(c) Cooper |
Est-ce que tu as un
lien particulier avec la France ?
Bill Pritchard :
Mon premier contact avec la France, c'est un quarante-cinq tours de
chez Vogue que m'a offert mon Grand-Père. Il ne savait pas du tout
ce que c'était. J'adorais le design, le logo Vogue, tout ça.
J'avais neuf ans. Bien sur à l'époque, je ne comprenais rien. Les
années ont passées et je suis allé à l'université à Bordeaux.
J'ai fait de la radio libre là-bas. J'ai découvert les chanteurs
français des années 1960, le mouvement yéyé. Beaucoup de punk
aussi. Il y avait un mouvement punk très intéressant à l'époque,
les situationistes. A l'université j'étudiais le français et
l'allemand (dans le civil, Bill Pritchard est professeur de français,
ndlr). Les écrivains, les poètes, les politiques français
m'enchantaient. J'étais captivé.
Tu as habité à Paris
aussi ?
B.P. : Oui, je
connais tellement de monde ici. C'est vraiment dommage de ne rester
qu'un seul soir. Beaucoup de gens viennent me trouver et me disent :
« Salut Bill, où t'étais passé ? » (Rires).
Tu ne reviens pas
tellement souvent, non ?
B.P. : Non c'est
vrai. C'est la première fois depuis six ans. Je suis venu en France
en Août, j'ai fait un concert en Normandie. Je suis content d'avoir
cette opportunité de revenir. Cela coïncidait avec ma tournée en
Allemagne.
Ton dernier album « A trip to the coast » est arrivé un peu par surprise. Honnêtement, je pensais que tu t'étais retiré...
B.P : Moi aussi je
le pensais (rires) ! Le disque a été fait avec mon ami Tim
Bradshaw. On s'est rencontré au début des années 1990 avant son
déménagement aux Etats-Unis. C'est un musicien professionnel, c'est
son boulot. C'est aussi mon pote, un des meilleurs. Un jour il
m'appelle : « Bill, je suis de retour ». Moi j'avais
compris qu'il était revenu vivre à Londres. Je lui ai dit :
« Tu sais Tim, je n'aime pas tellement aller à Londres ».
Je suis un peu casanier, j'aime bien rester à la maison. Et là il
me dit : « Non, non, Bill j'ai déménagé à Stoke, à
deux rues de chez toi ! ». Et voilà, il fallait
absolument qu'on fasse quelque chose ensemble ! De fil en
aiguille, on a fait cet album ensemble, chez moi, à la maison.
Ensuite, Remy le bassiste m'a suggéré de trouver un label, il
trouvait le résultat vraiment bon. J'ai pensé oui, pourquoi pas ?
Tout ça c'est fait de manière très spontanée. Il n'y avait pas de
plan pour faire un album tout les sept ans ou quelque chose dans le
genre. Ca c'est fait comme ça, c'est tout...
Ce nouveau disque est
très acoustique, contrairement au précédent, « By Paris, by
accident » qui était plus électronique. Un peu comme un
classique instantané...
B.P : C'est
amusant parce que, au début, on n'avait pas du tout l'intention de
le sortir dans le commerce. On l'a fait avec nos propres moyens et
après on est allé chercher un label. En fait on a vraiment fait ce
qu'on a voulu. Tim et moi, on vient du même coin d'Angleterre et
c'est un album très anglais. Il y a beaucoup de différents endroits
d'Angleterre dans ce disque. Et merci pour le compliment ! Ca me
fait ma journée.
Souvent, dans tes
chansons on retrouve des références géographiques bien précises...
B.P : Cet album a
beaucoup à voir avec le mouvement, l'avion, le vol, la transition. Beaucoup
de choses ont changées dans ma vie ces derniers temps. La
transition, le mouvement, tout ça se termine par ce voyage sur la
côte (A trip to the coast, ndlr). On part de Stoke, où on habite
avec Tim, et on finit à Anglesey, là où habite mon Papa.
Un petit mot sur tes
chansons parisiennes « Paname » et « Pigalle on a
tuesday is charming » ?
B.P. : « Pigalle
on a tuesday is charming », c'est une chanson intéressante.
