C’est avec un plaisir non dissimulé que l’on a retrouvé les Hot Shot Mama (voir mon post du 28 décembre 2008), attachante formation originaire du Val de Marne, a qui revenait cette année l’honneur de clôturer la dernière soirée du Marché de Noël de Créteil. Les Hot Shot ne pourrait être qu’un groupe de reprises de plus baignant dans la culture des 60’s, un concept déjà sympathique à la base, mais le talent de ces musiciens leur permet de se réapproprier le répertoire ainsi proposé. Pour ce faire, les Hot Shot misent sur une orchestration à la fois classique (basse, batterie, guitares, claviers, harmonica) et originale, pour un groupe de rock s’entend (scratches, saxophone). Enfin, les Hot Shot ont une qualité particulièrement appréciable pour un groupe de rock n’roll, le sens du groove grâce à une excellente section rythmique. Pendant une petite heure on a pu ainsi revisiter, sur un mode inédit, quelques classiques du blues (Muddy Waters, John Mayall, « In the midnight hour » de Wilson Pickett) et du rock (ZZ Top, « Born to be wild » de Steppenwolf, le « Summertime blues » d’Eddie Cochran, « Come Together » des Beatles, « Love me two times » des Doors). Le temps d’un « Day Tripper » les Beatles se transforment en groupe funk et l’enchaînement « All your love » (John Mayall) / « A fool for your stockings » (ZZ Top) nous a plongé dans une ambiance bluesy à souhait avec une touche jazzy apportée par le sax des plus appréciables. En guise de rappel le groupe nous a offert un bon petit reggae de derrière les fagots histoire de nous réchauffer comme l’a si bien dit le chanteur. On a pu ainsi oublier l’espace d’un instant le froid et la neige. Toute l’assistance est alors debout. Un concert en forme de révision des classiques, comme un regard tourné vers l’age d’or du rock, avant de dire adieu à l’an 2010...
mercredi 29 décembre 2010
mardi 28 décembre 2010
The Dukes Interview
8 décembre, alors qu’une tempête de neige s’abat sur la ville, faisant ressembler toute tentative de déplacement à un enchaînement figures libres de patinage artistique, et que l’on fête le trentième anniversaire de la mort de John Lennon, nous avons rendez vous avec Shanka et Gaspard Murphy, le duo de guitaristes des Dukes (voir mon post du 31 octobre). Deux garçons très sympas, passionnés et très liés d’amitié depuis que l’un a donné des cours de guitare à l’autre. Notre entretien du jour débute avec Shanka seul avant que Gaspard ne débarque de l’aéroport la valise dans une main, la guitare dans l’autre…
Comment a débuté le groupe, au début il y avait toi et Greg dans No One Is Innocent ?
Shanka : Tout a fait. Avec Greg on s’est rencontré au moment de notre recrutement pour No One Is Innocent en 2004. On a fait plus de 150 concerts ensemble. On se connaît bien humainement, musicalement et scéniquement. On sait comment va réagir l’autre sur scène, c’est très drôle de rejouer avec lui maintenant, je retrouve des réflexes, des regards, des manières de fonctionner qui ont été rodées. Début 2010, beaucoup de choses se sont croisées de manière un peu improbable. J’ai reçu un email de Greg me disant : « Ca ne te dit pas de refaire du rock n’roll avec moi je m’ennuie un peu » et en même temps j’avais plein de morceaux en stock qui étaient inutilisés, assez pour faire un album. Et j’avais envie de bosser avec Magnus Lindberg, un producteur suédois que j’avais rencontré l’année précédente. Comme on est assez téméraires, on s’est dit « ouais on le fait » et on voit jusqu’où on peut pousser la blague…
Il y a un an le groupe n’existait pas, tout est allé très vite…
S. : Ca c’est le moins que l’on puisse dire… En moins d’un an on composé et produit l’album, on a trouvé des partenaires, on a déjà fait des concert à l’international en juin dernier. C’est même parfois un peu whaou... Ca donne le vertige.
Et cela ne te fait pas un peu peur…
S. Non parce que si tu veux pour un groupe, c’est hyper important qu’il y ait une dynamique. Surtout au jour d’aujourd’hui où on vit dans une société où la notion de flux est essentielle. Il faut tout le temps faire des petits trucs, des gros trucs. Il faut tout le temps qu’il se passe quelque chose. Donc au final c’est très bien. Et puis je retrouve l’ambiance que j’adorais du temps de No One, ça se fait vite, ça se fait bien et on travaille beaucoup. Dans une ambiance super détendue. Il y a vraiment un truc super positif qui se dégage de ce projet. C’est les alchimies humaines, tu ne peux pas les contrôler. Des fois tu mets des mecs super mortels ensemble et ça donne un résultat déprimant, où il ne se passe pas grand-chose. Et des fois tu réunis une équipe et bam ! Tout le monde rigole, tout le monde est content d’être là, ça se passe super bien et on ne fait pas semblant quand on joue… Une vraie dynamique de groupe s’est créée comme ça, spontanément…
J’ai lu que l’album a été enregistré en Suède par moins 25 degrés dans un ancien hôpital psychiatrique. Est-ce que tu peux nous en parler…
S. : Ouais (rires). Une ambiance très particulière… En fait Magnus, le producteur avec qui on a enregistré, est le batteur de Cult of Luna un groupe originaire d’Umea une ville d’où sont originaires pas mal de groupes cultes, genre Meshugga. Pourtant pour te donner un ordre d’équivalence, c’est une ville genre Nancy. Mais il y a un vrai truc artistique et assez chouette qui se passe là-bas. On s’est rencontré avec Magnus, on a joué, discuté et on s’est promis de bosser ensemble dès que l’occasion se présenterait. On réuni l’argent pour prendre l’avion, j’ai emprunté à mon père, à mon éditeur (Shanka est aussi l’auteur de plusieurs méthodes pour apprendre la guitare, ndlr). Un peu tout le monde en fait, j’ai fait tout mon répertoire. C’était une expérience unique, le lieu est incroyable c’était un hôpital psychiatrique énorme qui a été réhabilité, il y a des logements, une école maternelle et le studio. Et ils ont récupéré pas mal de matériel de l’hôpital. J’ai fait beaucoup de guitare avec un ampli qui à la base était utilisé pour faire des annonces. Et on a enregistré au milieu de l’hiver le plus froid depuis 20 ans, c’était (il cherche le bon mot) lunaire… Post apocalyptique, mais en même temps c’était chouette et je pense que c’est un truc que je ne retrouverais jamais ailleurs…
Et penses-tu que cette ambiance s’entend dans la musique ?
S. : Complètement. Il y avait un vieux piano, du début du siècle, qu’ils avaient gardé volontairement désaccordé et qui sonne vraiment d’un autre monde.
Est-ce que tu pourrais nous parler de « Wayfaring Stranger », une chanson country-folk qui n’est pas sur l’EP ?
