samedi 26 juin 2021

Fredda, Studio de l’Ermitage, 25 juin 2021.


Venue de la chanson française, Fredda a évolué vers des sonorités plus rock après un séjour prolongé dans l’Arizona, tout en conservant l’habitude d’écrire ses textes en français. Sur scène, elle se présente en duo en compagnie du guitariste Pascal Parisot (et de sa magnifique guitare vintage ressemblant à une jazzmaster) pour défricher ces espaces musicaux entre pop et chanson sur lesquels souffle le vent du désert de l’Arizona, surtout quand un harmonica fait son apparition. Une sonorité chaude assez indéfinissable où résonnent les fantômes du blues ou de la musique western mais qui, bien évidemment, ne ressemble à rien de tout cela. C’est une note intrinsèquement rock’n’roll qui habite la musique du duo. Régulièrement, la musique est entrecoupée de lectures, de poèmes, renforçant l’essence littéraire (et surtout poétique) de la musique de Fredda. La complicité entre les deux musiciens, pratiquant tous deux la guitare et les claviers, saute aux oreilles des spectateurs. Une approche intime qui sied particulièrement bien aux compositions et qui trouve l’écrin idoine dans l’ambiance cosy du Studio de l’Ermitage. Le retour dans les salles de concert fut magnifique, merci !


mercredi 23 juin 2021

Jay and The Cooks : « Le Cœur Sec »

 


Parmi tout le contingent de musiciens/chanteurs étasuniens exilés en France, Jay Ryan (résident français depuis 1980) fait figure d’exception : il écrit et chante en français ! Actif auprès de fines gâchettes de 1980 à 1999 (Elliott Murphy, Jesse Garon, Jacno, Johan Asherton), Jay s’est ensuite éloigné de la musique, pour se consacrer aux fourneaux, afin de mieux y revenir il y a une dizaine d’années accompagné d’un nouveau groupe, les bien nommés The Cooks. Ce nouvel effort, le quatrième, de la formation propulse l’auditeur en terra incognita. Car si Jay a adopté le français, il a aussi gardé intacte sa dévotion aux idiomes typiquement américains : country ou blues, teintés de rockabilly, tous chantés dans la langue de Molière, on a rarement entendu ça (cf. la reprise improbable du « Je suis venu te dire que je m’en vais » de Serge Gainsbourg) ! Finalement, les seules références existantes seraient à rechercher du côté du Québec. Ainsi, l’album se révèle rare mais surtout passionnant à plus d’un titre. Outre le geste musical impeccable (tous les fans de country, de blues ou de rockabilly peuvent plonger les yeux fermés), le chant rocailleux transpirant le vécu, les textes en français ouvrent une perspective extérieure sur les vicissitudes de notre beau pays (cf. « Travailleurs essentiels »), forcément intéressante. Au-delà de son angle curieux ou exotique, l’album éveille l’intérêt et décloisonne l’oreille. A découvrir, forcément !

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dimanche 20 juin 2021

Popa Chubby : « Tinfoil Hat »



Le plus beau des héritages laissé par le confinement sera certainement toute cette série d’albums « fait à la maison ». Un disque entièrement solo où l’artiste assure lui-même tous les instruments, Paul McCartney l’a fait, Popa Chubby aussi ! Ce dernier, bien esseulé après l’arrêt de sa tournée, du jour au lendemain, après une dernière date en Floride, a plongé la tête la première dans l’inconnu, imposé par la pandémie, en faisant ce qu’il fait de mieux : un disque ! Et « Baby put on your mask » tel qu’il le chante sur ce nouvel effort ! Retrouvant l’usage d’instruments qu’il ne pratique pas en temps ordinaire (on pense notamment à la batterie) Popa assure, avec le minimum de technique nécessaire mais le plus de cœur possible. Ainsi ce nouvel effort s’inscrit dans la lignée récente de l’artiste où, enfin apaisé à l’aube de sa sixième décennie, il sort ses meilleurs disques, avec le supplément d’âme qui fait toute la différence (« No justice, no peace ») muselant ses envies électriques pour enfin trouver la note juste (« You ain’t said shit »). Un cri, du cœur, d’amour, de rage et de colère aussi, bref, un album humain et attachant. Solide !

