Déjà six ans que
l'on parcours en long, en large et en travers le parc de Saint-Cloud
à la fin de l'été. La rentrée est déjà là et Rock en Seine
aussi, sous une soleil de plomb et une chaleur accablante…
Two Door Cinema Club (c) Victor Picon
Theo Lawrence & The Hearts (c) Olivier Hoffschir
The Strumbellas (c) Olivier Hoffschir
Brian Jonestown Massacre (c) Olivier Hoffschir
Brian Jonestown Massacre (c) Olivier Hoffschir
Jack Garratt (c) Olivier Hoffschir
On commence par des
retrouvailles avec une vieille connaissance Theo Lawrence and the
Hearts, que l'on avait découvert ici même avec son ancien groupe,
les Velvet Veins, qui ont d'ailleurs joué leur dernier concert à
Rock en Seine, sur la scène Île-de-France. C'était il y a deux ans
et depuis, Theo a pris le temps de laisser mûrir son nouveau projet.
Résultat, c'est avec l'aplomb d'un vieux briscard que Theo, toujours
très classe, cheveux parfaitement gominés et chemisette à
carreaux, a pris possession de la scène de l'industrie. L'artiste a
évolué dans l'intervalle, on retrouve ses influences blues/rock 60s
qui désormais se parent de nouvelles couleurs issues de la soul. La
voix de Theo s'est également métamorphosée entre-temps. Une
prestation très classieuse, hélas polluée par des problèmes de
sons et une présence trop imposante de la basse qui a tendance à
avaler toutes les autres fréquences (hélas ça ne sera pas la
dernière fois du week-end, une conséquence de la canicule). On
continue par un petit saut de puce en direction de la scène pression
live pour découvrir The Strumbellas, une formation Canadienne assez
nombreuse pratiquant un folk choral post-hippie. La présence du
violon ajoute une note originale évoquant tour à tour la country ou
le folk celtique. Assez plaisant… On continue dans cette veine
post-hippie avec nos héros Brian Jonestown Massacre. Et désolé de
le dire mais il s'agît là du plus mauvais concert donné par la
troupe menée par Anton Newcombe (on en a vu un certain nombre) qu'il
nous ai hélas été donné de voir. Pire encore, le groupe n'y est
absolument pour rien. Mais on retrouve les problèmes de son évoqués
plus avant, une présence trop forte de la basse, avalant toutes les
fréquences. Dès que ce pauvre bassiste à la malheur de frôler une
corde on n'entends plus rien, un véritable massacre (c'est le cas de
le dire). Le même problème se reproduit avec la batterie (la grosse
caisse et le tome basse). Une véritable cacophonie. On s'étonne
encore qu'Anton Newcombe, pourtant coutumier du fait, n'ait pas piqué
une crise de nerfs. On l'a déjà vu péter les plombs pour moins que
cela… Faisons ensuite connaissance avec un véritable équilibriste
du son Jack Garratt, un one-man-band d'un genre particulier entre pop
et électro. Un main sur le synthé, l'autre sur la batterie Jack
fait tout absolument tout seul et surtout, sait communiquer son
enthousiasme avec le public ! L'apparition sporadique d'une
guitare, jouée également par ses soins, ajoute une note heavy voire
bluesy aussi étonnante dans ce contexte que bienvenue. Sa voix
tirant plutôt vers la soul Jack mélange les influences pour un
résultat autant unique que personnel. Rafraîchissant. On termine
cette première journée avec Two Door Cinema Club. Le concert nous
confirme ce que l'on savait déjà, les Irlandais sont nettement plus
impressionnants sur scène que sur disque, les partis-pris de
production très FM 80s ayant tendance à gommer leur agressivité
naturelle. Le groupe trouve son équilibre entre synthés, datés, et
un son de guitare personnel qui a fait leur fortune (cf. leur synchro
très connu dans la pub). Le groupe a trouvé sa formule et la répète
à l'envi, les nouvelles compositions jouées ce soir (le nouvel
album sort en octobre) ne faisant que confirmer cet état de fait.
Efficace à défaut d'être surprenant.
(c) Victor Picon
Kaviar Special (c) Olivier Hoffschir
La Femme (c) Christophe Crénel
L7 (c) Olivier Hoffschir
L7 (c) Olivier Hoffschir
Samedi 27 Août.
On commence la
journée avec une grosse pensée pour Sharon Jones & The
Dap-Kings qu'hélas on n'applaudira pas cette année après
l'annulation pour raison de santé… L'après-midi débute par un
énorme coup de cœur pour les Rennais de Kaviar Special. Leur
prestation rageuse entre rock, garage, psyché et surf a réussi à
créer l'illusion d'une plage en pleine banlieue parisienne. Il n'en
faut pas plus pour s'attirer les vivas d'un public nombreux en plein
cagnard. Enjouée, avec ce délicat équilibre entre swing rythmique
et gros son, la prestation du groupe a durablement marqué les
oreilles de votre serviteur. Excellent ! Ce soir La Femme vous
donne du plaisir… Rassurez-vous, vous êtes bien à la bonne
adresse, La Femme (de Biarritz) étant le groupe le plus bigarré du
week-end, chevelure arc-en-ciel, bretelles tricolores, ce genre de
choses. Un univers décalé et coloré qui se prolonge au niveau du
son, la formation prenant un malin plaisir à brouiller les pistes
entre surf music, new wave et électro-psychédélisme… Il faut
imaginer quelque chose comme « Rebop » (Marie et les
Garçons) repris par les Challengers (ou inversement), porté par un
équilibre fragile entre les trois synthés et une guitare aux
interventions sporadiques mais judicieuses. Une chose est sûre La
Femme va à tout les coups nous donner beaucoup de plaisir pour de
nombreuses soirées encore… Leur deuxième album sort ces jours-ci
et on est curieux de l'écouter… C'était le rendez-vous
immanquable pour tous les kids des 90s biberonnés au grunge :
L7 est de retour ! Pionnières du mouvement riot girls, le
quatuor de punkettes vieillit bien, toujours aussi abrasif après
quelque trente années de carrière. On a bien kiffé (comprendre
headbanggé) : c'était l'heure nostalgique du week-end !
Réservée aux groupes locaux en développement, la scène
Ile-de-France, un chapiteau reproduisant le décor d'une salle de
concert, a été le théâtre de nombreuses surprises ces dernières
années (Marietta, Velvet Veins, Blackfeet Revolution etc.). Et
encore une fois c'était là qu'il fallait être pour avoir sa dose
de rock n'roll ! Le groupe s'appelle The Psychotic Monks et on
avait déjà évoqué deux de leurs Eps auparavant. Entre les mains,
jeunes mais expertes, des Psychotic Monks le rock n'roll devient
cette matière éruptive, une boule de feu explosive prête à vous
brûler les tympans et le reste. La petite demi-heure passe trop
vite, en forme de grand huit, faîte de hauts et de bas, de passages
calmes et aériens et de crashs spectaculaires, les yeux révulsés,
les cheveux en pagaille. Un grand moment !
Blues Pills (c) Olivier Hoffschir
Kevin Morby (c) Olivier Hoffschir
Gregory Porter (c) Olivier Hoffschir
Gregory Porter (c) Olivier Hoffschir
Iggy Pop (c) Olivier Hoffschir
Dimanche 29 Août.
En bon fan de rock
on attendait le moment avec impatience, la venue, toujours assez rare
de Blues Pills en dépit de la présence de l'excellent guitariste
français Dorian Sorriaux au sein de la formation. Entre psyché et
hard rock, marqué par les sixties, Led Zeppelin n'est jamais bien
loin, Blues Pills est l'un des meilleurs groupes dans le genre à
l'heure actuelle (avec les Rival Sons) dont on parle hélas assez
peu. La musicalité du groupe est extrême, la virtuosité à
l'avenant, entre attaques de guitare et séquences planantes au
clavier. L'audience est sous le charme de la chanteuse Elin Larsson,
les pieds nus, et de sa combinaison moulante. On prend ensuite nos
quartiers sur la scène de la cascade ou nous attend Kevin Morby,
une magnifique plume entre pop et folk, excellent songwriter,
héritier de Dylan. Afin de rendre le set live plus dynamique, Kevin
et son quatuor optent pour une option électrique ce qui ne change
pas fondamentalement la donne ni le pouvoir d'attraction de sa
musique. Extrêmement bien écrite, ses chansons prennent la forme de
petits bijoux indémodables gageons que sa musique vieillira bien.
Vint ensuite l'heure de retrouver une présence étonnante en ces
lieux, celle du jazzman Gregory Porter, mais un peu de swing ne fait
jamais de mal. Saxophone, piano, autant d'instruments que l'on a peu
eu l'occasion d'entendre ce week-end et qui font tous le sel de la
musique de Gregory Porter. Showman né et chanteur au timbre
impressionnant de puissance, Porter aurait dû nous combler si son
set n'avait pas été pollué par ces problèmes récurrents de
sonorisation de la contrebasse. Cette dernière avalant toutes les
fréquences et transformant la musique, pourtant oh combien subtile
et délicate de Porter, en imbuvable cacophonie. Une belle occasion
de ratée, on enrage… Dernier survivant, qui l'eut crû, du trio
formé avec Lou Reed et David Bowie, Iggy Pop a toujours la pêche et
une furieuse envie d'en découdre. Revisitant avec panache sa
carrière avec les Stooges (« I wanna be your dog » en
ouverture) ou en solo (« Lust for life », « The
Passenger ») Iggy devient une sorte de créature, animal rock
sur qui le temps n'a pas de prise. Les compositions n'ont pas pris
une ride et sont délivrées avec autant de patate qu'au premier
jour. Enfin du moins au début du show. Toujours excentrique et
prince du second degré Iggy multiplie les mimiques sur l'avancée de
scène avec une fraîcheur qui fait plaisir : « S'il vous
plaît la sécurité laissez-là monter sur scène »… En
revanche se produire torse nu à son age semble au-delà du
raisonnable… Mais tentez donc de faire entendre raison à Iggy…
Un seul regret, le répertoire de son excellent dernier album (« Post
pop depression ») est un peu délaissé au profit des vieux
tubes. Dommage même si on est toujours heureux de réécouter ces
grands classiques indémodables...
Cela devient une bonne habitude, tous les ans au mois de septembre, Chuck Sperry est de retour en France ! Avec de nouvelles sérigraphies (sur papier et sur bois) sous le bras, le véritable héritier de la scène psychédélique des sixties, inspiré par l'art nouveau et les poster rock psyché des années 1960, exposera à la galerie l’œil ouvert du 15 septembre au 2 octobre.
This is your second
record after a long break away from music and i think something has
changed in your music in-between…
Bill Pritchard :
I think that basically i came back to what i like to do which is
guitar based pop using real instruments that i like and that evokes
memories. We used real piano, horns and getting away from anything
synthsized or electronic. It's very important.
Was that an input
from your producer Tim Bradshaw on your music ?
BP : I've known
Tim for a very long time. I needed somebody to translate my musical
ideas into music. I would write the songs, get the bare bones of the
songs. The skeleton. And he would dress the whole thing with skin. I
suggest thing. For « Saturn & Co » i told him i
wanted to sound mid-sixties B-Side Brigitte Bardot. That sort of
thing. And then he goes, i understand that, let's do it ! I can
do it.
