Le prolifique et talentueux pianiste belge est de retour
avec un nouvel album, « Sing Twice ! », le troisième en autant
d’années. Après son dernier effort instrumental, ce disque marque le retour
d’Eric Legnini vers un jazz vocal grâce aux collaborations avec le chanteur Hugh
Coltman (sur trois titres) et les chanteuses Namani Keita (deux titres) et Emi
Meyer (un titre). Chaque voix marque ce disque de son empreinte, qui s’il reste
foncièrement jazz prend parfois des atours pop. Dans cette optique, les trois
titres chantés par Hugh Coltman sont clairement pop et Hugh, dans un registre
nouveau pour lui, joue l’atout charme du crooner. Namani Keita incarnerait
plutôt l’Afrique et le retour aux sources, dans la lignée du travail entamé par
le pianiste sur l’album « The vox ». Enfin, « Winter
Heron », titre né de la collaboration avec l’Americano-Japonaise Emi
Meyer, abat une carte folk et acoustique. Si la formule en trio (piano,
contrebasse, batterie) reste le cœur de la musique d’Eric Legnini, ce dernier
ne s’interdit pas quelques écarts, histoire de varier un peu les plaisirs.
L’utilisation de cuivres, de claviers vintage (fender rhodes) et d’une guitare
électrique apporte une note plus funky, plus marquée par les années 1970, rappelant
Stevie Wonder. Enfin, la session est complétée par quatre compositions
instrumentales, notamment la très belle « Cinecittà », double hommage
d’Eric à l’Italie originelle mais aussi à l’art cinématographique. Une réussite
supplémentaire dans la carrière de cet artiste talentueux et attachant.
dimanche 31 mars 2013
samedi 30 mars 2013
The Boogie Ramblers : « The Lack of blues is the root of all evil »
Les Yellow Dogs séparés (provisoirement ?), il n’aura
pas fallu très longtemps au chanteur/guitariste Yannick Dorel pour rebondir
avec sa nouvelle formation The Boogie Ramblers. Si la note est toujours et
encore bleue, ce nouveau groupe marque une évolution dans la musique de
Yannick. Les Yellow Dogs étaient un power trio très influencés par la scène
british boom et le son des années 1960/1970. Les Boogie Ramblers
approfondissent encore plus les influences. Nouveau line-up, une contrebasse et
un harmonica font leur apparition, une batterie et Yannick au chant et à la
guitare complètent la formation. La contrebasse apporte un swing nouveau et le
son se rapproche encore plus des origines, il y a quelque chose d’assez fifties
dans cette approche. L’harmonica amène de la diversité et permet d’échapper au sempiternel
solo de guitare. De fait, la guitare se concentre essentiellement sur le
rythme, le shuffle (exception faite de « Teeny bit of your love »).
Pour bien saisir les différences il suffit d’écouter « Cheap beer and
shuffle » puisque la chanson a été enregistrée par les deux groupes. En
bon adorateur de blues, et plutôt doué qui plus est, Yannick et son nouveau
groupe ont, une fois de plus, sorti un bon petit maxi (8 titres) joué et
enregistré avec passion. Comme ils le disent si bien eux-mêmes le manque de
blues est la racine de tous les maux, alors vous savez ce qui vous reste à
faire…
En téléchargement libre :
http://boogieramblers.bandcamp.com/
jeudi 28 mars 2013
dimanche 24 mars 2013
Duel : Vertiges #2
L’aventure de Julien Boulfray et Brieuc Carnaille continue
avec ce deuxième maxi, « Vertiges #2 » (Rappelons que dans le but de
fidéliser son public, Duel s’est mis en tête de sortir un nouveau maxi chaque
trimestre). Ce nouvel EP de quatre titres commence avec l’excellente
« Hey, tu ne me manquera plus », véritable tube pop en puissance que
l’on avait découvert sur l’ep précédent. C’est hélas pratiquement le meilleur
moment du disque. Les trois titres suivants les voient continuer leurs
expérimentations, lorgnant cette fois vers la french pop des années 1980.
Beaucoup de synthés donc, des boîtes à rythmes et peu de guitares de ci de là. Si
l’objectif était de faire un disque rétro, c’est alors parfaitement réussi. Si
vos oreilles n’ont pas gardé un bon souvenir des années 1980, dans ce cas la
déception est au rendez-vous. C’est dommage dans la mesure où Duel possède des
qualités d’écriture, tant pour la musique que pour les textes, plutôt
intéressantes. Sans ces encombrants arrangements, certaines chansons auraient
été très réussies, « Les roses de la nuit » notamment. Moins marquée
par les eighties « L’aurore » clôt cet ep mi-figue, mi-raisin sur une
excellente note, avec toujours cette impression tenace que ce groupe est
capable de beaucoup mieux.
jeudi 21 mars 2013
Hifiklub + The Legendary Tiger Man : « Ghost of Nico »
Après Brian Wilson (voir le post d’hier), les français
d’Hifiklub continuent de présenter leurs hommages aux géants du rock
s’attaquant cette fois au répertoire de Nico, ex-mannequin Allemand et ancienne
égérie du Velvet Underground dans les années 1960. Pour l’occasion, Hifiklub
reçoit un renfort de poids en la personne du Legendary Tiger Man (a.k.a Paulo
Furtado, fantasque leader des géniaux Wraygunn). Ces quatre titres commencent
de la meilleure des façons avec « One More Chance » morceau au tempo
lent et aux guitares hypnotiques, grand numéro de charme de Paulo qui chante
avec une voix lascive (quel chanteur tout de même !). On pourrait en dire
autant de « Femme Fatale » (une des meilleures chansons jamais
composée par le Velvet), qui poursuit dans la même lancée et prolonge cet état
de grâce. Une rupture de ton s’opère dès la troisième plage « Win a
few », plus expérimentale et aux guitares abrasives. Une approche noisy
dans la plus pure tradition New-Yorkaise qui rappelle un peu un autre groupe
mythique de la grosse pomme, Sonic Youth. Enfin, « It was a pleasure
then » clôt cette session sur un mini tour de force de 6 minutes. Bien
fait, respectueux de la tradition du Velvet tout en réussissant quelque part à
réinventer la musique du velours underground, voici un bon petit maxi, bien
sympathique.
