Intitulé « My
way home », ce nouvel album, le cinquième, scelle le grand
retour d'Eli « Paperboy » Reed. Il faut dire que
l'artiste revient de loin. Un petit retour en arrière s'impose. Deux
albums sortis en indépendant (dont l'excellent « Roll with
you », 2008) ont transformé le guitariste en nouveau petit
prodige de la soul vintage. L'industrie musicale s'intéresse alors
au musicien pour le meilleur (l'album « Come and get it »,
2010) et le pire (« Nights like this », un album raté
dans les grandes largeurs sorti en 2014). Porté aux nues puis voué
aux pires gémonies par l'industrie, Reed est alors « libéré »,
comme on dit poliment dans le milieu, de ses obligations
contractuelles après maintes promesses non tenues. Laissé pour
compte, sur le carreau, le musicien semble vidé de son inspiration.
Mais il en faut plus pour faire taire un véritable artiste. La
rédemption viendra d'un coin de rue à Harlem, entre la 125ème rue
et le boulevard Frederick Douglass, où le natif de Boston prendra
l'habitude d'encadrer une chorale formée de jeunes défavorisés
dans le cadre du « Gospel for teens program » pour des
concerts improvisés à même le trottoir. Comme un passage de témoin
pour le chanteur, lui-même formé à la Chicago Church par Mitty
Collier, une ancienne gloire soul devenue pasteur. Revigoré, Reed
retrouve le chemin, sa « way home » et se lance dans
l'enregistrement de ce nouveau disque, qui prend une importance toute
stratégique pour son auteur. Enregistré en petit comité (l'ex True
Love JB Flatt à l'orgue, Michael Montgomery à la basse et Noah
Rubin à la batterie) en quatre jours tout pile, « My way
home » retrouve la magie soul qui nous avait tant touché à
l'époque de « Roll with you ». Puisant à la source, le
gospel (« What have we done »), la soul, Reed délivre un
album intimiste, animé d'une véritable fièvre rock n'roll incarnée
par des guitares rugueuses et des vocaux au cordeau. Sur ce plan
précis Reed impressionne vraiment, se livrant corps et âme sur
chaque titre, de son chant inimitable, à plein poumons entre cri et
mélancolie. Il n'a jamais aussi bien chanté que sur ce disque. A
New York, le revival soul ne se limite pas aux labels Daptone et
Truth & Soul, aussi excellents soit-ils. Ce nouveau disque vient
en apporter la preuve magistrale. Enfin réconcilié avec sa musique,
Eli « Paperboy » Reed est de retour. Et on est heureux de
le revoir.
En concert à Paris
(la boule noire) le 3 juin et le 23 septembre 2016.
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