mercredi 31 août 2016

Rock en Seine 2016

Une chaleur accablante (c) Victor Picon

Vendredi 26 Août.

Déjà six ans que l'on parcours en long, en large et en travers le parc de Saint-Cloud à la fin de l'été. La rentrée est déjà là et Rock en Seine aussi, sous une soleil de plomb et une chaleur accablante…

Two Door Cinema Club (c) Victor Picon

Theo Lawrence & The Hearts (c) Olivier Hoffschir
The Strumbellas (c) Olivier Hoffschir
Brian Jonestown Massacre (c) Olivier Hoffschir

Brian Jonestown Massacre (c) Olivier Hoffschir
Jack Garratt (c) Olivier Hoffschir
On commence par des retrouvailles avec une vieille connaissance Theo Lawrence and the Hearts, que l'on avait découvert ici même avec son ancien groupe, les Velvet Veins, qui ont d'ailleurs joué leur dernier concert à Rock en Seine, sur la scène Île-de-France. C'était il y a deux ans et depuis, Theo a pris le temps de laisser mûrir son nouveau projet. Résultat, c'est avec l'aplomb d'un vieux briscard que Theo, toujours très classe, cheveux parfaitement gominés et chemisette à carreaux, a pris possession de la scène de l'industrie. L'artiste a évolué dans l'intervalle, on retrouve ses influences blues/rock 60s qui désormais se parent de nouvelles couleurs issues de la soul. La voix de Theo s'est également métamorphosée entre-temps. Une prestation très classieuse, hélas polluée par des problèmes de sons et une présence trop imposante de la basse qui a tendance à avaler toutes les autres fréquences (hélas ça ne sera pas la dernière fois du week-end, une conséquence de la canicule). On continue par un petit saut de puce en direction de la scène pression live pour découvrir The Strumbellas, une formation Canadienne assez nombreuse pratiquant un folk choral post-hippie. La présence du violon ajoute une note originale évoquant tour à tour la country ou le folk celtique. Assez plaisant… On continue dans cette veine post-hippie avec nos héros Brian Jonestown Massacre. Et désolé de le dire mais il s'agît là du plus mauvais concert donné par la troupe menée par Anton Newcombe (on en a vu un certain nombre) qu'il nous ai hélas été donné de voir. Pire encore, le groupe n'y est absolument pour rien. Mais on retrouve les problèmes de son évoqués plus avant, une présence trop forte de la basse, avalant toutes les fréquences. Dès que ce pauvre bassiste à la malheur de frôler une corde on n'entends plus rien, un véritable massacre (c'est le cas de le dire). Le même problème se reproduit avec la batterie (la grosse caisse et le tome basse). Une véritable cacophonie. On s'étonne encore qu'Anton Newcombe, pourtant coutumier du fait, n'ait pas piqué une crise de nerfs. On l'a déjà vu péter les plombs pour moins que cela… Faisons ensuite connaissance avec un véritable équilibriste du son Jack Garratt, un one-man-band d'un genre particulier entre pop et électro. Un main sur le synthé, l'autre sur la batterie Jack fait tout absolument tout seul et surtout, sait communiquer son enthousiasme avec le public ! L'apparition sporadique d'une guitare, jouée également par ses soins, ajoute une note heavy voire bluesy aussi étonnante dans ce contexte que bienvenue. Sa voix tirant plutôt vers la soul Jack mélange les influences pour un résultat autant unique que personnel. Rafraîchissant. On termine cette première journée avec Two Door Cinema Club. Le concert nous confirme ce que l'on savait déjà, les Irlandais sont nettement plus impressionnants sur scène que sur disque, les partis-pris de production très FM 80s ayant tendance à gommer leur agressivité naturelle. Le groupe trouve son équilibre entre synthés, datés, et un son de guitare personnel qui a fait leur fortune (cf. leur synchro très connu dans la pub). Le groupe a trouvé sa formule et la répète à l'envi, les nouvelles compositions jouées ce soir (le nouvel album sort en octobre) ne faisant que confirmer cet état de fait. Efficace à défaut d'être surprenant.

(c) Victor Picon

Kaviar Special (c) Olivier Hoffschir

La Femme (c) Christophe Crénel
L7 (c) Olivier Hoffschir
L7 (c) Olivier Hoffschir

Samedi 27 Août.