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samedi 19 juin 2021

Mustang : « Memento Mori »

 


Alors, avouons-le tout de go, pour les véritables amoureux du rock’n’roll, les purs et durs, le cas posé par le trio semble insoluble… Le seul fait que le groupe qualifie sa musique de Krautabilly résume assez bien la chose. Car il est indéniable que l’on sente chez ce groupe une attirance pour les années 1960, question de classe et de guitares, entre rockabilly et surf, qui s’emballent telles un Mustang (le cheval) au triple galop (cf. « Le Vin »). Mais parce qu’il ne serait pas assez amusant de se contenter de la redite, aussi excellente soit-elle, le groupe a toujours parsemé sa musique de synthés tout droit sortis des années 80 qui sont longtemps, avouons-le, tombés sur la musique comme un cheveu sur la soupe. Mais rien de tel ici ! Quatre albums c’est le temps qu’il aura fallu au trio mené par Jean Felzine pour maîtriser, avec maestria, cet étonnant mariage. Sur ce nouvel effort, les claviers s’intègrent naturellement à la musique, sans la dénaturer, accentuant même le swing de la musique (cf. « Loyal et honnête ») apportant une fraîcheur euphorisante. Et puis il y a la plume « piquante » de Felzine, on pourrait dérouler le totalité de la tracklisting et dénombrer autant de punchlines. Mais cela serait beaucoup trop facile car, une fois le premier degré passé, on distingue dans les textes un véritable talent pour saisir l’air de l’époque (« Fils de machin », « Pôle emploi gueule de bois »), épingler les petites hypocrisies du quotidien avec un humour ravageur (« Pas de Paris ») mais aussi célébrer les plaisirs hédonistes de la vie (« Le Vin »). Les mots sont portés avec classe par le chant de Jean Felzine, en véritable crooner des temps modernes, dont on ne soulignera jamais assez la qualité, en termes de prononciation, et d’articulation. Un excellent album à l’élégance d’un autre âge.

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mercredi 16 juin 2021

Gaelle Buswel : « Your Journey »

 


Ce nouvel effort de la chanteuse débute par le morceau « Your Journey » (également le titre de l’album) : ton voyage. Pourtant, c’est surtout le parcours de Gaëlle qui est passionnant. Si l’on poursuit dans cette voie de la métaphore, ledit parcours serait un road-trip. Quelques éléments de décors, un long ruban de bitume, marquage au sol jaune, de la poussière qui se soulève au passage de la bagnole, le ciel d’un bleu céruléen, soleil de plomb au-dessus de la tête et des cactus sur le côté. Vous aurez certainement reconnu le grand ouest étasunien et c’est heureux, Gaëlle vient de produire la bande son idéale pour ce genre de voyage ! Si dans les faits, la musicienne s’éloigne, un peu, du blues au profit d’une approche frontale plus rock, le feeling reste, perceptible, notamment, au-travers d’une guitare slidée avec délice. Le changement s’accompagne d’une transformation vocale, plus affirmée, plus posée, la chanteuse s’affirme avec une autorité nouvelle et une petite cassure soul au fond de la gorge (« Razor’s Age »). Enfin, ne comptez par sur Gaëlle pour jouer la carte de la redite. Certes les influences du rock des années 60/70 sont présentes un peu partout sur l’album, dans le son des guitares et dans les riffs (« Perfect Foil »). Mais, parfaitement digérées, ces dernières sont habillées d’un nouveau costume, résolument contemporain, au moyen d’une production dynamique qui déboîte.

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lundi 14 juin 2021

Fredda : « Bisolaire »

 


Les yeux mi-clos sur la pochette, la chanteuse apparaît mystérieuse, présente et absente en même temps, mais quels tourments peuvent-ils bien habiter l’artiste ? L’album s’intitule « Bisolaire », terme inventé pour l’occasion et qui, en l’occurrence, lui va ravir. Car, chez Fredda, la mélancolie brille, scintille, et la musique réchauffe (les cœurs surtout) deux fois plus qu’ailleurs. Onze titres donc, tous chantés en français, habités d’une évidence mélodique rare, pop, folk et, surtout, intime. Le nombre des intervenants est volontairement limité, le tout forme un petit cercle restreint auquel l’auditeur est invité avec délice. Sans être ascétique, le disque est arrangé, avec soin. Chaque intervention doit se justifier, chaque note doit faire trembler la corde sensible. En équilibre, toujours, le chant oscille et manque de basculer à de nombreuses reprises (cf. « Primitive »). Finalement, seule l’émotion compte. Et elles affluent en nombre à l’écoute d’un tel disque.

