J’ai l’intime conviction que personne ne met un pied sur scène la fleur au fusil. Quelque soit le niveau auquel on joue, que ce soit pour dix potes, une fille (encore pire) ou plusieurs personnes, on monte sur scène la peur au ventre, la boule à l’estomac et les mains moites, ce qui est très gênant car après elles glissent sur le manche de la guitare et le médiator vous échappe des doigts…
Cette année comme tous les ans, je suis passé de l’autre côté de la scène, une fois n’est pas coutume, à l’occasion de l’audition de fin d’année de la petite MJC de banlieue où je prends mes cours de musique.
Afin d’éviter au mieux les inconvénients ci-dessus évoqués, j’ai l’habitude de me concentrer sur le premier geste : le premier accord à jouer, la première note, le reste viendra tout seul. La musique, c’est comme un train, une fois à bord, il n’y a plus moyen de descendre avant sa station, ça défile, il faut suivre le rythme.
On a donc commencé par « le crocodile » un duo à deux batteries dont l’une est jouée par votre serviteur, je n’en parlerai pas plus avant, je me suis planté, l’autre mec s’est planté aussi, le son était mauvais, un désastre… Ca été par contre beaucoup mieux sur « Summertime blues », la reprise d’Eddie Cochran, un standard du rock n’roll où j’ai également officié comme batteur. Laurent, le prof, me tape amicalement sur l’épaule : « t’as assuré mon pote, t’étais bien dedans », moi un peu modeste, un peu incrédule aussi : « C’est vrai ? ». On a ensuite enchaîné avec « Doctor, Doctor » une vieille scie hard-rock/blues des années 70 du groupe UFO, il n’y a qu’Alain, le prof de guitare pour aller dénicher des trucs pareils ! Néanmoins, je suis quand même assez fier depuis que j’ai lu quelque part que Robert Vennum, des BellRays, cite régulièrement UFO, comme une des principales influence de son groupe. Y’a pas à dire, ça quand même de la gueule ! J’ai ensuite délaissé un instant mes partenaires dans le crime du jour, le temps qu’ils jouent (sans moi), « Seven Nation Army » des White Stripes. J’en profite pour souffler cinq minutes, il fait une chaleur étouffante dans la salle, le temps est très lourd, il n’y a pas un souffle d’air, je suis complètement en nage et je m’essuie comme je peux.
Ca été ensuite le bouquet final, les trois saxophones sont venus nous rejoindre pour le dernier morceau « Mercy, Mercy » une reprise de Joe Zawinul (Weather report) un grand musicien de jazz qui nous a quitté il n’y a pas très longtemps et auquel Aldo, le prof de sax a rendu un bel hommage. J’avoue, j’étais un peu en panique quand j’ai vu les cuivres débarquer, vu qu’on n’avait jamais répété ensemble, ce n’était pas prévu ou alors je n’étais pas au courant. Mais bon, les gars et la fille étaient super sympa et au final notre affaire a plutôt bien roulé, bien swingué. Sauf que les sax, ça fait tellement de boucan, que j’entends à peine ma guitare. Ils ont vraiment assuré, et moi, c’est la première fois que je joue avec des cuivres et ça m’a fait bien plaisir, cette petite jam un peu improvisée.
Et voilà, c’est sur cette bonne note que s’est terminée l’audition de cette année. Mine de rien c’est des mois (on répète depuis fin février, début mars), des semaines et des heures à répéter les mêmes gestes, dans l’espoir de ne pas faire de connerie le jour J. Tout ça pour 25 petites minutes qui viennent de s’achever, c’est une sensation étrange. L’adrénaline est retombée maintenant, et j’ai une grande fatigue qui me tombe sur les épaules, j’ai mal aux bras, je suis complètement crevé et j’ai comme une sensation de vide. A l’année prochaine !