On commence la journée avec une grosse pensée pour Sharon Jones & The Dap-Kings qu'hélas on n'applaudira pas cette année après l'annulation pour raison de santé… L'après-midi débute par un énorme coup de cœur pour les Rennais de Kaviar Special. Leur prestation rageuse entre rock, garage, psyché et surf a réussi à créer l'illusion d'une plage en pleine banlieue parisienne. Il n'en faut pas plus pour s'attirer les vivas d'un public nombreux en plein cagnard. Enjouée, avec ce délicat équilibre entre swing rythmique et gros son, la prestation du groupe a durablement marqué les oreilles de votre serviteur. Excellent ! Ce soir La Femme vous donne du plaisir… Rassurez-vous, vous êtes bien à la bonne adresse, La Femme (de Biarritz) étant le groupe le plus bigarré du week-end, chevelure arc-en-ciel, bretelles tricolores, ce genre de choses. Un univers décalé et coloré qui se prolonge au niveau du son, la formation prenant un malin plaisir à brouiller les pistes entre surf music, new wave et électro-psychédélisme… Il faut imaginer quelque chose comme « Rebop » (Marie et les Garçons) repris par les Challengers (ou inversement), porté par un équilibre fragile entre les trois synthés et une guitare aux interventions sporadiques mais judicieuses. Une chose est sûre La Femme va à tout les coups nous donner beaucoup de plaisir pour de nombreuses soirées encore… Leur deuxième album sort ces jours-ci et on est curieux de l'écouter… C'était le rendez-vous immanquable pour tous les kids des 90s biberonnés au grunge : L7 est de retour ! Pionnières du mouvement riot girls, le quatuor de punkettes vieillit bien, toujours aussi abrasif après quelque trente années de carrière. On a bien kiffé (comprendre headbanggé) : c'était l'heure nostalgique du week-end ! Réservée aux groupes locaux en développement, la scène Ile-de-France, un chapiteau reproduisant le décor d'une salle de concert, a été le théâtre de nombreuses surprises ces dernières années (Marietta, Velvet Veins, Blackfeet Revolution etc.). Et encore une fois c'était là qu'il fallait être pour avoir sa dose de rock n'roll ! Le groupe s'appelle The Psychotic Monks et on avait déjà évoqué deux de leurs Eps auparavant. Entre les mains, jeunes mais expertes, des Psychotic Monks le rock n'roll devient cette matière éruptive, une boule de feu explosive prête à vous brûler les tympans et le reste. La petite demi-heure passe trop vite, en forme de grand huit, faîte de hauts et de bas, de passages calmes et aériens et de crashs spectaculaires, les yeux révulsés, les cheveux en pagaille. Un grand moment !

Blues Pills (c) Olivier Hoffschir
Kevin Morby (c) Olivier Hoffschir
Gregory Porter (c) Olivier Hoffschir

Gregory Porter (c) Olivier Hoffschir
Iggy Pop (c) Olivier Hoffschir


Dimanche 29 Août.