Libellés :
Hifiklub,
The Legendary Tiger Man
mercredi 20 mars 2013
Hifiklub : « Smiled »
C’est à l’occasion d’une exposition sur Brian Wilson, que
les français de Hifiklub ont enregistré ce maxi de trois titres en hommage à
« Smile », l’album maudit des Beach Boys. Et le titre et la pochette
sont un décalque malin de l’œuvre originale. On pourrait en dire autant de la
musique. Des Beach Boys, Hifiklub a gardé l’esprit et modernisé la lettre. Le
chant est soigné, autant que dans l’original. La musique a subi un sérieux
lifting, on a bien affaire à un disque du 21ème siècle pas une pale
copie des années 1960. C’est particulièrement vrai sur « Mrs O’Leary’s
Cow », tour de force de 10 minutes pour moitié constitué de manipulations
sonores et autres bruitages électro avant que les guitares n’entrent en action. Pouvait-on rendre un plus bel hommage au génie de Brian Wilson ? En prime deux réinterprétations de « Vega-tables », l’une très réussie
et l’autre à cappella plus proche de l’originale. Les reprises sont réussies
dans la mesure où elles réinventent les morceaux originaux. A découvrir.
lundi 18 mars 2013
Lady
Lady, c’est la rencontre fortuite de deux voix. Celle de
l’anglaise Terri Walker et de l’américaine Nicole Wray. C’est aussi un coup de
cœur immédiat. Duo sans leader, Terri et Nicole s’échange les rôles avec bon
cœur, à toi à moi, le lead ou les chœurs. Signé sur l’excellent label de
Brooklyn, Truth & Soul, un des meilleurs à l’heure actuelle en matière de
soul avec les cousins de chez Daptone, Lady sort son premier album, très
attendu après les premiers extraits diffusés en fin d’année dernière, avec
l’aide du groupe maison, The Expressions (ceux là même qui accompagnent
habituellement Lee Fields). On a beau en avoir l’habitude, on reste une fois de
plus pantois devant le résultat. Lorsqu’elle est jouée avec autant d’amour et
de passion, il est tout simplement impossible de se lasser de cette soul music
estampillée 60s/70s. Les voix des deux chanteuses sont magnifiques, et pour le
coup, véritablement soulful, des frissons vous parcourent la colonne vertébrale
à l’écoute. Les émotions se bousculent. Musicalement, le rendu est impeccable,
le niveau de finesse des arrangements, cuivres, cordes, harmonies vocales est
hallucinant (« Karma »). Le disque pulse à point servi par une
section rythmique pleine de groove, avec en prime des percussions que l'on jurerait tout droit sorties de chez l'immense Curtis Mayfield. Entre autres réussites citons notamment « Good
lovin » qui s’éloigne un peu de la tonalité Motown de l’ensemble, pour un
son plus psychédélique. Une impeccable réussite.
http://truthandsoulrecords.com/artists/lady/
dimanche 17 mars 2013
Séquence 8, Casino de Paris, 16 mars 2013.
Quatre ans après son dernier passage dans la Capitale, la
très athlétique troupe Québécoise les sept doigts est de retour avec sa
nouvelle production « Séquence 8 ». Huit, comme le nombre d’artistes
présents sur scène, chacun ayant droit à une séquence le mettant en vedette.
Sur un fond musical choisi avec soin, les danseurs/acrobates/gymnastes se
donnent en spectacle avec une impressionnante intensité de tous les instants.
Séquence 8, c’est de l’acrobatie de haute volée. Les danseurs et danseuses,
évoluant avec grâce, lancent un défi constant aux lois de la gravité et de
l’attraction terrestre. Un festival de salto sur balançoire, de trapèze ou un
stupéfiant numéro sur un trampoline/barre. Les risques encourus font froid dans
le dos. Plus d’une fois le public reste stupéfait cloué au fauteuil. Les
mélomanes apprécieront le numéro de percussion chorégraphié à partir de cubes.
Absolument renversant.
samedi 16 mars 2013
Duplex + Elliott Murphy & The Normandy All-Stars, New Morning, 15 mars 2013.
Voici venu le temps du pèlerinage annuel au New Morning pour
fêter l’anniversaire d’Elliott Murphy… Mais comme l’année dernière, la soirée
commence avec Duplex, le groupe mené par son fils Gaspard Murphy
« surexcité mais un peu stressé », auquel il revient l’honneur
d’assurer la première partie. Depuis un an, on avait eu peu de nouvelles de
Duplex. Les musiciens mûrissent tranquillement leur projet qui a beaucoup évolué.
