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Yard Act (c) Olivier Hoffschir |
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Inhaler (c) Olivier Hoffschir |
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Newdad (c) Christophe Crénel |
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UTO (c) Victor Picon |
Grandes retrouvailles au Domaine National de Saint-Cloud après deux ans de disette, pour les raisons que tout le monde connaît ! On commence le 25 août avec l’impression d’embarquer sur le ferry en direction de Dublin, tant l’Irlande est omniprésente dans la programmation de ce premier jour : Yard Act, Fontaines DC, Inhaler et Newdad. On commence avec Yard Act, excellente formation post punk à l’énergie aussi débordante que contagieuse et dotée, qui plus est, d’un grand sens de l’humour. Une excellente découverte en forme de petite mise en jambe avant le choc provoqué par la prestation à couper le souffle de Fontaines DC. L’énergie du quatuor, à grands coups de riffs de guitare addictif entraîne le spectateur dans sa folie, un concert fait de hauts, de bas et de subites montées en tension, difficile de s’en remettre… On termine cette première journée avec trois découvertes, Inhaler dont le chanteur Elijah Hewson n’est autre que le fils de Bono (U2) dont on retrouve un petit quelque chose dans le chant. Sur scène la pop rock énergique d’Inhaler assure le job inhérent à la scène d’un festival mais sans être d’une originalité folle non plus. Une question de maturation sans doute. Un peu plus loin, sur la scène Firestone, nous faisons la connaissance de Newdad, groupe éthéré, une forme de My Bloody Valentine moins expérimentale, aux compositions planantes, raffinées, menées par une basse que n’aurait pas renié The Cure ou Joy Division. La voix de la chanteuse, très mélodieuse, apporte un contrepoint bienvenu et incarne avec grâce les compositions en apesanteur du groupe. Plutôt que de supporter ce pathétique golden pit (un quart de l’espace disponible cloisonné avec des barrières et réservé aux VIP +) nous préférons nous éclater sur la petite scène Ile de France en compagnie du jeune duo électro pop UTO. Déjantée et haute en couleurs, la proposition musicale du duo enchante et hypnotise. Eux-mêmes évoquent le cycle d’une machine à laver pour décrire leur compositions qui tournent en boucle. On sent une grande complicité dans le chant, et dans le jeu de scène, ainsi qu’une énergie débordante qui emballe le public dans une sorte de transe collective. La guitare apporte une note progressive étonnamment connotée 70s dans le contexte si original et novateur du groupe, qui sortait son premier album le soir même à minuit.
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Aldous Harding (c) Olivier Hoffschir |
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The Liminanas (c) Olivier Hoffschir |
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Los Bitchos (c) Victor Picon |
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Kraftwerk (c) Olivier Hoffschir |
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Jehnny Beth (c) Olivier Hoffschir |
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DIIV (c) Olivier Hoffschir |
Sans conteste la journée du 26 août aura été la plus dense et la plus satisfaisante sur le plan musical. On commence par faire un petit coucou à Jehnny Beth en grande forme synth punk sur la scène de la cascade, ce qui constitue un bon shoot d’énergie pour le reste de la journée. Sur la controversée grande scène, le golden pit nous aura laissé un peu d’espace pour admirer la sublime Aldous Harding. Cette dernière, assise sur une chaise, la guitare folk sur les genoux, incarne un contrepoint et une présence rare dans le cadre d’un festival où les décibels font la loi, c’est beau, mélodique, inattendu (cf. la tasse à café utilisée comme une percussion) et ça fait du bien. Les New-Yorkais de DIIV (prononcez dive) ont également fait sensation. Le groupe incarne une sorte de trait d’union post-grunge où Sonic Youth devient progressif shoegaze et planant, difficile de ne pas se laisser