En bon fan de rock on attendait le moment avec impatience, la venue, toujours assez rare de Blues Pills en dépit de la présence de l'excellent guitariste français Dorian Sorriaux au sein de la formation. Entre psyché et hard rock, marqué par les sixties, Led Zeppelin n'est jamais bien loin, Blues Pills est l'un des meilleurs groupes dans le genre à l'heure actuelle (avec les Rival Sons) dont on parle hélas assez peu. La musicalité du groupe est extrême, la virtuosité à l'avenant, entre attaques de guitare et séquences planantes au clavier. L'audience est sous le charme de la chanteuse Elin Larsson, les pieds nus, et de sa combinaison moulante. On prend ensuite nos quartiers sur la scène de la cascade ou nous attend Kevin Morby, une magnifique plume entre pop et folk, excellent songwriter, héritier de Dylan. Afin de rendre le set live plus dynamique, Kevin et son quatuor optent pour une option électrique ce qui ne change pas fondamentalement la donne ni le pouvoir d'attraction de sa musique. Extrêmement bien écrite, ses chansons prennent la forme de petits bijoux indémodables gageons que sa musique vieillira bien. Vint ensuite l'heure de retrouver une présence étonnante en ces lieux, celle du jazzman Gregory Porter, mais un peu de swing ne fait jamais de mal. Saxophone, piano, autant d'instruments que l'on a peu eu l'occasion d'entendre ce week-end et qui font tous le sel de la musique de Gregory Porter. Showman né et chanteur au timbre impressionnant de puissance, Porter aurait dû nous combler si son set n'avait pas été pollué par ces problèmes récurrents de sonorisation de la contrebasse. Cette dernière avalant toutes les fréquences et transformant la musique, pourtant oh combien subtile et délicate de Porter, en imbuvable cacophonie. Une belle occasion de ratée, on enrage… Dernier survivant, qui l'eut crû, du trio formé avec Lou Reed et David Bowie, Iggy Pop a toujours la pêche et une furieuse envie d'en découdre. Revisitant avec panache sa carrière avec les Stooges (« I wanna be your dog » en ouverture) ou en solo (« Lust for life », « The Passenger ») Iggy devient une sorte de créature, animal rock sur qui le temps n'a pas de prise. Les compositions n'ont pas pris une ride et sont délivrées avec autant de patate qu'au premier jour. Enfin du moins au début du show. Toujours excentrique et prince du second degré Iggy multiplie les mimiques sur l'avancée de scène avec une fraîcheur qui fait plaisir : « S'il vous plaît la sécurité laissez-là monter sur scène »… En revanche se produire torse nu à son age semble au-delà du raisonnable… Mais tentez donc de faire entendre raison à Iggy… Un seul regret, le répertoire de son excellent dernier album (« Post pop depression ») est un peu délaissé au profit des vieux tubes. Dommage même si on est toujours heureux de réécouter ces grands classiques indémodables...

(c) Christophe Crénel

dimanche 28 août 2016

Chuck Sperry de retour en France

 

Cela devient une bonne habitude, tous les ans au mois de septembre, Chuck Sperry est de retour en France ! Avec de nouvelles sérigraphies (sur papier et sur bois) sous le bras, le véritable héritier de la scène psychédélique des sixties, inspiré par l'art nouveau et les poster rock psyché des années 1960, exposera à la galerie l’œil ouvert du 15 septembre au 2 octobre.
http://www.loeilouvert.com/artiste/chuck-sperry
https://www.facebook.com/events/1785768444972259/

L’œil ouvert Marais - 74, rue François Miron - 75004 Paris - Métro St-Paul

L’œil ouvert République - 1, rue Lucien Sampaix - 75010 Paris - Métro République / Jacques Bonsergent

Interview with Bill Pritchard




This is your second record after a long break away from music and i think something has changed in your music in-between…
Bill Pritchard : I think that basically i came back to what i like to do which is guitar based pop using real instruments that i like and that evokes memories. We used real piano, horns and getting away from anything synthsized or electronic. It's very important.

Was that an input from your producer Tim Bradshaw on your music ?
BP : I've known Tim for a very long time. I needed somebody to translate my musical ideas into music. I would write the songs, get the bare bones of the songs. The skeleton. And he would dress the whole thing with skin. I suggest thing. For « Saturn & Co » i told him i wanted to sound mid-sixties B-Side Brigitte Bardot. That sort of thing. And then he goes, i understand that, let's do it ! I can do it.

Like « A trip to the coast », the new album is released on the Tapete Records label which happens to have an impressive roster of 80s songwriters. Lloyd Cole, Robert Forster...
BP : Yes, a big collection of them (smile).

How did you got in touch with that label ?
BP : I played a gig in France, and Vincent Lemarchand, a bass player in the band with me, asked me if i've got any stuff recorded. He has all my old albums. He listened to some demos made with Tim and some friends and he told me you've got to have this released. So i thought about it. A german fan suggested Tapete Records so i got in touch with them. The first label i've approached and they said yes. That is very rare (smile). Fantastic.