J'étais assis dans ce restaurant à hamburger à Pigalle. Wendy's
burger ou quelque chose comme ça. Je ne me souviens plus du nom, ça
n'était pas une chaine. Enfin, c'était un mardi, en 1988, je
regardais les gens aller et venir. Et voilà !
Les chansons de ton
dernier album me font penser à Elliott Murphy. Tu le connais ?
B.P : On s'est
rencontré une fois. On a fait un concert ensemble au Rex Club. Un
mec très bien. C'est très agréable de parler avec lui. Un type
calme.
Un petit mot sur la
pochette ? Elle ressemble un peu à une carte postale. Je me
suis dit, tiens Bill est de retour, il nous envoie une carte postale
avec de nouvelles chansons ?
B.P : C'est
exactement ça, tous les sept ans j'envoie une carte postale avec de
nouvelles chansons (rires) ! Quelqu'un m'a demandé pourquoi ça
m'avait pris autant de temps pour faire un nouveau disque. Moi je dis
simplement, pour ceux que cela intéresse, je ne suis pas encore
mort ! Je suis toujours vivant et voilà ce qui se passe
maintenant ! C'est exactement comme une carte postale. Tu vois
là ,sur la pochette, c'est Anglesey, une station balnéaire où
j'allais enfant. C'est une île au nord du Pays de Galles. La plage
est incroyable. On voulait que les couleurs correspondent à la
musique. C'est pour cela qu'on a choisi ces tons...
La pochette de "Jolie" (1991) signée Anton Corbijn |
La plage, l'océan c'est quelque chose qui t'inspire ? Je pense notamment à la pochette de « Jolie »...
B.P : Oui, c'est
vrai. Mais la photo en question a été prise dans le désert à Los
Angeles. On ne pouvait pas être plus éloigné de la mer. C'était
dans le coin du Joshua Tree. Mais je vois ce que tu veux dire, on a
l'impression que la plage est juste à côté. La photo est signée
Anton Corbijn (devenu depuis réalisateur de cinéma cf. Control, The
American, A most wanted man, ndlr), je pense qu'il voulait donner
cette impression de bord de mer. Et c'est son écriture sur la
pochette. Il aimait la musique et voulait s'occuper de la pochette
dans son intégralité. Il avait une vision. C'est très réussi,
c'est un type très talentueux.
Tu ne tournes pas
tellement en ce moment...
B.P : Seulement en
Allemagne. Mais je vois ce que tu veux dire, d'ordinaire je ne fais
qu'un seul concert par an ! Il faut vraiment que je revienne.
J'en ai envie.
En 1988 tu as
enregistré un album avec Daniel Darc « Parce que ». Quel
souvenir tu gardes de lui ?
B.P (ému) :
C'était un type très rigolo avec un grand sens de l'humour. Et un
très grand parolier. Peut-être bien le meilleur.
Un rigolo, vraiment ?
B.P : Oh oui !
Mais il y a une ambiguïté, ses chansons sont tellement sombres. En
fait les chansons de Daniel sont pleines d'humour, mais c'est un
humour loin d'être évident. Ses paroles sont très honnêtes, il
disait toujours la vérité. Et je me souviens de lui parce que nous
sommes tous les deux gauchers. En fait je pense qu'il était le seul
type encore plus gauche que moi ! Il était tellement maladroit.
Tout le temps en train de renverser des trucs. Un type très
talentueux. Probalement le meilleur parolier que j'ai jamais
rencontré.
C'est le concert en son
hommage ce soir. C'est émouvant pour toi d'être ici ?
B.P (il chuchote,
ému) : C'est très touchant. Je voulais venir à ses
funérailles. Finalement je n'ai pas pu, c'était à Paris, c'était
compliqué. J'ai voulu participer à ce concert hommage dès que j'en
ai entendu parler. C'est ma manière de lui dire au revoir. Je ne
vais jouer que trois chansons, mais cela sera bien. Spontané. C'est
ce que je voulais.
Propos recueillis le 24 mai 2014.
Many Thanks to Bill for his kindness.
Propos recueillis le 24 mai 2014.
Many Thanks to Bill for his kindness.
http://www.billpritchardmusic.com/
Tommy & Co (1989)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire