Le titre évoque un vieil album de Bruce Springsteen. Mais les comparaisons s'arrêtent ici, Martha Reich évoluant sur un terrain bien différent de celui du boss. Aucune guitare, suffisamment rare pour être souligné en matière d'americana, mais un piano et un violon mélancoliques tissant une toile automnale sur laquelle se pose, comme une feuille morte, la voix éthérée de la chanteuse. Une chanson de saison en somme…
De tout temps une confusion a existé entre rock et blues, comme si la moindre note slidée ou la plus petite partie jouée ternaire suffisait à rendre la musique « bleue ». Le blues, Hoboken Division, devenu un trio avec ce deuxième album, le connaît, ne serait-ce que pour avoir grandi dans l'est de la France au milieu d'usines désaffectées. Ce nouvel album voit le groupe s'ancrer un peu plus profondément dans le blues mais aussi, plus généralement, dans le paysage des musiques raciniennes (cf. les échos country qui viennent hanter « 436 Procter Steet », le gospelisant « Oh lo' no mo' » ). Et pourtant Hoboken Division reste en dépit de tout un sacré groupe de rock n'roll (cf. les guitares rageuses de « Howlin' », vous êtes prévenus, tout est dans le titre). Oui, de rock n'roll (la précision est d'importance et il ne faut pas confondre avec ce que l'on appelle « le rock ») et dont l'écho se fait sentir dans la fureur qui habite le groupe. Ce fragile équilibre sur lequel repose le trio n'est pas sans rappeler les productions du label Fat Possum ("Lazy") et, dans ses meilleurs moments, la transe n'est jamais bien loin (la bien nommée « Boiling Up » toute en colère rentrée, la dérive psyché en eaux troubles de « Cold water »). Intense et habité, ce nouvel effort, leur meilleur à ce jour, voit le groupe passer une nouvelle étape d'importance. Pourvu que cela dure…
Teleferik, qui avait enflammé le Supersonic lors de notre concert du 9 juin dernier, vient de lancer une opération de crowdfunding afin de financer l'enregistrement de leur deuxième album en compagnie de Rizan Saïd, un ancien musicien d'Omar Souleyman (voir l'interview).
Si l'on s'amusait à dessiner une carte de France du rock, le gros quart nord-ouest du pays, une ligne qui en gros partirait de Lille pour s'arrêter à Nantes, apparaîtrait comme la plus attractive. Un peu normal si l'on considère que, longtemps, avant qu'internet ne rende tout cela obsolète, ce quart nord-ouest a été à portée d'ondes directe avec l'Angleterre, instaurant une tradition pop et rock qui perdure encore de nos jours. Basé à Guingamp, les Bretons de The Craftmen Club, un des fleurons rock du pays encore en activité, se trouve, logiquement, au cœur de notre ligne imaginaire.
Avec ce nouvel album, le cinquième depuis leurs débuts en 2001, il y a 16 ans (déjà!), The Craftmen Club continue, encore un peu plus profondément sa mue entamée avec le précédent album, le brillant « Eternal life ». Longtemps The Craftmen Club a été un chantre du rock garage, à fond les amplis et, à ce titre, leur disque « Thirty six minutes » (tout est dans le titre) est assez remarquable. Depuis, le groupe s'est converti aux vertus de la cold wave, sans pour autant renoncer à l'électricité (« Last trip »), noyant ses décibels sous une solide couche d'angoisse (« Colores », « Expect to crash », « Elevator »). Le groupe avait l'habitude de nous assommer sous les coups du boutoir, maintenant, il nous prend à la gorge, six cordes à l'appui (« La route »). Ce nouveau disque, « Colores », ouvre une brèche plus intime pour le groupe. Déjà, pour la première fois, les visages des musiciens s'affichent sur la pochette. Ensuite ce nouvel effort voit le groupe renouer avec sa langue maternelle, utilisée de manière assez cryptique (« Nos enfants rois »). Ce n'est certes pas une nouveauté, mais c'est suffisamment rare pour être souligné. Enfin, parmi cette nouvelle livrée, deux titres (« Le lac », « Le Lustre ») ont été enregistrés live en studio, sans retouche ni fioriture, documentant à merveille la facette rock n'roll mais aussi acoustique/western du quatuor. Pour le reste, on retrouve encore une fois avec délice ce mélange étonnant entre rock garage (les guitares crades) et cold wave (la rythmique d'une précision glaçante). Le résultat est excellent, une fois encore.