Funny thing is you often sings about France, songs like « Paname », « Mont Saint Michel », but you don't sing in French much…
BP : « Mont Saint Michel », i was there with my family. I was suddenly going through a bleak period in my life. That happens sometimes in life, you know. So i was there and it felt fantastic. Suddenly it all made sense to me. That's why the song is there. Interestingly i did a tour in Germany recently and i played « Rien de toi », a song from « Parce que » wrote by Daniel Darc. I've been singing that in french really enjoying it and i got good reactions. In Germany ! It's really strange. I did « Tout Seul » on « A trip to the coast ». The origin is a song by an American band from the 60s The Fugs. « Morning morning ». A french Canadian Richard Drouet wrote a french version, in the early sevneties and he brought this beautiful lyrics to it. I loved it so we did our version of it.


« Vampire in New York » has a very surprising jazz angle, almost New Orleans…
BP : I loved New Orleans jazz, Dr John, i love all that stuff. I've played with him once ! I never had the opportunity to do it. I wrote the song on the piano. We got some french people to do the trumpets, to get that New Orleans feel.

Do you like to fool around in the studio while recording ?
BP : I like to experiment especially with harmonies. I love the idea of being spontaneous. And also lyrics. I write lyrics down but i would change lyrical sentences depending on how it sounds. I like to play around changing an adjective or a verb.

Do you often shop in the « Deja vu boutique » ?
BP (laughs) : I'll tell you a secret. The « Deja vu boutique » is actually an hair dresser in Newcastle. I was driving and i saw the title « Deja Vu Boutique » on the left i thought what a brilliant thing ! So I used it. I'll send you a picture of the Deja Vu boutique. I must take a picture of that. In the middle of the midlands. What was the odd of that !

And what lies in the « 50 A Holy Street » ?
BP : 50A holy street is a place from Erfuhrt, Germany. I wrote it there i was there with a friend.

Some songs like « Victorious » are ambitious with a very big sound and it's quite opposed to « A trip to the coast » that was more intimate…
BP : We wanted to develop our sound. And we had more of an idea of what the overall sound was going to be because we knew we will released it. « A trip to the coast » was written and recorded over a long period of time without an idea of an end thing of releasing it. This time it was very specific and that was better for working together. We had a very good idea of what we wanted. For example we got a live drummer, we got horns in, we used different guitars and strings. We had an idea of what we wanted, that was the reason.

One of my favourite on the album is « Lily ann », i thought the song has some sort of a 60s Gainsbourg quality…
BP : Oh wow, thank you very much ! That is a really nice thing to say.


Actually thinking about it, it's a little like the Brigitte Bardot thing we talked earlier…
BP : Yes definetely. It has an very specific atmosphere like a Parisian club in a certain period when certain people used to hang around. You could just imagine Dani in her heyday. All the 60s style, that sort of vibe.

The last song, « The lamplighter » ends the album on an harder note. It reminds me the song « In june » for the previous album.
BP : It is strange because i had an repetitive piano beat. It was two songs put together. The second one worked with the first one. And we build it up, build it up and it felt like an natural conclusion to an album. I always think of albums. 12 songs 6 songs side one, 6 songs side two. I always think vinyl in my head. That was the natural finisher it had to be powerful.

Did you had an specific idea on how to sequence the songs ?
BP : I spent a lot of time sequencing. An album is a whole, two sides. Not as much as Carole King did with « Tapestry », she spent months. We spent a couple of nights over it.

How does it feels being back in Paris ?
BP : Absolutely fantastic. I sent an instagram on my way in saying : Brilliant Paris, why did i stayed away for so long ? It has an nice feel to it. I was heartbroken after what happened in Le Bataclan (sad). I had history there, i've played there years ago. I knew people who know people who were affected by what happened. I just thaught why ? I was just sad.

And how would you discribe your bound with France ?
BP : I think it's still there. I can't grow out of it !


vendredi 26 août 2016

Interview avec Bill Pritchard




Survivant des années 1980, Bill Pritchard est comme le bon vin, se bonifie avec le temps, vieillit avec élégance. Après une décennie passée loin des scènes et des studios, Bill a opéré un retour remarquable en 2014 avec un excellent album « A trip to the coast », un état de grâce prolongé cet année avec « Mother town hall », un disque excellent en tout points. « Classiques instantanés » étant les termes venant spontanément à l'esprit à l'évocation de ces deux albums. Professeur de français dans le civil, et parfaitement francophone, Bill a depuis longtemps noué des liens étroits avec la France collaborant avec Daniel Darc (l'album « Parce que », 1988) ou Etienne Daho (« Three months, three weeks and two days », 1989). C'est donc avec grand plaisir que l'on retrouve Bill, deux ans après une première rencontre, quelques semaines avant de retrouver une scène Parisienne, celle du Petit Bain, le trois septembre prochain…


