jeudi 30 novembre 2023

Batlik : « Numéro 13 »

 


Au fil des treize albums sortis tout au long de son parcours, long de deux décennies, Batlik aura réussit à mettre au point une formule en tous points fascinante. Que d’échos résonnent dans ses guitares précieuses ! Tout d’abord il y a chez Batlik un amour des mots, sans érudition ostentatoire, une recherche de la formule juste, de la chanson qui plonge l’auditeur dans un abîme d’émotions. Un genre bien trop réducteur pour l’artiste qui se garde bien de rentrer dans une case en particulier. Une sorte de tension sous-jacente anime sa musique, perceptible dans chaque geste. Dans ses arpèges de guitares balancés avec minutie, dans la batterie dont le coup de fouet réveille l’auditeur, dans les cuivres parsemés ça et là qui nous transportent en plein désert, une poignée de sable sonore balancée à nos oreilles (« VV » ; « Baiser »). Chez Batlik on peut entendre, au choix, du folk, du blues, du rock ou de la chanson. Chaque genre est abordé par un prisme personnel, qui n’appartient qu’à lui. Le rendu est unique en son genre et atteint ce but rare, la musique au-delà du style et une ambiance qui finit par prendre à la gorge. Ce nouvel album est annoncé comme son dernier. Il va nous manquer.

En concert le 15/12 à La Maroquinerie.

https://www.facebook.com/batlikoff/




dimanche 26 novembre 2023

Jim Jones All Stars, Petit Bain, 25 novembre 2023

 

C’est peu dire qu’il nous avait manqué ! Forcé au renouvellement après la pause forcée due aux confinements l’Anglais Jim Jones nous revient avec un nouveau groupe les All Stars. Une transformation habituelle pour le chanteur, ancien leader des Thee Hypnotics, Black Moses, Jim Jones Revue et Jim Jones & The Righteous Mind. Et encore une fois, il s’agît pour Jim Jones de s’approprier l’histoire (cf. les nombreuses reprises qui ont émaillées le set) mais aussi son histoire personnelle reprenant en public le répertoire de la Jim Jones Revue (reprise mortelle de « Burning your house down ») pour la première fois depuis la mise à l’arrêt du groupe il y a une dizaine d’années maintenant. Côté musiciens on retrouve dans cette nouvelle formation l’inamovible Gavin Jay, ancien bassiste de la Revue et de Righteous Mind et Elliot Mortimer (ex pianiste de la Revue), Chris Ellul (le batteur de The Heavy, absent ce soir sur scène) et deux saxophones (contre trois sur l’album) ainsi que le guitariste Carlton Mounsher. Un sublime album, « Ain’t no peril » vient de sortir que le groupe défend sur scène avec conviction ce soir. Dès le premier titre on est estomaqués, scotchés sur place, par la puissance de la batterie et des guitares. Le bassiste Gavin Jay envoie des lignes énormes tout en gesticulant dans tous les sens, il est à l’évidence en très grande forme. Quant à Jim Jones, ce dernier hurle toujours aussi bien avec les années. Parti sur des bases aussi fortes, le soufflé pourrait retomber aussi vite. Il n’en est rien car à la puissance sonore, s’est adjoint un geste musical, plein de swing et de feeling, de très grande classe. C’est précisément là que se situe l’apport du piano et des deux saxophones. Modérer la puissance par la musicalité. Nous sommes ainsi passés par tous les états au fil de la soirée. Une véritable leçon de rock’n’roll.

https://www.facebook.com/JimJonesAllStars/

https://jimjonesallstars.bandcamp.com/





samedi 25 novembre 2023

Laudanum : « As black as my heart 4 : 1»

 


