dimanche 26 novembre 2023

Jim Jones All Stars, Petit Bain, 25 novembre 2023

 

C’est peu dire qu’il nous avait manqué ! Forcé au renouvellement après la pause forcée due aux confinements l’Anglais Jim Jones nous revient avec un nouveau groupe les All Stars. Une transformation habituelle pour le chanteur, ancien leader des Thee Hypnotics, Black Moses, Jim Jones Revue et Jim Jones & The Righteous Mind. Et encore une fois, il s’agît pour Jim Jones de s’approprier l’histoire (cf. les nombreuses reprises qui ont émaillées le set) mais aussi son histoire personnelle reprenant en public le répertoire de la Jim Jones Revue (reprise mortelle de « Burning your house down ») pour la première fois depuis la mise à l’arrêt du groupe il y a une dizaine d’années maintenant. Côté musiciens on retrouve dans cette nouvelle formation l’inamovible Gavin Jay, ancien bassiste de la Revue et de Righteous Mind et Elliot Mortimer (ex pianiste de la Revue), Chris Ellul (le batteur de The Heavy, absent ce soir sur scène) et deux saxophones (contre trois sur l’album) ainsi que le guitariste Carlton Mounsher. Un sublime album, « Ain’t no peril » vient de sortir que le groupe défend sur scène avec conviction ce soir. Dès le premier titre on est estomaqués, scotchés sur place, par la puissance de la batterie et des guitares. Le bassiste Gavin Jay envoie des lignes énormes tout en gesticulant dans tous les sens, il est à l’évidence en très grande forme. Quant à Jim Jones, ce dernier hurle toujours aussi bien avec les années. Parti sur des bases aussi fortes, le soufflé pourrait retomber aussi vite. Il n’en est rien car à la puissance sonore, s’est adjoint un geste musical, plein de swing et de feeling, de très grande classe. C’est précisément là que se situe l’apport du piano et des deux saxophones. Modérer la puissance par la musicalité. Nous sommes ainsi passés par tous les états au fil de la soirée. Une véritable leçon de rock’n’roll.

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https://jimjonesallstars.bandcamp.com/





samedi 25 novembre 2023

Laudanum : « As black as my heart 4 : 1»

 


Après une décennie d’absence, Matthieu Malon (chanteur auteur et compositeur très attachant par ailleurs entre pop rock et chanson) réactive son projet électro Laudanum. Un retour en très grandes pompes pour l’artiste dont le quatrième album se divise en trois parties. Les deux premiers volumes sont sortis respectivement en septembre et novembre, le dernier arrivera au mois de janvier. Trois albums donc faisant honneur au patronyme de l’auteur. En effet, apparu au 16ème siècle, le laudanum est une teinture alcoolique d’opium, aux effets particulièrement addictifs. Un adjectif qui convient à merveille à la musique de Laudanum. Seul derrière ses machines et avec l’aide d’une pléiade d’invités, Laudanum met au point une toile, semblable à celle d’une araignée, laquelle ne manquera pas de scotcher l’auditeur. On oserait presque parler de psychédélisme moderne si ce n’était la tonalité relativement dark (cf. le titre) de l’ensemble. Tout est affaire de rythme, que celui-ci soit imprimé par une vraie batterie (Philippe Entressangle) ou une boîte à rythmes réglée à la perfection (cf. « ReZisTanZ ») qui fait vriller les oreilles. La tonalité synthétique, parfois agrémentée de guitares électrisantes (« Howl in the dark »), est assez sombre et proche des années cold-wave, la décennie 80 (The Trophy Room ») ou plus dansante (« I want the horizon ») enveloppe le tout d’un voile hypnotique aussi entêtant que persistant. C’est un fait : l’écoute hante longtemps après la fin du disque.

En concert le 27/11 (Petit Bain)

https://www.facebook.com/welovelaudanum/





jeudi 23 novembre 2023

BlauBird, Manufacture Chanson, 20 novembre 2023

A la fois fidèle à son univers mais en constante évolution, BlauBird n’a de cesse de nous surprendre. Ainsi son retour à la Manufacture Chanson, pour un set complet, le premier depuis longtemps après une longue série de showcases et de premières parties, la voit accompagnée d’un nouveau musicien, Nicolas Beck, au tahru. La connaissant, on s’imaginait avoir affaire à une improbable viole scandinave d’un siècle passé. Et non, absolument pas, le tahru est un instrument récent apparu entre les années 1970 et 1980 dont la sonorité rappelle le violoncelle. Intrinsèquement mélancolique, le son du tahru s’accorde à merveille à l’univers de BlauBird. Sa musique nous touche autant, surtout sur scène, car elle nous ramène à quelque chose de foncièrement essentiel : la vie, la mort, l’absence. On l’a maintes fois répété, et le phénomène se renouvelle à chaque concert, sur scène, BlauBird nous émeut aux larmes. Le visage tourné vers le ciel, les yeux gonflés, alors que les notes s’échappent du piano, à l’évocation de chers disparus (son grand-père, la chanteuse Barbara), l’émotion nous gagne une fois encore. Et pourtant le concert du soir révèle de nombreuses surprises, exhumant des titres peu joués jusqu’alors (« Daddy » extrait du premier album) ou à l’occasion d’un sublime duo folk avec Lonny, dans une configuration guitare classique/voix assez rare, leurs deux voix s’harmonisant à merveille. Sublime soirée.

En concert le 11/12 à la Manufacture Chanson

https://blaubird.com/

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dimanche 19 novembre 2023

Great Lake Swimmers : « Uncertain Country »

 


Débuté il y a 20 ans avec une approche folk rustique, avec des albums enregistrés dans des églises et autres improbables silos à grains du siècle dernier (en dignes héritiers des Cowboy Junkies), les Canadiens prennent une nouvelle envergure avec ce nouvel effort. Un changement de direction qui les voit s’éloigner, un peu du folk pur et dur, pour mâtiner leurs guitares acoustiques (on ne se refait pas totalement) d’un soupçon de pop. Ainsi le son de ce nouvel album est ample, avec de l’écho, arrangé avec des claviers et des guitares électriques, et une rythmique qui pulse à rythme d’enfer (« Riverine »). Loin de nager en eaux troubles, le groupe joue la sécurité et alterne les morceaux intimistes basés sur une émotion vive véhiculée par la voix de Tony Dekker et chansons plus enlevées (« Swimming like flying ») qui devraient logiquement faire un tabac sur scène. Les véritables pépites se trouvent, à notre humble avis, dans la première catégorie (« I tried to reach you » ; « Moonlight, stay above » ; « Quiet before the storm ») mais l’ensemble, d’excellente facture, constitue une sublime virée au pays des grands lacs.

