'album se révèle automnal (« ECG », le terme anglais signifiant électrocardiogramme), délicat, un soupçon mélancolique et, surtout, folk (« The Dust »). Au fil des titres, on découvre finalement une nouvelle facette de ce musicien talentueux qui réussit, en quelques accords enchanteurs et inspirés, à poser une ambiance, un climat, un paysage et à, littéralement, transporter l'auditeur au cœur de la nature tourmentée. 

https://fr-fr.facebook.com/BartonHartshornMusic/
http://bartonhartshorn.com/


mercredi 17 octobre 2018

William Z. Villain, Le Café de la Danse, 16/10/2018

(c) Cathimini


(c) Cathimini

(c) Cathimini
Décidément William Z. Villain est un drôle de zozo ! Armé de sa magnifique guitare à huit cordes et accompagné de l'excellent batteur Lucien, un français embauché pour l'occasion, l'Américain, qui parle le français de mieux en mieux, nous a donné un concert sur courant alternatif. William, c'est tout d'abord une personnalité vive, débordante, un type bouillonnant et plein de vie. Le genre de qualités qui s'exprime dans sa musique, qui part parfois dans tous les sens dans un bouillonnement créatif incontrôlable. Sur scène, c'est pareil ! Impossible pour lui d'imaginer une performance « classique », il lui est quasiment obligatoire de faire le clown, d'haranguer la foule (en français) de se transformer en professeur de chant, l'air faussement sévère, pour le public, entre deux blagues hilarantes. Un type adorable en somme qui, même s'il s'est calmé, en fait toujours beaucoup. Trop peut-être au détriment du déroulement de la musique qui souffre un peu de ces (nombreux) moments de flottements. C'est en tout cas un grand plaisir de le voir jouer avec un batteur capable d'insuffler ce groove du sud qui imprègne sa musique au point d'en devenir une composante essentielle. Et quelle voix ! On ne peut que tout pardonner à un type nous chavirant d'émotion lorsqu'il entonne la magnifique « Her Song » en clôture.


(c) Cathimini






Viagra Boys, Le Point Ephémère, 15 octobre 2018.



Précédé d'une réputation mi-sulfureuse, mi-flatteuse, les Suédois de Viagra Boys ont débarqué lundi soir dernier devant un Point Ephémère pas très loin d'afficher complet alors même que la bande vient à peine de sortir son premier album. Ils sont six sur scène mené par le charismatique leader, Sebastian Murphy, Américain de naissance, débarqué en Suède (le pays de sa maman) à l'âge de 17 ans. Le corps pratiquement entièrement couvert de tatouages, un peu à la mode des Yakuzas, (il est tatoueur dans le civil) le chanteur attise les regards et cristallise l'attention. Limite ingérable, ce dernier se révèle un punk à l'ancienne, qui picole, recrache sa bière sur le public quand il ne se la reverse pas sur le corps (évidemment il est torse nu dès le deuxième morceau) et se roule par terre, quoi de plus indiqué lorsque l'on éructe « Sports » ? A l'inverse de l'attitude old school du chanteur, le groupe possède ce petit ingrédient en plus qui suffit à l'élever largement au-dessus du panier du combo punk moyen. Une gamme étendue tout d'abord entre le souffle déchiré du saxophone et des nappes synthétiques glaçantes, qui transforme le groupe en trait d'union rêvé entre les Stooges (de Funhouse) et Joy Division. Derrière le bruit, la fureur, et les watts des amplis en fusion (ils sont très doués pour cela aussi) on distingue une finesse dans les arrangements, une démarche expérimentalement noise bien servie par des musiciens révoltés (le bassiste en particulier fait forte impression). Même le rappel, chaotique, du bruit à moitié improvisé, et finalement assez inutile ne parvient pas à doucher totalement l'enthousiasme du public. Ils sont en tournée française jusqu'à la fin de la semaine, ne les ratez pas ! Ah oui, on a aussi hâte d'écouter l'album… 

https://fr-fr.facebook.com/vboysstockholm/
https://twitter.com/viagraboys


dimanche 14 octobre 2018

William Z. Villain : « Stonedigger »