Après une décennie d’absence, Matthieu Malon (chanteur auteur et compositeur très attachant par ailleurs entre pop rock et chanson) réactive son projet électro Laudanum. Un retour en très grandes pompes pour l’artiste dont le quatrième album se divise en trois parties. Les deux premiers volumes sont sortis respectivement en septembre et novembre, le dernier arrivera au mois de janvier. Trois albums donc faisant honneur au patronyme de l’auteur. En effet, apparu au 16ème siècle, le laudanum est une teinture alcoolique d’opium, aux effets particulièrement addictifs. Un adjectif qui convient à merveille à la musique de Laudanum. Seul derrière ses machines et avec l’aide d’une pléiade d’invités, Laudanum met au point une toile, semblable à celle d’une araignée, laquelle ne manquera pas de scotcher l’auditeur. On oserait presque parler de psychédélisme moderne si ce n’était la tonalité relativement dark (cf. le titre) de l’ensemble. Tout est affaire de rythme, que celui-ci soit imprimé par une vraie batterie (Philippe Entressangle) ou une boîte à rythmes réglée à la perfection (cf. « ReZisTanZ ») qui fait vriller les oreilles. La tonalité synthétique, parfois agrémentée de guitares électrisantes (« Howl in the dark »), est assez sombre et proche des années cold-wave, la décennie 80 (The Trophy Room ») ou plus dansante (« I want the horizon ») enveloppe le tout d’un voile hypnotique aussi entêtant que persistant. C’est un fait : l’écoute hante longtemps après la fin du disque.

En concert le 27/11 (Petit Bain)

https://www.facebook.com/welovelaudanum/





jeudi 23 novembre 2023

BlauBird, Manufacture Chanson, 20 novembre 2023

A la fois fidèle à son univers mais en constante évolution, BlauBird n’a de cesse de nous surprendre. Ainsi son retour à la Manufacture Chanson, pour un set complet, le premier depuis longtemps après une longue série de showcases et de premières parties, la voit accompagnée d’un nouveau musicien, Nicolas Beck, au tahru. La connaissant, on s’imaginait avoir affaire à une improbable viole scandinave d’un siècle passé. Et non, absolument pas, le tahru est un instrument récent apparu entre les années 1970 et 1980 dont la sonorité rappelle le violoncelle. Intrinsèquement mélancolique, le son du tahru s’accorde à merveille à l’univers de BlauBird. Sa musique nous touche autant, surtout sur scène, car elle nous ramène à quelque chose de foncièrement essentiel : la vie, la mort, l’absence. On l’a maintes fois répété, et le phénomène se renouvelle à chaque concert, sur scène, BlauBird nous émeut aux larmes. Le visage tourné vers le ciel, les yeux gonflés, alors que les notes s’échappent du piano, à l’évocation de chers disparus (son grand-père, la chanteuse Barbara), l’émotion nous gagne une fois encore. Et pourtant le concert du soir révèle de nombreuses surprises, exhumant des titres peu joués jusqu’alors (« Daddy » extrait du premier album) ou à l’occasion d’un sublime duo folk avec Lonny, dans une configuration guitare classique/voix assez rare, leurs deux voix s’harmonisant à merveille. Sublime soirée.

En concert le 11/12 à la Manufacture Chanson

https://blaubird.com/

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dimanche 19 novembre 2023

Great Lake Swimmers : « Uncertain Country »

 


Débuté il y a 20 ans avec une approche folk rustique, avec des albums enregistrés dans des églises et autres improbables silos à grains du siècle dernier (en dignes héritiers des Cowboy Junkies), les Canadiens prennent une nouvelle envergure avec ce nouvel effort. Un changement de direction qui les voit s’éloigner, un peu du folk pur et dur, pour mâtiner leurs guitares acoustiques (on ne se refait pas totalement) d’un soupçon de pop. Ainsi le son de ce nouvel album est ample, avec de l’écho, arrangé avec des claviers et des guitares électriques, et une rythmique qui pulse à rythme d’enfer (« Riverine »). Loin de nager en eaux troubles, le groupe joue la sécurité et alterne les morceaux intimistes basés sur une émotion vive véhiculée par la voix de Tony Dekker et chansons plus enlevées (« Swimming like flying ») qui devraient logiquement faire un tabac sur scène. Les véritables pépites se trouvent, à notre humble avis, dans la première catégorie (« I tried to reach you » ; « Moonlight, stay above » ; « Quiet before the storm ») mais l’ensemble, d’excellente facture, constitue une sublime virée au pays des grands lacs.

