Ah décidément, ces chers artistes n’ont de cesse de mettre au point tout un tas de stratagèmes tous plus ingénieux les uns que les autres dans le seul but de faire parler de leur personne. Vraiment, ce petit monde du showbizness ne cesse de m’étonner. Donc dernier concept en date : « le concert en appartement ». C’est simple, l’artiste se pointe chez toi et chante pour toi et tes potes. Là, dit comme ça, c’est sympa. Dans les faits, c’est une véritable connerie. Je m’explique. Un peu plus tôt cette semaine, je reçois un mail : « X donne un concert en appart’, est-ce que cela te dit de couvrir l’évènement ». Moi : « ben oui bien sur ». C’est aussi un problème, ça, c’est que j’aime tellement la musique que je suis d’accord pour quasiment tout. Bon j’avoue, le jour où on me propose de couvrir un festival de black métal au fin fond de l’Islande en plein hiver, ok là je réfléchis à deux fois avant de donner mon accord. Mais bon, là le plan avait l’air sympa. Donc je reprends mon histoire, je retrouve l’attachée de presse et on part à la recherche du fameux appart quelque part dans le onzième arrondissement. Jusque là c’est assez rigolo, on part un peu à l’aventure, on bataille pour ouvrir la porte de l’immeuble, bref cela change de d’habitude. L’embrouille commence quand on arrive au pas de l’appartement du couple que l’on va rebaptiser pour les besoins de cet article, M. et Mme Baltringue. Ces derniers n’ont pas l’air au courant de notre venue ni spécialement ravis de nous voir. On nous mate, on nous regarde un peu de travers, l’ambiance est bobo à mort, bref le bon plan commence à puer un peu. Monsieur Baltringue (aka crâne d’œuf eu égard à son « impressionnante crinière ») commence à nous sortir les vieilles excuses : « Ah, je ne sais pas si c’est possible, on ne va pas avoir assez de place, on attends VRAIMENT BEAUCOUP de monde… ». Eh, Crâne d’œuf, déjà t’as vu la taille de ta terrasse ? C’est bon on n’est que trois ton salon ne vas pas non plus devenir la fosse du Zénith. Sur ce, l’Artiste, accompagné de son guitariste, font leur apparition, une interview est également prévue. On s’installe dans un coin de la terrasse, il fait bon, le soleil se couche ça pourrait même être agréable, mais je me sens tellement mal dans cette ambiance que je n’arrive même plus à mettre en route mon petit magneto à mini-disc. Cependant, je dois admettre que l’interview se passe plutôt bien, ils sont très sympas tous les deux et on rigole entre deux questions. Ne serait-ce qu’une crotte d’oiseau, que l’on a évité avec brio (encore une manigance de M. Baltringue, le crâne d’œuf pour nous faire dégager ?), les choses se sont assez bien passées. Mais je sens que quelque chose cloche, dans les regards. J’essaye de ne pas trop y prêter attention, je me concentre dans ma bulle, après tout j’ai une interview à mener et je tiens à ce que le boulot soit fait correctement. L’attachée de presse s’excuse un instant et, sous le prétexte d’aller nous chercher des verres d’eau, va s’enquérir de la situation auprès de Mme Baltringue (car soit dit en passant Mr et Mme Baltringue ont un sens de l’accueil tellement développé qu’ils ne nous ont même pas proposé un quelconque rafraîchissement…). L’attachée de presse, qui a été nickel du début à la fin, revient et je lui fait part de mon malaise : « Je ne me sens pas le bienvenu du tout, j’ai l’impression que l’on dérange depuis que l’on est arrivé… ». Elle m’assure alors que tout a été arrangé avec Mme Baltringue et que nous avons le droit de rester assister au concert. Bon OK, alors. Sur ce, Mr Baltringue, le Crâne d’œuf, qui n’a même pas les couilles de nous dire les choses en face, revient accompagné de l’Artiste. Cette dernière, toute contrite, est véritablement gênée aux entournures, se tortille comme une anguille et nous annonce : « Bon, je ne sais pas comment vous dire ça, mais bon, là, pour le concert ce n’est pas possible… ». Monsieur Baltringue, le Crâne d’œuf, est aux anges. L’attachée de presse bondit d’un seul coup et fulmine : « Mais on est venus spécialement pour couvrir le concert ! ». De mon côté, je ne comprends pas très bien ce qui se passe et je prends ça presque comme une bonne nouvelle, tellement j’avais envie de me casser de cette ambiance de mort. Bon, il faut savoir que dans ce milieu, les choses ne se passent jamais comme prévu. Les problèmes avec la « sacro-sainte liste » sont légions : Ah bon, il y avait aussi un pass photo de prévu ? Désolé je ne trouve pas ton nom sur la liste où deux invites, désolé mais il n’y a qu’un seul nom d’indiqué sur « la liste ». Ca arrive tout le temps, c’est classique, il faut aussi parfois faire preuve de diplomatie et de souplesse. Mais là, c’est quand même le pompon : on me propose de couvrir un concert et au final on se fait jeter comme des malpropres avant même que ledit concert ait commencé. L’Artiste trouve quand même le moyen de me dire : « Bon j’espère que tu vas quand même mettre en ligne l’interview ». Et puis quoi encore ? Après ce qui vient de se passer tu crois que j’ai envie de me prendre la tête pendant quatre heures pour tout retranscrire ? Sans parler de ce beau soleil, qui me donne plus envie d’être dehors que devant mon écran d’ordinateur… Et bien non, MERDE, il n’y aura pas d’interview et prends ça dans ton plan de com’ hyper hype !! Et c’est juste dommage, par ce que moi j’ai bien aimé ton album et ce concert, j’avais envie d’y assister. Je fais l’effort de me déplacer, de te rencontrer pour parler de toi et de ta musique et c’est comme ça que l’on me remercie ? En nous mettant dehors ? Je ne comprends pas bien la logique, ni la finalité, là ? Je me permets de te rappeler que tu es une jeune artiste qui débute, que personne ne connaît, que ton album sort bientôt et que tu as besoin de promo. Foutre dehors les gens qui s’intéressent à toi ça ne me paraît pas un bon calcul. Là, tu vois, je t’explique un truc vite fait, ta musique je n’ai plus du tout envie de la défendre…