lundi 27 février 2017

Tiger Army : « V*** »



Après quasiment une décennie d'absence, Tiger Army, toujours menés par Nick 13, sont de retour avec ce nouvel effort. Toujours inspiré par les années 1950, ce cinquième album s'inscrit dans une veine psychobilly soit l'exact point de rencontre entre les influences originelles venues du rockabilly, de la country et du rock n'roll et une dynamique punk prête à tout exploser. Ainsi, une véritable dichotomie dicte ce disque entre le chant mélodique de Nick 13, pour résumer un crooner qui s'ignore (« Dark and lonely night », « Prisonner of the night »), et des guitares vicieuses et tranchantes (« Knife's edge »). Mais l'album brille également par une véritable ambition musicale, les arrangements de cordes de « World without the moon » et de « Happier times ». Dommage toutefois que le trio n'ait pas pu aller au bout de sa démarche et doive se contenter de claviers au son un peu cheap. Swinguant de bout en bout (« Devil lurks on the road »), n'hésitant pas à piocher quelques idées de l'autre côté de la frontière Mexicaine et mettant l'accent sur le mot « night » (présent dans plusieurs titres), Tiger Army plonge l'auditeur dans un monde nocturne et interlope entre ruelles peu engageantes et bars un poil louches. Un trip en soi.
En concert le 5 mars à Paris (La Maroquinerie)

dimanche 26 février 2017

Soen : « Lykaia »



Le Nord reste un territoire privilégié pour le métal et la bonne surprise du jour nous arrive de Suède. Soyons honnêtes, jusqu'à ce jour, le nom de Soen nous était totalement inconnu. Et il est peu probable que cet état de fait perdure tant le troisième album du groupe « Lykaia » se révèle excellent. Soen œuvre dans un genre de métal progressif où l'agressivité des guitares est canalisée dans des compositions au long cours alternant passages atmosphériques et brusques décharges électriques (« Opal »). L'ouverture de l'album (« Sectarian ») est à ce titre on ne peut plus classique et rappelle Tool, le parangon du genre. Mais bien vite, le quatuor échappe aux formules toutes faîtes et s'échappe vers de nouveaux horizons porté par une finesse rythmique qui les voit flirter avec les pattern ternaires à la limite du free-jazz (« Lucidity ») ou s'essayer à des gammes orientalisantes (« Jinn »). La démarche de Soen est portée par une musicalité extrême, sobre et curieuse d'autres territoires musicaux. Le propos est bien servi par une production propre et aérée où les instruments et compositions respirent permettant à chaque élément de trouver sa place. Le climax du disque reste « Sister », qui voit le groupe atteindre des sommets d'intensité en forme de thérapie. Un album brillant.
En concert le 15/04 à Paris (Backstage O'Sullivan)

samedi 25 février 2017

Rumble To Jungle



Tirant son nom d'un fameux combat de boxe ayant opposé le regretté Mohamed Ali à George Foreman en 1974, Rumble To Jungle tient sa promesse d'une musique qui bastonne et tabasse. Ainsi, l'album débute avec un formidable « The next round », guitare au cordeau, section rythmique ultra-précise, la musique trahit l'engagement physique des musiciens et il est total. Baignant dans une délicieuse atmosphère teinté Blaxploitation 70s (la guitare wha wha de « Small town girl »), l'album scelle la rencontre entre rock n'roll assez dur et soul music par le biais de la voix suave et sexy de la chanteuse Kissia San. En ce sens l'album rappelle ce que l'on aime tant chez les BellRays ou, naguère, chez les Noisettes. Du rock n'roll (en l'espèce le roll est important) avec un supplément d'âme, hérité du blues et de la soul music (« Plea »). L'album alterne ainsi passages durs, funkys et tendres aussi (bouleversante « Memories » qui tirera des larmes à quiconque à un jour perdu quelqu'un) ; le groove érigé en valeur cardinale. Un disque de haute tenue et une formation taillée pour la scène.

vendredi 24 février 2017

Gaëlle Buswel : « New day's waiting »



Ce nouvel effort, son troisième, voit Gaëlle s'échapper du cadre blues au sens strict pour s'ouvrir à des horizons connexes teintés de folk et de rock n'roll, avec cette couleur 70s aux accents rolling zeppelinien (cf. « So blue », « 25 hours ») propre à l'artiste. Un voyage et des rencontres sont à l'origine de ce disque. A l'été 2015, Gaëlle s'envole pour les Etats-Unis, où elle restera 45 jours, sa guitare sous le bras. Le point d'orgue du voyage sera la rencontre avec David Quick, un chanteur/auteur/compositeur plutôt méconnu, à Austin, Texas. Ce dernier offre à Gaëlle, « No one else », une magnifique chanson folk qu'il chante depuis 20 ans dans la rue et que l'on retrouve sur l'album en duo avec son auteur. Ce n'est pas, loin s'en faut, le seul moment émouvant du disque. La voix de la chanteuse, légèrement brisée sur le morceau-titre « New day's waiting », laisse apparaître une émotion à fleur de peau. Toujours sur la brèche, dans l'entre-deux, l'album ne verse jamais dans la mélancolie excessive, mais est, au contraire, porté par un enthousiasme contagieux (cf. « Makers of love ») à l'image de son auteure, toujours positive et souriante. Emballant.
En concert le 10 mars 2017 à Paris (Café de la danse)