Bonjour Bill, ravi de te revoir. Donc « Mother town hall » est ton deuxième album après un long break et j'ai l'impression que quelque chose a changé dans ta musique…
Bill Pritchard : En fait, je suis revenu à ce que j'aime faire, c'est à dire de la pop basée sur la guitare. On a utilisé des « vrais » instruments, que j'aime et qui m'évoquent des souvenirs : du piano, des cuivres… On s'est éloigné de tout ce qui est électronique ou synthétique. C'est très important.

Quel a été l'apport de ton fidèle producteur, Tim Bradshaw, dans cette démarche ?
B.P : Je connais Tim depuis très longtemps. Je voulais quelqu'un pour traduire en musique mes idées. J'écrivais les chansons, le squelette et Tim arrivait pour les habiller. J'ai fait quelques suggestions cependant. Pour « Saturn & Co » (un titre du nouvel album, ndlr) je lui ai dit que je voulais sonner comme une face B de Brigitte Bardot de la moitié des années 1960. Ce genre de trucs. Et Tim disait, « Ok je comprends. Faisons-le ! »

Ce nouvel album, comme le précédent « A trip to the Coast » sort sur le label Tapete Records, qui a signé beaucoup de songwriters des années 1980 comme toi…
B.P : Ah oui, Lloyd Cole, Robert Forster, il y en a toute une collection (sourire)…

Comment les choses ont-elles commencées avec ce label ?
B.P : J'ai fait un concert en France et il y avait ce bassiste Vincent Lemarchand dans mon groupe. Il m'a demandé si j'avais de nouvelles chansons, ce type possède tous mes vieux albums… Il a écouté quelques démos faites avec Tim et quelques amis et il m'a dit : Il faut absolument les sortir ! J'ai commencé à y penser. Et puis un fan Allemand m'a suggéré Tapete Records. Je les ai contactés. Le premier label que je contacte et ils me disent oui tout de suite ! C'est tellement rare (sourire) ! Fantastique !

Tu chantes souvent à propos de la France (« Paname », « Mont St Michel ») mais tu ne chantes pas souvent en français (rappelons que Bill est parfaitement francophone et professeur de français dans le civil, ndlr)…
B.P. : Le Mont St Michel, j'y étais avec ma famille. Je traversais une période un peu morne dans ma vie. Tu sais, ça arrive des fois… Donc, j'étais là-bas et d'un coup je me suis senti super bien ! Soudainement, tout cela faisait sens pour moi. C'est la raison pour laquelle la chanson existe. Récemment j'ai fait une tournée en Allemagne et j'ai joué « Rien de toi » une chanson écrite par Daniel (Darc, ndlr) sur notre disque en commun (« Parce que », 1988). J'ai chanté en Français et j'ai vraiment aimé cela. Et le public a adoré ! En Allemagne ! Très surprenant ! Sur « A trip to the coast » j'ai enregistré « Tout seul ». La chanson originale « Morning Morning » (1966, ndlr) vient d'un groupe Américain, The Fugs. Un Québecois, Richard Drouet en a fait une version française au début des années 1970 avec des paroles magnifiques. J'ai adoré, j'en ai fait ma propre version.

« Vampire in New York » a un angle jazz assez surprenant, presque New Orleans…
B.P. : J'adore le jazz New Orleans, Dr John, ce genre de trucs. J'ai même joué avec lui une fois ! Je n'avais jamais eu l'opportunité auparavant d'embrasser ce style. La chanson a été écrite au piano, on a fait venir des musiciens français pour les cuivres afin de s'approcher au plus près de ce feeling Nouvelle-Orléans.

Tu aimes tenter des trucs dingues en studio ?
B.P : J'aime expérimenter. Avec les harmonies. J'adore l'idée d'être spontané. Avec les paroles également. J'écris les paroles mais je me permet de changer un verbe ou un adjectif suivant la façon dont cela sonne.