En concert le 4 décembre à La Boule Noire

https://greatlakeswimmers.com/

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samedi 18 novembre 2023

Logan Ledger : « Golden State »

 


Incarnant une time capsule idéale, par la seule grâce de sa voix, le jouvenceau Logan Ledger nous propulse dans les années 1950 avec ce deuxième album. Un idéal fantasmé fait de country, de folk et de rock’n’roll des pionniers. Et ce ton si particulier de la voix trouvé par l’artiste, finalement autant crooner que rocker. Le numéro de charme peut commencer et il dure 10 plages durant, soit autant de chansons, toute d’une qualité superlative et marquées du sceau de l’élégance, batterie aux balais, swing détendu et laid-back : voici l’album idéal pour roucouler les longues nuits d’hiver en rêvant au printemps et à l’été à venir. La bande son du soleil couchant sur la nature verdoyante. Qu’il est doux de visiter en musique ce « Golden State » rêvé. Une pépite !






jeudi 2 novembre 2023

Gurl : « Maybe we’re not kids anymore »

 


Le tout jeune power-trio sort son deuxième EP en à peine trois ans d’existence. C’est peu dire que les choses vont vite pour Gurl ! Comme décidé à ne pas perdre son temps, le groupe fonce pied au plancher, toutes guitares dehors, tout en prenant d’admirer les bas-côtés de l’existence. Peut-être que nous ne sommes plus des enfants songent-ils en tirant de la sentence une petite collection de chansons, pas tout à fait mélancoliques mais assez énergiques, dont la dimension électrique est contenue. Surf music, rock garage et grunge cohabitent, en toutes circonstances le trio ménage son aspect mélodique. La dernière plage prouve également que le trio est aussi très habile en acoustique. Une affaire à suivre.

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mercredi 1 novembre 2023

Jean-Philippe Goude : « Le salon noir »

 


Alors que n’a pas tout à fait sonné l’heure des bilans de fin d’année, c’est pour bientôt, l’un des événements marquants aura certainement été le retour dans les bacs de Jean-Philippe Goude après quinze ans d’absence. Compositeur aux accents classiques, ce dernier signe un retour des plus ambitieux avec un double album pantagruélique contenant 19 pièces. Un effort colossal, dont le titre est inspiré du site préhistorique de la Grotte de Niaux (sise en Ariège) : le salon noir qui orne la pochette. Un salon que Goude se fait fort de nous faire visiter en musique, usant à merveille du piano mélancolique (« La Rage »), étrange lorsque ledit instrument est préparé (« Deci-delà » ; « Tomber dans les fragments ») ou des cordes stridentes (« Même les étoiles »), mettant ainsi en harmonies mélancolie et autres angoisses nocturnes (« J’habite une blessure »). Entêtante, obsédante, l’œuvre impressionne par sa grandeur, sa grandiloquence, digne d’une bande originale de Bernard Herrmann pour Hitchcock. Un sentiment encore surligné par les textures sonores concoctées par le compositeur (dont il est également friand), contrastant avec l’esthétique classique de l’ensemble. La musique happe littéralement l’oreille de l’auditeur pour mieux lui en faire voire de toutes les couleurs. Ecouter cet album est comme monter dans un ascenseur émotionnel faisant passer par tous les états. Enfin, et il est important de le souligner, l’album signe la rencontre de Goude avec un instrument inattendu et jusqu’ici peu utilisé dans l’univers de Goude : la voix. Celle du contre-ténor Paulin Bündgen que l’on retrouve sur 8 plages incarnant ces différents états d’âme. Sans doute la bande originale idoine pour l’automne et l’hiver.

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mardi 31 octobre 2023

Alamo Race Track : « Greetings from Tear Valley and the Diamond Ale »

 


Groupe américain plus vrai que nature, ils sont en réalité Hollandais, Alamo Race Track est de retour dans les bacs après 17 ans d’absence ! Un événement d’importance donc signant un retour sous les meilleurs auspices. Ainsi, dès le titre d’ouverture, la magnifique « Sally H », c’est toute une foule de souvenirs qui saisit l’auditeur, quelque part entre la pureté mélodique de Big Star et des harmonies vocales à se damner dignes des Beach Boys. Ainsi sans chercher particulièrement à s’inscrire dans une esthétique retro ou nostalgique, le groupe mené par Ralph Mulder y arrive le plus naturellement du monde, s’appuyant sur la force de ses compositions. Une pop pratiquant une ligne claire mélodique, s’appuyant sur des guitares cristallines (« Got to get home » ; « Romney Shed 1 »), tout en sachant faire monter la pression sans ostentation aucune (« Fight » dont la ligne de basse dégage une tension sous-jacente contrastant avec le chant aérien), Alamo Race Track atteint une forme intemporelle propre à égaler ses prestigieux modèles. Il se dégage de ces compositions quelque chose d’éthéré, une sensation calme et apaisée. « Wish I Was a Bird » chante Ralph Mulder sur ce nouveau disque. À défaut de voler lui-même, ses compositions s’envolent et planent comme dégagées des contingences terrestres. Un chef d’œuvre et un retour réussi au-delà de toutes les espérances !

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lundi 30 octobre 2023

Karkwa : « Dans la seconde »

 


Vingt ans après leurs débuts (« Le Pensionnat des Établis », 2003) et après treize années de silence discographique (« Les Chemins de Verre », 2010), le groupe montréalais est de retour et c’est une merveilleuse nouvelle ! Bien que l’on ne les ait jamais vraiment perdus de vue, le chanteur/guitariste Louis-Jean Cormier est devenue dans l’intervalle une superstar dans son Québec natal, grâce à ses disques en solo et en qualité de membre du jury de « La Voix » (« The Voice », chez nous), mais c’est une dynamique unique et bien particulière qui se met en marche lorsque le quintet se réunit et que l’on retrouve aujourd’hui avec plaisir. Amateur d’ambiances planantes et autres artefacts progressifs, le groupe n’a pas son pareil pour mettre en sons la bande originale imaginaire d’un rêve musical éveillé (cf. « Miroir de John Wayne » ; « Dans la seconde »). Une sensation que l’on retrouve dans cette « Ouverture » majestueuse qui débute l’album. La nouveauté réside dans l’appropriation par le groupe des sons psychédéliques (cf. « A bout portant » ; « Gravité »), chose inédite jusqu’ici. Mais Karkwa ne serait pas Karkwa s’ils se contentaient bêtement de suivre un modèle (l’occasion nous est ici donnée de tordre le cou à cette réputation ridicule de Radiohead francophone qu’ils traînent depuis des années, ce groupe vaut bien plus et mieux que ça!) Ainsi le psychédélisme de Karkwa se veut dénué de guitares garage ou du moindre aspect nostalgique rappelant les années 60. Non Karkwa s’enferme, cherche et se perd dans un labyrinthe sonore bien à eux et en livre le résultat à nos oreilles émerveillées. C’est émotionnellement très fort, une sorte de manège la tête à l’envers, bruitiste à l’occasion (« Nouvelle Vague »). Cela valait le coup d’attendre !