Like « A trip
to the coast », the new album is released on the Tapete Records
label which happens to have an impressive roster of 80s songwriters.
Lloyd Cole, Robert Forster...
BP : Yes, a big
collection of them (smile).
How did you got in
touch with that label ?
BP : I played a
gig in France, and Vincent Lemarchand, a bass player in the band with
me, asked me if i've got any stuff recorded. He has all my old
albums. He listened to some demos made with Tim and some friends and
he told me you've got to have this released. So i thought about it. A
german fan suggested Tapete Records so i got in touch with them. The
first label i've approached and they said yes. That is very rare
(smile). Fantastic.
Funny thing is you
often sings about France, songs like « Paname », « Mont
Saint Michel », but you don't sing in French much…
BP : « Mont
Saint Michel », i was there with my family. I was suddenly
going through a bleak period in my life. That happens sometimes in
life, you know. So i was there and it felt fantastic. Suddenly it all
made sense to me. That's why the song is there. Interestingly i did a
tour in Germany recently and i played « Rien de toi », a
song from « Parce que » wrote by Daniel Darc. I've been
singing that in french really enjoying it and i got good reactions.
In Germany ! It's really strange. I did « Tout Seul »
on « A trip to the coast ». The origin is a song by an
American band from the 60s The Fugs. « Morning morning ».
A french Canadian Richard Drouet wrote a french version, in the early
sevneties and he brought this beautiful lyrics to it. I loved it so
we did our version of it.
« Vampire in
New York » has a very surprising jazz angle, almost New
Orleans…
BP : I loved
New Orleans jazz, Dr John, i love all that stuff. I've played with
him once ! I never had the opportunity to do it. I wrote the
song on the piano. We got some french people to do the trumpets, to
get that New Orleans feel.
Do you like to fool
around in the studio while recording ?
BP : I like to
experiment especially with harmonies. I love the idea of being
spontaneous. And also lyrics. I write lyrics down but i would change
lyrical sentences depending on how it sounds. I like to play around
changing an adjective or a verb.
Do you often shop in
the « Deja vu boutique » ?
BP (laughs) :
I'll tell you a secret. The « Deja vu boutique » is
actually an hair dresser in Newcastle. I was driving and i saw the
title « Deja Vu Boutique » on the left i thought what a
brilliant thing ! So I used it. I'll send you a picture of the
Deja Vu boutique. I must take a picture of that. In the middle of the
midlands. What was the odd of that !
And what lies in the
« 50 A Holy Street » ?
BP : 50A holy
street is a place from Erfuhrt, Germany. I wrote it there i was there
with a friend.
Some songs like
« Victorious » are ambitious with a very big sound and
it's quite opposed to « A trip to the coast » that was
more intimate…
BP : We wanted
to develop our sound. And we had more of an idea of what the overall
sound was going to be because we knew we will released it. « A
trip to the coast » was written and recorded over a long period
of time without an idea of an end thing of releasing it. This time it
was very specific and that was better for working together. We had a
very good idea of what we wanted. For example we got a live drummer,
we got horns in, we used different guitars and strings. We had an
idea of what we wanted, that was the reason.
One of my favourite
on the album is « Lily ann », i thought the song has some
sort of a 60s Gainsbourg quality…
BP : Oh wow,
thank you very much ! That is a really nice thing to say.
Actually thinking
about it, it's a little like the Brigitte Bardot thing we talked
earlier…
BP : Yes
definetely. It has an very specific atmosphere like a Parisian club
in a certain period when certain people used to hang around. You
could just imagine Dani in her heyday. All the 60s style, that sort
of vibe.
The last song, « The
lamplighter » ends the album on an harder note. It reminds me
the song « In june » for the previous album.
BP : It is
strange because i had an repetitive piano beat. It was two songs put
together. The second one worked with the first one. And we build it
up, build it up and it felt like an natural conclusion to an album. I
always think of albums. 12 songs 6 songs side one, 6 songs side two.
I always think vinyl in my head. That was the natural finisher it had
to be powerful.
Did you had an
specific idea on how to sequence the songs ?
BP : I spent a
lot of time sequencing. An album is a whole, two sides. Not as much
as Carole King did with « Tapestry », she spent months.
We spent a couple of nights over it.
How does it feels
being back in Paris ?
BP : Absolutely
fantastic. I sent an instagram on my way in saying : Brilliant
Paris, why did i stayed away for so long ? It has an nice feel
to it. I was heartbroken after what happened in Le Bataclan (sad). I
had history there, i've played there years ago. I knew people who
know people who were affected by what happened. I just thaught why ?
I was just sad.
And how would you
discribe your bound with France ?
BP : I think
it's still there. I can't grow out of it !
Survivant des années
1980, Bill Pritchard est comme le bon vin, se bonifie avec le temps,
vieillit avec élégance. Après une décennie passée loin des
scènes et des studios, Bill a opéré un retour remarquable en 2014
avec un excellent album « A trip to the coast », un état
de grâce prolongé cet année avec « Mother town hall »,
un disque excellent en tout points. « Classiques instantanés »
étant les termes venant spontanément à l'esprit à l'évocation de
ces deux albums. Professeur de français dans le civil, et
parfaitement francophone, Bill a depuis longtemps noué des liens
étroits avec la France collaborant avec Daniel Darc (l'album « Parce
que », 1988) ou Etienne Daho (« Three months, three weeks
and two days », 1989). C'est donc avec grand plaisir que l'on
retrouve Bill, deux ans après une première rencontre, quelques
semaines avant de retrouver une scène Parisienne, celle du Petit
Bain, le trois septembre prochain…
Bonjour Bill, ravi
de te revoir. Donc « Mother town hall » est ton deuxième
album après un long break et j'ai l'impression que quelque chose a
changé dans ta musique…
Bill Pritchard :
En fait, je suis revenu à ce que j'aime faire, c'est à dire de la
pop basée sur la guitare. On a utilisé des « vrais »
instruments, que j'aime et qui m'évoquent des souvenirs : du
piano, des cuivres… On s'est éloigné de tout ce qui est
électronique ou synthétique. C'est très important.