Se taire pour mieux retrouver sa voix, tel pourrait être le parcours de la musicienne, qui, est de retour après avoir respecté un vœu de silence au sein d'un couvent. Six longues années se sont écoulées depuis la sortie de son premier album. Aujourd'hui, l'artiste revient, différente, régénérée, rassérénée. Le silence a des bienfaits, sa voix est claire et limpide, elle sert à merveille des textes intimes, touchants et sincères. Ce nouvel effort a été conçu en petit comité. Ils sont trois à la manœuvre, une section rythmique accompagne la voix et la guitare de Lisa. Il en ressort un véritable effort de groupe où l'implication de chacun est maximale et cela s'entend. L'auditeur est ainsi invité à partager un moment d'intimité avec eux, un moment à part, suspendu dans le temps. Entre rock et chanson, le disque est un album de climats, les différents effets apposés sur la guitare permettent de varier les ambiances où la menace sous-jacente ne disparaît jamais tout à fait.
Une jonque posée sur la Seine, sur laquelle se reflètent les lumières de la ville à travers de grandes bains vitrées, le décor boisé est à la fois classe et vintage. Ce soir nous avons donc rendez-vous sur l'eau et finalement quoi de plus indiqué pour cette soirée accueillant deux groupes bretons ? On commence avec le duo The Blue Butter Pot. Une guitare et une batterie, le duo s'inscrit dans la longue lignée de ces groupes garage qui depuis le début du 21ème siècle donnent un nouveau souffle au blues et au rock n'roll (ne pas négliger le « roll » qui est, en l'espèce, très important). On pense notamment à Seasick Steve, logiquement repris en fin de programme. D'emblée le groupe semble surpuissant, la batterie est fine et précise, la frappe redoutable, et, de sa voix de gorge, l'immense chanteur barbu, ressemblant à un bonimenteur sur une fête foraine, conte ses histoires, et se joue avec maestria du bottelneck. Pourtant ce qui retient notre attention c'est la connivence entre les musiciens et ce dialogue, musical et incessant, entre eux. Les compositions jouent les prolongations et rebondissent dans des recoins insoupçonnés, chaque mouvement est l'occasion d'explorer une nouvelle idée. Derrière son kit, le batteur joue avec parcimonie de sa double pédale, un artefact typique du heavy metal beaucoup plus rare dans le blues. Utilisé intelligemment la chose renforce le groove et évoque un roulement de tambour typique de la Nouvelle-Orléans. Le set est tellement dense et compact qu'on a finalement l'impression d'avoir assisté à un concert de deux heures, tellement de choses à écouter et à découvrir, ce groupe est une magnifique découverte !
Dans un registre différent, mais tout aussi intense, on retrouve ensuite une ancienne connaissance en la personne du trio (Breton également) Wicked. Moins roots que le groupe précédent, Wicked donne sa version personnelle du blues, sous la forme d'une guitare magnifiquement slidée, mâtinée de rock (and roll, toujours) indé et de garage. Le groupe est précis et carré, pour un résultat puissant. La voix du chanteur ressemble à un râle débordant d'émotion et de feeling alors que la section rythmique laboure et creuse au maximum le champ des possibles. La guitare alterne entre riffs puissants et divagations noisy dans un déluge de larsen psychédélique. Le trio joue parfaitement le jeu de la tension/détente, l'intensité montant soudainement d'un cran, les aiguilles du potentiomètre à fond dans le rouge. Les musiciens sortent de scène totalement lessivés, ruisselant de sueur. A coup sûr, ce trio, assez rare sur nos scènes, mériterait de revenir plus souvent à la capitale.