En concert le 3/11 à La Maroquinerie

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samedi 28 octobre 2023

Dylan LeBlanc : « Coyote »

 


Depuis 2019 et la réussite exceptionnelle de son précédent album « Renegade », on avait un peu perdu du vue le chanteur. Et à l’écoute de ce nouvel effort, le cinquième, on reste pantois devant l’écart entre la maturité affichée sur ce nouveau disque et le jeune age (33 ans) de son auteur. Si dans un premier temps une forme de déception se fait jour à l’écoute de ce nouvel album, le sentiment s’efface aussitôt. Comparativement à l’album précédent, ce « Coyote » souffre de s’écouter dans une dimension unique. En effet, l’album voit Dylan LeBlanc renouer avec ses racines folk et country. Le disque se conçoit donc comme une formidable collection d’arpèges délicats et de nappes de cordes rêveuses, assez loin donc des tentatives pop/rock et des riffs de guitares survoltés du disque précédent. Le présent album se veut beaucoup plus rêveur, voire planant dans une certaine mesure, c’est un peu les grands espaces qui s’ouvrent à son écoute, la bande originale d’un voyage imaginaire dans l’ouest américain. Quoi qu’il en soit, il constitue une preuve supplémentaire du talent de LeBlanc en termes acoustiques, qui s’impose, un disque après l’autre, comme une valeur sûre du songwriting.

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vendredi 27 octobre 2023

Black Box Revelation, La Maroquinerie, 25 octobre 2023

Comme tant d’autres groupes en noir (Black Keys) ou blanc (White Stripes), la formation belge a débuté comme un duo guitare/batterie hybridant habilement influences blues aux sons rock garage. Comme tant d’autres (Dirty Deep), le groupe s’est adjoint les services d’un musicien additionnel. Et c’est dans cette configuration que l’on retrouve les Bruxellois sur la scène de La Maroquinerie, après une longue absence. Le troisième larron alterne entre plusieurs instruments, des synthés vintage à la basse voire une deuxième guitare. L’effet se fait immédiatement sentir et ouvre de nouveaux horizons au groupe, plus pop (les claviers) ou groove (la basse), suivant l’instrument utilisé par le troisième membre du groupe. Une démarche qui les éloigne de leur son originel, une évolution qui se fait sentir chez Jan (le chanteur / guitariste) aux longues improvisations psychédéliques et blues. Ce n’est finalement que lorsque le troisième musicien se contente d’un tambourin que l’on retrouve le sel qui faisait le groupe auparavant, ce son lourd et massif, plus violent aussi, qui fait immédiatement partir la fosse en pogo. Voilà néanmoins un retour qui fait du bien !

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mardi 24 octobre 2023

Israel Nash : « Ozarker »

 


A bien des égards, Israel Nash appartient à cette catégorie de songwriters, typiquement étasunienne, dont les influences raciniennes, country, se fondent dans un format teinté de rock, voire pop dans une certaine mesure, propre à séduire le grand public : le heartland rock. Chant à la virilité assumée autant que nuancée, nappes synthétiques dans le fond assurant le lit sur lequel se posent les mélodies, batteries propres et carrées, pour le groove on repassera, et saillies millimétrées à la guitare en constituent les principaux éléments ; fournissant autant de points de comparaisons avec Bruce Springsteen ou John Mellencamp, un compagnonnage prestigieux auprès duquel Israel Nash fait bonne figure. Dans cette collection d’hymnes fédérateurs, faîte pour résonner dans les stades et autres arénas de grande ampleur, on a tendance a surtout apprécier les intros. C’est à dire ce moment crucial où l’intimité transperce, juste avant que la machinerie lourde ne se mette en marche. C’est au travers de ces interstices que l’on aperçoit la trempe de l’artiste qu’est Israel Nash, le songwriter précieux, le guitariste inspiré. Ces mêmes interstices qui laissent deviner le grand album qu’aurait pu être « Ozarker », si seulement quelqu’un avait mis la pédale douce sur les effets et tempéré l’artillerie lourde. Ah si tout l’album avait pu sonner comme « Lost in America », « Midnight Hour », "Travel On" voire « Firedance » (nos préférées) ! On rêverait d’une version acoustique dépouillée. Navré, mais en l’espèce la chose sonne à nos oreilles comme datée et figée dans le temps. Et c’est bien dommage…

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lundi 23 octobre 2023

Thomas Kahn : « This is real »

 


Thomas Kahn, après une première tentative indie-rock, s’est métamorphosé en soulman plus vrai que nature. Son premier véritable album dans ce style s’intitule « This is real », un titre pour le moins indiqué tant le chanteur clermontois a véritablement chopé le truc. Son grain de voix un peu rocailleux, un peu cassé dans le fond de la gorge, typiquement soul, incarne à merveille le genre. D’autant plus que, musicalement, l’album se nourrit aux meilleures sources. Groove incendiaire, les cuivres pêchus bien en avant et coup de gorge à l’avenant (« More than sunshine », « Don’t look at me ») ou plus langoureux (le funky sexy « Stay Away », la sublime « Try to see Further »), tentatives acoustiques émouvantes (« Hope ») ou chaloupement reggae (« Flying Around ») l’album fait mouche à tous les coups mettant en valeur le feeling, le moment, l’émotion, transformant chaque chanson en pur moment de bonheur soul. Sorti il y a un peu plus d’un an maintenant, la qualité de l’album méritait bien qu’on s’y arrête même avec retard. D’autant plus que l’artiste défend encore actuellement son disque sur scène, avec un certain succès. Un passage à la Maroquinerie est annoncé pour le 2 février prochain. On s’y retrouve ?

http://thomas-kahn.com/

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dimanche 22 octobre 2023

The Silencers : « Silent Highway »

 


La parenthèse Celtic Social Club refermée, Jimme O’Neill est retourné à ses premières amours (et en famille cette fois-ci), The Silencers, groupe phare des années 80 et 90. Un retour fidèle aux canons du rock et de la new-wave FM des années 1980 particulièrement efficace et accrocheur dans la première partie de l’album, notamment par son adaptation au sonorités blues et rock’n’roll (la guitare twang de « Western Swing » ; la rythmique ternaire de « Whistleblower » et sa ligne d’harmonica inspirée). Dans ce registre, le timbre devenu légèrement rocailleux avec les années de Jimme, comme nourri aux gravillons, fait des merveilles. Cependant, on assiste à une rupture de ton de l’album dans sa deuxième moitié, plus émotive et plus lente. Une forme de nostalgie s’installe ainsi après des retrouvailles vigoureuses. Un album d’excellente facture qui se clôture sur la superbe « Torchsong ». Un retour réussi.

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samedi 21 octobre 2023

Cash Savage and The Last Drinks + Kim Salmon, Petit Bain, 20 octobre 2023.

On commence cette belle soirée placée sous les bons auspices du rock australien avec le vétéran Kim Salmon, un ex-Scientists au début des années 80, qui n’a de cesse d’arpenter les couloirs obscurs du punk et du rock garage depuis la fin des années 1970. Un musicien expérimenté donc qui a toujours de beaux restes à savoir un grain de voix à cracher du gravier, trahissant le vécu du personnage, et une guitare à l’avenant, saturée à point. Le set part sur des bases élevées grâce à une section rythmique qui mène la danse sur les chapeaux de roues et des guitares abrasives. Le répertoire trahit les influences power-pop vitriolées au punk et se révèle riche en chansons fédératrices, entraînantes à écouter en concert. Une petite heure et un très bon moment marqué par la présence du légendaire Warren Ellis en guest sur deux titres.

Nous l’avions, à titre personnel, découvert en 2018 avec son fabuleux album « Good Citizens », une claque à l’époque, mais l’Australienne Cash Savage, en compagnie de son groupe The Last Drinks, est active depuis 13 ans, et est forte d’une discographie de cinq albums (+ un album live) dont le dernier est sorti il y a quelques mois. Aussi, la rumeur enfle autour des prestations scéniques de la chanteuse depuis quelques temps et nombreuses sont les connaissances à nous avoir averti de sa puissance en concert. Les aléas de l’existence ont fait qu’il nous avait été impossible de le vérifier de visu avant hier soir et on ne peut que souscrire à sa réputation après une heure et demie sous (très haute) tension. Cash Savage est avant toute chose une présence assez impressionnante sur scène, qui occupe l’espace et focalise les regards grâce à un langage corporel trahissant l’intensité du moment. Elle cherche souvent le public du regard, cherche à nouer le contact, pour elle le plus important est le moment passé ensemble. Musicalement la chose se révèle hybride, intensément rock’n’roll, mais pas dans le sens où on pourrait l’imaginer, c’est à dire sous un déluge de décibels. Certes les guitares sont saturées, mais dans une juste mesure, c’est à dire sans assommer le spectateur. A ce titre, la présence d’un violon et du clavier ajoute une note mélodique et mélancolique qui participe de la fascination exercée par le groupe. Le truc viendrait plutôt de la dynamique et du rythme, tantôt extrêmement élevé, tantôt ralenti, le tout créant une sorte de grand huit, fait de brusques montées en tension et d’accélérations subites, dont on ressort sonné. Enfin l’intensité mise par tous les musiciens dans la moindre note jouée crée énormément de feeling et fait ressortir les émotions. Dans le contexte tragique qui est le notre depuis deux semaines, Cash Savage and The Last Drinks nous redonne foi en l’humanité.

https://cashsavage.com.au/

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jeudi 19 octobre 2023

Emma Sand Group : « Beautiful Boy »

 


L’attachante formation parisienne sort son premier album et, ne boudons pas notre plaisir, c’est une excellente nouvelle, tant cet effort inaugural confirme les qualités perçues sur les deux premiers Eps du groupe. Faîte d’aplats et de déliés, de creux et de reliefs, la musique du groupe respire. Les compositions s’imaginent comme autant de cartes postales envoyées depuis des horizons lointains dépeints en musique. Ménageant une place au silence, comme si la note retenue était finalement aussi importante que celle sortie des instruments, la musique d’Emma Sand respire les grands espaces, il s’y dégage une impression de soleil qui cogne et une odeur de poussière, entre folk et rock, entretenant un cousinage lointain avec le blues voire la country. Une musique mue par une batterie en sourdine, sonnant comme une menace flottante, fiévreuse et animée par une tension sous-jacente. Autant d’influences d’outre-Atlantique que le groupe a su faire siennes et au-delà puisque, et c’est une première, la chanteuse s’exprime en français sur deux titres. On applaudit des deux mains !

En showcase acoustique les 3/11 chez GIBERT DISC et 7/12 aux BALLADES SONORES

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mercredi 18 octobre 2023

Marc O et Christophe Deschamps : « The sound of 60’s garage rock »

 


Au commencement on retrouve deux potes, deux partenaires dans le crime, animés par la même passion du rock’n’roll. A la guitare, Marc O, le Franglais, déjà auteur du remarquable « L’homme de l’ombre ». Derrière le kit, Christophe Deschamps, batteur que tout le monde connaît pour avoir joué avec toutes les immenses stars de la variété, un chemin de traverse, pour le musicien qui reste viscéralement attaché au rock, également virtuose de son instrument (pour l’avoir vu sur scène derrière Bill Pritchard et Frédéric Lo, on vous l’assure ce type dépote comme pas deux!) Leur album commun s’intitule « The sound of 60’s garage rock », et c’est ainsi qu’il faut l’entendre, le terme le plus important ici étant « sound », tout indiqué pour un disque instrumental. Pas de grand discours sur la mondialisation ici, l’opus est un festival de groove à base de guitares fuzz déchaînées, un exercice de haute voltige allant du rock garage au psychédélique agrémenté d’un arrière goût blues (« Blue Thunder ») et surf, mené tambour battant. Sans prétention autre que celle de se faire plaisir, et celle d’en donner à quiconque les écoutera, les deux potes s’en donnent à cœur joie ! Une joie communicative et contagieuse qui transcende les enceintes. Et ça fait du bien ! Vivement une version physique et des concerts, on en a besoin par les temps qui courent !