Si l'espace d'un moment (d'égarement) on a pu confondre William Z. Villain avec un bluesman, cette étiquette trompeuse, et trop réductrice, s'efface définitivement avec ce deuxième album. Aux itinéraires bien balisés, William préfère les embardées dans les à-côtés de la musique populaire. Ainsi, ce nouvel effort place l'auditeur dans la position d'un utilisateur ne sachant pas très bien régler son poste de radio qui reste coincé entre deux fréquences. Un effacement progressif des genres et des style qui laisse place à un flot créatif (pas forcément bien contrôlé, soyons honnêtes) visitant les musiques du monde, du sud particulièrement (calypso, tango, rebetiko). Même si la base reste ancrée dans les musiques raciniennes étasuniennes (le folk notamment), la voix adopte un phrasé hip hop faisant du chant, des mots et (surtout) du flow un ingrédient sonore comme un autre s'intégrant dans l'ensemble (« Boom goes boom », « Papertrail », « Homesick »). L'album se déroule en deux temps et, dans sa première partie, l’œuvre désarçonne, questionne, et réclame de nombreuses écoutes attentives pour bien en saisir la consistance, les enjeux et la beauté subtile. Mais la donne change à partir de la plage n°6. On assiste alors, ébahis, à un enchaînement de perles : « Stonedigger », la poignante « Decadence », « Something beautiful », « Cliff » et « I wonder » (un titre interprété au piano, une nouveauté au moins sur disque) : autant de tubes potentiels qui n'auraient pas dépareillés sur le premier disque. C'est un fait, William Z. Villain a mûri son art et sa musique même si la formule n'est pas encore tout à fait au point. Le musicien n'a pas encore sorti le grand disque qu'il porte probablement en lui mais il nous semble plutôt bien parti… 

En concert à Paris le 16/10 (le Café de la Danse).
https://fr-fr.facebook.com/WilliamZVillain/
http://williamzvillain.com/
https://twitter.com/WilliamZVillain
https://williamzvillain.bandcamp.com/album/stonedigger

samedi 13 octobre 2018

Johnny Mafia : « Princes de l'amour »



Johnny Mafia, le groupe, est de retour avec un deuxième effort qui, n'en déplaise à son titre très second degré, est toujours chanté dans la langue de Shakespeare. Donc ce nouvel album s'intitule « Princes de l'amour », et, au-delà, de l'humour (une composante essentielle du groupe comme en témoigne ses clips très séries B), ce titre symbolise toute la ferveur juvénile du quatuor et que l'on retrouve dans sa musique foutraque où se mélangent les influences, entre grunge et rock psyché (cf. l'écho qui habille les guitares) dans un joyeux foutoir, un chaos savamment organisé. Car l'énergie est ici fondamentale. Le son des guitares a grossi au point de dresser parfois un mur effrayant, la section rythmique mène la chose sur un tempo véloce, le chant part dans des embardées incontrôlables, bref, tout va bien ! L'écrin est en tout cas parfait pour ces petites bombinettes rock rock’n’roll dépassant à peine les trois minutes, le format idéal pour exprimer au mieux toute la fougue adolescente qui habite (encore) le groupe. Pourvu que ça dure… 

En concert à Paris (La Maroquinerie) le 30/11.
https://fr-fr.facebook.com/johnnymafiagroupe/
https://twitter.com/johnnymafia1
https://johnnymafia.bandcamp.com/

vendredi 12 octobre 2018

Viagra Boys au Point Ephémère le 15/10


Cela se passe lundi soir au Point Éphémère et c'est énorme !

Woody Murder Mystery : « Lost in Beaucaire »



Perdu dans Beaucaire annonce le titre… Pour Baptiste Rougery, le musicien multi-instrumentiste tête pensante qui se cache derrière cette mystérieuse affaire, la question semble se poser autrement tant l'homme paraît perdu dans le son et les instruments. Il en résulte cette somme à la fois psychédélique et éthérée où les influences se croisent et mutent. Une basse ronde, comme dans les sixties, échappée de Melody Nelson (Serge Gainsbourg) sur la plage titulaire donnant corps à cet aspect général rêche, une production près de l'os et un je ne sais quoi de génialement foutraque généralisé qui nous ramène immanquablement au Brian Jonestown Massacre des années 1990, autant d'éléments qui nous donnent quelques précieuses indications sur les disques qui immanquablement constituent la discothèque de Baptiste. Une collection de très bon goût nous semble-t-il. Mais Woody Murder Mystery se distingue par une approche pop (les Beatles ne sont pas bien loin) gommant les notions de fuzz, de saturation et l'aspect garage auquel les groupes psychés sont souvent associés. A la place on retrouve de jolies mélodies planantes, parfois très brèves, parfois instrumentales mais toujours assez rock dans l'esprit plus que dans la forme. Encore une belle sortie signée Freemount Records. 

https://woodymurdermystery.bandcamp.com/
Facebook



mardi 9 octobre 2018

Lil' Red and the Rooster : « Soul Burnin' »