Ce premier album scelle notre première rencontre avec le duo marseillais Date with Elvis. Et plutôt que de rencontrer Elvis, le rencard en question, serait plutôt celui entre le blues séculaire et le futur. Car c'est bien de cela qu'il est finalement question ici. Une guitare, une batterie, depuis l'avènement des Black Keys et des White Stripes, il y a, déjà, 15 ans de cela, la formule s'impose comme un cliché de plus en plus éculé du rock dans sa version 21ème siècle. Sauf qu'en confiant la production de son album à Kid Francescoli, un autre membre illustre de la scène phocéenne plus réputé dans les cercles électro que rock, le duo change la donne. Plutôt que refaire, le duo remet à jour. Et c'est le groupe tout entier qui semble reboosté, les basses vrombissent donnant du volume et de l'impulsion à la musique (le départ pétaradant de « Evil or love », « Ain't got no ») sans jamais négliger l'aspect rock (« How deep is your love ? », « I get dizzy ») et les guitares tranchantes (« One way or another », « Not Enough »). Ailleurs, l'intervention, aussi discrète que déterminante, de synthés éthérés apportent une note psyché/progressive (l'intro de « So glad »). Enfin, le duo se permet également une incursion exotique en territoire reggae (« Cool and calm »). La pochette, aux allures d'un cabinet de curiosités rococo, donne une image assez fidèle de l'album, fourmillant de détails et d'idées, en forme de petits trésors cachés que l'on découvre une écoute après l'autre. A classer près du nouvel album des No Money Kids.
Ancien collaborateur d'Air Louis Arlette occupe une place aussi singulière qu'inédite sur la scène française. Pas tout à fait rock, ni complètement industriel et bien plus qu'un héritier d'une nouvelle forme de chanson française teinté d'électro mais les trois en même temps, sacré mélange ! Ingénieur du son de formation, Louis a mis son apprentissage à profit pour livrer un disque parfaitement « mis en sons », et soigné dans les moindres détails, entraînant l'auditeur dans son univers tantôt oppressant (la brutale « A notre gloire » placée en ouverture) parfois lumineux (« Le moment est venu ») et toujours pleins d'emphase (« A la dérive »). Trois titres, complétés par deux versions live, absolument fascinants, on a hâte de plonger plus avant dans l'univers de Louis Arlette avec un premier LP attendu pour le mois de janvier 2018. Vivement la suite !
En concert à Paris (le hasard ludique) le 22 novembre.
Sortie après sortie, l'itinéraire de Trupa Trupa s'apparente à un conte de fée pop et contemporain. Il y a deux ans de cela, Trupa Trupa était inconnu au bataillon, cantonné à sa ville de Gdsank (Pologne). Et puis par chance, hasard, accident ou sérendipité, leur excellent album « Headache » est sorti chez nous faisant sensation dans le petit cercle pop indé. Ce nouvel effort sort dans un contexte différent. « Headache » nous a pris par surprise. Maintenant le groupe est attendu. Et le gant est relevé, haut la main. D'emblée le groupe nous semble plus audacieux, bâtissant des structures musicales complexes et alambiquées (« Against breaking heart of a breaking heart beauty ») œuvre d'une formation sans œillères et n'ayant pas froid aux yeux. Et on n'est alors pas loin de penser que le groupe a habilement intégré les influences psychédéliques et progressives à son œuvre (« Love supreme » sans aucun rapport avec John Coltrane). Mais l'album frappe fort en conciliant les contraires. Il y a tout d'abord cette évidence mélodique, cette ligne claire qui surplombe l'album (« Coffin », « Mist », « None of us », « Only good weather ») et condense quarante années de pop. Assumant la prise de risque jusqu'au bout, le quatuor polonais prend ensuite un malin plaisir à pervertir ses propres compositions par le biais d'une guitare bien sentie, d'un virage musical aussi surprenant qu'habilement négocié ou d'une irrésistible et impressionnante montée en pression (l'incroyable « Jolly new songs », « Never forget »). Désarçonné, l'auditeur ne sait plus trop à quel saint se vouer avant de se laisser prendre au piège de cette pop aussi vicieuse que vénéneuse. Brillant.
Sortie le 27/10.