Déjà comme le dit Gaspard : « On a pris des cours de piano ». De
fait deux synthés ont fait leur apparition et apportent une touche à la fois
pop et électro. Les deux guitaristes se faisant parfois face chacun sur son
clavier. Pourtant Duplex reste un groupe de rock français (car Gaspard chante
dans la langue de Molière), les guitares ont pris de l’épaisseur, le ton
général s’est durci. Le batteur Tom en particulier n’avait pas fait une aussi
forte impression il y a un an. L’assise rythmique est phénoménale, plus rien
n’arrête le groupe ainsi lancé. Comme chez les Smashing Pumpkins, une jeune et
jolie jeune fille tiens la basse avec beaucoup de talent. Plusieurs nouvelles
compositions, assez chouettes, et comme l’an dernier, une reprise de Bruce
Springsteen pour finir, le groupe jette cette fois son dévolu sur « Adam
raised a Cain ». Grosse débauche d’énergie, c’est donc en nage que nos
musiciens quittent la scène avant de revenir remballer le matériel, car c’est
un peu le destin du rocker, devenir une superstar ou porter son ampli soi-même…
Duplex un projet en voie de maturation auquel il ne manque plus qu’une sortie
discographique pour valider le chemin parcouru en un an. Pour bientôt
peut-être, on l’espère en tout cas…
On retrouve ensuite le papa, Elliott comme d’habitude
entouré de ses musiciens français, le Normandy All-Stars, soit le guitar-hero
Olivier Durand, Laurent Prado à la basse et le batteur Alain Fatras. Mine de
rien, Elliott s’apprête à sortir son quarantième album, « It takes a
worried man », ce qui au final donne la moyenne insensée d’un album par an
depuis ses débuts en 1973. Incroyable. Compositeur fin et lettré (également
auteur de plusieurs romans) Elliott Murphy est toujours autant marqué par Bob
Dylan et évolue dans un registre un peu similaire entre folk et rock n’roll. Plusieurs
nouvelles compositions furent jouées, avec toujours, cette qualité de
composition qui le caractérise. On retrouve avec beaucoup de plaisir les
classiques anciens « The last of the rock stars » ou plus récents
« Take that devil out of me ». Pour la nouveauté, cette année on a
enfin eu la confirmation que le groupe sait danser. Sur la fin Gaspard vient
rejoindre son père sur scène et se lance dans de formidables chorus de guitares
en duo avec Olivier. Le concert se termine dans un unplugged absolu, avec un
chouette morceau country, Olivier à la mandoline (c’est une nouveauté) et une
reprise magnifique de Neil Young : « Rockin in the free world ».
L’avantage quand on a une notoriété assez réduite, comme Elliott, c’est de pouvoir
entretenir des relations humaines avec ses fans, les salles sont de taille
raisonnable, le public (souvent des habitués) répond présent chaque année et
est particulièrement réceptif. Le concert se déroule dans une ambiance bon
enfant, l’audience est comme emballée dans une sorte de vibration collective,
on lève les mains en l’air, on danse. C’est beau de voir un type fêter ses
quarante ans de carrière et rocker comme au premier jour. A des années lumières
de ces performances ou le professionnalisme prime pour ne laisser aucune place
à l’émotion. Ca fait du bien. Conseil, réservez votre week end pour l’année
prochaine.
https://www.facebook.com/duplexduplex
jeudi 14 mars 2013
Mankoora : « El Loco »
Premier quarante-cinq tours pour ce groupe. La face A,
« El loco », à peine commencée, la température grimpe rapidement pour
atteindre des valeurs affolantes. Mankoora donne dans le funk (instrumental)
latin. Au programme donc, des orgues complètement folles, des percussions au
sprint avec quelques coups de cuivres pour la bonne mesure. La face B,
« Boogaloo Tormenta », est à peu près similaire et commence par une
affolante intro au piano. L’influence du jazz se fait sentir sur les deux
titres par le biais de soli de trompettes bien sentis et dans la construction
générale des morceaux. Bien que respectueux d’une tradition funk héritée des
années 1970 et les deux faces sont animées d’une dynamique bien de notre
époque. C’est chaud !
mercredi 13 mars 2013
Edwyn Collins : « Understated »
Auteur d’un tube mondial, « A girl like you » en
1994, l’Ecossais Edwyn Collins est de retour avec un nouvel album
« Undrestated ». Rien que du très classique me diriez-vous ?
Sauf que dans l’intervalle, victime d’un AVC en 2005, on a bien cru Edwyn
Collins perdu pour la musique voire même la vie tout court. Bien au contraire,
c’est un Edwyn remonté comme une pendule et plein de projets tout azimut que
l’on retrouve. L’épisode n’est cependant pas occulté et fait l’objet d’une
chanson absolument déchirante « Forsooth » ou Edwyn proclame son
amour de l’existence sur une mélodie qui n’est pas sans rappeler « Sunday
Morning » du Velvet Underground groupe qui « a changé ma vie à 15
ans »*. C’est symptomatique de ce disque, le monde change tout autour,
Edwyn reste attaché à certaines valeurs : « Les refrains sont très
importants pour moi. J’aime avoir des hooks, des accroches mélodiques »*.
Ce disque se présente donc comme un album à l’ancienne, celle d’un songwriter
maîtrisant ses classiques sur le bout des doigts. A titre d’exemple, les
meilleurs plages sont certainement « Carry on, carry on » et « Too
bad » aux accents Motown. Varié, du rock n’roll, de la pop, de blue eyed
soul, un soupçon de country, « Down the line », l’album ne souffre
absolument pas de ce classicisme, c’est au contraire un gage de qualité. D’un
bout à l’autre, la voix de crooner d’Edwyn Collins, miraculeusement épargnée,
trône au dessus de la mêlée et semble mue par une force inébranlable :
celle de la vie.
* Propos recueillis le 1er mars 2013.
www.edwyncollins.com
mardi 12 mars 2013
The Spinto Band + Duel, Le Point Ephémère, 11 mars 2013.
Présent en première partie Duel (dont on avait évoqué le premier ep ici) illustre bien la difficulté de chroniquer les artistes en
développement. Le duo de guitaristes/chanteurs, formé de Julien et Brieuc, est
pour la scène renforcé par un troisième membre préposé aux claviers, samples et
boîtes à rythmes. Toujours en gestation, le projet n’a pas encore de contours
biens définis. Duel, cherche, expérimente et cela s’entends. Si on peut parfois
regretter l’importance prises par les boucles sonores et la rigidité imposée
par l’utilisation d’une boîte à rythme, la musique de Duel révèle pourtant
parfois des moments d’une évidence mélodique limpide :
« Caramel », « Mourir au combat » ou le tube en puissance
« Hey tu ne me manqueras plus ». C’est finalement lorsque l’accent
est mis sur les guitares (une acoustique et une électrique) que l’on apprécie
le plus le duo. Dans ses meilleurs moments, Duel emporte littéralement
l’auditeur dans une virée onirique au pays du son. A noter également une
excellente reprise du « There is a light that never goes out » des
Smiths et Dieu sait qu’il n’est pas aisé de se glisser dans les pénates de
personnalités aussi fortes que Marr et Morrissey. Une prestation en demi teinte
donc, pas dénuée de qualités, loin s’en faut, mais la formule n’est pas encore
complètement rodée, simple question de temps.
C’est ensuite avec un plaisir non feint que l’on retrouve
The Spinto Band, quintet (guitares, basse, claviers, batterie) originaire du
Delaware (suffisamment rare pour être souligné). On pourrait croire que le
Spinto Band, parce qu’il pratique un univers coloré et enfantin où se côtoient
kazoo (« Brown Boxes ») et mandoline (« Oh Mandy ») et
s’amuse à reprendre « Brazil », est un groupe pop gentillet. Erreur
fondamentale. Certes, la pop du groupe est colorée, fun et toujours optimiste.
En studio. Tel un iceberg, une fois sur scène, le groupe révèle une face
immergée bien différente. Celle d’un groupe de rock indé redoutable boosté par une
section rythmique à toute épreuve. Dôté d’un jeu de scène assez expressif,
Thomas Hughes à la basse est d’une précision sans faille. Son approche de
l’instrument est pour le moins originale mais efficace. Derrière sa batterie,
Jeff Hobson frappe ses toms avec une impressionnante puissance, assez
inattendue. Et le fait que le groupe ait perdu un guitariste, ils ne sont plus
que deux contre trois précédemment, n’a en rien altéré cet aspect rock.
« Late » ou « Direct to helmet » sont quasiment garage/punk.
C’est aussi avec grand plaisir que l’on a retrouvé le tube inusable « Oh
Mandy », dans une nouvelle version sans mandoline mais axée sur les
guitares, qui en huit ans n’a pas pris une ride. A noter aussi les chouettes
harmonies vocales du groupe. Enfants naturels de la scène power pop indé des
années 1990 (Nada Surf, Weezer, Spoon, Death Cab for Cutie etc…) The Spinto
Band prend la relève avec beaucoup de classe.
dimanche 10 mars 2013
Interview avec Yann Destal
(c) Nadia Gric |
Leader de Modjo à la fin des années 1990 avec un tube dance
à la clé, « Lady » en 2000, Yann Destal s’est lancé en solo en 2004
avec son album « The Great Blue Scar » qui fût un échec commercial.
Depuis Yann a plus ou moins disparu des radars et tente de revenir à son
inspiration première, la pop et le rock des années 1960 et 1970… Rencontre avec
un phénomène…
Ton précédent album date de 2004, que s’est-il passé
depuis ?
Yann Destal : Pour moi, ce disque c’était le début de
mon projet en solo. Le disque n’a pas été un succès commercial, loin de là.
Depuis je me suis séparé de ma maison de disque de l’époque, j’ai renoué avec
« la musique sans référent », c'est-à-dire sans personne à qui devoir
rendre des comptes.
C'est-à-dire ?
YD : Quand tu es signé, tu fais ton morceau après ton
directeur artistique l’écoute, on te donne un avis ensuite tu parles avec
quelqu’un d’autre… De fil en aiguille tu dialogues avec des gens, ce qui peut
être bien mais pas toujours. Et le dialogue n’est pas forcément artistique.
C’est cliché mais c’est ce que j’ai vécu. La séparation avec le label s’est
bien passée, d’un commun accord. Je crois que l’on était tous contents de se
libérer. Pendant un temps j’ai apprécié de refaire de la musique, je n’ai jamais
cessé d’enregistrer, j’ai mon propre studio. J’ai eu besoin de me retrouver
intérieurement, de renouer avec le but premier de la musique à savoir un mode
d’expression personnelle. Un plaisir. Parfois le système dans lequel on est
poussé, peut détourner de l’artistique à la longue. Moi j’ai apprécié pendant
quelques années d’en être débarrassé. Depuis, j’ai fini par rencontrer des
gens, ma manageuse, l’agence de presse, avec qui j’ai le sentiment de vivre
quelque chose d’humain ; l’artistique est préservé. J’ai eu aussi besoin
de reconnecter avec le public. De refaire surface.
Parlons musique, quelle est la part d’expérimentation dans
ton travail ? Tes morceaux sont en général très produits, les arrangements
sont très précis, comment ça se passe ? Je pense à « You know
me » en particulier…
YD : C’est assez bizarre, chaque morceau à son propre
scénario. Bon parfois le scénario n’a rien de spectaculaire. Pour « You
know me », c’était assez rigolo, au départ on m’avait demandé un
instrumental pour un autre artiste. Et puis mon amie de l’époque m’avait
dit : « Mais ce morceau, tu peux pas le donner il faut le garder
pour toi ! ». C’est ce que je pensais de toute façon. J’en suis très
content. J’aime beaucoup la progression harmonique, il y a beaucoup d’accords, c’est
un peu expérimental, du point de vue harmonique en tout cas. Les voix qui
passent, c’est un système que j’ai inventé : un chant tellement retraité
qui finit par sonner comme un instrument. Je porte un masque pendant les
concerts, je l’appelle l’effet dauphin. Il faut que cela soit
« inhumain ». Pas dans le sens monstrueux mais plutôt comme quelque
chose qui vient d’ailleurs. La voix ne doit pas sonner comme
« humaine ». Et c’est le masque qui incarne le personnage de cette
voix. J’ai vérifié sur internet, je crois que personne n’avait jamais fait ça
avant. C’est mon invention, c’est cool.
L'effet Dauphin (c) Nadia Gric |
On parlait de la précision de tes arrangements, ta musique
est-elle difficile à retranscrire sur scène ?
YD : C’est un challenge. Il faut faire des choix. Pour
beaucoup de morceaux, il y a vraiment un suspense avant de les aborder avec les
musiciens pour la scène : est-ce que ça va marcher ou pas ? Jusqu’à
présent ça marche, en général. Pour les morceaux important du moins. Comme
« Let me be mine » ou il y a un truc de production important qui fait
que ça monte tout le temps, crescendo. On a utilisé beaucoup de pistes en
studio, je n’étais pas sur d’y arriver avec seulement cinq musiciens sur scène.
Finalement, je suis très content de la version live. Et même d’ailleurs
souvent, les gens qui découvrent la musique en concert me disent qu’ils
préfèrent les versions live aux versions studio. Ca me fait plaisir mais ça
m’inquiète aussi un peu. Quand les versions live sont réussies, tu as une
énergie qu’on ne peut pas retrouver en studio. Mais il s’agit de deux choses
distinctes dont le but est différent. Le disque tu vas l’écouter chez toi,
tranquille, l’objectif n’est pas de faire hurler le public. Les versions live
en revanche doivent être plus émotionnelles. Le concert c’est moment unique,
plus violent.
Le concert c’est aussi une expérience…
YD : Personnellement c’est ce que je préfère. La
musique que j’écoute quand je suis chez moi, c’est à 80 % des enregistrements
en public. Quelque soit l’artiste. Et d’ailleurs quasiment jamais des live
officiels. Des bootlegs trouvés sur internet. Quand je suis fan d’un artiste,
j’écoute toute la tournée, je choisis mes versions préférées selon les
concerts. Quand ce n’est pas retravaillé. Les versions live bootlegs ne sont
pas celles qui ont été choisies pour être des versions live officielles. Tu
entends le mec un peu fatigué, là tu as vraiment accès à l’artiste. Réellement,
c’est ce qui m’intéresse le plus. Le concert c’est primordial. Mon but c’est un
jour de faire une version live par chanson que je puisse considérer comme la
version ultime du morceau, supérieure au studio. J’enregistre tous mes
concerts. C’est aussi important de se réécouter pour pouvoir progresser. Il y a
toujours un petit truc à trouver pour que cela marche de mieux en mieux.
Surtout pour mes arrangements qui sont très précis.
Ta voix m’a rappelé Jeff Buckley, pour les montées dans les
aigüs…
YD : Jeff Buckley, c’est un chanteur incroyable.
Pourtant je ne l’ai pas beaucoup écouté. Il fait partie de ces « chanteurs
pièges » quand tu es chanteur toi-même. A force de les écouter, tu vas
reprendre leurs mimiques. Tu vas t’effacer à leur profit sans même t’en rendre
compte. Et après pour s’en débarrasser… J’espère ne pas être trop tombé dedans.
Il y a beaucoup de gens qui ont influencé ma façon de chanter. Buckley en fait
partie, pour les montées dans les hauteurs. C’est de plus en plus rare
d’exploiter ces registres « ténor » de la voix. Je ne sais pas
pourquoi…
Il faut déjà en être capable déjà…
YD : Je pense que l’humain en est capable. Dans les
années 60 et 70, surtout en Angleterre, il y avait des chanteurs qui allaient
dans ces hauteurs là. Moi je trouve ça important. Il y a une sorte de vérité
physique. Même si le mec devient ensuite une super star qui se la pète, en
attendant, en concert, pour atteindre sa note, le gars est obligé de
s’impliquer physiquement. Pour de vrai. C’est aussi une prise de risque, on est
dans les extrêmes. Je sais que personnellement, je n’ai pas une grande marge de
sécurité. Je ne vais que là où je peux aller. Suivant la forme physique. Ce qui
fait que chaque concert est différent. Je suis dans un combat. C’est pour ça
que les notes hautes m’intéressent, le challenge. Quand je l’écoute chez un
autre artiste, il y a quelque chose qui me touche. C’est un peu comme le sport,
un truc physique.