jeudi 23 février 2017

Plaisir Vallée



Cet EP est axé sur un concept tout simple, celui du plaisir. Outre le nom du groupe, chaque chanson contient le mot plaisir dans son titre (« Plaisir valium », « Plaisir parti » etc.). Ce qui pourrait relever ailleurs du concept hasardeux prend ici une saveur bien particulière. Car avec son garage rock, aux effluves psychédéliques, efficace et bien envoyé, le trio nous fait effectivement très plaisir. Les compositions reposent sur un équilibre délicat entre guitares incisives dans le genre gros son alors que les rythmiques ménagent de l'espace pour une délicieuse syncope funky et dansante. Le chant, plutôt pop, assuré par Adrien Balency incarne à merveille cette dualité interne au groupe et apporte également un contrepoint intéressant au tranchant des guitares. Résumons la chose simplement : Plaisir Vallée égal plaisir immédiat.


mercredi 22 février 2017

Molécule : « 60° 43' Nord »



Cet album résulte d'une expérience/aventure pour le moins originale. En janvier 2014, Romain Delahaye, musicien électronique, a embarqué pendant 34 jours sur un chalutier, Le Joseph Roty II, en compagnie de pêcheurs dans l'Atlantique Nord. L'objectif étant d'enregistrer les bruits de la pêche et de l'Océan et de mixer le tout dans la cale du bateau transformée en studio de fortune. Le livret, très détaillé, véritable carnet de bord, donne des indications très précises sur le jour d'enregistrement de ces dix morceaux ainsi que la position du navire à cet instant précis. Le résultat se révèle aussi mouvant et ambivalent que sa source d'inspiration principale : l'Océan. Une techno minimale, en sourdine, rythmée par le bruit des vagues se fracassant sur la coque du navire, souvent sombre et menaçante, voire même dangereuse et violente (« Hébrides », « Rockall ») à l'image de la superbe pochette et parfois ambient, zen et aussi apaisante qu'un coucher de soleil sur la plage (« Shannon », « Le jardin », « Soleil Bleu »). Il est vrai que sur cette page on aime à décrire la musique en termes de paysages et de voyages intérieurs, autant de notions qui prennent un nouveau relief à l'écoute de cet excellent album. L'édition Deluxe est accompagnée d'un deuxième disque enregistré en live durant les Transmusicales de Rennes en 2015.
En concert le 3 mars 2017 à La Passerelle (Saint-Brieuc)

mardi 21 février 2017

La Féline : « Triomphe »



Situé au confluent d'influences très diverses (électro, chanson, pop, cold wave), ce deuxième album de La Féline fait montre d'un univers qui gagne en épaisseur. Les sonorités électroniques héritées de la new-wave, pendant un temps la signature de la formation menée par Agnès Gayraud, se fondent dorénavant dans un ensemble harmonieux ou l'électro cohabite avec des instruments organiques (« La mer avalée », « Trophée », « Comité rouge », la magnifique « Séparés ») voire acoustiques (« Nu, jeune, léger ») tout en ménageant de la place pour ce petit grain de sable propre à faire dérailler la machine dans l'inattendu, provoquant ce que l'on appelle communément un heureux accident (cf. le saxophone free qui orne « Le Royaume », « La femme du kiosque sur l'eau » baroque et orientalisant à souhait). Tout au long de ces dix plages, La Féline évolue sur la brèche entre limpidité mélodique et cette basse prépondérante accentuant le côté dark de sa musique, dessinant l'écrin idéal pour sa voix veloutée, séduisant l'auditeur un titre après l'autre. Une évidence se fait alors jour. On éprouve que trop rarement ce sentiment de proximité et d'intimité avec une œuvre que l'on découvre pourtant pour la première fois, comme si cette dernière avait fait partie depuis toujours de notre quotidien. C'est le signe des grands albums et « Triomphe » en est assurément un.
En concert à Paris le 16 mars (La Maroquinerie avec Louis-Jean Cormier)

lundi 20 février 2017

Exposition HEY! du 17 mars au 22 avril



Après le succès phénoménal rencontré par l'exposition "Tatoueurs tatoués" au Musée du Quai Branly (700 000 visiteurs), le duo Anne et Julien (également aux manettes de la luxueuse revue "Hey" du même nom) investit la galerie Arts Factory pour une exposition-vente réunissant 200 œuvres inédites sur papiers et 37 artistes de 13 pays différents.

HEY! Gallery Show #1
Du 17 mars au 22 avril 2017

Galerie Arts Factory
27 rue de Charonne 75011 Paris (métro Ledru-Rollin/Bastille)
Du lundi au samedi de 12h30 à 19h30

Mathis Haug : « Wild Country »