En concert (!!!) le 24 juin à Paris (Studio de l’Ermitage)

http://fredda-music.com/

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mercredi 9 juin 2021

Nika Leeflang Project : « Bad Sunday »

 


Un mauvais dimanche avec Nika Leeflang ça n’existe pas ! Pas plus qu’un autre jour de la semaine soit dit en passant. Tout simplement parce que son grain de voix chaud, délicat et légèrement éraillé au fond de la gorge agit comme un baume propre à réchauffer toutes les peines du monde, en anglais comme en français. Ajoutez à cela un sens de la récitation à la classe toute gainsbourgienne (cf. « Bad Sunday ») et des compositions rock’n’roll, directes et euphorisantes (cf. la formidable « Broken Bones ») et le tour est joué ! Tout à l’air tellement facile à l’écoute. Car pour être heureuse, l’ancienne chanteuse des Liminanas, à une solution toute simple : un micro, une gratte et on joue, fort, et on chante, à gorge déployée ! L’enthousiasme, la joie simple de faire de la musique s’entend dans chaque note jouée, ouvrant une brèche originale entre énergie power pop, échos des Pixies à la clef, et aspirations psychédéliques (« Customer » ; « Never tell it » ; « Old Stones »). L’album est bref, (9 titres seulement) et à le défaut de ses qualités, efficace pour éviter le remplissage et l’ennui, mais frustrant et au goût de trop peu. L'artiste devrait faire un tabac sur scène, un concert (un dimanche ou tout autre jour), vite !!

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lundi 7 juin 2021

The Starphonics : « Wild Wild Lover »



Un grondement sourd de la batterie immédiatement suivi de l’irrésistible twang de la guitare, dès les premières notes, les Starphonics sortent le grand jeu ! Et quel jeu ! Le groupe possède de nombreux atouts, un goût très sûr et des reprises (trois) de bon aloi (chipées chez Gershwin ou Link Wray) et des compositions originales (cinq) de haute tenue, incarnées à la perfection par un chanteur au timbre de gorge affirmé, parfait pour le genre. Mais il n’est point d’amour que l’on ne saurait trahir. Aussi, la formation ne craint pas de sortir des chemins ô combien balisés du rockabilly ou de la surf music pour s’aventurer sur les bas côtés à la recherche d’une identité propre. Un theremin mystérieux par ici ou une méconnaissable reprise du « Summertime » de George Gershwin par là, dans laquelle on croit déceler un bout de Led Zeppelin (« Living Loving Maid ») en lieu et place de Janis Joplin. Le quatuor joue la carte de l’efficacité à plein tubes (l’addictif et entraînant « Gogo Bar ») avec un album d’une remarquable concision, quoique frustrante pour l’auditeur, au goût de trop peu. Sexy, élégant, il ne manque guère qu’un soupçon de folie, que le disque ne fait finalement qu’effleurer, pour que l’adhésion soit pleine et entière. Néanmoins, il s’agît là de magnifiques débuts.

https://www.facebook.com/thestarphonics/





dimanche 6 juin 2021

Steve Earle & The Dukes : « J.T .»

 


De Guy Clark à Townes Van Zandt, Steve Earle a souvent, au cours de sa carrière, rendu hommage à ses inspirateurs sous la forme d’albums de reprises. Ici, sa démarche prend un sens différent dans la mesure où Steve reprend les compositions de son propre fils Justin Townes Earle (dont le prénom du milieu est lui-même un hommage à Townes Van Zandt) tragiquement décédé en août 2020, pour en arriver à cet étrange paradoxe : peut-être son album le plus personnel alors qu’il ne signe que le dernier titre de sa plume. Né de circonstances dramatique, le disque n’est pas sombre pour autant (la dernière plage mise à part), Steve ayant beaucoup injecté de sa personnalité dans les chansons de son fils infusant ces dernières de ses influences rock (« Maria » ; « Champagne Corolla »), country («They killed John Henry») ou reproduisant la tension qui anime ses propres enregistrements (« Lone Pine Hill »). En cela, l’album ne fait pas tâche dans sa discographie et ne déstabilisera pas ses fans. Le disque se distingue par sa modestie, dans l’approche, dans les arrangements, et sa brièveté. A la fois émouvant, son chant déraille un peu parfois, et solide, l’album se termine sur une note d’une émotion intense avec le parlé « Last Words », seule composition originale du disque, en hommage au regretté Justin.

https://www.steveearle.com/