emporter par la spirale hypnotique. En parlant de spirale hypnotique, l’enchaînement avec les Limiñanas semble tout trouvé ! En l’espèce les Catalans incarnent une sorte d’épitomé inégalable. Le groupe est en grande forme et nous transporte séance tenante dans les sixties psychédélique (les visuels diffusés en arrière plan y sont pour beaucoup). La collaboration avec Anton Newcombe a laissé des traces dans le son du groupe dans lequel on retrouve parfois un peu ce côté foutraque cher à BJM. En parlant de psychédélisme nous aimerions maintenant partager notre entrain pour les Anglaises de Los Bitchos qui ont la particularité d’être un groupe entièrement instrumental (rare dans le contexte d’un festival). Un grand carambolage de sons psyché, surf, exotica rétro futuriste où les percussions latines prennent parfois le dessus sur l’orgue et la guitare. Dommage toutefois de sombrer dans le cliché en reprenant cette vieille scie de « Tequila » mais une très belle découverte. Enfin, l’ovni du week-end aura été sans conteste la prestation (en 3D !) de Kraftwerk (des lunettes spéciales ont été mises à disposition du public). Les quatre membres du groupe sont alignés de manière robotique derrière des pupitres identiques ne laissant apercevoir que peu de chose, alors que, derrière, l’écran géant diffuse les films en 3D, parfois assez creepy lorsque la main du mannequin incarnant « The Robots » vient nous frôler le visage où lorsqu’un satellite (« Spacelab ») nous arrive en pleine poire. Incarnant un futur dystopique (« Computer Love », « Computer World », « The Man Machine ») ou une évocation de l’essor industriel du 20ème siècle (« Autobahn ») dans ce qu’il peut avoir de pire (« Radioactivity »), Kraftwerk reste indispensable un demi-siècle après sa formation. A la fin du set, chaque musicien a droit à son solo de clavier avant de quitter la scène, Ralf Hütter, le seul membre original du groupe encore en activité, quittant les lieux en dernier. Nous sommes hébétés.
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Lulu Van Trapp (c) Victor Picon |
C’est déjà samedi et la fin (pour nous) de cette édition 2022. On commence l’après-midi sous le charme charismatique de Malik Djoudi dont la proposition électro soul pop, chantée en français, constitue la bande son idéale de cet après-midi de canicule ! Un sprint pour traverser le site dans son intégralité et on a raté, hélas, le début du concert de November Ultra, chanteuse qui évolue quasiment dans son jardin (elle est de Boulogne-Billancourt) et qui a failli, selon ses propres dires « venir en pyjama ». Une idée pas si idiote que cela tant son folk dépouillé (elle est seule sur scène assurant tour à tour clavier, guitare sèche ou électrique) apaise, repose et émeut quand elle évoque le deuil, le temps d’une chanson pudique, ou convoque ses racines et le passé en chantant en espagnol. On en a des nœuds dans l’estomac. Sublime ! Enfin après tant de douceur il est temps de se réveiller et pour ça rien de mieux qu’un bon shoot de rock’n’roll déjanté en compagnie de Lulu Van Trapp. Aligné sur la scène qu’ils semblent prêts à prendre d’assaut (même le batteur joue debout) le quatuor attaque littéralement le public de ses compositions où surf music, ska et reggae se télescopent au punk garage psyché. Quel cocktail mené avec énergie par la chanteuse Rebecca qui, à peine déstabilisée par son synthé tombé en panne pendant le soundcheck (soit quelques minutes à peine avant le show) n’a pas hésité à venir visiter le public déchaîné, dans un grand nuage de poussière, à plusieurs reprises dans un grand moment d’euphorie collective, ce à quoi un festival digne de ce nom doit ressembler. Alors évidemment on aurait aimé vous parler de Tame Impala, d’Idles ou de Nick Cave, autant d’artistes que l’on adore, mais ce golden pit, sinistre, sans âme et bloquant la vue, nous a découragé d’avance. On a préféré aller faire la fête ailleurs.
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Malik Djoudi (c) Christophe Crénel |
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November Ultra (c) Victor Picon |