Revenons à ton travail en studio, quand la musique est
autant travaillée que la tienne, il n’y a pas un risque de se perdre dans un
dédale de pistes et de possibilités ?
YD : Si, si, ouais. Moi j’essaye de faire aussi concis
que possible, de ne pas trop en rajouter. C’est à la fin que je remarque que
c’est assez riche. En tout cas chaque arrangement est là par ce que je
l’entends et pas pour faire tiens et si je rajoutais ça et ça. Au contraire de
l’album précédent d’ailleurs. Dès que j’entendais une note c’est par ce qu’elle
devait y être. J’essayais de respecter l’inspiration sans la brider. Là j’ai
essayé d’épurer un peu sans tomber dans le truc avec juste une voix et une
guitare. En tout cas je n’ai pas la sensation de me perdre. Mais ça peut être
un piège.
Personnellement, j’ai eu besoin de deux, trois écoutes pour
vraiment rentrer dedans. J’ai été un peu déstabilisé au départ…
YD : Oui, c’est vrai qu’il y a pas mal d’arrangements
mais il y aurait pu en avoir beaucoup plus…
(c) Nadia Gric |
Un petit mot sur la reprise des Beatles, « Oh
Darling » ?
YD : J’aime bien faire des reprises en général, c’est
un peu mon école. C’est comme ça que j’apprends en reprenant des choses qui ne
sont pas forcément dans mon registre. Quand tu chantes que tes propres
compositions tu ne vas pas avoir accès aux idées des autres. Je joue toutes les
semaines des reprises dans un bar. Je ne communique pas dessus, j’en ai besoin
pour la gym vocale, pour tester de nouvelles techniques de chant. « Oh
darling » était une de ces reprises. J’ai fait un peu comme sur mon
premier album, j’ai adapté la chanson en mineur. Ca peut paraître un peu
scolaire mais c’est une émotion très concrète. Ca apporte de la noirceur, de la
profondeur. Ca se prêtait bien à cette chanson, qui n’est pas très connue.
C’est aussi un de ces moments où McCartney se déchire la voix sur des paroles
un peu blues, un peu bateau, genre « tu m’as quitté, je vais mourir
etc… ». Je me suis dit que sans ces influences blues, le titre prenait une
autre dimension, assez intéressante à écouter. J’étais content du résultat
alors je l’ai gardé. C’est une reprise à la base c’était plus pour faire un
exercice. Une curiosité, je voulais le tenter. Et puis les reprises c’est un
truc qui se fait beaucoup de nos jours, peut-être un peu trop d’ailleurs, mais
bon une seule ça va. Un album de reprises, ça ne serait pas un vrai album. Et
puis beaucoup des reprises que j’entends en ce moment, c’est en fait des
versions modernes auto-tunée. Quoi qu’il en soit, ça dénote un manque
d’inspiration. Dans l’album il n’y en aura pas deux, c’est sur.
On qualifie souvent ta musique de
« cinématographique », je pense notamment à « Stand by me »
qui est un peu western. Ca te plairait de travailler pour le cinéma ?
YD : Ca m’est déjà arrivé quelquefois. J’ai plus fait
l’acteur alors que je ne suis absolument pas comédien. Mais comme on me le
proposait. Faire de la musique pour le cinéma, oui ça me dirait bien. Tu n’es
pas le premier à me faire la remarque concernant l’aspect cinématographique de
mes morceaux. Ce n’est pas intentionnel. C’est difficile d’expliquer pourquoi…
On sent qu’il y a un climat, une ambiance dans tes chansons…
YD : Dans ma tête une chanson c’est souvent comme une
scène, quand tu décris quelque chose qui se passe. La chanson c’est un moyen de
communiquer une émotion, une situation.
Pourquoi avoir fait le choix de chanter en anglais ?
C’était évident, compte tenu de tes influences ?
YD : Ce n’est pas un choix idéologique, au contraire,
je trouve que c’est très bien de chanter en français. En fait je crois que je
n’ai pas tellement le choix. Mon père était très mélomane, sa passion c’était
d’écouter de la musique, il n’en faisait pas. Beaucoup de groupes anglo-saxons.
Et du coup, quand je compose aussi bien la musique que les textes, c’est
beaucoup dans cette veine anglo-saxonne. J’aime beaucoup certains français mais
qui eux-mêmes ont beaucoup piocher chez les anglais : Polnareff, William
Sheller, Balavoine, Gainsbourg. Et puis je trouve qu’il y a un talent et une
sensibilité musicale particulière chez les anglo-saxons qui me touche plus que
la tradition française. Nous on n’est plus dans les textes et la qualité
d’interprétation. J’essaye de prendre ce qu’il y a de mieux dans l’un et dans
l’autre, la sensibilité musicale des Beatles, la qualité d’interprétation de
Jacques Brel.
Et chanter en français ?
YD : Ca m’est arrivé. Ca dépend de l’inspiration. J’ai
fait un morceau en français par ce qu’il m’était venu comme ça. Il n’est jamais
sorti, je ne sais pas trop quoi en faire. C’était dans ma période « maison
de disques ». On aurait pu croire qu’ils me le demandaient, ils le
faisaient d’ailleurs, mais c’était là par hasard. J’ai hésité à le faire. Ils
insistaient tellement que si je leur montrais que je savais écrire en français,
j’allais tomber dans une sorte de piège, condamné à chanter en français. Ca
fait partie des choses qui font que je suis content de ne plus être en maison
de disques. On avait fait un clip d’ailleurs mais qui n’est jamais sorti,
encore pour des raisons propres au système…
Peut-on qualifier ta musique de psychédélique ?
YD : Ca ne fait pas un peu drogué ?
Je pensais surtout au rock de la fin des années 1960…
YD : Moi j’adore. Ce n’est pas le seul style de musique
que j’écoute. C’est vrai qu’il y a un côté un peu « space »,
déconnecté de la réalité, qui veut voyager dans l’imaginaire. Un peu
science-fiction. J’aime bien ce côté-là, onirique.
Ta bio indique que tu es détaché des modes et des formats…
YD : Je suis bien obligé de le constater. Je suis assez
peu référencé, très peu relayé par les médias. J’aimerai bien trouver une place
dans le système, un public. Mais c’est vrai que je n’aime pas les modes, je ne
regarde plus la télé. Il y a une sorte d’endoctrinement de la pensée que je
trouve dangereux. J’essaye de me rappeler qui je suis. Depuis que je ne regarde
plus la télé, j’ai l’impression d’avoir une pensée plus large, d’après mon
propre ressenti, plutôt que d’avoir le choix entre deux avis. Je suis
hors-format.
Propos recueillis le 13 juin 2012.
http://yanndestalmusic.com/index.html
jeudi 7 mars 2013
Caroline Lacaze : « L’étrange »
Repérée récemment sur le dernier album des Mighty Mocambos
(qui en leur temps accompagnaient Gizelle Smith), Caroline Lacaze réussi cet
exploit inespéré faire groover la langue française. Rencontre entre la chanson
et un accompagnement musical digne du meilleur de la soul contemporaine (les
labels Daptone et Truth & Soul), le premier quarante-cinq tours de
Caroline, « L’étrange » porte bien son nom. Le résultat est
terriblement excitant. Le premier album de Caroline Lacaze, « En
route », est prévu pour le mois prochain. Affaire à suivre…
mercredi 6 mars 2013
Smoove : « First Class »
Du jazz aux sonorités latines, en passant par le funk ou la
soul, c’est à un joli voyage musical que nous convie Smoove. On peut toutefois
regretter le parti pris de production club qui tend à niveler le tout et à
gommer la formidable finesse rythmique de la musique. Il y a de tout façon peu
à attendre d’un album de remixes, si ce n’est de fournir de la matière pour
danser le samedi soir. Mission réussie haut la main en l’espèce.
mardi 5 mars 2013
Lily after midnight : « These are strange days »
Lily after midnight, projet bien français comme son patronyme ne
l’indique pas, porte bien son nom. Acoustique, délicat et mélodique, les six
titres de cet ep sont tout indiqués pour une écoute nocturne. Lily pratique
l’intimité musicale et enregistre en petit comité, de la guitare acoustique, du
violoncelle et un piano de temps en temps. C’est peu mais en l’espèce c’est
parfait, soyeux. Il n’en faut guère plus pour que la magie opère et mettre en
valeur le timbre délicat de Lily. Seul petit reproche, certaines compositions
n’auraient pas souffert d’être plus courtes. Un univers très féminin qui ravira
les romantiques aimant rêver en musique.
dimanche 3 mars 2013
Adieu Daniel.
Je suis triste. Profondément triste. Daniel Darc a été
retrouvé mort dans son appartement parisien le jeudi 28 février 2013 à l’age de
53 ans. Durant sa carrière débuté à la fin des années 1970 au sein de Taxi
Girl, Daniel aura connu quelques hauts (grosso modo « Cherchez le
garçon » en 1980 puis à partir de l’album « Crève cœur » en
2004) et beaucoup de bas. Très, très bas. Daniel avait survécu à un nombre
incroyable d’overdoses et s’étonnait encore de n’avoir jamais contracté le
sida, comme par miracle. A la fin, on l’imaginait solide comme un roc,
indestructible. Et tellement fragile en même temps, dramatiquement humain.
Romantique. Ecorché. Sur scène Daniel faisait preuve d’un investissement sans
limite, comme on a pu le voir à l’Olympia en 2008. Tellement intense, qu’il
pouvait quelque part mettre mal à l’aise. Comme il le chantait dans son chef
d’œuvre « Nijinsky » (sorti en 1994, le disque est aujourd’hui
scandaleusement introuvable) : « N’ayez aucun remord, le jour de mes
obsèques, au-dessus de mon corps, Dieu dansera avec ». Adieu Daniel,
repose en paix.
Daniel Darc - Nijinski par chubbydebu
samedi 2 mars 2013
Portrait Edwyn Collins.
L’image est forte et émouvante, limite choquante. En cette
fin d’après-midi, un vendredi d’hiver, Edwyn Collins, l’auteur du tube « A
girl like you » en 1994, sort péniblement d’un café situé sur le boulevard
Saint-Michel. Victime d’un AVC en 2005, l’homme est depuis hémiplégique, cet
épisode dramatique fera bientôt l’objet d’un documentaire. Son bras droit reste
désespérément bloqué, il peine à se mouvoir, marche à l’aide d’une canne et a
parfois du mal à s’exprimer. Ce qui ne l’empêche pourtant pas d’être
extrêmement volubile. Prévue pour durer une demi-heure, l’interview s’est
finalement étalée sur une durée double. Sa dévouée manageuse, Grace, veille sur
lui avec soin. On s’en doute et l'ex-leader d'Orange Juice l’admet bien volontiers, l’épisode entier
à changé sa perspective sur sa vie : « Je suis beaucoup plus relax.