S. : Moi j’ai beaucoup d’influences country et folk qui ont été déclenchées par la rencontre avec Elliott (Murphy, ndlr) il y a maintenant presque 10 ans. Mes parents écoutaient pas mal de folk donc j’ai été sensibilisé avant de tomber très vite dans le rock voire même le métal à l’adolescence. Ca faisait longtemps que je ne m’étais pas rapproché de ce style. Avec ma copine on a fait un voyage à Nashville où on a appris pas mal de trucs. On a rencontré plein de monde. C’est un style que j’ai vraiment cherché à comprendre en profondeur aussi bien musicalement que sociologiquement. Le contexte quotidien, c’est comme le blues, c’est une musique qui est très terrienne que l’on joue sur le parvis de sa maison. Moi en tant que chanteur il faut que je raconte quelque chose, je ne peux pas juste mettre des clichés bout à bout, je le vivrais mal. J’ai plongé dedans parce que c’est là que ça se passe, au même titre que le blues où la musique africaine avec les griots. T’es là avec ta guitare, comment tu rends le truc intéressant ? Comment t’arrives à happer les gens dans ton univers ? Comme tout le monde je traîne sur you tube à la recherche de pépites et j’étais tombé sur la reprise de « Wayfaring Stranger » par Jack White qui la reprend de façon bluegrass, banjo et violons. Moi je ne connaissais que le standard dans une version différente. C’était vraiment chouette, ça m’a beaucoup touché et je me suis dis que cela serait rigolo de boucler la boucle et en faire une reprise version power rock à la White Stripes.
Gaspard, tu es arrivé après la formation du groupe, comment t’es-tu greffé sur le projet ?
Gaspard Murphy : Je connais Shanka depuis que j’ai douze ans environ, c’était mon prof de guitare. Après un an de cours, c’est devenu plus un ami, un grand frère qu’un prof. Faire de la musique avec lui, c’était un rêve de gosse. Quelque chose que j’avais envie de faire depuis super longtemps. Quand il m’a proposé de faire les Dukes avec lui, c’était une super occasion et j’ai sauté dessus.
S. : Gaspard s’est greffé sur le projet parce que je me suis rendu compte que j’avais assez de morceaux pour faire un album. On a arrangé les chansons ensemble. Maintenant que le projet est sur les rails, si on refait un disque, c’est évident, Gaspard prendra une part à la composition plus importante.
Gaspard, malgré le fait que tu sois assez jeune, tu as un vécu musical important, je pense notamment au concert de Bruce Springsteen au Parc des Princes…
G.M : Je ne m’y attendais pas du tout. Bruce est un très bon ami de mon père (Elliott Murphy, ndlr). C’est quelqu’un de formidable, je pourrais en parler pendant des heures… Bref, ce jour là, on était dans les loges au Parc des Princes et comme d’habitude mon père et Bruce regardaient la setlist pour voir quel morceau ils pourraient jouer ensemble. Bruce à dit à mon père : "j’aimerai bien que tu joues « Born To Run » avec moi". Ils l’avaient déjà jouée ensemble il y a deux ans à Bologne, alors que mon père ne connaissait absolument pas le morceau. C’est tout Bruce de faire monter des gens complètement par hasard sur une chanson qui en plus n’est pas la plus simple de son répertoire. Et moi qui étais excité à l’idée d’assister au concert, j’avais appris « Born to run » tout seul dans ma chambre et j’ai passé l’après-midi à la jouer sans penser une seule seconde qu’il y avait une possibilité de la jouer avec lui le soir. Mon père a dit à Bruce qu’il ne connaissait pas assez cette chanson et qu’il ne pouvait pas la jouer. Et moi j’ai à mon père, je la connais je peux te l’apprendre. Et quand Bruce m’a entendu dire que je la connaissais il m’a dit que je pouvais jouer avec eux. Et voilà !!!
Et ensuite…
G.M. : Bah moi j’ai dit oui. Mais c’était un peu stressant. J’avais le cœur qui battait très fort. Mais c’est marrant par ce que je pense que ce soir j’aurais beaucoup plus peur. Ce coup-ci c’est mon groupe. Et puis au Parc des Princes, il y a quoi ? 40 000 personnes ? Quand il y a autant de monde on ne se rend pas vraiment compte, c’est un peu irréel, on a l’impression de jouer devant un écran. On dirait un faux public. T’es trop loin pour voir les expressions des gens, ce qu’ils regardent, ce qu’ils pensent… C’est plus facile d’être à l’aise sur une énorme scène comme ça.
S. : Je suis assez d’accord. En fait si tu veux le public cesse de devenir un ensemble de gens au-delà d’un certain nombre, chacun fixe sa propre jauge. Il y a un moment où cela devient une masse. Un espèce de truc qui est vivant, qui réagit, fait des vagues. C’est marrant, ça devient presque de la physique des particules. C’est très amusant.
G.M : Et en plus les fans de blues sont à fond tout le temps, ils ne vont pas se mettre à huer. Mais je sais que pour moi, jouer un morceau tout seul devant un ami qui va me demander de lui faire de la guitare, moi, c’est un truc qui va me pétrifier dix fois plus que de jouer sur scène avec Bruce Springsteen. Enfin bon voilà, c’était une super occasion. Vraiment sympa.
Pour en revenir au groupe vous avez la réputation de composer assez vite…
S. : C’est plutôt flatteur. Ca vient des influences folk. Je n’ai pas envie d’enchaîner les riffs super compliqués à la guitare, histoire de montrer ce que je sais faire par ce qu’au final cela ne m’a jamais vraiment intéressé. Pour moi la pépite d’or c’est de trouver la bonne alchimie entre la guitare et la voix. Le gimmick de voix et les bons accords. Au final je n’ai même pas l’impression de composer. Je trouve ça d’une prétention… Typique de l’être humain de dire : « moi je compose, je crée… » J’ai l’impression que les chansons, elles sont juste là dans l’air. Il faut arriver à les choper, les écouter, les découvrir… Un peu comme d’être sur un terrain vierge et là tu creuses. T’as l’impression qu’il y a plein de super tubes potentiels qui sont dans l’air et à force de chercher tu finis par en trouver. C’est super ludique.
G.M : Moi quand je compose j’ai l’impression que le plus dur ce n’est pas de trouver ce qu’il faut jouer mais ce qu’il ne faut pas jouer. En fait le plus difficile c’est d’enlever des notes. Surtout pour Shanka et moi qui ont, à un moment donné, été fascinés par les trucs rapides, le métal et tout ça. Pour moi le challenge c’est de trouver la limite où je dois m’arrêter, savoir quand j’en mets trop. Ce que j’ai vraiment appris en Suède quand on enregistrait l’album c’est de faire quelque chose de simple et d’efficace.
S. : Le truc c’est que à un moment donné, plus tu en mets, plus tu caches l’absence de propos. Après je ne suis pas non plus apôtre du minimalisme à tout prix. Il faut aussi se faire plaisir, par ce que c’est fun d’en mettre partout, mais trop, tu noies le poisson. Il faut trouver le juste équilibre, comme toujours.