Après des débuts très marqué par le blues, Mathis Haug fait évoluer son univers sur ce quatrième effort. Certes la note bleue n'est jamais très loin mais cette dernière s'exprime différemment, dans un spectre plus général, celui de l'Americana, mélange hétéroclite entre folk, blues, country et rock n'roll, faisant un peu de place pour de nouveaux instruments comme le banjo, le violon ou l'accordéon. Il en va de même pour ce qui est des langues, polyglotte (bien que chanté majoritairement en anglais) ce nouvel album fait un peu de place à son allemand natal (« Luigi ») ou son français d'adoption (« Des Miles ») avec un bonheur égal. Car c'est au niveau vocal que le changement se fait de la manière la plus spectaculaire. Peu à peu, la patine du temps laisse sa marque sur le timbre de Mathis qui gagne en profondeur. Une voix de gorge, chaude et délicate, qui incarne à merveille les textes en lui donnant ce petit supplément d'âme qui finit de rendre la chose attachante. Une acoustique chatoyante et un répertoire à l'avenant (« Rock n'roll band », « A still life with smile ») font de cet album une valeur sûre et, gageons-le, un classique en devenir. Superbe.
En concert le 20 avril 2017 à Paris (New Morning)

dimanche 19 février 2017

Slow Joe & The Ginger Accident : « Let me be gone »



Cet album vient mettre un point final à une formidable aventure dont les prémices remontent à 2007, lorsque Cédric de la Chapelle, jeune guitariste lyonnais en vacances en Inde, tombe sur un vagabond, ce dernier se révélant être un véritable crooner qui s'ignore. La suite tient d'un improbable concours de circonstances, ceux donnant naissance aux belles histoires où se mêlent le destin et la chance. En l’occurrence, ces derniers prendront la forme du Ginger Accident, un groupe de rock vintage dont notre ancien clochard indigent deviendra le chanteur (interviewé dans ces colonnes en 2010). Ainsi, à l'automne de son existence, Joe se lancera dans le grand bain du rock n'roll avec deux excellents albums à la clé (« Sunny side up » en 2011 et « Lost for love » en 2014) avant de pousser son dernier soupir le 1er mai 2016 emporté par une rupture d'anévrisme à l'âge de 73 ans. C'est donc de manière posthume que sort cet ultime album. Sans pour autant être mortifère, il se dégage de ce disque un âme, une aura particulière. Chaque mot chanté par Joe pèse lourd, à l'image du traditionnel « Tambde Roza », chanté en langue vernaculaire, qui ouvre les débats de manière dramatique, et du poignant « Silent Wave » qui clôt définitivement l'affaire. Entre les deux, le Ginger Accident fait montre de sa classe habituelle poussant le curseur psychédélique encore plus loin, assumant la prise de risque le temps de quelques chansons bien barrées (« Swing your love », « My Sway », « I was a stooge ») et payant son tribut au blues (« Temple Mosque Church ») saupoudrant le tout d'un soupçon de spiritualité indienne (« Candy Sparkles ») évitant habilement tous les clichés inhérents au genre. Si l'aventure a été de courte durée, à l'échelle d'une vie, elle laisse une discographie impeccable, sans accroc ni faute de goût. Joe peut reposer en paix.
Concert hommage le 28 mars 2017 à Paris (Café de la danse)


samedi 18 février 2017

Festival How To Love, Petit Bain, 17/02/2017



Ce soir, le festival How to love rend hommage au regretté Daniel Darc dont plusieurs portraits ornent les murs du Petit Bain. Un moment forcément très émouvant assuré avec classe, précision et élégance par le groupe GYP qui a accepté de faire le backing band pour la kyrielle d'invités se succédant au chant. Impossible de citer tout le monde (désolé Cléa Vincent, Mathieu Malon, Alex Rossi et les autres) mais signalons tout de même la présence de quelques collaborateurs du regretté chanteur parmi lesquels Frédéric Lo (dont le métier principal n'est pas de chanter mais qui se sort de l'exercice avec les honneurs) et Bill Pritchard co-auteur avec Daniel de l'album « Parce que » sorti en 1988. Dans un autre genre, Jean Felzine, leader de Mustang, armé de sa sublime Gretsh blanche jette son dévolu sur « Anyday now », un titre d'Elvis (une passion commune avec Daniel), apportant une note 50s à l'ensemble. Dans la foulée GYP assure un set autour de son album « S'il fait jour encore » exhumé l'an dernier, 35 ans après son enregistrement.

Plus tard, pour finir la soirée, Alister a, à son tour, pris possession de la scène pour un set en deux parties, la première axée sur le piano puis la deuxième plutôt orientée guitare. Avec le chic et le détachement qu'on lui connaît, Alister ravit le public de ses piques parfois décalées mais toujours bien senties. Musicalement, Alister reprend le flambeau, un peu laissé à l'abandon, d'une pop à la française, assumant l'héritage des Polnareff et autres Gainsbourg avec une certaine réussite (la fantastique et baroque « Cathédrale »), une bonne dose de second degré (encore que…) et un accompagnement musical au top (fantastique basse au son rond et bourdonnant comme dans les 60s). La deuxième partie du set, celle consacrée à la guitare, révèle un tempérament plus agressif, limite garage rock, porté par l'efficace scansion du batteur. Séduisant.



vendredi 17 février 2017

The Handsome Family + Joana Serrat, Le Divan du Monde, 16/02/2017.



La première partie est assurée par la jeune et talentueuse Joana Serrat que l'on avait déjà pu admirer en ce même lieu en septembre dernier en ouverture des Jayhawks. Seule derrière sa guitare folk, l'harmonica par intermittence autour du cou, la jeune Catalane évoque des paysages désertiques marqués par les Etats-Unis. La réverbération appliquée sur la guitare apporte une ampleur au son tentant de gommer l'aridité de l'acoustique et apportant une note éthérée et rêveuse à la musique. Une très belle prestation qui va, hélas, s'interrompre brusquement de manière assez rocambolesque, Joana quittant précipitamment la scène expliquant qu'elle ne sent pas bien. La jeune chanteuse reviendra quelques minutes plus tard, sous les applaudissements nourris du public, expliquant, toute contrite, que son estomac ne digère pas très bien la cuisine française. Elle tiendra tout de même à terminer son set jouant deux chansons supplémentaires. Classe.

