John Cunningham,
songwriter aussi précieux que rare, est de retour après 14 ans de
silence discographique, en voilà une sacrée nouvelle ! En
attendant son sixième album solo, intitulé « Fell »,
dont la sortie est prévue en juin prochain, l'artiste vient de
poster un titre inédit, « Frozen in time ». D'emblée la
chanson sonne comme un classique immédiat, dans la droite lignée
des Beatles (comparaison éculée mais totalement fondée en
l'espèce) avec un soupçon de mélancolie dans le chant rappelant à
la fois Nick Drake mais également les Beach Boys (circa « Pet
Sounds »). Si le reste de l'album est du même niveau, on tient
là le disque événement de l'année ! Vivement la suite !
mardi 29 mars 2016
lundi 28 mars 2016
Shilpa Ray : « Last year's savage »
(c) EbruYildiz |
S'attirer les
louanges de Nick Cave, on a connu des carrières moins bien
embarquées que celle de Shilpa Ray. De fait il y a un peu du
ténébreux Australien chez cette New-Yorkaise dans sa façon
d'habiter ses chansons de sa voix puissante telle une crooneuse
d'outre-tombeau (« Johnny Thunders Fantasy Space Camp »,
« Noctural Emissions ») et dans l'ambiance sombre mâtinée
d'humour noir qui habite ses compositions (« Pop song for
euthanasia »). Musicalement tout repose sur une balance
délicate entre une guitare rock puissante à la limite du punk
(« Moksha ») qui bataille ferme avec un harmonium
baroque ; on pense parfois à Anna Calvi ou bien encore aux
Doors lorsque ceux-ci s'attaquaient à l'Opéra de quat'sous. Plutôt
que d'aligner les riffs, les couplets et les refrains, Shilpa Ray
préfère une forme plus expérimentale où les sons se côtoient et
se cherchent des noises. Tout au long des onze plages qui le compose,
« Last year's savage » nous transporte ainsi dans
l'univers étrange de Shilpa Ray, quelque part entre cabaret
déglingué et fête foraine bizarre. La curiosité de l'année,
digne du Freaks de Tod Browning (1932).
En concert le 29
mars à Paris (festival les femmes s'en mêlent, le divan du monde)
https://www.facebook.com/shilpa.ray.9dimanche 27 mars 2016
Why Mud : « Adam & Joe »
Un concept album
autour du destin tragique de deux frères (les Adam et Joe du titre),
15 titres organisés en trois actes séparés par autant
d'interludes, une heure de musique, c'est peu dire que le premier
album du quatuor Why Mud déborde d'ambition. Portée par la voix
pure du chanteur Roland dans laquelle on retrouve un petit quelque
chose de Jeff Buckley, la musique de Why Mud se retrouve dans une
zone grise, celle où le rock psyché et progressif se rencontrent.
Ainsi va Why Mud parfois aussi lancinant et hypnotique qu'une vague
(« Fugue ») et parfois pris d'une poussée de fièvre,
les potentiomètres dans le rouge (« Inside is out »,
« Devotion ») et ce dans le cours du même titre
(« Somebody do something »). Il faut imaginer quelque
chose de l'ordre de Radiohead en version plus digeste. Et le
véritable tour de force de l'album réside là, dans cet aplomb qui,
en dépit de sa longueur, jamais ne lasse et projette l'auditeur dans
un dédale d'émotions. A tel point qu'une seule écoute ne suffit
pas pour en faire le tour. C'est à force d'écoutes répétées que
Why Mud dévoile peu à peu ses trésors, nichés dans les moindres
détails d'une production léchée, à la fois nostalgique et
cinématographique. Un album particulièrement dense, pour un premier
essai, c'est une réussite !