G.M : Quand tu es musicien, les idées elles viennent tout le temps que ce soit pour le chant ou la musique. Je ne m’assis jamais à ma table en me disant tiens je vais écrire un morceau. Après, c’est juste de la mise en place.
S. : En fait pour répondre à ta question, une fois que j’ai trouvé les gimmicks de chant et de guitare, c’est l’autoroute. C’est pour ça que cela va très vite.
Dans les années 60 on disait que le Velvet Underground composait de bonnes chansons avant d’expérimenter en studio. Est-ce que les Dukes composent des chansons pop et passe en mode punk au moment de les enregistrer ?
S. : C’est un peu ça. Magnus avait sorti l’expression : « sweet songs with unsweet sounds » que je trouve assez chouette. C’est assez bien résumé. Mon intention de départ, c’est d’arriver à jouer des chansons qui ne parlent pas qu’à un seul type de personnes. Sans rechercher l’universalité non plus, sinon je serais Lady Gaga (rires). Je ne veux pas des formats abscons que seuls les fans de madcore peuvent comprendre. Je n’ai pas vocation à aller dans les niches. Il ne faut pas qu’il y ait trop d’obstacles en termes de gimmicks de style, genre la double pédale dans le métal. J’essaye vraiment d’enlever tous les clichés de style par ce qu’en fait ce ne sont que des réflexes faciles. Une fois que tu es arrivé au fond du fond, là tu reconstruit. Et tu trouves des trucs originaux. De partir d’une page blanche, de monter le truc en sauce petit à petit pour arriver à des arrangements inattendus.
G.M : Les Beatles avaient dit : « si un morceau est bon, tu n’as pas à expliquer pourquoi ». On a eu des plusieurs bonnes surprises sur certains morceaux, des arpèges de guitare très aériens, supers beaux. Shanka avait essayé un truc moi j’en ai rajouté encore par-dessus. L’expérimentation vient comme ça, après, sur une base qui est solide au départ.
L’EP a une tonalité assez âpre, ancrée dans les années 90. Sur « The Laughter » il y a un effet qui déforme la voix…
S. : C’est un vocoder. Il y a peu c’était encore formellement interdit par la police du bon goût ! On a failli avoir une descente (rires) ! C’est marrant parce que le gimmick s’est imposé comme une évidence alors que le vocoder, c’est quand même super limite. C’est un truc t’as vite fait de tomber dans le cheesy total. C’est une chanson sur la déshumanisation à cause d’internet où tout le monde passe son temps à se foutre de la gueule les uns des autres. Le vocoder a un côté très froid qui colle bien avec le thème. On a essayé avec des vraies voix et ça rendait moins bien. Il n’y avait plus ce côté impitoyable qu’apporte le vocoder, qui fait froid dans le dos.
G.M : Dès les premières démos il y avait déjà le vocoder et cela m’a tout de suite plu. Alors que le vocoder… Tu sais que tu ne dois pas aimer. Tout peut être bien si c’est fait avec goût, dans le bon contexte…
Un plaisir coupable…
S. : C’est toujours pareil. Peu importe le moyen du moment que c’est une bonne idée. Il n’y a pas de snobisme à avoir par rapport à l’instrument. Il ne faut pas trop réfléchir.
Est-ce que l’on peut parler de votre attitude « DIY acharné » ?
S. : Depuis le début, ce projet on l’a monté sans aucune aide du milieu de la musique. Si ce n’est « nous production », un tourneur assez important qui nous connaissait par ce que l’on n’est pas « des lapins de six semaines » comme dirait Greg, le batteur. On a commencé par faire nos poches pour enregistrer l’album. Ecouter une démo aujourd’hui c’est quelque chose qui n’existe plus. En gros il faut arriver : « voilà notre album, t’en veux ou pas ?». Après on a eu le partenariat avec Oxbow, trouvé par Greg. C’était une tournée assez chouette tout le monde y gagne. Nous on y gagne au niveau exposition. On a eu des titres sur leur téléphone. C’était au moment ou ils finissaient un film de surf avec toutes leurs têtes d’affiche, Laird Hamilton etc… Ils ont placés des titres à nous dans le film. Ils ont fait venir toutes les super stars du surf en Europe, on a joué avec eux. Ils projetaient le film, on jouait derrière. De fil en aiguille on s’est acoquiné avec PIAS qui suivait le projet. On a sorti l’EP. On gros on fait tout de A à Z. On n’a pas de manager, on n’a pas de label derrière. Ce qui est plutôt intéressant, même si on ne va pas le faire pendant 20 ans non plus. On ne gagne pas d’argent et il faut bien que l’on paye nos loyers aussi. C’est plutôt gratifiant, le projet convainc beaucoup de monde, personne ne nous refuse. C’est chouette, ça fait plaisir par ce qu’on a mis beaucoup d’énergie et de cœur dans le groupe. Si on veut que les choses soient bien faites autant les faire soi-même. C’est un système qui n’est pas facile par ce que c’est toi qui es à la barre et si tu te plantes, tu en subis les conséquences et la responsabilité.
www.thedukesmusic.com
Propos recueillis le 8 décembre 2010.
samedi 25 décembre 2010
A Christmas gift for you from Phil Spector
On termine, pour cette année, notre série sur les albums de Noël avec le véritable cadeau, le chef d’œuvre : « A Christmas gift for you ». Sorti en 1963 et produit par le légendaire Phil Spector, l’album met à contribution, par ordre d’apparition Darlene Love, The Ronettes, Bob B. Soxx and The Blue Jeans et The Crystals. Un casting plutôt orienté rhythm and blues au service d’un répertoire de Noël, ma foi assez classique, et produit comme un album de pop californienne. Car l’album est en quelque sorte le paradigme du disque de producteur. Toutes les techniques du fameux « Wall of Sound » sont ici à leur apogée. Harmonies vocales, les amateurs de belles voix seront servis, luxuriants arrangements de cordes et de cuivres, auxquels se mêlent les traditionnelles clochettes de saison, donnent des résultats spectaculaires en particulier sur « Sleigh Ride » et « Marshmallow World ». La réédition cd ayant de plus la bonne idée de conserver le mixage mono d’origine, c’est, pour le coup, un véritable mur du son, dense et compact, qui vous saute aux oreilles. A l’arrière de la scène, on compte parmi les musiciens le pianiste Leon Russell, Jack Nitzsche et Sonny Bono aux percussions entre autres. Un petit mot pour finir sur le livret qui illustre bien la paranoïa entourant les albums de Noël. En effet, afin être prêt pour une sortie en décembre, ces derniers sont souvent enregistrés pendant l’été. C’est ainsi que l’on voit dans le livret tout ce beau petit monde se balader en chemisettes, les lunettes de soleil sur le nez. Y’a plus de saisons serait-on tenté de dire. En même temps, il est dommage de laisser un album aussi réussi prendre la poussière sur une étagère onze mois par an…
vendredi 24 décembre 2010
Halie Loren & Matt Treder : « Many Times, Many Ways »
Découvert, entre autres pépites, sur le site de ma talentueuse copine Saab, « Many Times, Many Ways » est un album de Noël enregistré à deux par la chanteuse Halie Loren accompagnée pour l’occasion du pianiste Matt Treder. Un disque intime à deux mains et une voix. La touche play appuyée, et aussitôt l’album vous enveloppe de son élégant charme jazzy hérité des années 30. La voix d’Halie se révèle soyeuse et profonde, grave et sexy avec un registre assez large et une grande capacité à accompagner les changements rythmiques. La réussite de l’opus doit beaucoup au sex-appeal qui s’en dégage. Au piano Matt Treder fait montre d’une habilité dans les doigts de tous les instants, à l’aise aussi bien dans un registre swing ou plus lent légèrement teinté de mélancolie. Ruptures, changement de rythmes se succèdent ainsi le plus naturellement du monde sans jamais désarçonner son auditeur. Le rythme est la grande affaire de cet album, tellement les silences entre les notes sont finalement aussi importants que les notes elles-mêmes. Composé de neuf reprises et de deux instrumentaux originaux, composés par Treder, la grande réussite de l’album réside dans sa brièveté, un peu plus d’une demi-heure. C’est suffisamment court pour ne pas lasser et dans le même temps pas assez long tellement l’envie de rester lové dans ce son est forte. Lorsque le disque arrive à son terme, c’est un peu le rêve qui se termine. Voici le compagnon idéal pour un réveillon douillet à la lumière des bougies… Joyeux Noël à tous.