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lundi 16 octobre 2023

Dope Lemon : « Kimosabè »

 


Derrière l’alias super citronné, on retrouve Angus Stone (la moitié du duo folk formé avec sa sœur Julia), le présent album étant la quatrième escapade en solo du fantasque Australien. Un disque rare évoluant sur un subtile ligne de crête entre passé et présent. Du groove chaloupé qui enrubanne « Kimosabè », le titre d’ouverture, s’échappe une sensation délicate et sucrée, une sorte de bien-être, les bonnes vibrations s’échappant des enceintes, un sentiment qui accompagnera finalement l’auditeur du début à la fin de cet album en forme de road-trip initiatique et imaginaire, le long des plages de l’Australie natale du chanteur. Pour accompagner notre errance, Angus nous a concocté un album aux petits oignons à la fois classique et moderne. On y trouve du rock et des guitares dans un échantillon alliant subtilement les classiques des années 70 (« Miami Baby » au solo stonien en diable) à l’attaque power-pop des années 90 (« Derby Raceway »), quelques résidus arpégés rappelant le folk fondateur de la fratrie (« Golden God ») le tout nimbé dans un groove légèrement hip-hop à base de boucles répétitives à vocation hypnotique (« Slinging Dimes »). Et bien d’autres surprises psychédéliques 80s encore (« Blue Moon Fox » ; « Give me that fire » ; "Lemon Tree") ! Un sacré cocktail donc qui aurait tout de la décoction peu ragoûtante chez les autres mais qui se transforme en merveille d’album grâce au savoir-faire expert de l’Australien. Drapé d’un feeling nostalgique, voici la bande-son idéale pour rêvasser à l’été finissant, de quoi prolonger, rattraper un peu de cette bonhomie estivale qui s’échappe aussi lentement que sûrement.

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dimanche 15 octobre 2023

Grant Haua : « Mana Blues »

 


Depuis la reprise du mythique label Dixiefrog par de nouveaux propriétaires, il est probablement l’un des artistes les plus attachants qu’il nous ait été donné de découvrir. Virtuose de la guitare acoustique, ses compositions sont proprement impossibles à reprendre, le Néo-Zélandais Grant Haua, puisque c’est de lui qu’il s’agît, prend des risques avec ce nouvel effort s’appropriant un instrument qui n’est pas vraiment naturel pour lui, la guitare électrique (à ce titre les photos ornant la pochette ainsi que le livret sont trompeuses). Une électrification générale qui drape sa musique d’une aura seventies (« Embers » ; « Time of dying »), encore plus prégnante lorsque le duo The Inspector Cluzo, invité sur le premier titre, se charge de rajouter une dose supplémentaire de décibels rapprochant Haua d’une scène garage à l’évidence assez éloignée de sa zone de confort. Paradoxalement, ce contexte sous haute tension, les amplis à fond, fait ressortir quelque chose d’inattendu chez l’artiste, une sorte de fragilité dans la voix contrastant avec l’ambiance virile, une faille musicale sur laquelle se tient le musicien. Il y a du Calvin Russell en lui, le visage autant cabossé que la voix, ce qui lui sied à ravir quand il est question de cœur brisé (« Jealousy », « To be loved ») ou d’évoquer son inspiratrice « Billie Holiday » sur une note étrangement rock et saturée. L’attachement à sa culture maori (« Pukehinahina ») constitue un autre angle saillant de sa musique. Attachant jusque dans ses rythmes funky, « Good Stuff », une ode aux plaisirs simples et une bouffée d’optimisme salutaire, voici un excellent album qui, gageons-le, vieillira bien.

https://granthauamusic.com/

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samedi 14 octobre 2023

Belle Scar : « Atoms »

 


Dotée d’un grain de voix expressif d’où les émotions découlent à l’envi, la chanteuse, Canadienne installée à Londres, a trouvé l’écrin idéal en cet album pour mettre en valeur sa voix. Pas vraiment rock, les guitares occupant ici un rôle secondaire, Belle Scar évolue dans un genre hybride, entre pop orchestrale et trip hop, parfois dark, mettant en valeur l’étendue de ses capacités vocales aux accents maniérés voire classiques. Derrière les manettes, son compagnon Marc O, a sorti les grands moyens et s’en donne à cœur joie s’adonnant à son sens de la production épique. Envolées de cordes, auxquelles répondent le chant de Belle Scar, chœurs grandioses et pianos mélancoliques transforment chaque titre en un générique potentiel pour un prochain James Bond. Du grand spectacle à savourer en stéréo !

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vendredi 13 octobre 2023

Population II : « Electrons libres du Québec »

 


L’auteur de ces lignes en est persuadé depuis bien longtemps, mais les Québecois, probablement parce qu’ils sont situés dans le cœur même du nœud gordien, l’Amérique du Nord, ont une bonne longueur d’avance musicale sur nous autres Français. Qu’il s’agisse de rock garage/pysché (Le Nombre, Chocolat, Les Hôtesses d’Hilaires, même si ces derniers sont Acadiens) ou d’americana folk countrysante (Jean Leloup), nos cousins d’outre-Atlantiques sont capables de miracles lorsqu’il s’agît d’adapter dans la langue de Molière tous ces idiomes typiquement étasuniens quand nous autres Français pataugeons dans une maîtrise laborieuse de la langue anglaise. Le tout dernier exemple vivant du raisonnement nous vient du groupe méconnu au nom abscons, Population II, dont le dernier effort en date relève du petit miracle. Disque aussi génial que barré, « Electrons libres du Québec », qui porte décidément bien son nom, ravive le fantôme de Soft Machine, et le tout en Français, svp. Excusez du peu ! Disque loufoque et complètement dingue ce nouvel album est un exercice de style de haute voltige psychédélique entre guitares acides, saturées à la limite de l’expérimentation punk/garage d’une agressivité folle (« Tô Kébec »), rythmique menée tambour battant (c’est le cas de le dire) au sens du groove acéré (« Beau Baptême ») tout en ruptures brusques et coupes franches. Un grand huit entre accalmie et tempête qui donne le tournis. La déclinaison scénique s’annonce dantesque !