https://soundcloud.com/whymudsamedi 26 mars 2016
Michelle Blades : « Polylust »
Jeune Etasunienne
(terme qu'elle préfère à celui d'Américaine) installée en
France, Michelle Blades sort un nouvel EP. A l'image d'un David
Bowie, l'univers musical de l'artiste est en perpétuelle mutation,
c'est ainsi que l'on a appris que la jeune musicienne avait débuté
dans le folk. Cette époque semble lointaine et dorénavant Michelle
s'éclate aux synthés dans une sorte de recherche sonore aux basses
très présentes dont le côté ample rappelle parfois Kate Bush
(« Eternal Fugitive »). Le disque débute de manière
inquiétante avec l'instrumental au titre imprononçable « How
black the night o'er the hills of Machynlleth », sorte
d'électro baroque et gothique lancinante. Mais c'est lorsque
Michelle conjugue ses aspirations expérimentales et songwriting pop
que le disque nous accroche définitivement l'oreille (cf.
l'excellente « New Friends »). Dans le même ordre
d'idée, « Two tongs » et sa coda psychédélique
planante à la guitare pourrait bien être la bonne pioche de cette
nouvelle mini-livraison. A découvrir.
En concert ce soir à
Paris (le pop up du label)
jeudi 24 mars 2016
Stuart McCallum : « City »
En matière de
musique, il y a les gardiens du temple, tenants de la tradition et il
y a les autres. Guitariste de The Cinematic Orchestra, Stuart
McCallum appartient définitivement à la deuxième catégorie. A la
recherche d'un nouveau souffle musical, le guitariste mélange son
jeu ouaté, très marqué par le jazz, à des boucles électro-lounge
(cf. « T-Onics »). La présence d'une véritable
batterie, au swing downtempo délicat et le chant soul suave (cf.
« City », « North Star ») assuré par une
cohorte d'invités (JP Cooper, Sharlene Hector…) renforce l'aspect
profondément humain de la démarche. Ce sont deux mondes qui se
rencontrent tout au long de ces huit plages. Délicat, beau et
captivant à la fois.
mardi 22 mars 2016
Bror Gunnar Jansson : « Moan snake moan »
Le stupéfiant
bluesman Suédois revient nous hanter avec un deuxième album habité.
S'écartant des chemins balisés du blues, l'artiste scandinave
élargit sa palette sur ce nouvel effort usant d'instruments
jusqu'ici inédits dans son univers : le saxophone, le pump
organ ou le banjo sont autant de nouveaux ingrédients destinés à
varier les paysages sonores, plus proches par moments de l'americana
tendance dark que du blues pur et dur (« New Mountain ballad
n°1 »). C'est peu dire que Jansson est le genre d'artiste qui
vous prend aux tripes quitte à vous étouffer littéralement. La
tension qui habite « One for earth » est palpable, à
couper au couteau. Ailleurs, Bror (aka Gugges Enmanna) renoue avec le
climat sombre et inquiétant, la marque de fabrique qui habite ses
compositions où les meurtriers ont le premier rôle (« William
is back » suite des aventures de l'assassin William Joseph
Dean ; « He had a knife »). Notons pour finir
l'extraordinaire reprise du « Ain't no grave » de Brother
Claude Ely où la voix et les guitares déchirées font des
merveilles et transportent la chanson sur un étonnant terrain garage
rock. L'album a reçu le coup de cœur de l'académie Charles Cros,
une récompense amplement méritée pour cet artiste singulier.
lundi 21 mars 2016
Your Favorite Enemies : "1-2-3 (One Step Away)"
Nos amis Québécois Your Favorite Enemies sont de retour avec un nouveau clip classe et sexy. Leur rock indé est toujours aussi intense. Vivement la suite !
Le Mamooth : "Bad Summer trip"
Le Mamooth, groupe garage, déboule à cent à l'heure avec ce petit clip sympa et d'excellent tenue aux fausses allures de série B surf/horreur filmé sur la côte Brestoise.