mercredi 22 décembre 2010
Bob Dylan : « Christmas in the heart »
Venant d’un grand songwriter, connu et célébré, « Christmas in the Heart », l’album de Noël de Bob Dylan se présente comme une incongruité dans la carrière de ce dernier : le disque est entièrement composé de reprises. Même pas un seul original à se mettre sous la dent. Il faut donc le prendre pour ce qu’il est : un exercice de style. Et à ce petit jeu, Monsieur Dylan, à qui on ne la fait plus depuis belle lurette, se révèle plutôt doué. Le réveillon de Bob Dylan est étrange, intriguant. Sa voix tout d’abord, éraillée, écorchée, il incarne un drôle de conteur. Pour un peu il ferait peur aux enfants. Musicalement, cet effort navigue en eaux troubles, folk bien sur mais aussi country, blues (la séduisante « The Christmas Blues ») et musique Hawaiienne (« Christmas Island »). L’ensemble est assez baroque, « O’Come All Ye Faithful (adeste fideles) », « Must be Santa », et finalement sonne un peu comme du Tom Waits. On a comme l’impression que Dylan n’est pas vraiment à sa place. Et pourtant, si le disque est entièrement composé de reprises, ces dernières ont été réarrangées en profondeur au point que Dylan se les ait totalement appropriées. Et pour au final accoucher d’un excellent opus.
The Fleshtones : « Stocking stuffer »
Véritable institution outre-atlantique, le « Christmas Album » a souvent donné des résultats prévisibles, les disques s’appuyant toujours, peu ou prou, sur le même répertoire. Afin d’aborder la soirée de samedi dans les meilleurs conditions, ce blog adopte des couleurs de saison, et vous propose cette semaine un petit florilège d’albums de Noël.
On commence cette série avec les Fleshtones et leur opus « Stocking Stuffer ». Les Fleshtones tout d’abord se sont formés à la fin des années 70 et font depuis figure de vétérans de la scène garage/rock n’roll US. On est ici en plein territoire déglingué et à cet effet, cet effort est à classer tout près de celui des Bellrays. Contrairement à la coutume, cet album se base sur un répertoire original, seulement trois reprises sur onze titres. D’ailleurs est-ce un vrai album de Noël ? A l’exception d’utiliser les mots « christmas » et « santa claus » à tire larigot, les Fleshtones ont appliqués leur principes à la lettre : ça joue vite, ça joue fort, les voix éraillées dans le mike, « Super rock » Santa pour paraphraser un de leur titre. A peine ont-ils rajouté quelques clochettes de ci de là et ont repris, de façon très rigolote, le thème de jingle bells à la basse en intro de « You’re all i want for Christmas ». Pour le reste on retrouve les Fleshtones comme on les aime entre rock n’roll furieux, tendance 50s (« Mr Santa Claus », « Super rock Santa », « Christmas with bazooka Joe ») et ballades bluesy (« Champagne Christmas », « You’re all i want for Christmas »). Avec toujours cet orgue qui apporte un peu de chaleur au milieu d’une tempête de Neige. Bref et intense, moins de trente minutes, cet opus procure un plaisir immédiat. Un excellent moyen de se mettre en jambe pour le réveillon. Et accessoirement un cadeau de Noël tout trouvé pour remplir les chaussettes.
www.thefleshtones.org
dimanche 19 décembre 2010
Melissa Auf Der Maur, Le Trabendo, 15 décembre 2010.
Depuis la sortie de son premier album en solo en 2004, après avoir été bassiste de Hole et des Smashing Pumpkins, la jolie québécoise Melissa Auf Der Maur avait un peu disparu des radars pour se consacrer à la photographie. En France on la connaît surtout pour « le grand secret » single en duo avec Indochine et « Taste You » la seule chanson en français de son répertoire. L’année 2010 a marqué son retour avec un nouvel album l’excellent « Out of our minds » (chronique à venir) et une tournée qui s’est arrêtée mercredi soir dernier au Trabendo.
Le concert du soir commence par une séance de cinéma. Le nouvel album de Melissa s’accompagne en effet d’un moyen métrage, dans lequel joue la belle, d’une demi-heure intitulé « Out of our minds » projeté avant les concerts. Sorte de fable métaphysique, sans aucun dialogue mais sur fond de musique électro, sur le passage de la vie à la mort, sur la déforestation par l’homme, l’absurdité de notre monde actuel et sur le sorte de suicide collectif de l’humanité qui en découle. Les bûcherons sont représentés comme des assassins, des serial killers couverts de sang, les coups de haches résonnent comme des tirs d’armes à feu et les arbres saignent… Ambiance… Vient ensuite les anglais de Birdpen qui pratiquent une new-wave mélancolique, tirant parfois vers la disco et l’électro, avec un engagement physique assez prononcé des membres du groupe.
Après quelques minutes d’attente, le temps pour les roadies de préparer la scène, le groupe fait son entrée en scène, deux guitaristes et le batteur. Parmi les musiciens, on reconnaît Steve Durand, l’excellent et fidèle guitariste rythmique. Melissa fait son entrée en scène tout en mouvements saccadés dans un nuage de talc, gracieuse et belle comme le jour. Par rapport au souvenir gardé de ses passages de 2004, le spectacle bénéficie de moyens beaucoup plus importants. L’aspect visuel a été soigné. Le groupe est vêtu de costumes de scène assortis, des visuels sont projetés sur un rideau de toile blanche tiré derrière la scène. Grâce à son français exotique mais parfait, la connexion s’établie facilement avec le public. Le concert commence avec les pulsations cardiaques de « The Hunt », l’instrumental qui ouvre le dernier album et il ne faut pas plus de deux minutes pour que tout ce beau petit monde « headbangue » et s’agite dans tous les sens. Melissa est particulièrement bien accompagné, outre le susnommé Steve Durand, le batteur est efficace et carré et le guitariste soliste, dont j’ignore malheureusement le nom, se révèle plutôt doué et créatif. Sur certains titres comme « Out of our minds », l’excellente « I need I want I will », « Real a lie » la formule fait un malheur, le groupe emporte tout sur son passage. Au chant Melissa séduit et sa voix semble s’envoler au dessus de la mêlée. Sur le duo avec Glenn Danzig « Father’s grave » l’énergie baisse un peu d’un cran car Melissa se retrouve seule sur scène, le titre étant interprété en play-back orchestre. La chanson étant très personnelle (elle traite du décès de son père) Melissa tenait absolument à l’interpréter. On gagne alors en émotion, qui est à son comble, ce que l’on perd en fureur rock. Alors que l’horaire est dépassé, Madm revient pour deux rappels dont l’inattendue reprise des Doors « When the music is over ». Le concert s’achève donc sur ces paroles magnifiques « Music is your special friend »…
www.xmadmx.com
Rencontre avec Séverin
13 heures. A peine arrivé dans les locaux du label cinq7 où se déroule l’interview du jour, on tombe sur un personnage hallucinant, hirsute avec un champignon digne du meilleur de la blaxploitation et une barbe qui se ballade une madeleine à la main. « Euh, je me trompé d’étage en venant et on m’a donné une madeleine. Est-ce que tu veux partager la madeleine avec moi ? ». Et c’est comme cela que j’ai partagé une madeleine avec Séverin (voir mon post du 31 octobre), notre interlocuteur du jour. Ce dernier apparaît toujours comme un peu décalé et dans son monde (au cours de notre entretien on apprendra que ce jour là Séverin était parti de chez lui en claquant la porte, oubliant ses clés à l’intérieur de sorte qu’il se retrouve enfermé dehors) constamment en train de sourire. On se retrouve ensuite dans un étage complètement désert, à moitié en travaux ou sera installé ensuite des bureaux. « Tu verras, il est marrant » m’avait prévenu l’attachée de presse. Et effectivement, on s’est bien marrés…
On te connaît assez peu comme artiste solo, est-ce que tu peux te présenter ?
Séverin : J’étais dans un groupe qui s’appelait one-two, j’ai fait mon premier album solo qui n’était pas vraiment en solo puisque j’avais invité quatorze chanteuses à venir chanter avec moi (le projet cheesecake, nda) ! J’ai écrit pour les quatorze filles mais je ne chantais pas, je faisais les instruments et les chœurs. Et là c’est mon deuxième album sous ce nom, Séverin, et cette fois-ci c’est moi qui chante. Et en français !
J’ai lu dans ta biographie qu’à l’origine tu étais plutôt destiné à faire une école de commerce, est-ce que tu n’as pas l’impression d’être passé à deux doigts d’une catastrophe ?
S. : (rires) Pour l’industrie, je n’aurais pas été d’une grande aide, je pense ! Je ne suis pas très organisé et j’ai du mal à me lever tôt. Mon employeur n’aurait pas été très content ! Mon père est prof d’université et directeur d’une école de commerce, il n’imaginait pas qu’on puisse faire de la musique comme métier. Mais, surtout, mon père est un grand fan de jazz et de rock et c’est grâce à lui que j’ai découvert la musique. Je ne suis pas marginalisé par rapport à ma famille.
Dans la chanson « Comment Pourquoi », il y a une phrase qui dit « Un costume cravate trop grand pour toi », est-ce une référence au monde du travail, des écoles de commerce ?
S. : Il y a de ça c’est vrai. C’est une image du monde du travail dans son côté un peu triste, répétitif. Ce système très hiérarchique, carré. Souvent tu vois des documentaires sur des employés qui pètent les plombs, le soir, complètement bourrés, à faire des folies tellement leur boulot est aliénant. Et c’est aussi une référence au concert des Talking Heads, « Stop making sense », ou David Byrne est enfermé dans un costard énorme qui lui fait une toute petite tête. Je trouvais l’idée superbe…
Il y a quelque chose qui m’a frappé en écoutant l’EP. Musicalement on est dans une ambiance années 80, french pop assez légère et en même temps les paroles sont un peu douces-amères…
S. : C’est un peu ma façon d’être. Je me suis fabriqué un tee-shirt où devant j’ai marqué « Imbécile » et dans le dos « Heureux » (fou rire). Ca résume ma personnalité. Je suis conscient de tout un tas de choses assez tristes, de notre environnement pas toujours très joyeux. Mais j’aime bien maquiller cela derrière une musique plutôt fun. Ca me vient naturellement. J’ai du mal à faire une musique foncièrement triste et nostalgique. C’est pour ça que je n’arrête pas de sourire (c’est vrai, nda).
Toujours d’un point de vue musical, les titres « En noir et blanc » et « Comment pourquoi » sont toujours dans cette ambiance 80s new wave mais traversés par des éclairs rock…
S. : C’est le mélange de mes influences. C’est vraiment ce que je voulais faire. Il y a ces références eighties, même si eighties pour moi cela ne veut pas dire grand-chose, tellement la décennie est variée. Disons que je suis très influencé par le début des années 80 et les premiers synthétiseurs. Mais en même temps on retrouve une énergie que j’adore et qu’on entend dans des groupes vraiment rock genre Led Zeppelin, dont je suis assez fan même si ma musique n’a absolument rien à voir au final. J’aime bien les guitares qui apportent de la puissance, qui permettent de monter des paliers et puis de les redescendre dans un bloc de son.
Tu joues de la guitare sur le maxi, mais en même temps ta musique est plus portée sur les synthés que sur les guitares…
S. : Tu veux dire que je ne suis pas un grand guitariste ? (rires). Les guitares sont importantes mais ne sont pas mises en avant par choix esthétique. La guitare est très présente sans être très forte. Et pourtant il y a de la guitare tout le temps. J’essaye toujours de faire en sorte qu’elle ait une utilité. Qu’elle ne va pas se battre contre la voix, mais jouer avec elle. Qu’elles s’accompagnent ensemble.
Est-ce que tu es du genre à aller chiner aux puces et dans les brocantes pour acheter des claviers vintages ?
S. : Ah bien sur ! Chez moi, il y a énormément de synthés que j’ai acheté 50 euros chez Emmaüs. J’aime bien les claviers avec les gros boutons. Maintenant les claviers ont été recréés mais tu ne retrouves jamais ce grain qu’il y avait dans les vieux synthés. C’est souvent des synthés analogiques qui sont fait à partir d’une onde électrique. Il y a un truc mécanique. Ca ne joue pas un sample digital. On retrouve quelque chose d’organique à la base. C’est un son beaucoup plus vivant. Je peux te parler de l’histoire du synthé si tu veux, mais cela risque de n’intéresser personne ! (rires).
Tu a une éducation plutôt jazz à l’origine. Comment es-tu passé du jazz au rock ?
S. : Ca doit beaucoup à la rencontre avec Lafayette qui était mon partenaire dans one-two qui m’a fait découvrir ça. J’écoutais beaucoup de musique instrumentale, pas trop de chansons. Les Beatles et Jimi Hendrix je les ai plutôt découvert à 20 ans. Je n’étais pas trop branché pop.
Au niveau des paroles, comment s’est passée la transition de l’anglais au français ?
S. : One-two chantait en anglais par ce que cela nous semblait plus facile et plus adéquat par rapport à la musique que l’on écoutait. Le passage au français est venu par une sorte de frustration. J’avais l’impression avec l’anglais de remplir des cases. Ce n’était pas ma langue maternelle. Je ne pouvais jamais approcher les nuances, les finesses et tu vas forcément finir par sortir des poncifs de phrases que tu as déjà entendues ou qui sonnent bien. C’est grâce à l’album des filles que j’ai commencé à écrire en français. Je me suis rendu compte que le challenge est beaucoup plus difficile mais aussi plus ambitieux. Par ce qu’avec l’anglais quand tu as des phrases un peu moyennes dans un couplet, tu t’en fous, tu les laisses et cela ne va gêner personne. Alors qu’en français tu ne peux pas te permettre d’avoir une phrase qui ne te plaît pas. Ce n’est pas possible. Ou alors tu te retrouves à détester un morceau juste pour une phrase… Ca t’écorche les tympans. Et puis c’était aussi pour me mettre un peu plus en danger. Je m’en sentais capable. Ce qui n’était pas forcément le cas avant…
D’on te vient cette fascination pour l’été que l’on entends dans « Un été andalou » ? Tu cherches à décrocher le tube de l’été prochain ?
S. : Non, je doute que cela soit le tube de l’été… Au moment où j’ai écrit ce morceau, j’étais célibataire à la campagne. Tout seul dans une maison dans l’ouest de la France. J’ai idéalisé ce que je pourrais être en train de vivre sauf que je n’étais pas en train de le vivre du tout… J’ai imaginé que cela pouvait être un moment génial. Amoureux et tout. C’était plutôt un fantasme. Après il y a Kiwi la choriste sur le projet qui a chanté et cela rend la situation crédible, comme si il y avait un vrai échange entre elle et moi. Alors qu’au moment où la chanson a été écrite j’étais vraiment tout seul.
Est-ce que tu peux nous parler un peu de l’album qui sortira au mois de mars ?
S. : Je pense que l’EP est assez représentatif avec peut-être un côté un peu moins marqué eighties sur l’album. La couleur est toujours là, mais les synthés sont un peu moins présents. L’EP est plus positif, il y aura d’autres morceaux plus tristes sur le disque. Il y a dix titres dont un final tragique intitulé « le dernier tube » qui est ma chanson d’adieu (rires). Je trouve ça bien de mettre une chanson d’adieu sur un premier album. Tu ne peux pas en mettre une sur un deuxième disque, par ce que là cela devient sérieux. Il y a aussi une ballade guitare/voix ou j’ai essayé pour la première fois de faire un truc complètement live sans aucun maquillage. J’en ai un peu marre de cette époque « pro-tools » où tu peux tout jouer très vite, très mal et tout bidouiller ensuite sur l’ordinateur. Là il n’y a quasiment aucune retouche où on trafique la musique. C’est enregistré en groupe sans overdubs. C’est le son que l’on retrouve en live à nos concerts. Cinq pistes. Le plus direct possible. Brut. C’est pour ça je pense que l’on trouve le disque assez rock alors que la musique ne l’est pas tellement. Voilà, pour résumer, dix morceaux magnifiques (rires) !!!!
Parlons de cinéma, dans ta bio tu es décrit comme un amoureux de la nouvelle vague…
S. : C’est vrai. Après mon bac je devais faire des études et le cinéma était ce qui correspondait le plus à un projet artistique et socialement acceptable. Si tu dis que tu vas faire de la poterie par exemple cela devient plus compliqué. Le cinéma c’est un bon compromis. Mais déjà au moment où j’étudiais le cinéma, je voulais faire des comédies musicales. J’adorais les films de Jacques Demy. Je pensais qu’il y avait des choses plus modernes à faire. J’adore les films de Demy mais ils sont assez datés. J’aimerais bien y revenir un jour. C’est par le cinéma que j’ai découvert toute la technique du son que j’adore traiter comme une matière. J’ai mon studio chez moi où je fais toutes mes maquettes. Je ne suis pas un auteur à guitare genre Dylan. Moi j’aime la musique dans son ensemble. C’est pour cela que j’ai pu réaliser des morceaux pour d’autres gens. J’aime bien être dans toutes les parties, je ne pourrais jamais ne pas réaliser moi-même mes disques. Sauf le mixage par ce que pour le coup cela me dépasse. Mais je suis présent au studio de dix heures du matin à deux heures du matin tous les jours de mixage. Par ce que je ne peux pas laisser ma musique dans la nature.
On sent un attachement très fort à ta musique…
S. : Oui mais même au son, pour moi la musique ne s’arrête pas à la chanson. Il y a le son et tout autour. La matière. Que cela soit plus où moins scintillant par exemple. C’est pour cela qu’à la fin d’un album je suis complètement exténué. Je suis tout de A à Z.
On pense beaucoup à Etienne Daho à l’écoute de l’EP…
S. : C’est un honneur. J’adore les débuts d’Etienne Daho. Je trouve que c’est un truc qui a eu un énorme impact en France. Les trois premiers albums je les trouve vraiment super c’est à la fois poétique, frais, simple et en même temps pop dans le sens commercial. Des vrais chansons mais avec un habillage. Ce que j’ai adoré dans cette scène là, Edith Nylon, Taxi Girl, c’est que le français est utilisé d’une façon cool. C’est parfois un peu flou par moments, cela peut également être hyper répétitif. Tu vois « Rebop » de Marie et les Garçons ? J’adore, ils répètent quatre fois « Moi sur la banquette et toi dans le hall de l’hôtel ». Et ils répètent ça du début à la fin du morceau. A cette époque le français était utilisé de façon musicale. Comme un instrument. Pour ça, cette scène là je la trouve vraiment super.
J’ai ressenti ce côté flou dans « En noir et blanc » où tu dis « la population mondiale c’est plus que la France fois dix ». Ca arrive comme un cheveu sur la soupe, je me suis dis mais de quoi il parle…
S. : C’est exactement ça. J’aime bien cette phrase par ce que quand elle arrive il y a un petit silence avant de repartir sur le refrain. C’est une phrase qui tombe à plat et tout le monde est là à se gratter le menton. On a rajouté une double voix dessus pour la faire vraiment ressortir. La phrase n’a aucun intérêt et c’est pour cela que je la trouvais pas mal.
Tu utilises beaucoup l’expression « oh oh oh » dans tes paroles…
S. : Sur le coup je ne m’en suis pas rendu compte mais cela m’a sauté aux oreilles après en réécoutant. C’est pour cela que sur le dos de la pochette quand on a voulu reproduire les paroles on a juste repris cette phrase « oh oh oh ».
Alors que nous prenons congé, l’attachée de presse revient chercher Séverin car le patron du label souhaite le voir. Séverin part alors les mains dans les poches, nonchalant, « bon ben salut, je part me faire engueuler… ». Sacré personnage…
Propos recueillis le 26 novembre 2010.
www.myspace.com/iciseverin
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jeudi 16 décembre 2010
Jeu-Concours Les Touffes Krétiennes
mardi 14 décembre 2010
Concert Les Touffes Krétiennes
lundi 13 décembre 2010
Buridane : « Comme avant »
Une guitare sèche et sa voix. Il n’en faut pas plus à la chanteuse Buridane pour faire partager son univers. Situé à la lisière du folk et de la chanson française, avec un certain sens du swing dans le poignet, ce qui évite une certaine lassitude du au contexte minimaliste. Ledit univers se fait tour à tour tendre ou plus grave, laissant apparaître quelques fêlures («En général », « Quand j’serais une fille », « Rapport à ») sur des tempos lents et des arpèges mélancoliques. A l’écoute de ces cinq titres, on est surtout frappé par les qualités d’écritures de l’artiste, tant au niveau des mots que des notes, et cette capacité à dire beaucoup en peu de temps, la composition la plus longue dure 2’37. Une brièveté à la fois bienvenue, à l’époque où tant de groupes abusent des longs formats offerts par le cd, mais aussi frustrante. On rêve maintenant de l’entendre sur la longueur d’un album.
France de Griessen : « Six Uses for a heart »
dimanche 12 décembre 2010
Les Haunted : « Vapeur Mauve »
Le saviez-vous ? Le fabuleux « Purple Haze » de Jimi Hendrix a fait l’objet d’une version française. En effet, le groupe psychédélique Québécois Les Haunted a transformé, dans les années 60, « Purple Haze » en « Vapeur Mauve ». Un moment d’anthologie pareil se passe de commentaires… Pardon, j’embrasse le ciel !!!!
Cotton Belly’s
Nouveau venu sur la scène blues française, le quintet Cotton Belly’s a la particularité d’évoluer dans un registre des plus ruraux. Un blues majoritairement acoustique, avec harmonica, guitare parfois slidée, basse ou contrebasse et batterie ou cajon suivant les configurations. Les membres du groupe sont tellement imprégnés de cette culture rurale qu’ils l’ont faite leur. L’exécution est parfaite, la voix sonne juste, les interventions de l’harmonica sont inspirées. Mais surtout, le groupe a su injecter une bonne dose de swing dans son blues. A ce titre l’entrée en matière est parfaite. Les trois premières plages, à savoir « Barbecue », « Cup song » et « Ghost baby blues » sont remarquables. On a beau parler de musique acoustique, cela déménage bien quand même sur un tempo plutôt enlevé. On est de suite transporté en plein bayou, les fourmis dans les jambes. Plus électrique et plus lente « Stranger at home » apporte un contrepoint intéressant et la touche de feeling indispensable à tout bon disque « bleu » qui se respecte. « Shy boy » explore une autre voie, plus minimaliste, où le seul accompagnement musical est constitué de claquement de mains, d’harmonica et un peu de contrabasse sur la fin. Les instrumentaux « La promenade du kid » au banjo et « Cotton Jig » sont teintées d’une couleur plus country. L’album va ainsi de surprises en surprises au gré des routes. Creusant toujours, peu ou prou, le même sillon, les Cotton Belly’s ont néanmoins réussi à trouver de la variété, tout en respectant une belle unité de son. Un excellent album.
mercredi 8 décembre 2010
Wonderflu : « Lota Schwager »
Avec ce mini-album (8 plages mais 7 chansons en vérité « Comeback » étant divisé en deux parties) le quatuor français Wonderflu renoue avec un style rock-indé qui de Nada Surf à Spoon en passant par Yo la Tengo et Death Cab for Cutie a fait le délice de nos oreilles pendant toutes les années 90. Et le groupe le fait avec style. Les influences parfaitement digérées et l’assimilation de l’anglais, Greg le chanteur a de plus une belle voix, font que le groupe propose un excellent disque. Tout simplement. Bonnes compositions et une belle production et c’est un petit exploit compte tenu de la faiblesse des moyens engagés. Le tout est extrêmement pop et mélodique (le baroque « Your Draw »), cependant quelques fulgurances électriques dignes du meilleur Sonic Youth, l’accélération de fin de morceau de « Travel », « Comeback » à la couleur métal, nous prouve que l’on bien affaire à un véritable groupe de rock. Qui mériterait bien qu’un label lui donne sa chance…
Carosel : Star
Déjà auteur d’un premier album en 2009, le duo irlandais Carosel, composé de la chanteuse Michelle Phelan et du guitariste Pete McGrane, sera de retour en janvier 2011 avec un tout nouvel album dont le présent EP donne un premier avant goût. De l’aveu même du duo, Carosel évolue dans un registre qu’il qualifie de « upbeat pop music ». Et effectivement, c’est un sentiment joyeux qui habite les quatre titres de l’EP. C’est frais, doux, mélodique et taillé sur mesure pour la voix enchanteresse de Michelle. Si le disque présente une belle unité de son et semble taillé dans le moule sixties, imprégné par les Beatles, Carosel n’en profite pas moins pour varier les plaisirs. « Something I need » est teinté de soul soyeuse, l’acoustique « Easy » lorgne du côté du folk typiquement britannique avec arrangement de vents et enfin « Take me » propose un petit pas de côté et sonne plus 80s, Michelle retrouvant les intonations d’une Blondie. Ce petit EP a définitivement un goût de trop peu tellement cet air joyeux est agréable. C’est comme un mini miracle, il suffit de presser le bouton play et d’un seul coup les soucis s’envolent et l’auditeur se trouve comme pris dans une vague d’optimisme. Et maintenant que le duo est installé à Paris, on va avoir la chance de pouvoir profiter d’eux souvent…
http://www.youtube.com/caroseltv
A consulter également le blog de Michelle Phelan racontant sa vie à Paris et sa passion pour la cuisine :
www.greenteaandbiscuits.wordpress.com
mardi 7 décembre 2010
Soirée Custom au Nouveau Casino
Séverin - Teaser Live Custom du 8 décembre
envoyé par CInq7. - Clip, interview et concert.