Le virus semblant être le thème de la soirée c'est ensuite The Handsome Family qui arrive sur scène en affirmant qu'ils avaient des « free cold american viruses available in girl or boy version » à offrir au public ! Mais ce n'est pas quelques légères quintes de toux qui va stopper la classe américaine du groupe, le swing raffiné du batteur aux balais, la caresse délicate de la lap-steel et la voix de gorge et chargée d'émotion du chanteur Brett Sparks qui forme un couple explosif avec la bassiste Rennie, son épouse, avec laquelle il se chamaille gentiment comme un ado. Entre folk et country, le groupe revisite ainsi le terroir étasunien pour une prestation propre à ravir tous les fans d'americana. Espérons qu'ils reviennent nous voir bientôt !


Wild Times : « The Wanderers »



Entre guitares aux secousses sauvages (« ILWY ») et synthés guillerets (« The Wanderers »), Wild Times offre une large palette d'émotions. Entre joie et noirceur. Un peu à l'image de la pochette où un couple heureux, bras dessus dessous, échappé des 50s par une faille temporelle, fonce tout droit vers l'explosion nucléaire, l'air de rien. Jamais totalement dark, on sent cependant dans les compositions du groupe cette petite réserve qui empêche la joie d'être totale (« Season »). Un premier EP en clair obscur donc, toujours sur la brèche, peut-être les prémices d'un univers créatif potentiellement passionnant. On attend la confirmation sur la longueur d'un LP.


jeudi 16 février 2017

Carré-Court : « N°1 »



Premier EP pour cette jeune formation originaire de Limoges. Œuvrant dans un style vintage à souhait, finalement pas si courant dans notre hexagone, Carré-Court produit une musique ensoleillée (mais qui n'occulte pas les zones d'ombres) entre rock n'roll, soul et girls group des années 60. Oscillant entre guitares et pianos, l'Ep se révèle ainsi des ambiances variées mais cohérentes, tantôt jazzy, tantôt pop, et la chanteuse Julie, dont le timbre rappelle Amy Winehouse, se révèle à l'aise quelque soit le contexte ; l'habillage musical enveloppant sa voix avec classe et élégance. Quatre titres seulement mais d'ores et déjà une belle découverte.
https://fr-fr.facebook.com/carrecourtband/

Flying Padovani's + Les Soucoupes Violentes + Daltons, Festival How to love, Petit Bain, 15 février 2017.



Chouette festival mélangeant rock et BD, How To Love se tient dans la salle du Petit Bain redécorée pour l'occasion. Cette soirée se tient sous le signe de la nostalgie du rock français des années 1980 et les cheveux gris sont aussi nombreux dans la salle que sur scène.

On commence par les Daltons, carré et efficace, le groupe distille un rock puissant dont les paroles semblent venues d'une autre époque : « Dans mon costume de merde », « J'ai trouvé un CDD »… Assez classique dans la forme, la formation assure le job avec classe et détermination. Rien de bien original certes, mais on passe un bon moment, le quatuor nous met en jambes pour la suite avec entregent. La suite est assurée par les Soucoupes Violentes, dont on avait bien aimé le disque l'année dernière mais dont la déclinaison scénique déçoit quelque peu. Accompagnateurs peu impliqués, le regard vague, Stéphane le leader, admirable d'abnégation, se démène tant qu'il peut derrière sa superbe guitare, l'affaire ne décolle jamais vraiment en dépit de la considérable énergie qu'il a déployé à titre personnel. Ce n'est qu'à certains moment que l'on peut entrapercevoir le potentiel du groupe, certains morceaux sont vraiment excellents, quelques trop rares éclaircies dans cette morne plaine.


Mais rien ne nous préparait vraiment à la déflagration qui allait suivre. Mené par le mythique Henri Padovani (le guitariste original de Police), The Flying Padovani's sont de retour après des années d'inactivité. Trio instrumental, le groupe trouve sa source parmi certains de nos genres préférés, du rock n'roll, de la surf music, du blues surpuissant (« Pin up blues »), du western inspiré par l'art de la musique de film. Le trio déboule en faisant le grand écart dans la plus pure tradition du rock n'roll. On est d'emblée scotchés par la formidable puissance développée par le groupe. Derrière sa batterie, lunettes d'Elvis sur le nez, Chris Musto prend des allures de tornade. Groove hyper puissant, agile et rapide, Chris ne se contente pas de bûcheronner mais fait montre d'un véritable feeling. Solo joué à mains nus : ce type est une machine ! Chauve, le bassiste Paul Slack est à l'avenant. Ses lignes sont à la fois fines, précises et puissantes, délivrées avec une précision métronomique. Wow ! Enfin, le terrain est largement balisé pour que M. Padovani laisse éclater toute la classe de sa Gibson demi-caisse rouge. Pas de pédales d'effet, que du son brut, direct et un remarquable maniement du vibrato Bigsby. Quelle classe ! De plus, Henri se révèle un showman de tout premier ordre régalant le public de ses anecdotes, récoltées au cours de ses quarante années de rock n'roll, entre les chansons. Une prestation de haute volée !

mercredi 15 février 2017

Les Nuits de l'alligator 2017



Avec sa programmation tournant autour du blues, du rock garage, de la soul et du folk/country, le festival Les Nuits de L'alligator fait notre bonheur depuis douze ans puisqu'on est sûr, d'une part de trouver des groupes que l'on aime et, d'autre part de faire de belles découvertes. Avec une programmation de haut vol, cette nouvelle édition n'a pas échappée à la règle, le tout dans le cadre intime et intrinsèquement rock n'roll de la maroquinerie. Retour sur les trois premières soirées parisiennes du cru 2017...