Est-ce que tu fais souvent tes courses dans la « Déjà vu boutique » (un titre du nouvel album, ndlr) ?
B.P. : (rires) Je vais te dire un secret. La « Déjà vu boutique » c'est en fait un coiffeur à Newcastle. Je conduisais et j'ai vu l'enseigne « Déjà vu boutique » sur la gauche. C'était génial, alors je l'ai utilisé ! Je vais t'envoyer une photo ! Il faut absolument que je prenne cette vitrine en photo ! Au beau milieu des Midlands, quelles étaient les chances de voir un truc pareil !

Qui réside au « 50 A Holy Street » (une chanson du nouveau disque, ndlr) ?
B.P. : C'est à Erfuhrt en Allemagne. J'y étais avec un ami. Le titre a été écrit là-bas.

Une chanson comme « Victorious » est très ambitieuse, très arrangée, c'est une démarche très différente de « A trip to the coast » qui semblait plus intimiste…
B.P. : On voulait développer notre son. On avait une idée générale plus précise sur la façon dont le disque devait sonner. Savoir que le disque allait sortir dans le commerce a tout changé ! « A trip to the coast » a été écrit et enregistré sur une période très longue sans savoir ce que les chansons allaient devenir. Cette fois on avait un objectif et c'était beaucoup mieux pour bosser. On avait une idée très précise de ce que l'on voulait. On a fait venir un batteur, des cuivres, on a utilisé plusieurs guitares, des cordages différents.

« Lily Anne » est une de mes préférées sur ce nouveau disque. Il y a quelque chose qui me rappelle le Gainsbourg des années 60…
B.P. : Oh wow, merci beaucoup, c'est super gentil de me dire ça !

En fait, maintenant que j'y pense, c'est dans la lignée de ce qu'on disait tout à l'heure à propos de Brigitte Bardot…
B.P. : Oui tout à fait. Il faut imaginer une atmosphère particulière. Un club parisien à une époque donnée avec une certaine catégorie de personnes. On peut penser à Dani par exemple à sa grande époque. Les sixties, ce genre de choses…

La chanson finale « The Lamplighter » termine l'album sur une note plus dure. Cela me rappelle « In June » du disque précédent...
B.P. : Elle est basée sur un motif de piano répétitif. Ta ta ta (Il chantonne). En fait il s'agît de deux chansons que l'on a assemblée l'une dans l'autre. On a fait monter la sauce et cela me semblait comme une conclusion naturelle pour un album. Je résonne toujours en termes d'album : douze chansons. Six sur la face A et six sur la face B. Je pense toujours en vinyle ! C'était la fin naturelle pour l'album, elle se devait d'être puissante.

Le séquençage, définir l'ordre des chansons, c'est un travail important pour toi ?
B.P. : Ah oui ! J'y passe beaucoup de temps. Un album c'est un tout. Deux faces. Bon je ne passe pas autant de temps que Carole King pour « Tapestry » (1971, ndlr) qui a duré des mois. Mais on a quand même passé quelques nuits sur la question.

Et à part ça, qu'est-ce que cela te fait de revenir à Paris ?
B.P. : C'est génial, fantastique ! J'ai envoyé un message sur Instagram en arrivant : « Paris génial. Pourquoi je suis resté éloigné si longtemps ? ». Le feeling est très plaisant. Tu sais j'étais dévasté après les événements du Bataclan. J'ai une histoire avec l'endroit, j'y ai joué il y a longtemps. Je connais des gens qui connaissais des gens qui ont été affectés par ce désastre. J'ai pensé : « Mais, pourquoi ? ». J'étais triste tout simplement…

Et comment tu décrirais ton lien avec la France ?
B.P. : Il est toujours là. Je n'arrive pas à m'en séparer. Tu vois mon lien avec la France il est là (il sort un exemplaire du « Premier Homme » d'Albert Camus)...

En concert à Paris (Petit Bain) le 3 septembre 2016.

Propos recueillis le 2 mai 2016.