Quel a été
l'apport de ton fidèle producteur, Tim Bradshaw, dans cette
démarche ?
B.P : Je
connais Tim depuis très longtemps. Je voulais quelqu'un pour
traduire en musique mes idées. J'écrivais les chansons, le
squelette et Tim arrivait pour les habiller. J'ai fait quelques
suggestions cependant. Pour « Saturn & Co » (un titre
du nouvel album, ndlr) je lui ai dit que je voulais sonner comme une
face B de Brigitte Bardot de la moitié des années 1960. Ce genre de
trucs. Et Tim disait, « Ok je comprends. Faisons-le ! »
Ce nouvel album,
comme le précédent « A trip to the Coast » sort sur le
label Tapete Records, qui a signé beaucoup de songwriters des années
1980 comme toi…
B.P : Ah oui,
Lloyd Cole, Robert Forster, il y en a toute une collection (sourire)…
Comment les choses
ont-elles commencées avec ce label ?
B.P : J'ai fait
un concert en France et il y avait ce bassiste Vincent Lemarchand
dans mon groupe. Il m'a demandé si j'avais de nouvelles chansons, ce
type possède tous mes vieux albums… Il a écouté quelques démos
faites avec Tim et quelques amis et il m'a dit : Il faut
absolument les sortir ! J'ai commencé à y penser. Et puis un
fan Allemand m'a suggéré Tapete Records. Je les ai contactés. Le
premier label que je contacte et ils me disent oui tout de suite !
C'est tellement rare (sourire) ! Fantastique !
Tu chantes souvent à
propos de la France (« Paname », « Mont St
Michel ») mais tu ne chantes pas souvent en français
(rappelons que Bill est parfaitement francophone et professeur de
français dans le civil, ndlr)…
B.P. : Le Mont
St Michel, j'y étais avec ma famille. Je traversais une période un
peu morne dans ma vie. Tu sais, ça arrive des fois… Donc, j'étais
là-bas et d'un coup je me suis senti super bien ! Soudainement,
tout cela faisait sens pour moi. C'est la raison pour laquelle la
chanson existe. Récemment j'ai fait une tournée en Allemagne et
j'ai joué « Rien de toi » une chanson écrite par Daniel
(Darc, ndlr) sur notre disque en commun (« Parce que »,
1988). J'ai chanté en Français et j'ai vraiment aimé cela. Et le
public a adoré ! En Allemagne ! Très surprenant !
Sur « A trip to the coast » j'ai enregistré « Tout
seul ». La chanson originale « Morning Morning »
(1966, ndlr) vient d'un groupe Américain, The Fugs. Un Québecois,
Richard Drouet en a fait une version française au début des années
1970 avec des paroles magnifiques. J'ai adoré, j'en ai fait ma
propre version.
« Vampire in
New York » a un angle jazz assez surprenant, presque New
Orleans…
B.P. : J'adore
le jazz New Orleans, Dr John, ce genre de trucs. J'ai même joué
avec lui une fois ! Je n'avais jamais eu l'opportunité
auparavant d'embrasser ce style. La chanson a été écrite au piano,
on a fait venir des musiciens français pour les cuivres afin de
s'approcher au plus près de ce feeling Nouvelle-Orléans.
Tu aimes tenter des
trucs dingues en studio ?
B.P : J'aime
expérimenter. Avec les harmonies. J'adore l'idée d'être spontané.
Avec les paroles également. J'écris les paroles mais je me permet
de changer un verbe ou un adjectif suivant la façon dont cela sonne.
Est-ce que tu fais
souvent tes courses dans la « Déjà vu boutique » (un
titre du nouvel album, ndlr) ?
B.P. : (rires)
Je vais te dire un secret. La « Déjà vu boutique »
c'est en fait un coiffeur à Newcastle. Je conduisais et j'ai vu
l'enseigne « Déjà vu boutique » sur la gauche. C'était
génial, alors je l'ai utilisé ! Je vais t'envoyer une photo !
Il faut absolument que je prenne cette vitrine en photo ! Au
beau milieu des Midlands, quelles étaient les chances de voir un
truc pareil !
Qui réside au « 50
A Holy Street » (une chanson du nouveau disque, ndlr) ?
B.P. : C'est à
Erfuhrt en Allemagne. J'y étais avec un ami. Le titre a été écrit
là-bas.
Une chanson comme
« Victorious » est très ambitieuse, très arrangée,
c'est une démarche très différente de « A trip to the
coast » qui semblait plus intimiste…
B.P. : On
voulait développer notre son. On avait une idée générale plus
précise sur la façon dont le disque devait sonner. Savoir que le
disque allait sortir dans le commerce a tout changé ! « A
trip to the coast » a été écrit et enregistré sur une
période très longue sans savoir ce que les chansons allaient
devenir. Cette fois on avait un objectif et c'était beaucoup mieux
pour bosser. On avait une idée très précise de ce que l'on
voulait. On a fait venir un batteur, des cuivres, on a utilisé
plusieurs guitares, des cordages différents.
« Lily Anne »
est une de mes préférées sur ce nouveau disque. Il y a quelque
chose qui me rappelle le Gainsbourg des années 60…
B.P. : Oh wow,
merci beaucoup, c'est super gentil de me dire ça !