dimanche 20 mars 2016
Bror Gunnar Jansson
Puisque la musique
est un langage sans frontière, partons aujourd'hui à la découverte
d'un personnage fascinant : le bluesman Suédois Bror Gunnar
Jansson. Ce premier album est d'abord sorti de manière assez
confidentielle (100 exemplaires produits et rapidement épuisés)
dans sa Suède natale avant d'être réédité par l'excellent label,
français de surcroît, Normandeep blues, cocorico, saluons
l'initiative au passage ! Bror Gunnar Jansson excelle dans un
exercice assez compliqué, celui du one-man band, autrement dit le
musicien qui fait tout, tout seul la guitare sur les genoux et deux
pédales aux pieds pour assurer la batterie, en l'espèce le flight
case de sa guitare faisant office de grosse caisse ! Entièrement
enregistré live, ce premier album distille un poison malsain et
venimeux. Dès les premières notes, Bror instille un climat lourd
qui ne fait que s'appesantir au fil des morceaux. Le disque commence
de manière assez cérémonieuse avec « Dead Cold Hands »,
tout est dit dans le titre, martèlement martial de la grosse caisse,
guitare lourde et traînante, Jansson traîne le blues du fin fond de
l'âme humaine pour le ramener sous la lumière blafarde d'un
lampadaire. Sa voix de gorge, au timbre profond, sort littéralement
des tripes, on jurerait redécouvrir un vieux bluesman oublié du
Delta, plus vrai que nature ! Avec son climat inquiétant (le
tueur William Joseph Dean, personnage récurrent de son œuvre) et
son ambiance sombre, Bror Gunnar Jansson livre un album dense dont on
ne revient pas tout à fait indemne.
En concert le 16
juin à Paris (La Boule Noire).
samedi 19 mars 2016
Mavis Staples : « Livin'on a high note »
Est-il réellement
besoin de présenter Mavis Staples ? Légende vivante de la
soul, qui a, au sein du groupe familial The Staple Singers, donné
une conscience politique à la scène soul des années 1960/1970 ?
La fille du regretté Pops, immense artiste, est aujourd'hui une
survivante et est toujours la digne représentante (avec entre autres
Candi Staton et Bettye Lavette) du genre old school. Depuis quelques
années, la chanteuse recherche un nouveau souffle musical
collaborant avec des artistes de la nouvelle génération souvent
venus de l'indie rock. Après Jeff Tweedy (Wilco) sur le précédent
album et un virage électro sur l'EP « Your good fortune »
sorti l'an dernier, Mavis se tourne maintenant vers M. Ward (She and
Him) pour ce nouvel effort. Les bienfaits de cette nouvelle
collaboration sautent aux oreilles dès le premier titre « Take
us back », les guitares sont tranchantes et la voix de Mavis
est particulièrement bien mise en valeur. C'est un bain de jouvence,
un hybride parfait de soul music (le chant grave et profond de Mavis)
et de rock n'roll, à rendre fous de jalousie tous les jeunes turcs
de la scène garage (cf. « Action », « High
note »). Et ce n'est pas tout, le savoir faire de M. Ward se déploie également sur
les morceaux les plus tendres à grands renforts de violons (« If
it's a light »). Auprès de la jeune génération, Valerie
June, Trombone Shorty et Aloe Blacc (la merveilleuse "Tomorrow", un passage affolant du disque), qui ont tous de près ou de loin
participé à ce nouvel effort, Mavis Staples a retrouvé sa voix, un
souffle rauque et subtilement brisé, transpirant le vécu, qui donne
des frissons. Un must, pas le moindre des exploits après cinquante
ans de carrière.
http://livinonahighnote.com/
https://www.facebook.com/mavisstaples
https://twitter.com/mavisstaples
vendredi 18 mars 2016
Team Wild : « Clear eyes, Full hearts, Can't lose »
Pour son premier
album, la jeune nordiste Amélie D. Noordzee (a.k.a Team Wild) n'a
pas fait les choses n'importe comment. Ce bel objet a été
enregistré à Nashville sous la houlette de deux producteurs de
renom Robin Eaton (The Spinto Band) et Brad Jones (Yo La Tengo).
Voilà de quoi rendre jaloux bon nombre de confrères rêvant
d'Amérique. Dix jours sur place ont suffi pour revenir avec ce petit
bijou de rock âpre et empreint de blues. Car, contrairement à ce
que pouvait laisser penser le pedigree des deux producteurs, Team
Wild ne joue pas dans un cour indie/power pop mais propose un rock
n'roll où des guitares crades, comme autant de coups de fouets
électrisants (« Skin Coat », « Darkness speaks to
me »), le dispute à des influences venues du blues. C'est le
Gun Club réinventé avec une touche féminine. Amélie se révèle
être une chanteuse déroutante, une voix ample et ronde, assez
aiguë, qui n'est pas sans rappeler Kate Bush (« Ô my broken
heart »), assez étonnant dans ce contexte pour le moins
électrique qui constitue la grosse majorité du disque et parfait
sur les morceaux les plus folk (« At the end of everything », "Fell from a tree").