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dimanche 1 octobre 2023

Dirty Deep : « Trompe L’œil »

 


Après un album acoustique (« Foreshots », 2020), Dirty Deep fête son retour « électrique » comme le proclame le dossier de presse. Certes les guitares sont de sorties pour ce nouvel effort, produit par François « Shanka » Maigret (ex-The Dukes, No One is Innocent) mais sur un mode différent. Evoluer sans trahir le son qui les a défini jusqu’à maintenant, telle est la problématique au cœur de cet album qui l’art d’évoluer en « Trompe L’œil ». Ainsi si on retrouve les fondamentaux du groupe, le blues (« Hipbreak III »), le folk (« Don’t Be Cruel ») et le rock garage, ces différentes influences parsèment l’album plus qu’elle le définisse. En d’autres termes il s’agît là de l’effort le plus pop du groupe (« From Tears », enluminée d’un surprenant arrangement de cordes sortant de l’ordinaire), flirtant avec le psyché ("Donoma") qui reste à l’occasion une bombe à décibels (« Shoot First », « Hold on Me »). Une réussite.

En concert le 2/10 à La Maroquinerie.

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vendredi 29 septembre 2023

BlauBird, Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme, 28 septembre 2023.

Alors que son dernier album, « Le Ciel est Partout » fêtera bientôt (le 18 novembre) son premier anniversaire, Laure Slabiak, BlauBird, défend inlassablement le répertoire de l’album sur scène. Nous la retrouvons donc ce soir, une date de prestige dans le cadre du sublime Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme, et, une fois n’est pas coutume, accompagnée d’un groupe au complet dans lequel on retrouve le fidèle Michel Schick (clarinette, clarinette basse), son mari Olivier Slabiak (violon) et le saxophoniste Rémi Fox (on a au passage une chaleureuse pensée pour l’accordéoniste Ivica Bogdanic, rentrée en catastrophe en Serbie pour urgence familiale). Les concerts au sein des musées ont toujours quelque chose d’un peu impressionnant, ce n’est pas rien de traverser cette immense cour absolument sublime dans le soir couchant, puis de pénétrer au sein du musée et de cheminer au sein de ses murs en vieilles pierres blanches où sont accrochées œuvres et photos avant de finalement atteindre l’auditorium, savant alliage de murs en pierres blanches et de bois. Un cadre peu habituel et prestigieux qui semble avoir inspiré la chanteuse et ses musiciens. Le répertoire est ainsi revisité pour l’occasion, du Kaddish d’ouverture, une prière pour les défunts dans la religion juive, seule pièce chantée en hébreu, aux chansons de l’album aux envolées Klezmer appuyées par les clarinettes et le violon. Ce dernier instrument apporte une réelle plus-value, déjà parce que BlauBird est rarement accompagnée du violon sur scène et ensuite grâce à la sensibilité d’Olivier et à l’émotion procurée par son jeu. Au piano ou derrière son magnifique micro vintage, Laure est égale à elle-même, théâtrale et lyrique, toujours sur le point de chavirer sous l’émotion de ses textes. Elle bouge suivant le rythme de la musique avec grâce et élégance, le mouvement de ses bras évoquant les ailes d’un oiseau sur le point de s’envoler. Sa voix plane, traversant les langues : français, yiddish, arabe, allemand, espagnol et anglais, dans un voyage imaginaire en musiques. Enfin, la date aura également été atypique du point de vue du répertoire, revisitant le premier album (« Blue Bird ») ou dévoilant des titres pour la première fois sur scène (« Reste »). Pour ceux qui vont la découvrir sur scène ces prochaines semaines, de nombreux concerts sont prévus cet automne, soyez prévenus : on ne ressort jamais tout à fait indemne d’un concert de BlauBird.

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https://blaubird.bandcamp.com/album/album-le-ciel-est-partout-2022





jeudi 28 septembre 2023

Demian Dorelli, Sunset Sunside Jazz Club, 26 septembre 2023.

Après plusieurs tentatives en groupe, le pianiste mi-Italien/mi-Anglais, Demian Dorelli était apparu sur nos platines, il y a environ deux ans, avec un premier album solo consacré au répertoire de « Pink Moon », le classique signé Nick Drake. Le voici de retour, et pour la première fois sur scène à Paris, avec son nouvel effort, « My Window », regroupant cette fois-ci des compositions originales. Il y a, dans la présence de ce pianiste à la virtuosité douce, quelque chose relevant du sacré. Les gestes sont calculés, ses mains se déplacent le long des 88 touches avec un sens du déplacement et du débit très précis. La musique laisse de la place au silence et de l’espace entre les notes. Tout le contraire d’un déferlement, la musique respire et le temps s’arrête. L’émotion bat son plein. En fin de set, Demian Dorelli nous a réservé un véritable cadeau, pas moins de cinq pièces reprises chez Nick Drake, en version instrumentales. Un don tant il est rare de voire le regretté chanteur/guitariste repris sur scène. Une bien belle soirée.

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Grant Haua, Jazz Club Etoile Le Méridien, 23 septembre 2023

Guitariste à la virtuosité unique en son genre, le Néo-Zélandais Grant Haua était sur la scène du Jazz Club Etoile en ce samedi soir. Le set débute par quelques titres acoustiques joués en solo. Le musicien se distingue par un jeu très rapide, sur un tempo élevé, et une battue des cordes uniques où les arpèges s’entremêlent aux accords. Le tout donne quelque chose d’assez funky, relativement impossible à reproduire à la guitare pour le commun des mortels. Aussi, même s’il s’exprime assez souvent de la sorte, en solo acoustique, on ne peut le confondre avec un chanteur folk tant son style est loin de la ballade. Plutôt une randonnée en terrain hostile et électrique comme le prouve le reste de la soirée où Grant et rejoint par Neal Black et son groupe qui jouent à la perfection le rôle du backing band. Une occasion unique de voir l’artiste s’exprimer en groupe tant l’éloignement géographique fait qu’il est difficile de le faire voyager avec ses musiciens. L’occasion également d’exhiber sa magnifique guitare Gibson SG aux couleurs psychédéliques. Grant semble galvanisé par la présence de ses acolytes et le set au fort goût électrique penche définitivement plus du côté rock, que blues, de l’équation. Une patate qui se sent particulièrement dans le chant où la débauche d’énergie est conséquente et qui ne s’arrêtera pas, même après l’entracte entre les deux sets, débuté également en solo. Une belle occasion enfin de découvrir son répertoire d’avant la signature avec Dixiefrog, assez méconnu par chez nous.