En fait, maintenant
que j'y pense, c'est dans la lignée de ce qu'on disait tout à
l'heure à propos de Brigitte Bardot…
B.P. : Oui tout
à fait. Il faut imaginer une atmosphère particulière. Un club
parisien à une époque donnée avec une certaine catégorie de
personnes. On peut penser à Dani par exemple à sa grande époque.
Les sixties, ce genre de choses…
La chanson finale
« The Lamplighter » termine l'album sur une note plus
dure. Cela me rappelle « In June » du disque précédent...
B.P. : Elle est
basée sur un motif de piano répétitif. Ta ta ta (Il chantonne). En
fait il s'agît de deux chansons que l'on a assemblée l'une dans
l'autre. On a fait monter la sauce et cela me semblait comme une
conclusion naturelle pour un album. Je résonne toujours en termes
d'album : douze chansons. Six sur la face A et six sur la face
B. Je pense toujours en vinyle ! C'était la fin naturelle pour
l'album, elle se devait d'être puissante.
Le séquençage,
définir l'ordre des chansons, c'est un travail important pour toi ?
B.P. : Ah oui !
J'y passe beaucoup de temps. Un album c'est un tout. Deux faces. Bon
je ne passe pas autant de temps que Carole King pour « Tapestry »
(1971, ndlr) qui a duré des mois. Mais on a quand même passé
quelques nuits sur la question.
Et à part ça,
qu'est-ce que cela te fait de revenir à Paris ?
B.P. : C'est
génial, fantastique ! J'ai envoyé un message sur Instagram en
arrivant : « Paris génial. Pourquoi je suis resté
éloigné si longtemps ? ». Le feeling est très plaisant.
Tu sais j'étais dévasté après les événements du Bataclan. J'ai
une histoire avec l'endroit, j'y ai joué il y a longtemps. Je
connais des gens qui connaissais des gens qui ont été affectés par
ce désastre. J'ai pensé : « Mais, pourquoi ? ».
J'étais triste tout simplement…
Et comment tu
décrirais ton lien avec la France ?
B.P. : Il est
toujours là. Je n'arrive pas à m'en séparer. Tu vois mon lien avec
la France il est là (il sort un exemplaire du « Premier
Homme » d'Albert Camus)...
En concert à Paris
(Petit Bain) le 3 septembre 2016.
Formation
particulièrement prometteuse, les Psychotic Monks avait fait forte
impression avec un remarquable premier EP. Ce deuxième volume de
leur aventure sonore reprend les choses là où le groupe les avait
laissées.Toujours aussi efficace, le groupe joue avec entrain un
rock n'roll lourd, entêtant, hypnotique (« Paranoid/Transcience »).
Ces riffs de guitares qui tournent en boucle ont en effet de quoi
donner le tournis (« Leave it alone »). D'hier et
d'aujourd'hui, la musique des Psychotic Monks allie le rock
heavy/psyché tendance 70's à la scène stoner contemporaine. Et
quelque part, caché au fond du buisson, le blues se tient toujours
prêt à surgir et à mordre (« City of lights »). Ceux
qui iront passer le week-end à Rock en Seine seraient bien inspirés
de faire un petit tour par la scène Ile-de-France samedi soir aux
alentours de 22h00…
Auteur de deux
albums gentiment décalés, d'inspiration cinématographique
pastichant les films d'action de série B (« Soundtrack from the motion picture », 2011) ou d'horreur de série Z
(« Arcane », 2013), Los Disidentes Del Sucio Motel change
d'approche pour ce troisième effort, le premier à sortir sur le
label américain Ripple Music. En effet, le quintet strasbourgeois
s'éloigne du stoner qui a fait sa réputation, et par conséquent
des influences blues et heavy 70s, au profit d'une démarche plus
sombre, creusant encore plus profondément son sillon heavy et son
déluge de décibels. Fini de rire pense-t-on à l'écoute du disque.
Intitulé « Human Collapse », que l'on pourrait traduire
par quelque chose comme effondrement humain, l'album met en son un
monde post apocalyptique se nourrissant des crises sociales et
environnementales traversées actuellement avec un réel sens de
l'angoisse qui trouve toute son expression dans l'impressionnante
« Border », une composition phare de ce nouvel album
décidément plus post/sludge que stoner. Mais lorsque le groupe met
la pédale douce cela donne de très belles choses également (cf.
« Community », « Rebirth »). Le groupe a
soigné ses effets, chaque son de guitare semble avoir été traité
avec un soin tout particulier, travaillé au corps par une section
rythmique au taquet (cf. l'intro de « Downfall », seul
titre ressemblant un peu de près ou de loin au LDDSM d'avant). Les
tempi sont lents et chaque attaque de guitare est empreinte d'une
lourdeur hypnotisante (« Determination »). Le chant à
deux voix, qui se répondent et se complètent, parachève
l'ensemble. L'auditeur est pantois, KO pour le compte. Le quintet a
débuté en pastichant le cinéma de Tarantino et de Robert
Rodriguez, maintenant, il met en décibels l'univers
post-apocalyptique de Mad Max.
Originaire de
Belgique, Shakedown Tim And The Rhythm Revue déboule sans prévenir
et semble prêt à tout pour retourner vos enceintes. La chose
s'intitule « Hard to catch » (difficile à attraper,
ndlr) et le moins que le puisse dire, c'est que le titre est plutôt
fidèle au contenu fuyant de cet album, débordant de swing et
rebondissant dans tous les sens. Il est bien entendu question de
blues, jump et boogie mâtiné d'un soupçon de jazz ou de rhythm
n'blues. Baignant dans une ambiance rétro, le disque possède le
charme indéniable de ces albums intemporels qui ont cet étrange
pouvoir de figer calendriers et horloges. Rétro certes mais pas
nostalgique pour deux sous, grâce à la production dynamique du
Français Nico Duportal. En outre, la diversité des ambiances rend
le voyage agréable du swing survolté de « Feelin' Good »
(également présent en version longue dans les bonus) au sexy
langoureux « Take off your clothes » (tout un
programme!). Un joli voyage dans le temps en musique, pas prise de
tête pour un sou et charmant de la première à la dernière minute.