Jeudi 9 février : C'est aux Espagnols de Guadalupe Plata qu'il revient l'insigne honneur d'ouvrir les débats de cette nouvelle édition. Le trio, assez atypique, compte en son sein un musicien préposé à d'étranges instruments dépassant rarement les deux cordes en sus des classiques batterie et guitare. La musique est majoritairement instrumentale, twangue en diable et chasse sur les terres punk et blues, rappelant le Gun Club et autres RL Burnside. Déjà assez côté dans son pays natal, le groupe devrait conquérir l'autre versant des Pyrénées. Enfin, dans un monde parfait. Il y a quelques mois de cela, on s'était extasié sur le nouvel album des Sore Losers et leur prestation du soir ne fait que renforcer l'excellente impression laissée par l'album. Le set débute sur une note à la fois lourde et lancinante rappelant Black Sabbath puis vire vers un son rock n'roll garage brutal et sauvage bien aidé dans sa tâche par un chanteur charismatique et un guitariste maniant l'art du solo sans en faire des tonnes. Excellent de bout en bout, le groupe apporte une touche de métal qui jusqu'à présent faisait défaut au festival. Non, Boss Hog n'est pas le nouveau groupe de l'hyperactif Jon Spencer (Blues Explosion, Heavy Thrash). C'est même un projet très ancien, formé avec son épouse Cristina Martinez, dont les premiers pas discographiques remontent à 1990 et dont on avait perdu la trace à la fin du siècle dernier. Un retour remarqué, après 17 ans d'absence, c'est dire si l'événement est d'importance. La Maroquinerie est pleine comme un œuf, pas évident de trouver le spot idéal pour voir la scène (à vrai dire on n'y sera jamais totalement arrivé) mais on est littéralement emporté par la tornade rock n'roll ourdie par Spencer & Co. Contrairement à ses autres formations, cette dernière est plus fournie, claviers (pour une légère touche électronique assez rare chez Spencer), batterie et deux guitares. Les voix étant dans leur majorité assurées par Cristina Martinez qui harangue la foule dans une attitude foncièrement rock n'roll. Le son est énorme, le public assommé. Grand moment.

Vendredi 10 février : La soirée débute avec une jolie découverte, l'atypique trio King Biscuit, originaire de Normandie. Derrière sa jolie guitare vintage demi-caisse, Sylvain Choinier dispense un blues envoûtant de sa voix de gorge. L'ensemble est très rythmique, la formation est complétée par un batteur et un percussionniste, la transe n'est jamais bien loin. Une étrange petite guitare carrée (une mini Bo Diddley) et quelques discrètes notes de claviers gardent la routine à distance, faisant pencher la balance vers plus de modernité. Belle découverte. Lorsqu'il arrive sur scène Theo Lawrence et ses Hearts emmène avec lui son univers sous la forme de divers artefacts. Des plantes vertes et autres lampes chinoises font ainsi leur apparition transformant la maroquinerie en salon douillet. Situé au crossroads entre soul, blues et rock n'roll, l'univers musical de Theo transpire le raffinement et l'élégance, bien servi par sa voix de crooner et des musiciens de haute volée. Superbe exercice. On termine enfin avec Luke Winslow King, chanteur et guitariste venu de la Nouvelle-Orléans qui se produit pour la première fois dans nos contrées. Sorte de Jeff Buckley du blues, Winslow King enlumine son songwriting pop d'influences venues du blues, du jazz et du folk. Son groupe est remarquable, le batteur swing avec efficacité sur des patterns venus du jazz et la paire de guitaristes (dont Winslow King lui-même) maîtrise le bottelneck à la perfection. Hélas, la durée (trop longue) des compositions tends à en réduire l'impact. Une belle découverte quoi qu'il en soit.