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samedi 23 septembre 2023

Denis Agenet & Nolapsters : « Peace Of Land »

 


Ancien membre des Bad Mules, Denis Agenet possède la particularité d’être à la fois batteur et chanteur, une rareté dont il a su tirer profit pour ce premier album en bien belle compagnie (Sax Gordon Beagle, Arnaud Fradin, Nico Wayne Toussaint…) Conçu comme un hommage au label NOLA et au rhythm’n’blues néo-orléanais des années 1960, le groupe a tout d’abord sorti un EP de reprises en 2018 avant de passer à la vitesse supérieure, de manière assez spectaculaire, avec cet effort de tout premier plan, composé de chansons originales. Ce que l’on retiendra avant tout de ce disque c’est la virtuosité du geste de Denis, au grain de voix légèrement éraillé, la petite cassure soul au fond de la gorge, propre à faire chavirer l’auditeur, mais aussi son habilité derrière la batterie aussi à l’aise dans le groove soul que le swing jazz. Car on aime aussi l’album pour sa variété de climats, d’ambiance de l’intimité acoustique (« The Beautiful Sad Song ») au jazz en grande formation (« My First Christmas Alone »), le feeling blues habitant l’ensemble, d’un petit lick d’harmonica ici ou d’une guitare slidée là, finissant d’emporter l’adhésion générale.

En concert le 23/09 au Triton

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dimanche 3 septembre 2023

Grace Potter : « Mother Road »

 


Le constat est forcément désespérant. Après une vingtaine d’années de carrière, Grace Potter, une des plus grandes chanteuses rock en activité à l’heure actuelle, reste cantonnée à l’anonymat. Le postulat n’est pas exagéré, Grace Potter, également organiste B3 de haute volée, possède cette petite cassure irrésistiblement soul dans le fond de la gorge et une énergie débordante, autant de caractéristiques qui la rapprochent de Janis Joplin. Certes, nouvelle Janis, l’argument est éculé, mais, en l’espèce, ce nouvel effort voit la chanteuse en forme olympique prête à tout casser, et à faire succomber à son charme vocal n’importe quelle oreille qui aura la bonne idée de se poser sur son album. Un disque où folk-rock, soul et blues côtoie le funk, le tout dans une ambiance road-movie, guitares débridées à l’appui, qui fleure bon l’Amérique, le groove sur les autoroutes poussiéreuses et les cactus. Dans le genre, il n’y a guère que les Black Crowes qui aient fait mieux ces trente dernières années.

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samedi 2 septembre 2023

Kendra Morris : « I am What I am Waiting For »

 


Apparue sur la scène soul new-yorkaise des années 2000, Kendra Morris aurait pu se glisser sans mal dans l’esthétique vintage prônée par les labels Daptone et consorts. Un rapport au temps, comme le suggère la pochette où la chanteuse pose avec une pendule géante, qui domine la scène musicale où le modèle des années 60/70 est reproduit à l’infini. Il y a certes un peu de cela dans la démarche de la chanteuse mais ce nouvel effort la voit sortir de sa zone de confort avec un bonheur certain. A première vue le disque se présente sous la forme d’un album soul classique gorgé de groove (« Dominoes ») et de feeling. Mais en s’acoquinant avec Torbitt Schwartz (moitié du groupe hip-hop Run The Jewels) qui coproduit l’album et a participé à son écriture, la chanteuse est décidée à faire passer sa musique à un niveau supérieur. Car derrière l’écrin soul classique, se cache des arrangements judicieux, beaucoup plus contemporains, qui voient cohabiter tradition et modernité (« Special » ; « Still Spinning »). D’autant plus que l’album se révèle au final très varié entre pop rock (« The Door »), exotica 21ème siècle (« All Your Jokes ») et reggae/dub. Un ensemble varié rendu cohérent par le chant charmeur et une production au cordeau.

En concert le 4/10 au Pop Up

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vendredi 1 septembre 2023

Scott Hepple and The Sun Band : « Ashes to Wildflowers »

 


Faisant fi, du temps, des modes et même de sa localisation géographique (Newcastle, UK), Scott Hepple and The Sun Band sort son premier album au psychédélisme bon teint. En effet, peu de choses dans ce premier effort évoquent Newcastle et son ciel gris. Par la grâce de ses mélodies, Scott Hepple nous embarque dans un trip psychédélique californien fantasmé dans le San Francisco des années 1960 ou, du moins, dans l’idée que s’en fait le chanteur, comme le souligne le titre de l’album en forme d’éternel recommencement. Ainsi, l’album se révèle un hommage à cette scène où se bousculent les références aux cavalcades électriques de Neil Young en compagnie du Crazy Horse (« Nobody Else (Is Gonna Do It For You) » ; « Leisure Cruise ») ou au Brian Jonestown Massacre (« Letting Go », « Warm Night »). Alors que quelques pistes à l’électricité plus abrasives (« Caligula ») sont à rapprocher du rock garage. C’est donc entre ces extrêmes, formant une sorte d’arc partant du folk psyché (« Spirit Animal » ; « Hair of The Dog ») pour arriver au rock déglingué, que Scott Hepple réussit à trouver une voix personnelle, inspirée mais sans être vampirisée pour autant par des ombres tutélaires envahissantes. Les chouettes mélodies et le timbre agréable et haut perché du chanteur font que c’est un excellent moment qui est passé à l’écoute de l’album, une sorte de classique immédiat intemporel qui enlumine l’automne 2023 comme il aurait pu illuminer celui de 1973.

Sortie le 22 Septembre.

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mercredi 30 août 2023

Rock en Seine, 25, 26 et 27 Août 2023.


The Big Idea (c) Victor Picon

Bertrand Belin (c) Louis Comar

Viagra Boys (c) Louis Comar


Pogo Car Crash Control (c) Victor Picon
Vendredi 25 Août.