Conseillé.
Mon Dieu, que le
temps passe vite ! Cela fait environ deux ans, que ce cd
attendait sagement sur le bureau son tour... Et pourtant on l'avait
écouté et même aimé ce disque ! Mon bon c'est la vie et
comme on le disait au début, le temps passe vite… Mais puisqu'il
n'est jamais trop tard pour bien faire et comme le groupe (selon nos
informations) s'apprête à remettre le couvert au début de
l'automne avec une nouvelle livrée, il est peut être temps de
mettre un coup de projecteur sur cet excellente formation. Mesdames,
Messieurs, voici Bone Tee And The Slughunters ! Contrairement à
ce qu'indique le titre, le quartet n'a pas un pied mais les deux dans
les racines, et fort heureusement il est loin de s'agir du même
sabot. Racines au pluriel, car elles sont multiples et gravitent
autour du blues (cf. « Mr Goodnews »). Bien loin de se
contenter de la version Chicagoanne de l'idiome, Bone Tee y ajoute
d'autres couleurs, picorant des influences dans le rockabilly, le
rhythm and blues (« I'm asking why »), la country
(« Grave Crawling ») et un soupçon d'ambiance jazzy pour
les titres les plus nocturnes ("I got a gal"). Tout ça grâce à la force des
arrangements, qui, au détour d'une ligne de piano boogie bien
envoyée sous les doigts experts de Daniel Conqueret, d'une lampée
d'harmonica ou d'un glissé de bottelneck (cf. « Because of
you ») apportent charme et piment à la chose. Les
interventions extérieures sont choisies avec soin, la section de
cuivre pêchue (cf. « I'm asking why ») ou le banjo et le
violon sont utilisés avec justesse et parcimonie et apportent une
diversité d'ambiances tout en restant fidèle à la ligne rétro
choisie par le groupe. Nostalgique ? Non, tout simplement
intemporel. Et que ça swingue !
Voilà le genre de
disque, arrivant par surprise et qui, rapidement, se fait une petite
place dans notre discothèque au rayon de nos préférés, refusant
obstinément de quitter la platine. Kieron McDonald, chanteur
Australien de son état, s'est fait une spécialité du rockabilly,
le genre d'argument qui, ici, nous touche particulièrement. Tout
dans cet album est absolument charmant, de la magnifique pochette
pastichant une affiche de film noir des années 50, à la musique
bien entendu. Le répertoire est entièrement original, écrit par
Kieron, et cela fait toute la différence. Au lieu de reprendre,
encore et toujours, les même titres, ce qui finit par constituer un
hommage particulièrement stérile, Kieron donne une nouvelle
jeunesse à ce style qui entre ses mains expertes jamais ne sonne
dépassé mais plutôt intemporel. Magnifique chanteur, sa voix de
gorge déborde de charme et de nuances, Kieron s'est construit
l'écrin musical parfait pour accueillir son timbre de crooner.
Parfois plein de swing (cf. « Go go Girl », « I'm
the king of the road »), ou sur un registre plus down tempo
(« The Knock on my door ») teinté de country (« Goodbye
Lonesome, Hello Baby Doll »). A l'écoute, on imagine sans
peine Kieron swingant quelque bouge louche aux murs de briques
rouges, portant fièrement sa gomina. Un album dépaysant, charmant
et qui nous remonte le moral. Que demander de plus ?
Installé en Europe
depuis plus de 25 ans, l'Australien Hugo Race a longtemps été
associé à Nick Cave, guitariste au sein de Birthday Party puis des
Bad Seeds. Fatalists est son groupe le plus récent (attention ne pas
confondre avec l'album du même nom sorti par Hugo en 2010). Timbre
de voix caverneux, ambiance crépusculaire, les points communs entre
la musique d'Hugo et celle de son ancien patron sont nombreux et
sautent aux oreilles dès la première écoute. Le guitariste livre
ainsi un disque qui transpire la poussière et la chaleur écrasante
du désert, évoquant autant les grands espaces désertiques de son
Australie natale que les Etats-Unis. Nourri à la grande musique
étasunienne, l'album s'abreuve à la source du folk, de la country
voire du blues, autant d'idiomes dont le guitariste livre son
interprétation sombre et habitée, le long de ces 10 plages
magnifiques. Recommandé.
Excellent label
multipliant les sorties de haute tenue (le garage rock de ZombieGarden Club, le rock gothique de Secret Lie), Bongo Boy Records se
lance dans l'exercice compilatoire. Après des volumes consacrés au
blues et au rock garage (dont nous aurons l'occasion de parler
prochainement) , le présent disque s'intéresse à un idiome que
l'on aime bien dans ces colonnes, totalement estival et donc de
saison : la surf music. Née au début des années 1960, la surf
music, est indissociable de la Californie, prônant un style de vie à
la cool, les pieds dans le sable. Le présent disque dresse un
panorama, dans sa version instrumentale, de la scène surf moderne,
chaque groupe présent y allant de sa petite originalité tout en
restant fidèle aux codes du genre. Ainsi, le disque pourrait
s'écouter comme un guide de voyage dressant un liste de spots. Dans
cette optique, « Lava Spout » du groupe Blues Wave Theory
serait la Jamaïque grâce à des arrangements reggae. « Happy
Beach Song » de James and the Enigmatic Light Band
représenterait Hawaï par le biais d'un ukulélé, instrument
emblématique de l'archipel. Le son rock et puissant, proche du
garage, de Jenny & the Felines - « Psychedelic Sea »,
qui décroche en prime la palme du titre le plus cool - évoquerait
plutôt Teahupoo, l'impressionnante gauche de Tahiti. Ces quinze
titres forment un ensemble homogène et cohérent et la bande son
idéale pour tous les estivants.