Dimanche 12 février : Le plateau regroupant des artistes masculins est superbe. On commence par un chanteur dont l'album nous avait particulièrement impressionné en début d'année William Z. Villain. La complexité rythmique du disque laissait augurer une transposition scénique compliquée. Et ce fut le cas. Seul avec sa guitare et tout un attirail de percussions diverses, William passe de longues minutes, entre chaque morceau, pour mettre au point le pattern nécessaire à la chanson. La performance d'ensemble perd ainsi un peu de son impact. Fort heureusement, la personnalité fraîche, chaleureuse et enthousiaste de William aide à patienter. Visiblement heureux d'être sur scène, William emballe le public en moins de deux grâce à ses blagues et son français, approximatif mais charmant. Lorsque tous les éléments sont en place, la musique est une véritable beauté hypnotique, à l'image du magnifique « Her Song » de clôture ou du tube « Anybody gonna move » dont les méandres rythmiques rappellent l'Afrique. Un jeune artiste à suivre. Avec leurs chemises à carreaux et leurs stetson sur la tête, Karl Blau et son groupe œuvrent dans un registre différent, celui de la country raffinée et romantique. La pedal steel amène un indéniable supplément d'authenticité et la voix déborde d'âme. L'ensemble évoque comme une version tendre et assagie de Steve Earle. Magnifique. Lorsque Bror Gunnar Jansson, tiré à quatre épingles, arrive sur scène, le silence se fait dans la salle. Le public, comme impressionné par la stature de l'artiste, est dans l'attente d'un grand moment. De fait, un concert de Bror Gunnar Jansson est toujours un moment fort en émotions tant l'investissement du musicien est total. Ce sont ainsi mille tourments qui s'échappent de sa guitare et de sa voix. Ses accords déchirent l'air ambiant et le chanteur, les yeux exorbités, semble littéralement possédé. Limite flippant tant son esthétique est sombre. En formation one man band, assurant à lui seul l'ensemble des orchestrations, Gunnar impressionne et excelle, comme d'habitude.

dimanche 12 février 2017

Julien Gasc : « Kiss me you fool !»



Hyperactif, Julien Gasc est doublement sous les feux de l'actualité en ce début d'année avec une nouvelle sortie de son groupe Aquaserge et ce deuxième album en solo quatre ans après « Cerf, biche et faon ». Alors que les premières notes sortent des enceintes, la « patte » Julien Gasc est immédiatement identifiable. Une certaine forme de psychédélisme baroque (cf. « Circle Bar ») entre pop et free jazz (cf. « La Cure ») dont la source remonte aux années 1960, on pense ainsi à Gainsbourg, Polnareff, François de Roubaix ou Gérard Manset, servie par des textes (majoritairement dans la langue de Molière, c'est, hélas, devenu assez rare pour être souligné) surréalistes. Et c'est bien cet aspect qui fascine le plus chez Julien, cette capacité à faire fondre la langue pour la faire coller au mieux aux courbes, arabesques sinueuses, de sa musique labyrinthique (« Les pages anonymes »). Mettant les guitares en retrait, au profit d'une instrumentation dense, Julien Gasc compose un album envoûtant et classe. Pensé, produit et soigné jusque dans ses moindres détails, « Kiss me you fool » est bien plus qu'un énième revivalisme vintage, c'est un classique immédiat à la beauté intemporelle.
En concert à Paris (La Maroquinerie) le 18/02

samedi 11 février 2017

Angelfish Decay : « Hypnotised Tourist »



Voici le genre de projet qui, à l'instar de l'auteur de ces lignes, ravira tous les amateurs de ce fameux petit grain de sable empêchant le rock de tourner en rond (au hasard, le saxophone de Morphine, le violoncelle des Auteurs, le piano des Jim Jones Revue ou bien la cornemuse de Dropkick Murphys). Chez Angelfish Decay, le grain de sable en question prend la forme d'un quatuor à cordes, qui ne souligne pas le côté mélancolique du groupe comme on pouvait s'y attendre mais, au contraire, renforce la puissance sonore et le sentiment d'urgence provoqué par la musique. Mélangées aux boîtes à rythmes et au chant à deux voix, les cordes produisent une polyrythmie puissante rappelant la cold wave des années 1980 tout en dépoussiérant le genre (cf. « Today », « Pylons », « City Noise »). Une curiosité réussie.

jeudi 9 février 2017

Gloria : « In Excelsis Stereo »




Premier album pour cette excellente formation française autour de laquelle plane un voile mystérieux. Aussi improbable que cela puisse paraître en 2017, Gloria (le groupe) a décidé d'exister sans la moindre foutaise numérique et n'utilise aucun réseau social. Cette absence digitale est tout sauf anecdotique, inscrivant encore plus profondément le groupe dans le revivalisme sixties. Non content, de récréer musicalement l'époque, Gloria a choisi de vivre et de se comporter comme au vingtième siècle. Sans l'excellence affirmée de son label Howlin'Banana, un recommandable pourvoyeur du rock n'roll d'ici (Kaviar Special, Volage, Madcaps etc...) cet album serait tombé aux oubliettes sans autre forme de procès et, avouons-le tout de go, cela aurait constitué une dramatique erreur. Emballée dans une magnifique pochette psyché/art nouveau, comme à l'époque, la chose séduit dès le titre d'ouverture le magnifique « Beam me up » qui envoûte littéralement l'auditeur. Gloria se trouve à un croisement bien particulier, assumant à lui seul l'héritage des groupes psychédéliques et des girls groups des années 60. Imaginez un Phil Spector noyé dans un bol d'acide lysergique. Voilà, Gloria c'est ça. Un art consommé de la ritournelle pop (« Howlin'stones », « In the morning ») pratiqué au milieu de vapeurs mauves et des lumières stroboscopiques ("Shame") mâtiné d'une pointe de folk (« The Highlight », « Requiem for a witch »). Voix féminines suaves, son de basse rond et sixties en diable, guitares au son travaillé avec un soin maniaque, excellence du batteur, les dix titres passent (trop rapidement) sans que l'on ait pu détecter la moindre faute de goût. C'est une révélation, ni plus, ni moins.

mardi 7 février 2017

Rover : « Let it glow »