Je profite de l’existence. Tranquille. Le fils d’un vieil ami à moi, dans
mon petit village d’Ecosse, a essayé de se suicider. La dépression tu
comprends, c’est sérieux. Je suis allé le voir, je lui ai dis : mais
pourquoi t’as fait ça ? Ne recommence plus jamais, la vie est précieuse !
Il m’a dit : oui Edwyn ». Collins affiche un sourire satisfait.
« La vie se joue au hasard » reprend-t-il. « Regarde Grant
MacLennan (ancien membre des Go-Betweens, décédé d’une crise cardiaque en 2006)
il est mort comme ça du jour au lendemain. Après l‘attaque je me suis senti
renaître. Je suis heureux, j’adore ma vie. C’est juste génial d’être
ici ».
Edwyn Collins n’a pas pour autant tiré un trait sur sa vie
professionnelle. Un nouvel album « Understated » sort ce mois-ci,
« mon deuxième depuis l’accident. Déjà. C’est incroyable ». Et
s’apprête même à reprendre la route. Le chanteur est également producteur (deux
albums avec Little Barrie notamment) et possède même son propre label :
AED qui signifie Analogic Enhanced Digital, « une blague que personne ne
comprend », se marre-t-il. « On a sorti cinq disques sur ce nouveau
label. Tu vois à 19 ans j’avais déjà mon propre label Postcard records. Voilà
la boucle est bouclée ». Si Edwyn ne peut plus, hélas, jouer de la
guitare, il chante toujours. Mieux que jamais même. Son timbre de crooner fait
des merveilles sur ce nouveau disque. « Oh oui, j’ai toujours été un
crooner. J’adore Iggy Pop. Sinatra a eu une influence énorme sur moi ».
Enregistré avec l’aide de quelques amis, Paul Cook, l’ex-Sex Pistols à la
batterie et Barrie Cadogan, « un guitariste extraordinaire », ce
nouvel album est excellent.
Rien de tout cela n’aurait été possible sans le succès
phénoménal et mondial rencontré par « A girl like you », son tube de
1994. « La chanson est plus célèbre que moi » rigole-t-il, ce qui
semble être confirmé par les faits ; depuis une heure les touristes vont
et viennent dans le petit hall d’hôtel sans que personne ne semble lui porter
la moindre attention. « Je ne regrette absolument rien de ce titre. Cette
chanson m’a fait vivre depuis des années. Le succès est arrivé assez très tardivement,
j’avais déjà trente cinq ans à l’époque et plus de 15 ans de carrière, je n’ai
pas pété les plombs. J’étais déjà très cynique, sarcastique concernant le
business à cette époque. Avant j’étais signé chez Polydor. Le chef de projet
avec qui je travaillais, c’était n’importe quoi. Un jour il me disait de faire
de la soul music. Le lendemain, je devais devenir gothique et plagier les Cure.
J’ai vite compris que si je voulais continuer, il fallait que je construise mon
propre studio et que je contrôle tout du début à la fin. C’est ce que j’ai
fait. Le premier album que j’ai enregistré en étant propriétaire du studio
c’était « Gorgeous George » (et la fameuse chanson « A girl like
you ») qui a été un succès phénoménal on a eu de la chance. Ce succès a
été un cadeau, cela m’a permis de rester libre, d’expérimenter. Depuis je suis
un peu en marge du business musical. Et franchement ce n’est pas une mauvaise
place. Je regarde les autres s’agiter et moi je fais mon truc dans mon coin. Et
même si aujourd’hui je passe pour un « one hit wonder », le type qui
n’a réussi qu’une seule chanson dans sa vie, c’est plus que la majorité des
gens ne peuvent espérer ».
Propos recueillis le 1er mars 2013.
Libellés :
Edwyn Collins,
Interview,
Portrait
vendredi 1 mars 2013
La Mauvaise Voie, Théâtre le passage vers les étoiles, 28 février 2013.
Alors que les lumières s’éteignent et que résonnent les
premières notes de piano, le silence se fait dans la salle. C’est parti pour le
grand voyage dans le temps. Nous sommes dans les années 1960 et alors que la
France s’industrialise, cette chose étrange appelée « l’autoroute »
fait son apparition. Deux caractères s’opposent la folle Vémina (jouée avec
conviction par Laura Woody, par ailleurs membre des Barettes) qui a pour
ambition de tout détruire et de dominer le monde et la vaillante équipe du
Macadam, petit cabaret dont le plus grand malheur est de se trouver sur le chemin
de ladite autoroute, bien décidée à ne pas se laisser exproprier...
Si le sujet peut paraître grave, la pièce ne l’est
absolument pas. Fun et légèreté sont ici les maîtres mots. Sur une bande son jazz
et pop, intégralement jouée en live par une excellente pianiste, la jeune
troupe joue danse et chante avec entrain. Les chorégraphies sont un
enchantement et l’ensemble du casting donne de la voix avec talent. Les
costumes ont été choisis avec soin et même le décor, pourtant spartiate et
minimaliste possède ce petit charme suranné. La pièce toute entière est portée
avec une énergie communicative par son casting de jeunes acteurs. Allez les
voir, c’est l’assurance de passer un moment drôle et, au final, une bonne
soirée.
Théâtre Passage vers les étoiles, 17 cité Joly 75011 Paris.
Prochaine représentation le 21 mars 2013 (21h00)
Réservations au 09 50 00 60 17
http://www.billetreduc.com/85053/evt.htm
Retrouvez la mauvaise voie en juillet prochain lors du
festival d’Avignon.
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