The Big Idea, contrairement à ce que son patronyme laisse supposer, n’a pas eu une bonne idée mais plusieurs ! Déjà pour commencer, celle d’enregistrer son nouvel album, en mer, sur un bateau. Ensuite, les Rochelais sont sont tous d’excellents musiciens s’échangeant les instruments. Il en résulte une prestation inclassable commencée sans guitare (hélas nous avons raté les premiers titres) mais avec trompette, harmonica, clavier, percussions latines et batterie et terminée par un chaos de quatre guitares en plus de la section rythmique, de la pop psyché au rock brut de décoffrage. Inclassable, intriguant mais surtout brillant ! Un petit tour pour apprécier la chanson pop de Bertrand Belin sur la grande scène, qui de loin ressemble un peu au Bowie cheveux longs des années 90, qui a quelque peu musclé son jeu pour le festival, un festival de synthés hypnotiques, quelques guitares et une rythmique solide (xylophone compris). Place ensuite à un sacré poids lourd venu de Suède, les Viagra Boys (endeuillés par la disparition récente de leur guitariste) et toujours mené par le charismatique Sebastian Murphy, un américain exilé, qui monopolise l’attention par son corps intégralement tatoué (enfin presque) et qui assume sans complexe aucun sa bedaine naissante. Mais musicalement parlant c’est du punk, lourd, très lourd, aux guitares dévastatrices sur une rythmique en béton armé. La basse saturé galvanise (cf. « Sports ») le saxophone (parfois baryton comme chez Morphine) et les synthés analogiques apportent fraîcheur et originalité aux compositions. Bref en un mot c’est une claque monumentale que les Viagra Boys ont donné au festival. Dans le même ordre d’idée, on termine avec les Pogo Car Crash Control, dont le son a évolué progressivement du punk au métal pour atteindre une sorte d’hybride parfait aux paroles particulièrement bien senties et, au passage, on, suivant les conseils du groupe, « fait des doigts » (ça fait du bien comme ils disent). Energiques et sulfureux. En sus, le guitariste du groupe a réalisé une première, celle de surfer dans le Parc National de Saint-Cloud, sur une authentique planche de surf porté à bout de bras par le public chaud patate.


Parlor Snakes (c) Olivier Hoffschir

Samedi 26 Août.

On suit les Parlor Snakes depuis longtemps et on a souvent pensé que le groupe se jouait, avec maestria, de la retenue faisant longtemps monter la pression ce qui finissait par créer cet hypnotisme particulier au groupe. Un caractéristique que le batteur du groupe, contrairement à son prédécesseur, semble décider à bousculer dynamitant les compositions de breaks ravageurs qui, mis bout à bout, finissent par créer un sacré tour de grand huit. Peter, le guitariste, semble quant à lui décidé à changer d’approche, à travailler le son plus que d’habitude et exhibe, sur un titre, une sublime Vox Phantom orange. Au chant et aux claviers, Eugénie, égale à elle-même, charismatique et émotive, charme le public de sa voix particulière, un peu aiguë. Une prestation solide et un peu isolée de la part d’un groupe sans actualité immédiate, en compensation de l’annulation du passage prévu l’an dernier qui devait clôturer la précédente tournée du groupe, mais qui a permis de découvrir de nouvelles compositions en prévision de l’album prévu pour l’an prochain. Nous devrions donc les retrouver bientôt.


Altin Gün (c) Victor Picon

Place ensuite au psychédélisme débridé des Hollandais/Turcs d’Altin Gün où les giclées de guitares acides cohabitent avec cet orientalisme propre au groupe et ces sons disco kitch venu des synthés analogiques. Le groove entre percussions, batterie, et une basse particulièrement bien tenue est irrésistible et il ne faut pas très longtemps avant que la fosse ne se transforme en discothèque à ciel ouvert, propulsant le public dans l’Istanbul des années 70. Ça danse un peu partout ! Festif, psyché et ensoleillé.


Tamino (c) Olivier Hoffschir

Lui aussi venu du Nord, la Belgique, et d’origine Égyptienne, Tamino fait preuve d’un magnétisme rare. Depuis le début de sa carrière les comparaisons avec Léonard Cohen ou Jeff Buckley abondent et font sens selon qu’il joue d’une guitare classique ou électrique. Mais il serait trop réducteur de placer le chanteur sous l’ombre tutélaire, et envahissante, de ces deux géants. Car Tamino possède un univers bien à lui, un peu mélancolique, souligné par le violoncelle, et aussi teinté d’orientalisme (cf. l’oud dont il joue très bien) même s’il a choisi de chanter en anglais. Autre particularité, cet instrument bizarre, une basse à deux cordes jouée à l’archet, qui teinte la musique d’un onirisme unique. Un artiste habité.

Un peu à part dans le grand cirque de Rock en Seine, la Scène Île-de-France, la seule sous chapiteau et présentant une jauge réduite, visant à recréer l’ambiance d’une petite salle, est réservée aux groupes débutants de la région. C’est aussi l’endroit où il fait bon traîner pour multiplier les découvertes et cette année ne fera entorse à la tradition avec le formidable trio Ditter. Jeune et frais, le groupe, charismatique et enthousiaste, pratique une électro fortement teinté de rock’n’roll et joue parfaitement d’une complémentarité avec une basse énorme, teinté cold wave et d’une guitare débridée. Boite à rythme et sonorités électro apportent une dynamique festive, là aussi ça danse et saute beaucoup, alors qu’un titre joué en configuration basse et deux voix (un truc rarement vu avant) démontre qu’avant toute chose, un songwriting solide est à la base de tout. On attends un premier EP bientôt.

Dimanche 27 Août




Gaz Coombes (c) Louis Comar

Snail Mail (c) Louis Comar

On commence avec une prestation très solide de Gaz Coombes, qui sur scène s’est donné les moyens de ses ambitions. Saxophone, choriste, batteur jouant volontiers aux balais, la prestation de l’ex-leader de Supergrass est marqué d’un sceau à la fois classe et intemporel. Le répertoire est à l’avenant entre songwriting classieux et giclées acides psychédéliques. Petite déception ensuite avec la chanteuse Snail Mail, précédée d’une réputation élogieuse, dont le post grunge manque de variété donnant cette impression lancinante d’une même chanson jouée en boucle. Place ensuite à une énorme claque, celle des Irlandais de The Murder Capital (découverts ici même il y a quelques années) qui ont évolués depuis le post punk des débuts vers un son plus atmosphérique mais toujours marqué par ces attaques d’une violence inouïe et des pattern de batteries proches de Killing Joke. Coup de cœur du week-end à égalité avec les Viagra Boys. La prestation des Australiens Amyl & The Sniffers sur la grande scène commençait plutôt bien, charisme de la chanteuse, une énergie de tous les diables. Hélas, notre Iggy en bikini s’agite plutôt en vain, problème d’écriture, manque de variété dans les compositions, une fois encore le concert tourne en rond. Le gang Australien, pourtant fort d’un excellent album ne tient pas la distance, hélas. Une averse plus tard, on retrouve les portés disparus depuis 15 ans, Be Your Own Pet, qui reviennent avec un troisième album tout juste sorti sur Third Man Records, le label de Jack White. Une excellente prestation, énergisante, excitante, sulfureuse, du groupe garage qui, certes, fait beaucoup de bruit mais, surtout, fait honneur à des compositions d’excellente facture. De quoi bien terminer le week-end.


The Murder Capital (c) Louis Comar

Amyl & The Sniffers (c) Louis Comar

Be Your Own Pet (c) Victor Picon