Il est de ces disques, souvent auto-produits, qui passent relativement inaperçus et qui pourtant, une fois posés sur la platine nous réservent d'excellentes surprises. Ainsi, Lil' Red and the Rooster est de retour avec une nouvelle tranche de bonheur gravée sur sillon. Ce que l'on aime par-dessus avec cet album, c'est sa capacité à nous faire voyager, à travers le temps, les époques, et les continents. Le disque baigne dans une ambiance délicieusement rétro, dans un cross-road prisé et précieux, au confluent des influences entre blues, jazz et une pointe de soul. La voix de la chanteuse Jennifer Milligan est magnifique, rauque ou douce au besoin, et, quelque soit le contexte, débordante de charme. L'accompagnement musical est à l'avenant, swing velouté mais contrebalancé par des guitares rêches mais néanmoins élégantes de l'excellent Pascal Fouquet tirant le fil de soli inspirés. Enfin dernier élément, discret mais essentiel à l'équation : le clavier. Qu'il s’agisse de nappes d'orgues soul soyeuses, ou de piano swinguant en diable, l'instrument fait basculer l'ensemble dans une autre dimension tout en apportant un supplément d'élégance (si toutefois cela était nécessaire) dans le moindre espace disponible. De quoi faire de cet album un classique immédiat dépassant de la tête et des épaules toute la triste cohorte des contrefacteurs.

https://lilredandtherooster.com/
https://www.facebook.com/LilRedRecords
https://twitter.com/LilRedRecords

lundi 8 octobre 2018

Bombino : « Deran »



Enregistré au Maroc, ce nouvel album marque le retour du guitariste sur son continent d'origine, l'Afrique, après dix années d'exils successifs qui l'ont vu sa notoriété exploser sur le plan international via une liste de collaborations longue comme le bras (Robert Plant, Stevie Wonder, Keith Richards etc.) Mais qu'importe dans le fond, Bombino est resté le même, à savoir un musicien inspiré et conscient du monde qui l'entoure, un type à qui six cordes posées sur un morceau de bois suffisent pour être heureux. C'est ainsi un message de paix et d'espoir, dans une époque troublée, que partage le Touareg, une carte postale musicale de 10 titres inspirés et relaxants ; tout juste si la chaleur et le désert suintent à travers les enceintes. Bombino n'est jamais aussi inspiré que lorsqu'il est en Afrique. Le guitariste retrouve ainsi sa position de passeur, imaginant sa musique comme un trait d'union entre les cultures. Puisant aussi bien dans le terreau de la musique traditionnelle de son continent natal, dans le reggae qu'il adapte à sa personnalité (ce qui donne le Tuareggae) que dans les musiques occidentales (blues, funk, soul, folk), il réussit à trouver dans chaque style le point commun, la part d'humanité nécessaire, qu'il retranscrit ensuite avec une énergie rock, électrifiée, vivifiante et hypnotique (« Tenesse »). Un album inspirant, enivrant, tant l'artiste réussit à nous embarquer dans son sillage, son odyssée, sa croisade. 

En concert le 7/11 à Paris (Petit Bain)
http://www.bombinomusic.com/
https://www.facebook.com/bombino.official
https://twitter.com/BombinoOfficial

dimanche 7 octobre 2018

The Handsome Family + Lonny Montem et Guillaume Charret, Le Petit Bain, 4 octobre 2018.


La soirée, sur l'eau puisque Le Petit Bain est une barge posée sur la Seine, commence avec le duo Lonny Montem/Guillaume Charret qui décline sur scène son projet Tara enregistré en une semaine dans une maison auvergnate (d'où vient d'ailleurs le titre du disque). Un endroit très vraisemblablement d'une tranquillité inspirante si l'on en juge par les chansons qui ont été tirées de l'endroit. Nous voici donc parti pour une superbe odyssée musicale entre harmonies vocales et délicats arpèges de guitare. Un harmonica ou un banjo éparse apportant une note entre blues et country. Magnifique d'émotion, le duo nous happe littéralement sur un quai de gare enneigé (cf. « Little Lovers »). 

Changement d'ambiance ensuite avec The Handsome Family, groupe d'Albuquerque (Nouveau Mexique) qui s'est fait connaître il y a quelques années en signant le générique de la première saison du feuilleton True Detective. The Handsome Family, un groupe dont les compositions suintent la poussière et les cactus par tous les pores. On navigue à vue (puisque nous sommes sur l'eau) entre folk, rock et country alternative, autant de genres servis par une qualité de composition tenant le haut du panier et assurée par des musiciens virtuoses. Quelque part entre la fulgurance de Steve Earle et la démarche expérimentale des Jayhawks, The Handsome Family télescope les influences du passé (des années 50 à 70) avec une ferveur et un son contemporain pour un résultat dépaysant (enfin surtout vu de France) et ne manquant pas d'humour noir. Un groupe qui a tout bon ! 

http://www.handsomefamily.com/
https://fr-fr.facebook.com/lonnymontem/

Brisa Roché, le Café de la danse, 3 octobre 2018.



