mercredi 24 septembre 2014

Portrait Dorian Pimpernel



(c) Sylvere Hieulle

C'est au terme d'un véritable acharnement téléphonique (environ sept coups de fil reçus en l'espace d'une demie-heure) lors de la dernière édition de Rock en Seine que l'on a pu rencontrer Dorian Pimpernel. Où plus exactement, Jérémie Orsel, chanteur/guitariste de ladite formation et seul membre du groupe encore sobre (l'affirmation est de lui) à cette heure. Ah la dure vie de festivalier...

(c) Sylvere Hieulle
D'un abord sympathique, Jérémie commence par nous éclairer sur le patronyme du groupe, objet de multiples spéculations : « Dorian est un adjectif qualifiant un mode musical évoqué par Platon dont la définition est viril et conquérant, ce qui est plutôt ironique dans notre cas (sourire). Pimpernel, c'est le mot anglais pour désigner le mouron, une fleur. Les deux accolés ensemble sonnent plutôt bien, comme le nom d'un personnage fictif ». Comme bien souvent à l'origine de Dorian Pimpernel se trouve un musicien solitaire, Johan Girard, la cheville ouvrière du groupe, composant seul sur ses claviers : « En fait Johan composait des démos seul dans son coin et cherchait des musiciens pour assurer des concerts. Au départ je suis arrivé pour être le guitariste et faire des essais pour les chœurs. Finalement je suis le chanteur. Mais je ne suis que l'interprète des compositions de Johan. Sur notre set list actuelle, il n'y a qu'un seul titre que Johan n'a pas écrit seul. ». La « moonshine pop » de Dorian Pimpernel se singularise par son extrême sophistication tant sur le plan mélodique qu'harmonique. Le fait est que le groupe rappelle beaucoup les productions (anglaises notamment) de la fin des années 1960 (en vrac citons les Zombies, Left Banke, King Crimson ou bien encore l'école de Canterbury) ainsi que le krautrock de la décennie suivante sans pour autant tomber dans l'écueil de la pâle copie. Une démarche que le groupe qualifie « d'anti naturalisme », où les claviers imitent les instruments acoustiques : « l'artificialité doit s'entendre » insiste le guitariste. La seule utilisation du Variophon peut résumer la chose : « C'est un synthé Allemand actionné par le souffle. On l'utilise pour remplacer les instruments à vents ». Ainsi le chanteur nous confie la passion du groupe pour les claviers sans tomber dans le vintage à outrance : « Les claviers sont plutôt choisis en fonction de leur originalité et de leur rareté. Au final il y a autant de claviers anciens que modernes. C'est notre façon de créer notre univers musical personnel ». Bien évidemment la transposition sur scène d'un tel univers n'est pas chose aisée : « En fait on fonctionne à l'inverse d'un groupe de rock classique dont les morceaux sont bruts de décoffrage et peaufinés ensuite en studio. Nous, nos compositions sont très élaborées dès le départ et on doit les simplifier pour la scène. Il y a des arrangements que l'on ne peut absolument pas reproduire en concert. On est parfois obligé d'utiliser des bandes ». La seconde composante principale du son Dorian Pimpernel, c'est la basse. Une basse ronde, terriblement sixties, qui est pour beaucoup dans l'attrait exercé par le groupe. Le mélange avec les claviers n'est pas sans rappeler l'album « Triggers », le chef d'oeuvre signé April March, au point que l'on n'est pas loin de penser que Dorian Pimpernel aurait trouvé un refuge naturel chez Tricatel, le label de Bertrand Burgalat, sur lequel était signé April March à l'époque (2002, ndlr) : « En fait on a quelques liens avec Tricatel. Notre batteur, Hadrien Grange, était assistant ingénieur du son sur le premier disque des Shades, « le meurtre de Vénus » (sorti en 2008, ndlr). Quant à moi, Bertrand m'appelle de temps en temps pour des commandes, assurer des chœurs des choses comme ça... On ne se fréquente pas vraiment cependant. Je pense que Bertrand cherche surtout la singularité dans les projets qu'il signe. On aurait fait double emploi avec April March ou avec ce qu'il a pu faire lui-même en solo ». Faute de Tricatel, le groupe est finalement abrité par Born Bad, l'excellent disquaire devenu label et plutôt orienté sur le garage et le rock psyché (Wall Of Death ou les très prometteurs Forever Pavot). La signature de Dorian Pimpernel marque également une évolution douce de la ligne éditoriale du label : « Les premiers contacts avec JB (Wizz, le patron de Born Bad, ndlr) datent de 2004/2005 à l'époque où Johan tâtait du journalisme. On a sorti un premier 45 tours sur un autre label ce qui nous a rappelé à son bon souvenir. Il nous a mis au défi de lui fournir un disque en trois mois ». Une gageure que l'on imagine immense pour des musiciens aussi méticuleux. Alors que le temps qui nous est alloué arrive à son terme, il nous reste une question fondamentale à élucider : alors Dorian Pimpernel, plutôt Pet Sounds ou Sgt Pepper ? Beach Boys ou Beatles ? « Franchement au sein du groupe c'est du 50/50 ! » (rires)...

Propos recueillis le 23 août 2014 à Rock en Seine.
En concert le 1er octobre à Paris (Petit Bain) avec Forever Pavot et Orval Carlos Sibelius.

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