Cultivant depuis de
nombreuses années ses accointances avec le milieu cinématographique,
le trio électro Zombie Zombie franchit le Rubicon, signant la bande
originale du premier film (magnifiquement) réalisé par Sébastien
Marnier. L'association tombait en effet sous le sens, Zombie Zombie
n'ayant pas son pareil pour souligner le suspense, l'angoisse même
procurée par l'histoire de cette femme prête à tout pour retrouver
son emploi, sombrant dans la folie. L'ambiance générale du disque
baigne dans une atmosphère délicieusement rétro, aux influences
80s, et comme toujours en pareil cas, c'est l'ombre de l'immense John
Carpenter (la référence absolue en la matière) qui plane au dessus
de cet album (cf. « Runing », le thème de Constance ;
« Filature », « Bowling », « Folie
furieuse »). Mais le trio ne se contente pas de recycler
habilement les années 1980. Ainsi, « l'effondrement »
n'est pas sans rappeler les stridences de Bernard Herrmann lorsque ce
dernier œuvrait aux côtés d'Alfred Hitchcock, dans une version
contemporaine et électro. Dans un registre plus festif, illustrant
les scènes de sorties nocturnes, « Tuning » et « Boite
de nuit », inventent un nouveau style, hybride, teinté de
nu-disco, une sorte de dance music étrangement triste et
mélancolique. Même sans l'apport essentiel des images, la bande son
tient la route par le seul pouvoir évocateur des sons, évitant
l'écueil de nombre BO. Un excellent film et une bande originale à
l'avenant.
Pas évident de
suivre le parcours de Ty Segall, impliqué dans plusieurs groupes en
même temps, le Californien tourne au rythme insensé d'un album
minimum par an depuis 2007 et encore quand il est en petite forme…
Dieu merci, en ce moment Ty se sent bien et quand il est en grande
condition, le chef d’œuvre n'est jamais bien loin
(l'excellentissime album « Manipulator » sorti en 2014).
En matière de rock garage/psyché, difficile de trouver mieux en ce
moment. Ce nouvel effort voit Ty défricher de nouveaux territoires
tout en restant fidèle à son pré carré garage/psyché, à peine
une demie-gageure pour ce funambule du rock. Ce qui ne change pas,
les guitares, barrées, dingues et sauvages au risque de sombrer dans
le grand n'importe quoi dissonant (cf. la coda de « Californian
Hills »). Ça, on adore ! Mais Ty évolue dans son
écriture, se penchant sur une forme de pop frappadingue, agrémentée
d'arrangements baroques à grands coups de synthés et de guitares
triturées on ne sait trop comment (« Baby big man »). Et
ça, on adore aussi ! Plusieurs écoutes sont évidemment
nécessaires pour apprécier à sa juste mesure cette dinguerie rock
caractérisée. Plus d'une fois, l'auditeur risque de se retrouver
les bras ballants devant un tel déferlement de décibels
(« Diversion », « Breakfast eggs »), ne
sachant plus trop à quel saint se vouer. Mais la récompense se
trouve au bout de ce disque brillant. Un dernier petit mot pour
signaler qu'en ce moment, Ty Segall est accompagné sur scène d'un
groupe formidable, appelé The Muggers qui, au début de l'été, a
littéralement enflammé la Plage des Eurockéennes de Belfort à une heure du matin.
1997. Grâce à une
poignée de titres ravageurs (« Sonnet », « Bitter
sweet symphony », « Weeping Willow ») « Urban
Hymns », le troisième album de The Verve, se hisse au sommet
des charts. Après des années passées dans l'antichambre du rock
anglais, la formation menée par « Mad » Richard Ashcroft
accède enfin à la célébrité. Un succès bien mal digéré par le
groupe de Wigan, les relations entre Ashcroft et son guitariste (le
génial Nick McCabe) se détériorent peu à peu et mènent à la
dissolution inexorable du quatuor. Richard n'en a cure et entame une
série de trois excellents efforts en solo (remember « Check
the meaning »?). S'en suivra une reformation de The Verve au
résultat mitigée (l'album « Forth » qui sonne comme si
la magie s'était évaporée) puis une tentative de cross over (un
groupe nommé United Nations of Sound) passée inaperçue. 2016. Dix
ans après son dernier effort en solo, Richard Ashcroft revient aux
affaires avec ce nouveau disque. Il s'en est passé des choses depuis
l'âge d'or de The Verve. Bien décidé à ne pas se laisser
distancer, Ashcroft reprends les choses là où il les avait
laissées, comme sa collaboration avec l'arrangeur Wil Malone (un
homme clé dans le succès d' « Urban Hymns »), tout
en tentant de nouvelles expériences. Soit mélanger son songwriting,
typiquement british, à base de guitare folk à une production
moderne et des beats électro (on note la participation de Mirwais).
Bien mal lui en a pris tant la démarche s'accorde mal avec la
nostalgie intrinsèque de ses compositions. On a ainsi l'impression
que l'émotion qui se dégagent des chansons est systématiquement
plombée par un martèlement dance, aussi fin que la démarche d'un
mammouth, un peu comme si un éléphant débarquait dans un magasin
de porcelaine (« Out of my body », « Hold On »).