Le concert commence avec les notes d'une basse naviguant en plein delay. Si le concert du soir se déroule en trio et le dernier album de Brisa Roché, le magnifique « Father », voit la chanteuse renouer avec l'idiome folk, cette réinterprétation se fera à sa manière, post moderne. Comme une funambule sur le fil, tirant un trait d'union entre le passé et le présent. Il en résulte un concert étonnant parsemé de nappes synthétiques fantomatiques, d'éclairs de guitare électrique limite garage (« 48 ») et de délicats arpèges acoustiques (« Holy Badness ») ou transparaît par intermittence la chanteuse de jazz qu'elle fut autrefois. Limitée par une technique rudimentaire « j'ai commencé à treize ans et je n'ai jamais progressé depuis » à la guitare, « c'est rare que je joue autant sur un projet » (signe de l'importance toute personnelle et particulière de ce dernier), Brisa inverse les rôles dans un tour de passe passe étonnant, la guitare folk étant cantonnée à un rôle rythmique alors que la basse prend, assez souvent, le lead et les soli. La performance du soir a été marquée par un rare et intense moment d'émotion lorsque Brisa interroge le public demandant quel est le parfum de votre amour perdu afin d'improviser une chanson. Un magnifique don de soi et d'humanité de la part d'une chanteuse qui chante aussi « pour nos disparus, nos amours perdus qui nous quittent jamais tout à fait mais deviennent des chansons et des poèmes »… 

http://www.brisaroche.com/
https://www.facebook.com/brisarocheofficial/


mardi 2 octobre 2018

Michelle David : « The Gospel Sessions Vol. 3 »



La pochette, où l'artiste apparaît maquillée de manière tribale, pourrait laisser imaginer un album sous influence africaine. Il n'en est rien. Si influence il y a, elle serait plutôt à rechercher du côté de la soul étasunienne des années 1960, teintée de gospel (cf. « Give to him ») scène dont Michelle David s'impose comme une héritière naturelle. Mais cet effort, son troisième mais le premier a être distribué dans nos contrées, va bien au-delà de la simple nostalgie pour atteindre une sorte d'intemporalité. D'hier ou d'aujourd'hui, qu'importe le flacon du moment que l'ivresse (musicale s’entend) se fasse ressentir. Et en l'espèce, cet effort réussit au-delà de toutes les espérances, portée par la voie puissante et tellement soul de la chanteuse. Groove dévastateur, cuivres saillants et audace des arrangements (cf. la boîte à rythmes de la délicate « Tell me why », accessoire totalement hors-sujet mais parfaitement intégré à l'ensemble) le disque entier est porté par un enthousiasme communicatif et il ne faut guère plus de 30 secondes pour avoir des démangeaisons dans les hanches à son écoute. L'engagement des musiciens, la soul, le vécu et la profonde humanité de l'ensemble transpire dans la moindre note jouée ici. Une grande réussite, dans un créneau soul vintage bien encombré par ailleurs, qui soutient la comparaison, les yeux dans les yeux, avec n'importe quelle production branchée made in Brooklyn. 
En concert les 17 et 18 octobre à Paris (Mama Festival)
http://michelledavidandthegospelsessions.com/
https://www.facebook.com/michelledavidandthegospelsessions/

lundi 1 octobre 2018

Sing and they'll sing your song



Alors que le label Mégaphone fête ses 20 ans, la présente compilation hommage nous amène à nous questionner sur ce qui fait la magnificence d'un label dont on collectionne compulsivement les sorties. Comment se crée une identité artistique forte au point que la seule présente d'un logo dans le coin d'une pochette suffit à imposer un gage de qualité sur un disque ? Dans le cas qui nous concerne, on serait tenté de parler de mélodie, d'émotion, entre douceur et chaleur, une intimité acoustique que l'on ressent à l'écoute des rééditions de la précieuse (mais hélas un peu oubliée) Karen Dalton ou du calypso de Blind Blake, du virtuose de l'oud Omar Bashir, de la scène pop hexagonale (Lecube, Sylvain Vanot, Simon Dalmais) ou du chanteur folk Michael Head. Une compilation de haute tenue pour fêter dignement l'anniversaire de ce précieux label et dont l'écoute se marie merveilleusement bien à la saison des feuilles mortes. 

https://fr-fr.facebook.com/themegaphonelabel/
http://www.megaphone-music.com/