Enregistré live, privilégiant une dynamique intime et la relation
musicale avec ses partenaires, « Clear eyes, full hearts, can't
lose » est une petite merveille de rock garage à l'emporte
pièce, urgent comme il se doit.
mercredi 16 mars 2016
Matt Elliott : « The Calm Before »
Tiens, seulement six
titres, probablement un EP, « rapide à chroniquer ça »,
se dit l'auteur, débordé de demandes, dont les piles de cds
sauvagement entassées sur le bureau, mieux achalandé que n'importe
quel rayon disques de la fnac soit dit en passant, menacent de
s'écrouler à tout moment… Erreur, erreur, car Matt Elliott, notre
héros du jour, est le genre de type qui aime prendre son temps. Son
nouvel effort, « The Calm before » n'a beau contenir que
six chansons, c'est un album à part entière. Commençons par
résumer un peu les choses. Par le passé, sous le nom de Third Eye
Foundation, Matt Elliott était le chantre de la drum n'bass soit le
genre de mec qui animait le dancefloor à des heures indues. Aussi
improbable que cela puisse paraître, c'est métamorphosé en baladin
folk qu'on le retrouve aujourd'hui, la guitare sèche sous le bras.
Elliott excelle dans le genre en échappant aux canons classiques.
Bien loin de la structure couplet/refrain, Matt évolue en territoire
inconnu, peignant à l'aide de son instrument des paysages sonores.
Car à ce niveau de durée (quinze minutes pour le morceau titre) on
ne parle même plus de chansons. Tout ici est affaire de climat et de
sous entendus. Derrière le calme apparent (celui du titre) une
angoisse sourde apparaît en sous texte et c'est une tension qui va
crescendo qui anime ce disque (« I only wanted to give you
everything », « Wings and crown »). Pas
nécessairement facile d'accès pour le grand public, l'album demande
de l'attention et de l'écoute de la part de l'auditeur. Accéder à
la beauté, celle qui se dégage des ces arpèges délicats et de ces
subtils arrangements de cordes, est à ce prix.
mardi 15 mars 2016
Tue-Loup : « Ramo »
A la fin des années
1990, sur la foi de deux albums remarquables, Tue-Loup (du nom du
hameau sarthois dont ils sont originaires) ouvrait une brèche
inédite sur la scène française entre folk, rock et chanson, teinté
d'une certaine noirceur. Puis le groupe avait disparu de nos radars
au début des années 2000, on le pensait démissionnaire, vaincu par
les éléments contraires : on avait tout faux ! La
formation sarthoise avait continué sa route, en toute discrétion,
loin des médias. Sortant de nouveaux disque avec une régularité
métronomique, année après année, sans faire trop de bruit,
Tue-Loup en est aujourd'hui à son dixième album ! Et on se
retrouve fort contrit de réaliser que, en 2016, on a loupé la
majorité de leur parcours… Et c'est regrettable. Car, loin d'avoir
éteint leurs qualités intrinsèques, le temps les a, au contraire,
affirmées. En 2016, Tue-Loup est une formation précise et
rigoureuse pratiquant l'épure musicale où chaque élément est à
sa place. Sans superflu inutile, le groupe repose toujours sur une
base guitare/basse/batterie mais cette dernière est particulièrement
fine. La musique de Tue-Loup possède quelque chose de rare, une âme,
une ambiance, que l'on ressent dans le moindre glissé de contrebasse
ou dans le chant subtilement « cassé » de Xavier Plumas.
Nul n'est besoin pour le groupe de courir après une quelconque mode
puisqu'il est évident qu'il a trouvé sa patte entre folk ombrageux
(« Tejo ») et rock ouaté (« In Vivo »). Mais
le groupe sait aussi s'ouvrir à de nouvelles sonorités, des
rythmiques teintées de free jazz, ou une appétence nouvelle pour
les arrangements au clavier (rhodes, piano, orgue, synthés discrets
etc.) et la langue portugaise (ce nouvel album est né sur les bords
du Tage). Du travail d'orfèvre…
lundi 14 mars 2016
Parnell : « Ce qu'il en reste »
Plume élégante,
c'est en Irlande que Parnell a trouvé son nom de scène et son inspiration musicale (cf. "Quel décor"). Ce premier
album s'impose comme un résumé de son parcours et « ce qu'il
en reste » finalement ce sont ces dix chansons comme autant de
petites vignettes collées sur l'existence (« Ma vie »).
Sa guitare folk sous le bras, Parnell pose un regard mélancolique
sur les relations sentimentales (« Elle passe ») ou le
quotidien (« Encore ») estimant qu'il « sera
bientôt prêt ». Pourtant, jamais l'album ne sonne sombre ou
désespéré mais se situe dans un entre-deux où la joie et la
mélancolie sont intrinsèquement liées, comme un rayon de soleil
dans un ciel noir de suie. Guitariste habile, Parnell a fait de son
instrument fétiche le cœur de sa musique. L'album s'avère un régal
d'arpèges folk pour les oreilles (« Piste Noire »,
« Elle Passe », « Pour que mon cœur »)
délicatement arrangé au violoncelle et à l'aide de divers claviers
vintage (Mellotron, Rhodes). Un ensemble harmonieux, intimiste et
délicat où plane le fantôme de Nick Drake.
mercredi 9 mars 2016
Refuge : « Brokenbird »
Refuge. C'est, bien
entendu, le nom du groupe. Mais c'est également, au-delà, une
conception de la musique. Un Refuge. En effet, la formation déploie
les grands moyens pour faire de chaque chanson un cocon précieux et
confortable. L'ambiance est langoureuse entre cordes soyeuses et
nappes synthétiques atmosphériques au-dessus desquelles plane la
voix de tête du chanteur, à laquelle se joint parfois une
chanteuse. Ces sept compositions inaugurales font montre d'un art
consommé de la pop, hypnotique (« Brokenbird ») fine et
ciselée. On pense parfois à Talisco (« Dumb believers »)
parfois à un version masculine de Kate Bush. Un EP apaisant, propice
à la rêverie, à écouter pour se détendre en fin de journée.
mardi 8 mars 2016
Nadéah : « While the heart beats »
Après l'ep « Met a man » sorti à l'automne dernier, Nadéah continue son
aventure musicale avec ce deuxième album en forme de rupture. Son
premier disque en solo, « Venus gets even », sorti il y a
cinq ans, avait séduit par son approche vintage entre rockabilly et
jazz swing. Tout ceci appartient au passé à l'écoute de cette
nouvelle livraison aux sonorités contemporaines, incarnée par les
synthés qui font leur apparition dans son univers. L'album commence
fort avec « Met a man » qui nous avait déjà
impressionné l'année dernière. De la basse disco 70s balancée sur
un rythme d'enfer en intro à la coda aux guitares bruitistes, la
chanson, hyper efficace, est un tube en puissance. Comment dès lors
que l'on frise la perfection dès les premières secondes de l'album
tenir le rythme sur la longueur sans sonner fade ? C'est toute
la problématique de ce disque à laquelle l'Australienne a décidé
de répondre par la diversité, incarnée par le duo de producteurs
convoqués : Rob Ellis d'un côté, Marc Collin (son comparse du
collectif Nouvelle Vague) de l'autre. Les deux hommes mettent en son
les différentes facettes de l'album : la disco (« Met a
man », « Kansas »), le rock (« Unknown »,
« Darling ») et les ballades, « Run »,
l'intimiste piano/voix « Pocket full of holes » placée
en conclusion. Sur un plan vocal, Nadéah se démène et donne de la
voix pour trouver une unité qui fait parfois un peu défaut. Car si
l'album possède un peu de tout pour plaire à tout le monde, chacun
fera sa sélection personnelle en sautant quelques plages…
En concert le 14/03
à Paris (Café de la danse)
https://twitter.com/nadeahlundi 7 mars 2016
Inglorious
Tout, absolument
tout, chez Inglorious exhale l'amour du (hard) rock classique, celui
des années 1970. Il faut dire que Nathan James, le chanteur et
leader du groupe a été à bonne école. Avant d'avoir sa propre
formation, Nathan a chanté auprès du mythique guitariste de
Scorpions, Uli John Roth. Difficile d'échapper à son destin avec un
cursus pareil… L'écoute de l'album se révèle ainsi un jeu de
cache-cache où le groupe s'amuse à évoquer, avec classe toujours,
ses influences. Il y a du Led Zeppelin (celui de « Kashmir »)
dans « High Flyin' Gypsy » alors que l'imparable
« Breakaway » évoquerait plutôt le hair métal des
années 1980. Mais c'est lorsqu'il lorgne du côté du blues que le
groupe est à son meilleur, « Holy water » ; le
rendu est alors proche de formations contemporaines dans une veine
Rival Sons/Blues Pills. A défaut d'être original, Inglorious se
révèle être une formation carrée et puissante, toutes guitares
dehors (la poisseuse « Warning ») mais sans ostentation
et également agile en acoustique (l'intro de « Bleed for
you », "Wake"). Que demander de plus ?
https://twitter.com/WeAreIngloriousdimanche 6 mars 2016
The New Roses : « Dead man's voice »
The New Roses, quel
étrange patronyme que voici, mélangeant à la fois nouveauté et un
petit air de ressemblance avec un autre groupe à roses (et à armes
à feu aussi) des années 1980. Et de fait, il y a beaucoup de cela
chez ces nouvelles roses qui nous ramènent trente ans en arrière
lorsque le rock était fun et hédoniste, avant que Nirvana ne mette
la noirceur à la mode. Ecouter the New Roses, c'est donc se
transporter dans le Los Angeles des années 1980, se balader cheveux
au vent dans une décapotable sur Sunset Boulevard en route pour
faire la fête au bord de la piscine dans d'immenses villas
hollywoodiennes. Étonnant lorsque l'on sait que le quartet est tout
ce qu'il y a de plus... Allemand ! Une sacrée bande
d'usurpateurs donc, mais avec un talent certain pour le hard rock
teinté de glam et un (léger) soupçon de blues au travers d'une
guitare bien sentie (« Thirsty », « Partner in
Crime »). Et pourtant, The New Roses réussit à injecter de la
fraîcheur dans ce style franchement daté, en mettant l'accent sur
les compositions plutôt que sur la recherche obsessionnelle d'un
temps révolu. Un album d'excellente tenue qui ravira les amateurs de
rock (au sens large) et pas seulement ceux dont la discothèque est
en jachère depuis 1990 et n'ont jamais digéré la déchéance d'Axl
Rose et autres Mötley Crüe…
samedi 5 mars 2016
Daria : « Impossible Colours »
Originaire d'Angers,
Daria assouvit ses rêves d'Amérique, enregistrant son quatrième
album à Baltimore dans le studio du mythique Jay Robbins (Clutch,
Against Me, Jawbreaker). Le quatuor revient de sa virée
outre-Atlantique avec un album remarquable, aux influences ancrées
dans le rock indépendant étasunien des années 1990. La chose
impressionne par sa cohérence, le son est énorme mais, plus encore,
le groupe semble être animé d'un feu intérieur dopé à
l'adrénaline. Une tension sous-jacente anime ce disque qui semble
aller crescendo alors que les premiers titres défilent (« Margins »,
« February », « A quiet anarchy »). L'album a
été enregistré live sur un magnéto 16 pistes et cela s'entend,
tant le son est abrasif et plein d'aspérités qui font son charme.
La musique vit et respire à mille lieues des productions aseptisées.