Après un premier album remarqué, Rover a effectué un retour remarqué avec ce deuxième disque sorti fin 2015. Expulsé du Liban, où il vivait, suite à un problème de visa, Timothée Reigner a posé ses valises dans la maison familiale, en Bretagne. Est-ce à cause de cet exil forcé, que la musique de Rover dégage une mélancolie aussi poignante (cf. « Some needs » qui ouvre les débats sur des bases assez élevées) ? Sur ce deuxième disque, Rover explore l'autre face du rock n'roll. Laissant la puissance brute et la violence s'exprimer ailleurs, Rover peaufine un univers élégant, voire maniéré, progressif, bien servi par son chant virtuose, doux et mélodique, montant assez haut dans les aigus, où les émotions se bousculent. La chose se situe à un croisement idéal (et rêvé), quelque part entre David Bowie, Michel Polnareff et Serge Gainsbourg ; l'artiste citant même Bach parmi ses influences premières. Les années 1970 restent le terrain d'exploration préféré du chanteur. Mais plutôt que de recréer futilement une époque, le musicien préfère reprendre les choses là où les grands anciens les avaient laissées, inventant une sorte de « Melody Nelson » enregistré en 2015. Il en résulte un disque aussi familier que déroutant, expérimental (cf. « HCYD », « Let it glow ») et étrangement facile d'accès (« Call my name »). Un must.
En concert à Paris (Salle Pleyel) le 27 février.

lundi 6 février 2017

Electro Deluxe en session Natura'Live

Natura'Live réalise des sessions d'enregistrement live dans des lieux à la fois naturels et hors du commun. La dernière vidéo en date a été réalisée sur le lac de Serre-Ponçon, le plus grand lac artificiel d'Europe, et met en vedette l'excellent groupe Nantais Electro Deluxe et son charismatique chanteur américain, James Copley. Le résultat est superbe, enjoy !

samedi 4 février 2017

Archie Shepp + Matt Wilson Quartet, Festival Sons d'Hiver, Maison des Arts de Créteil, 03 février 2017.

Matt Wilson (c) John Abbott
Archie Shepp (c) Monette Berthomier

Avec le sens de l'à-propos qu'on lui connaît habituellement, le Festival Sons d'Hiver fête le centenaire de l'arrivée du jazz en France avec une soirée hommage à Sidney Bechet avec deux réinterprétations complémentaires de l’œuvre du musicien natif de la Nouvelle-Orléans.

On commence avec le quartet mené par le batteur Matt Wilson. Ancien compagnon de route de Charlie Haden, Matt Wilson est un magnifique batteur au swing élégant. Trouvant la note juste, refusant le concours de vitesse généralement associé au solo, Wilson brille par son sens du ralentissement. N'ayant pas froid aux yeux, le musicien n'hésite pas à démonter sa caisse claire pour en tirer des sonorités inédites et développe un feeling égale aux baguettes ou aux balais. Bien entouré par une contrebasse et des vents, parmi lesquels on note la présence de la française, Catherine Delaunay à la clarinette en invitée spéciale, le batteur a livré une relecture classieuse et intemporelle du répertoire. Un superbe moment de musique, tout en swing.


Après une pause d'une vingtaine de minutes, inhérente à l'habituel changement de plateau, c'est au tour d'un monstre sacré, le saxophoniste Archie Shepp de s'attaquer au répertoire de Bechet, qui a comme lui trouvé une terre d'adoption en France. L'instrumentation est légèrement différente, on note la présence du piano et laisse plus de place à la voix assurée par Shepp lui-même ou par la chanteuse Marion Rampal. La prestation se révèle plus personnelle et inclut également des compositions hommages de Shepp ainsi que des reprises qu'affectionnait Bechet (de Fats Waller notamment). La démarche se révèle à la fois aventureuse et nerveuse. Sur scène Shepp impressionne par sa stature et son apparente économie de mouvement, gestes précis et notes calculées autant que soufflées. Généreux avec le public le groupe à prolongé le concert aussi longtemps que possible avant de saluer le public jusqu'à la prochaine fois, enfin si tout va bien. Magnifique.

jeudi 2 février 2017

William Z. Villain



N'étant pas homme à se contenter de formules toutes faîtes, l'Américain William Z. Villain déroute son auditoire au fil d'un album absolument tourneboulant aux confins du blues et de la musique Afro-Cubaine. Originaire du Wisconsin, c'est pourtant vers le sud, la Louisiane et ses marais mystérieux, que William ballade son auditeur. Mystère le mot est lâché et résume bien les sentiments de l'auteur de ces lignes quand il découvre cet étrange objet. Le disque est enregistré avec une remarquable économie de moyens, quelques percussions (limites tribales), la voix haut perchée de William qui interpelle et cette étrange guitare, à l'origine une classique National Resonator, modifiée pour soutenir huit cordes (contre six habituellement) entraînant l'auditeur dans un labyrinthe rarement visité jusqu'alors. C'est peu dire que, dans un premier temps, l'album désoriente, déconcerte et questionne l'auditeur, perdu dans ce dédale de rythmes et d'arpèges complexes. Œuvre exigeante et pointue, ce premier effort séduit pour peu qu'on lui accorde le temps et l'attention qu'il mérite.
En concert le 12/02 à Paris (Festival les nuits de l'Alligator – La Maroquinerie avec Bror Gunnar Jansson)

mercredi 1 février 2017

Tiger Army, le 5 mars à la Maroquinerie



Après plus d'une décennie d'absence sur les scènes européennes, Tiger Army, sera de retour le 5 mars prochain à la Maroquinerie.