Pourtant, parfois, le génie mélancolique d'Ashcroft réapparaît,
par intermittence, voire par accident (« They don't own me »,
« These People »), particulièrement en fin d'album
(« Picture of you », "Black Lines"). De quoi laisser des regrets…
Une nappe
synthétique s'élève et sort des enceintes, avant qu'une guitare au
glissé fantomatique n'entre dans le mix. Thomas Howard Memorial, qui
tire son nom d'un pseudonyme utilisé par Jessie James sort son
premier album et, disons-le tout de go, c'est une petite merveille
post-rock. THM étire le temps, livre un disque suspendu où les
longues plages succèdent aux coups de butoir avec une élégance
jamais démentie. Aérien mais puissant (cf. « Bad
Things »). A la tête du groupe, on retrouve un musicien que
l'on aime bien dans ces colonnes, Yann Ollivier, également batteur
des excellents Craftmen Club, dans un rôle différent, celui du
chanteur/guitariste, qui lui sied à merveille. Nourrie par une
tension et une angoisse sous-jacente, allant crescendo, THM ne baigne
pas spécialement dans l'optimisme et pose la question de l'avenir de
la condition humaine… Vaste programme. La sortie du disque est
accompagnée d'un film, « Live a Guerlédan », réalisé
par Nicolas Charles et tourné dans le site du lac asséché du même
nom. Un film-concert, sans public, en forme de clin d’œil/hommage
au mythique « Live in Pompei » de Pink Floyd (1972).
Acoustique et
champêtre, The Backyard Folk Club porte son nom comme un charme.
Originaire d'Alsace, mais biberonné au folk et à la country, le
Backyard Folk Club réussit à créer son petit bout d'Amérique à
l'est de la France. Rien ne manque, sifflement western (« My
King »), banjo, harmonica, chant choral et bottelneck sur
guitare nationale métallique. Sans parler de l'entregent du quartet
qui ne manquera pas d'interpeller les fans de' rockabilly (« The
Broken Spoon »). Ce petit EP (cinq titres seulement) possède
le charme de l'artisanat et on imagine sans peine ces chansons
bricolées dans une grange isolée. Un peu court pour devenir un
disque de route, cet EP plein de charme constitue néanmoins un
magnifique voyage en musique. L'écouter c'est l'adopter, on souhaite
vivement au groupe de passer au format long dans un avenir proche.
Autrefois one-man
band devenu duo, Dirty Deep ajoute un nouveau membre à chaque
disque. Troisième album donc, le groupe est devenu un power trio,
logique, cela tombe sous le sens ! Cela tombe surtout bien dans
les oreilles. « Plus on est de fous, plus on rit » comme
le dit le vieil adage qui trouve ici une parfaite illustration
musicale. Dirty Deep n'a jamais pratiqué une musique aussi fine,
creusé aussi profondément le sillon du blues racinien. La
différence se fait sentir dès le premier titre « Holy Pocket
Boogie » qui commence par une fantastique ligne de basse, le
genre de choses qui était bien évidemment impossible auparavant. Un
peu plus loin, une ruade de batterie apporte un groove imparable à
« Goin' down south », une fois encore les bienfaits du
trio se font ressentir. Dirty Deep, déjà excellent par le passé,
est clairement passé à la vitesse supérieure ! Au chant, à
la guitare et à l'harmonica, Victor Sbrovazzo fait montre de son
implication habituelle, son chant est intense, habité et c'est
l'ensemble du groupe (l'auditeur aussi par la même occasion) qui se
retrouve les pieds dans la boue, en plein marais. Au menu du blues,
oui, mais dopé par une énergie rock qui dévaste tout sur son
passage (« Can i kick it ? », « How i ride »,
à la lisière du métal). Ce qui n'empêche nullement Victor et ses
comparses de se montrer tendre à l'occasion d'un passage acoustique
(cf. « Light and Blue »). Mais qu'est-ce qui coule dans
mes veines ? Du bon son tiens, pardi !
Si l'on en croît le
titre de l'album, les Chikitas se sont trompées de motel. Une chose
est certaine cependant, les amateurs de rock n'roll seront, eux, à
la bonne adresse. Enregistré par Jim Waters (Sonic Youth, The Jon
Spencer Blues Explosion, cela vous classe le bonhomme) en Arizona, ce
troisième disque voit le duo Genevois s'essayer pour la première
fois aux vertus de l'enregistrement analogique. Parfaitement
canalisé, inspiré par les lieux, le duo grave ainsi un album
faisant la part belle à l'aspect primaire du rock n'roll. Vocaux
déchirés, batterie nerveuse et guitare abrasive en sont les
principaux ingrédients : simple et direct, aussi efficace qu'un
uppercut ! Pourtant, grâce à la diversité des influences qui
l'anime, l'album se révèle particulièrement varié, alternant les
plaisirs entre pop/rock garage (les fantastiques « My
Playground » et « Spin around you », les grandes
réussites de ce disque), punk (« Sucker Creep ») et
grunge (« Oh greed », « Watch Yourself »)
tout en restant cohérent et fidèle à leur esthétique 100 %
rock n'roll. Trente ans de rock bruitiste et noisy condensés en une
demi-heure : une certaine idée du bonheur…
Premier EP pour ce
jeune artiste français au patronyme inspiré par une affaire
judiciaire d'usurpation d'identité datant du XVIeme siècle. Produit
par Peter Von Poehl (quand même!) la chose est particulièrement
ouvragée, rustique et moderne à la fois. Songwriting pop, guitare
arpégée, acoustique et chatoyante, et de discrets arrangements à
base de nappes synthétiques (« New Hope ») sont les
différents ingrédients de cet EP étonnant par sa capacité à
faire le lien entre différents univers à priori contradictoires.
Charmant.