Placé en milieu de programme le morceau titre « Impossible
Colours » offre un moment de répit qui n'est qu'illusoire
avant que la cavalerie ne déboule sous la forme d'une batterie
explosive et d'un arrangement de cuivres pour le moins surprenant. A
force de larsens lancinants, Daria peint un paysage inquiétant comme
un ciel noir de suie avant que l'orage ne gronde (« Suspension
of disbelief », « Inner dialogue », « A tired
hand » peut-être la meilleure du lot). Excellent sur les
formats courts, comme autant de petites bombinettes soniques de moins
de deux minutes (« February », « Coup de grâce »
qui porte bien son titre soit dit en passant), Daria sait aussi
prendre des risques et clôture son album avec un « Empirical
Dismay » frôlant les dix minutes, un tour de force. Les Foo
Fighters ont annulé la fin de leur tournée mondiale ? Pas
grave, Daria passera certainement en concert près de chez vous dans
un futur proche…
https://twitter.com/dariathebandvendredi 4 mars 2016
Bill Pritchard : « Mother town hall »
Appelons cela un
signe des temps. Ces derniers mois ont vu la résurgence d'une
génération de songwriters oubliés des années 1980 revenir sous
les feux de la rampe, avec des albums de haute tenue, souvent publiés
sur le label Tapete Records. C'est ainsi que l'on a pu découvrir,
avec un ravissement certain, les nouveaux efforts de Lloyd Cole,
Robert Forster ou Pete Astor. Bill Pritchard pour sa part était
parti avec une longueur d'avance sur ses collègues, publiant il y a
deux ans le remarquable « A trip to the coast » après
pratiquement une décennie d'inactivité. Ce nouvel album « Mother
town hall » reprends les choses là où elles s'étaient
arrêtées en 2014, toujours produit par le fidèle Tim Bradshaw. Et
dès les premières notes de « Saturn & Co » qui
ouvre le bal, la magie opère une fois de plus. Lignes claires,
orchestrations classique et classieuse, comme lassé par une vaine
course à l'échalote, Bill Pritchard, abandonne ici ses oripeaux
hasardeux (cf. l'électronique de l'album « By Paris, By Taxi,
By Accident ») pour s'inscrire dans une veine pop intemporelle.
Un peu comme si le Britannique, lassé par des années d'errance
artistique, avait décidé de faire de la musique pour son propre
plaisir n'écoutant que ses envies. Cette fois encore, ce francophile
invétéré, prof de français dans le civil et co-interprète en
1988 de l'album « Parce que » en duo avec Daniel Darc, a
décidé de chanter dans sa langue maternelle même si la France
apparaît toujours en filigrane (« Mont St Michel »).
L'orchestration s'appuie sur du classique, du solide, piano, guitare,
basse et batterie parfois agrémenté de quelques cuivres distillant
un parfum jazzy (« Vampire from New York »), mélancolique
(« Déjà vu boutique », « September haze »)
ou plus enjoué sur un tempo rock (« In heaven »). Agé
de cinquante deux ans, Bill Pritchard est plus que jamais cet honnête
artisan de la chanson, résistant aux sirènes du temps et des modes,
composant pour la beauté du geste. Puisse-t-il longtemps continuer à
sortir des disque de cette qualité.
http://www.billpritchardmusic.com/mardi 1 mars 2016
The Rebels of Tijuana
Le Pop Club,
excellente structure Suisse basée à Genève, multiplie depuis
quelques années les projets séduisants (Monkberry Moon Orchestra,
The Green Flamingos) démontrant un attachement sans faille au rock
garage et psyché des années 1960. Le nouveau joyau du label se
nomme The Rebels of Tijuana qui passe ici au format long après un remarquable EP. Comme son nom ne l'indique pas, The Rebels of Tijuana
chante dans la langue de Molière sur cet effort, c'est (hélas)
devenu suffisamment rare pour être non seulement souligné mais
également encouragé. Ce premier effort baigne dans l'ambiance
garage/psyché typique du label. Rien ne manque, les guitares fuzz,
les claviers vintage et la basse énorme au son rond complétée par
une batterie pleine de groove. La langue française apporte un plus
incontestable, et distingue le groupe dans la mêlée de
revivalistes, particulièrement fournie à l'heure actuelle. Un peu
comme si les Rebels of Tijuana se réclamait de Serge Gainsbourg
(époque Melody Nelson) ou des bandes originales de François de
Roubaix plutôt que de Pink Floyd. Mais c'est surtout l'influence du
Jacques Dutronc déglingué des premiers albums (circa 1966-1967) que
l'on retrouve dans la causticité des paroles (« Bizarre »,
« Remington », "Le Solitaire"). Un groupe et un album attachant.
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