dimanche 5 décembre 2010
Electric Wizard : « Black Masses »
Le métal regroupe toute une kyrielle de sous-genre dans lesquels il est bien difficile de faire le tri. Aujourd’hui nous allons nous intéresser au doom et plus particulièrement aux anglais d’Electric Wizard, le magicien électrique plutôt cool comme nom, qui a sorti il y a quelques semaines son septième album « Black Masses ». Si Electric Wizard compte parmi les groupes les plus intéressant du heavy-metal, c’est par ce qu’il descend directement du début des années 70 sous l’influence de groupes tels que Black Sabbath ou Iron Butterfly qui ont posé les bases du doom. Le son d’Electric Wizard est fait de riffs de guitares assez lourds et de tempos plutôt lents. Les compositions sont également assez longues, dans le cas de « Black Masses » la chanson la plus courte « Turn off your mind » dure 5:51 minutes et la plus longue « Satyr IX » culmine à 9:58 minutes. Ce qui laisse de la place pour des délires acides et de longues plages hallucinogènes à base de guitares en fusion, ce dont ne se prive pas Electric Wizard également friand de rock psychédélique. Cet attirance pour les années 70 a d’ailleurs poussé le groupe a enregistrer son album précédent, « Witchcult today », uniquement avec du matériel provenant de cette décennie. Ce nouvel effort a également été intégralement enregistré en analogique. La pochette rend également hommage aux graphismes psychédéliques dont elle reproduit la typographie. Si vous n’avez pas peur du grand méchant loup, de leur look de gendres idéaux (sic) et êtes avides de sensations fortes, écoutez Electric Wizard, vous allez adorer…
www.myspace.com/electricwizarddorsetdoom
samedi 4 décembre 2010
Brandt Brauer Frick : « You make me real »
Avec cet album « You make me real », le trio allemand Brandt Brauer Frick, au nom composé des patronymes de ses fondateurs, s’impose dans un style que l’on pourrait qualifier de rétro-électro. Composé pour partie de musiciens venus de la scène club, Daniel Brandt et Jan Brauer, autrefois connu sous le nom de Scott, et d’autre part de Paul Frick, un ancien étudiant en composition sorti de l’université de Berlin, Brandt Brauer Frick tente de faire le lien entre la musique contemporaine et l’électro. Pour ce faire, le groupe utilise une palette assez large, du piano, des percussions, des cuivres, des cordes auxquelles s’ajoutent des beats et des samples. La démarche est extrêmement ambitieuse et rappelle à la fois les pionniers Kraftwerk, le Krautrock de Can, sans la voix car l’album est instrumental, et les musiques de films. Des thrillers particulièrement, car certaines plages distillent une angoisse sourde. On y distingue également un soupçon de jazz, mais d’obédience très très free. C’est ce subtil alliage qui donne cette tonalité unique à la fois rétro et moderne à cet effort. On navigue constamment entre deux eaux, jamais complètement synthétique, cf l’utilisation d’une instrumentation organique apportant de la chaleur et en gardant toujours l’aspect robotique et répétitif propres aux beats électro. Un pied dans le passé et le regard tourné vers le futur, Brandt Brauer Frick nous propose un album certes pas forcément facile d’accès mais excellent pour peu que l’on veuille bien lui accorder l’écoute attentive qu’il mérite. Mais au-delà, voilà un groupe qui a au moins le mérite de tenter le pari d’une musique innovante.
www.myspace.com/brandtbrauerfrick
vendredi 3 décembre 2010
Forget the Heroes : « Atomized »
Déjà auteur d’un premier album au titre évocateur « We don’t need guitar », le quatuor francilien Forget The Heroes est de retour avec son second effort intitulé « Atomized », with guitar inside, comme le précise la biographie du groupe. Misant sur une approche originale, le quatuor utilise une instrumentation assez peu ordinaire, dans le rock en tout cas, entre piano, contrebasse et violons, comme un croisement entre Ben Folds, les Auteurs et Cornu. A laquelle s’ajoute une batterie et effectivement des guitares. Mais l’élément le plus frappant, c’est la voix de la chanteuse et pianiste Corinne Carré au registre digne d’une chanteuse de jazz avec un coffre puissant. Finement armé, le quatuor nous plonge dans un grand bain musical entre pop, rock, jazz (« Ten memories ») et soul (« Distinct is your life »). Sur des rythmiques au swing sautillant, mais aussi plus dures à l’occasion (« Another lie »), les Forget The Heroes font montre d’un savoir-faire imparable en matière de songwriting aux mélodies instantanément mémorisables (« OhOohAhAha »). Au final le groupe nous propose un album très attachant et finement ciselé. Une belle découverte et qui sait peut-être de nouveaux héros ???
www.myspace.com/forgettheheroes
mercredi 1 décembre 2010
Electric Six, Le Trabendo, 29 novembre 2010.
On les avait un peu perdu de vue depuis leur formidable premier album « Fire », sorti en 2003, aussi la venue du sextet de Detroit, Electric Six, lundi dernier au Trabendo, avait tout d’un évènement, sept ans après leur premier (et unique) passage parisien lors de la première édition du festival Rock en Seine. L’attente autour du groupe était telle que le concert, à l’origine prévu à la boule noire, a du être déplacé au Trabendo, soit une salle à la capacité beaucoup plus grande. Il faut dire qu’Electric Six a su déjouer tous les pronostics. A la sortie de « Fire », seul disque du groupe à avoir bénéficié d’une sortie officielle en France (à ma connaissance), on ne donnait pas cher de la peau du groupe. Certes l’album en question et son urgente fusion disco/garage/hard rock est une pépite, mais le groupe serait-il capable de reproduire semblable brûlot ? Surtout que trois membres ont quitté le groupe à peine l’album sorti. D’ailleurs aujourd’hui ne subsiste plus de la formation qui a enregistré « Fire » que le seul chanteur, l’inénarrable Dick Valentine. Et bien non seulement Electric Six est toujours là, mais depuis 2005 le groupe tourne au rythme insensé d’un album par an, ce qui aujourd’hui porte leur discographie à sept albums et Dick Valentine a même trouvé le temps d’enregistrer un opus en solo. Ce qui n’est pas loin de faire d’eux le groupe le plus prolifique des années 2000. Lorsque la bande des six déboule sur scène, deux guitares, le synthé, la basse et le batteur, une interrogation parcours le public, car personne ne sait trop à quoi s’attendre. Ce groupe est finalement assez peu connu. Physiquement le chanteur Dick Valentine a bien changé depuis la photo du premier album, à peu près la seule que l’on connaît de lui. Sa voix aussi a évoluée ces sept dernières années, grave, une peu éraillée, son timbre est unique et fait de lui un chanteur assez marquant. C’est aussi un véritable showman, qui danse et saute un peu partout et reste une bête de scène même immobile. Il communique beaucoup avec le public, et place même une petite vanne sur notre Président, ce qui prouve qu’il s’intéresse aux pays qu’il visite. La relative méconnaissance du groupe par le public les a poussé à jouer un set très orienté sur le premier album : « Naked Pictures of your mother » (quel titre !), « Dance commander », le tube « Danger ! High voltage », « She’s white », « Improper dancing », « Gay Bar » et « Synthesizer ». Sept titres soit une bonne moitié de l’album en question. Que l’on s’est fait un grand plaisir de réécouter. Ceci étant, d’après ce que l’on en a entendu, le reste de leur répertoire n’a pas l’air moins efficace, certains titres ont même électrisé le public. Avec toujours cette fusion unique entre disco et gros rock. Tout un art d’être heavy et funky en même temps…
www.myspace.com/electricsixmusic
Electric Six - Danger High Voltage
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