En concert le 4 décembre à La Boule Noire

https://greatlakeswimmers.com/

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https://greatlakeswimmers.bandcamp.com/




samedi 18 novembre 2023

Logan Ledger : « Golden State »

 


Incarnant une time capsule idéale, par la seule grâce de sa voix, le jouvenceau Logan Ledger nous propulse dans les années 1950 avec ce deuxième album. Un idéal fantasmé fait de country, de folk et de rock’n’roll des pionniers. Et ce ton si particulier de la voix trouvé par l’artiste, finalement autant crooner que rocker. Le numéro de charme peut commencer et il dure 10 plages durant, soit autant de chansons, toute d’une qualité superlative et marquées du sceau de l’élégance, batterie aux balais, swing détendu et laid-back : voici l’album idéal pour roucouler les longues nuits d’hiver en rêvant au printemps et à l’été à venir. La bande son du soleil couchant sur la nature verdoyante. Qu’il est doux de visiter en musique ce « Golden State » rêvé. Une pépite !






jeudi 2 novembre 2023

Gurl : « Maybe we’re not kids anymore »

 


Le tout jeune power-trio sort son deuxième EP en à peine trois ans d’existence. C’est peu dire que les choses vont vite pour Gurl ! Comme décidé à ne pas perdre son temps, le groupe fonce pied au plancher, toutes guitares dehors, tout en prenant d’admirer les bas-côtés de l’existence. Peut-être que nous ne sommes plus des enfants songent-ils en tirant de la sentence une petite collection de chansons, pas tout à fait mélancoliques mais assez énergiques, dont la dimension électrique est contenue. Surf music, rock garage et grunge cohabitent, en toutes circonstances le trio ménage son aspect mélodique. La dernière plage prouve également que le trio est aussi très habile en acoustique. Une affaire à suivre.

https://www.facebook.com/rocknguurl/




mercredi 1 novembre 2023

Jean-Philippe Goude : « Le salon noir »

 


Alors que n’a pas tout à fait sonné l’heure des bilans de fin d’année, c’est pour bientôt, l’un des événements marquants aura certainement été le retour dans les bacs de Jean-Philippe Goude après quinze ans d’absence. Compositeur aux accents classiques, ce dernier signe un retour des plus ambitieux avec un double album pantagruélique contenant 19 pièces. Un effort colossal, dont le titre est inspiré du site préhistorique de la Grotte de Niaux (sise en Ariège) : le salon noir qui orne la pochette. Un salon que Goude se fait fort de nous faire visiter en musique, usant à merveille du piano mélancolique (« La Rage »), étrange lorsque ledit instrument est préparé (« Deci-delà » ; « Tomber dans les fragments ») ou des cordes stridentes (« Même les étoiles »), mettant ainsi en harmonies mélancolie et autres angoisses nocturnes (« J’habite une blessure »). Entêtante, obsédante, l’œuvre impressionne par sa grandeur, sa grandiloquence, digne d’une bande originale de Bernard Herrmann pour Hitchcock. Un sentiment encore surligné par les textures sonores concoctées par le compositeur (dont il est également friand), contrastant avec l’esthétique classique de l’ensemble. La musique happe littéralement l’oreille de l’auditeur pour mieux lui en faire voire de toutes les couleurs. Ecouter cet album est comme monter dans un ascenseur émotionnel faisant passer par tous les états. Enfin, et il est important de le souligner, l’album signe la rencontre de Goude avec un instrument inattendu et jusqu’ici peu utilisé dans l’univers de Goude : la voix. Celle du contre-ténor Paulin Bündgen que l’on retrouve sur 8 plages incarnant ces différents états d’âme. Sans doute la bande originale idoine pour l’automne et l’hiver.

https://www.facebook.com/jeanphilippe.goude