En concert le 27/10 à Nantes (Festival Soy) et le 28/10 à Vendôme (Rockomotives)
Voilà un album qui, dans un monde parfait, devrait faire l'unanimité et truster durablement les ondes. Mais, ne rêvons pas, rien de ceci n'arrivera et c'est bien dommage… A défaut d'entrer en « rotation lourde » sur les ondes FM, le disque restera en « rotation continue » sur notre platine. Et il y a d'excellentes raisons à cela. Pour commencer, la facture même de l'album qui s'apparente à une sacrée collection de chansons. Voilà, dit comme ça c'est tout bête et cela n'a l'air de rien mais c'est énorme. Depuis quand n'avez-vous pas accroché à une mélodie dès la première écoute ? L'album s'apparente ainsi à un travail soigné, bien produit, bien écrit, les mélodies accrochent l'oreille avec insistance (« Lo is the new hi ») et l'acoustique chaleureuse déployée ici transporte l'auditeur. En effet, la base de tout reste en l'espèce le folk et les guitares acoustiques délicatement arpégées (« Des Incas et des Khmers »). Mais l'album brasse large et convoque une foule d'influences insoupçonnées et que l'on imaginait incompatibles. On pense ainsi tour à tour à The Cure (« Best kept secret ») à Nada Surf pour cette façon toute personnelle de maîtriser l'électricité dans une sorte de violence paradoxalement douce (la coda d' « Alpinisme » ; car notre homme a aussi le bon goût de chanter parfois en français) voire même à une étrange connexion entre Nick Drake et Chris Isaak quand Manolo laisse exprimer son timbre de crooner (« Ten thousand days »). Un spectre d'influences large et pourtant rendu parfaitement cohérent grâce à un magnifique travail de « mise en sons ». Autour de la voix et de la guitare, c'est une multitude de détails que l'on découvre au fil des écoutes successives, ces synthés discrètement cold wave, ces bizarreries quasi psychédéliques qui déboulent sans crier gare (« Bigger Blow »), ces guitares électrifiées avec une justesse rare et cette rythmique débordante de feeling (« Lentement »). Il ne faut guère plus d'une écoute pour entrer de plein pied dans l'univers de Manolo Redondo qui possède cet art rare de stimuler l'imagination de l'auditeur. La marque des grands disques.
La 22ème édition du festival est placée sous le signe des monstres... Du 10 au 23 novembre à Metz et au-delà (Nantes, Luxembourg, Paris, Montreuil. Soirée de lancement le 19/10 à la REcyclerie (entrée libre).
Accompagné de la doublette Peter (contrebasse) et Kenny (batterie) Washington (sans lien de parenté apparemment) le pianiste fait les beaux jours (ou plutôt les soirs) du Village Vanguard, le fameux jazz club new-yorkais. Rien d'étonnant dès lors que l'écoute de ce nouvel album nous projette dans le confort douillet d'un club, aux murs de briques rouges, dans un sous-sol enfumé. Installons-nous sur la banquette et laissons Charlap, le Maestro, nous guider derrière son clavier, tant les émotions affluent à l'écoute de ce nouveau disque. Séduisante, la musique du trio l'est assurément. A ce titre le morceau d'ouverture « Spring can really hang you up the most » est remarquable de rondeur et de délicatesse. Comme le reste de l'album qui n'oublie cependant pas de faire la part belle au swing sautillant, subtil et élégant (« Curtains », « Uptown, Downtown »), le tout dans un remarquable ascenseur émotionnel et délicat, les doigts glissant sur les touches d'ivoire. Du travail d'orfèvre, classique et facile d'accès, mais surtout soigné et solide, faisant son miel du Great American Songbook.
Deuxième EP pour le groupe lyonnais qui nous invite à un sacré cocktail musical qu'il nomme eux-même la « Hip Wave ». Bien évidemment c'est l'influence hip-hop qui saute aux oreilles notamment grâce à un flow coulé et mélodique (« Jump zone », « Osiris »). Mais, c'est lorsqu'ils se décident à chanter (« Born to cry ») que Big Junior nous étonne faisant preuve d'un étonnant éclectisme, tout comme la musique qui, sans négliger le beat hip hop, fait la part belle aux mélodies chassant sur le terrain de la pop électro parfois mu par une énergie rock (« Shoot to breeze »). On regrette toutefois l'orientation ostensiblement dance de l'ensemble qui nous empêche d'adhérer totalement au projet.
Connu, depuis les années 1970, pour son blues très musclé et finalement assez proche du rock n'roll, "Bad to the bone" comme il le disait autrefois, George Thorogood surprend son monde avec ce nouvel album en solo intégral. L'exercice n' a rien d'évident. Sur un mode introspectif, George Thorogood revisite son histoire musicale et reprend des titres qui l'ont touché, ont parfois été autant d'éléments déclencheurs, avec pour seul accompagnement une guitare, un harmonica et quelques percussions. Une belle occasion de rendre hommage à ses aînés saisie au vol. Mais solo ne signifie aucunement acoustique, ni répétitif. Au contraire, en alternant acoustique et électricité, même seul, Thorogood livre un effort aux nuances variées, rendant ainsi hommage aux différentes tendances qui, mises bout à bout, font le blues. Outre le bon goût affiché (Robert Johnson, Willie Dixon, Johnny Cash, Dylan, les Stones) l'occasion est riche pour nous de découvrir l'artiste sous un jour nouveau, plus intime, et de (re)découvrir des classiques (cf. « One bourbon, one scotch, one beer ») qui ont fait sa gloire sous un angle différent. Attachant.
Voici une exposition que l'on attend avec impatience et une curiosité grandissante. Du 11 octobre au 17 novembre la galerie Arts Factory accueille 80 artistes et 300 œuvres dans un grand croisement des genres, des icônes de la musique aux affiches détournées de cinéma d'improbables séries B. Le tout formant un panorama à 360° de la culture pop. Alléchant et immanquable !
Vernissage le 10/10 de 17h à 21h.
Du 11/10 au 17/11
Galerie Arts Factory
27 rue de Charonne - 75011 Paris
www.artsfactory.net
(c) Kata Billups courtesy Arts Factory – « elvis and the beatles », 2001
acrylique sur toile – 60 x 45 cm
(c) E.A. Heavy courtesy Arts Factory – « blood of jesus », 2001
affiche peinte sur sac de toile (ghana) – 150 x 100 cm
Et là, alors que l'on pousse la touche play et que la musique commence à résonner, on se dit que vraiment quelque chose ne tourne pas rond et que, dans le fond, cela devient assez désespérant. Non pas que le nouvel album de Nico nous file le cafard, loin s'en faut ! Simplement, ce nouvel effort nous rappelle qu'il se passe des choses fantastiques dans ce pays, dans un assourdissant silence médiatique. Car, oui ce nouveau disque est formidable et personne (ou presque) n'en parle. Tout est finalement dans le titre, « Dealing with my blues » nous aide définitivement à gérer le notre (de blues). Blues donc, mais pas que, Nico a eu la riche idée d'infuser une dose de rockabilly dans sa note bleue. On adore le jump général de la chose, le swing rond de la contrebasse, les cuivres de bon aloi et l'orgue pour la touche gospel et soulful. Et puis il y a la beauté brute et sèche de la chose, ces guitares balancées sans fioritures excessives et la voix éraillée (notez bien la petite brisure soul dans le fond de la gorge) qui se fond parfaitement dans le tout. La tonalité d'ensemble est rétro et baigne dans un ambiance délicieusement 50s, mais il nous semble bien plus important de souligner la fraîcheur de la musique plutôt que son côté vintage, même si ce dernier participe pleinement au charme dégagé par le disque. Un album qui donne la pèche !
On l'attendait depuis longtemps, le voilà, le premier album de Lux, au contenu totalement original, sans aucun titre repris de leur premier EP, saluons l'effort pour commencer. Lux rêve donc en super 8 ainsi que semble l'indiquer le titre. Pour continuer dans la métaphore cinématographique, « Super 8 » (l'album) ressemble à ces petits films indépendants US, que l'on affectionnait tant dans les années 1990. Pas de gros moyens mais fait avec beaucoup de cœur, voire d'amour, et dégageant un charme certain dès la première écoute. Rien que du très classique cependant, des guitares (folk ou électriques), une voix, la basse et la batterie. Sans rechercher à tout prix à participer à la course à l’échalote du vintage, on sent bien que les musiciens ont baigné dans cette culture rock des années 1960 et 1970, un certain sens du classicisme qu'ils interprètent à leur tour. Le tout est assez sage, les décibels sont maîtrisées (« Damaged », « While waiting »), mais cela leur convient particulièrement bien. La voix ronde et mélodique de la chanteuse Angela Randall brille de mille feux alors que Sylvain Laforge, à la guitare, maîtrise son sujet. Pas d'effets de manche superflus, pas de saturation assommante, Lux se fait fort de remettre au goût du jour des notions telles que la mélodie et le songwriting. Le guitariste en particulier brille dans ce contexte, mettant sa virtuosité au service de la chanson et non l'inverse (« Rough Translation », « Island ») alors que Julien Boisseau (basse) et Franck Ballier (batterie) offrent une assise rythmique solide, feutrée à l'occasion ou groovy sans ostentation. Il en résulte un album sonnant comme un classique immédiat, pensé pour durer et être réécouté (pas la moindre des qualités à l'époque du streaming jetable) au charme évident. Pas la grande révolution mais un album très soigné, produit au millimètre et intrinsèquement attachant. Voilà un disque qui ravira tous les fans du classic rock. On y reviendra, ça c'est sur…