Interview avec Vincent Théval (Magic)


Voila au moins une bonne raison de se réjouir en 2017 : Magic est de retour dans les kiosques ! Vincent Théval, le nouveau rédacteur en chef, lève le voile sur la nouvelle formule du magazine...

1) C'est un détail amusant, avec cette nouvelle formule, Magic retrouve son rythme de publication originel : un numéro tous les deux mois. Pourquoi ce changement ?

Vincent Théval (rédacteur en chef) : Nous voulions nous détacher un peu de l’actualité des sorties de disques et prendre le temps de préparer des articles plus longs, des dossiers, des papiers avec un angle historique. C’est une banalité de le dire mais c’est une réalité quotidienne : tout va très vite, aujourd’hui. Les infos et les sons tombent par dizaines chaque jour, une actualité en chasse l’autre. Nous voulions prendre le contrepied de ce mouvement.

2) J'ai été étonné par le nouvel agencement de la revue, notamment par le cahier critique au début, alors que, traditionnellement, les chroniques de disques se retrouvent plutôt en fin de publication. Vous souhaitez casser les habitudes ?

V.T : La revue compte maintenant 132 pages et nous voulions qu’elle soit plus structurée. D’où les trois parties : une qui relève de la “prescription”, avec des rubriques et le cahier critique ; une qui regroupe les articles, entretiens, dossiers et un portfolio ; une qui est entièrement consacrée à l’histoire de la pop, au sens large. Les chroniques de disques ont toujours été un point fort de Magic, par leur nombre et leur côté très pointu. J’ai voulu les faire passer en première partie du magazine et aussi rendre le cahier critique un peu plus dynamique, en variant les formats. Il y a davantage de chroniques courtes qu’auparavant. 

3) J'ai également noté comme un "élargissement" de la ligne éditoriale, des artistes comme Brad Mehldau et Chris Thile par exemple, ne rentraient pas dans la ligne éditoriale de l'ancienne formule...

V.T : Cela correspond effectivement à une envie et une volonté très fortes d’aborder des genres musicaux différents, de façon un peu plus affirmée et régulière qu’avant. Là encore, c’est une banalité de le dire : non seulement les styles musicaux dialoguent beaucoup entre eux mais les gens aujourd’hui écoutent des choses très différentes. L’idée est donc d’aborder différents genres musicaux mais en restant pointus. Pour ma part, j’écoute énormément de jazz ou de “musique contemporaine” et je sais que je suis loin d’être une exception chez les gens qui se sont d’abord forgés une culture musicale plutôt rock et continuent d’en écouter. 

4) Pourquoi avoir abandonné le système de notation des disques dans les chroniques ?

V.T : Parce qu’on n’est pas à l’école. Je trouve le système de notes trop réducteur. In fine, quelle que soit la note, ça finit par desservir à la fois l’artiste et l’auteur de la chronique. 

5) Le sampler digital est-il complètement abandonné ?

V.T : Pour l’instant, oui. C’est beaucoup de travail pour gérer les droits des morceaux à télécharger quand, par ailleurs, les habitudes d’écoute des gens les portent vers le streaming et les plateformes d’écoute. Nous faisons des playlists, en revanche. Certaines en lien direct avec des articles du magazine. 

6) Une nouveauté que j'aime beaucoup c'est la dernière partie du magazine : rembobinages pop moderne, j'y vois comme une sorte de prolongement de l'ancienne rubrique "l'album oublié" (que j'aimais déjà beaucoup et grâce à laquelle j'ai fait beaucoup de découvertes !)...

V.T : Il y a un appétit pour l’histoire de la pop, on le voit notamment avec la politique de rééditions et de coffrets des maisons de disques. La partie “rembobinages pop moderne” répond à cet appétit-là, avec des chroniques de rééditions (souvent longues, qui permettent de raconter une histoire) mais aussi des portraits, des articles sans lien avec l’actualité ou une “discothèque pop moderne idéale”.

7) Ce nouveau magic s'accompagne aussi de soirées "magic number", un petit mot là-dessus ?

V.T : Magic a toujours organisé des concerts, sous différents noms et avec différents concepts. Nous produisons les soirées Magic Number avec La Route du Rock Booking, dans l’idée de proposer des soirées qui ont quelque chose de différent : par leur affiche ou le lieu où elles se tiennent. Pour la première, le 15 février au Divan du Monde à Paris, nous avons invité Mark Eitzel, qui sera accompagné sur scène par un groupe qui comprend Bernard Butler (l’ancien guitariste de Suede, qui a produit le nouvel album de Mark Eitzel). C’est une exclusivité européenne. La soirée Magic Number est la seule date de la tournée européenne d’Eitzel (avec Londres) où les deux musiciens seront réunis sur scène. Nous avons aussi convié Stranded Horse, que Magic a toujours soutenu, et Canari, jeune groupe issu de la galaxie La Souterraine, que nous sommes très heureux de soutenir aujourd’hui. La prochaine soirée Magic Number aura lieu le 13 avril dans un très beau lieu, avec une artiste culte, qui n’a pas joué à Paris depuis plus de dix ans. Suspens !

Propos recueillis par email le 31/01/2017