The Psychotic Monks : « Faces to »



Formation particulièrement prometteuse, les Psychotic Monks avait fait forte impression avec un remarquable premier EP. Ce deuxième volume de leur aventure sonore reprend les choses là où le groupe les avait laissées.Toujours aussi efficace, le groupe joue avec entrain un rock n'roll lourd, entêtant, hypnotique (« Paranoid/Transcience »). Ces riffs de guitares qui tournent en boucle ont en effet de quoi donner le tournis (« Leave it alone »). D'hier et d'aujourd'hui, la musique des Psychotic Monks allie le rock heavy/psyché tendance 70's à la scène stoner contemporaine. Et quelque part, caché au fond du buisson, le blues se tient toujours prêt à surgir et à mordre (« City of lights »). Ceux qui iront passer le week-end à Rock en Seine seraient bien inspirés de faire un petit tour par la scène Ile-de-France samedi soir aux alentours de 22h00…
En concert le 27/08 à Saint-Cloud (Rock en Seine)


mardi 23 août 2016

Los Disidentes Del Sucio Motel : « Human Collapse »



Auteur de deux albums gentiment décalés, d'inspiration cinématographique pastichant les films d'action de série B (« Soundtrack from the motion picture », 2011) ou d'horreur de série Z (« Arcane », 2013), Los Disidentes Del Sucio Motel change d'approche pour ce troisième effort, le premier à sortir sur le label américain Ripple Music. En effet, le quintet strasbourgeois s'éloigne du stoner qui a fait sa réputation, et par conséquent des influences blues et heavy 70s, au profit d'une démarche plus sombre, creusant encore plus profondément son sillon heavy et son déluge de décibels. Fini de rire pense-t-on à l'écoute du disque. Intitulé « Human Collapse », que l'on pourrait traduire par quelque chose comme effondrement humain, l'album met en son un monde post apocalyptique se nourrissant des crises sociales et environnementales traversées actuellement avec un réel sens de l'angoisse qui trouve toute son expression dans l'impressionnante « Border », une composition phare de ce nouvel album décidément plus post/sludge que stoner. Mais lorsque le groupe met la pédale douce cela donne de très belles choses également (cf. « Community », « Rebirth »). Le groupe a soigné ses effets, chaque son de guitare semble avoir été traité avec un soin tout particulier, travaillé au corps par une section rythmique au taquet (cf. l'intro de « Downfall », seul titre ressemblant un peu de près ou de loin au LDDSM d'avant). Les tempi sont lents et chaque attaque de guitare est empreinte d'une lourdeur hypnotisante (« Determination »). Le chant à deux voix, qui se répondent et se complètent, parachève l'ensemble. L'auditeur est pantois, KO pour le compte. Le quintet a débuté en pastichant le cinéma de Tarantino et de Robert Rodriguez, maintenant, il met en décibels l'univers post-apocalyptique de Mad Max.
Sortie le 9 septembre.

lundi 22 août 2016

Shakedown Tim And The Rhythm Revue : « Hard to catch »



Originaire de Belgique, Shakedown Tim And The Rhythm Revue déboule sans prévenir et semble prêt à tout pour retourner vos enceintes. La chose s'intitule « Hard to catch » (difficile à attraper, ndlr) et le moins que le puisse dire, c'est que le titre est plutôt fidèle au contenu fuyant de cet album, débordant de swing et rebondissant dans tous les sens. Il est bien entendu question de blues, jump et boogie mâtiné d'un soupçon de jazz ou de rhythm n'blues. Baignant dans une ambiance rétro, le disque possède le charme indéniable de ces albums intemporels qui ont cet étrange pouvoir de figer calendriers et horloges. Rétro certes mais pas nostalgique pour deux sous, grâce à la production dynamique du Français Nico Duportal. En outre, la diversité des ambiances rend le voyage agréable du swing survolté de « Feelin' Good » (également présent en version longue dans les bonus) au sexy langoureux « Take off your clothes » (tout un programme!). Un joli voyage dans le temps en musique, pas prise de tête pour un sou et charmant de la première à la dernière minute. Conseillé.


dimanche 21 août 2016

Bone Tee And The Slughunters : « One foot in the roots »



Mon Dieu, que le temps passe vite ! Cela fait environ deux ans, que ce cd attendait sagement sur le bureau son tour... Et pourtant on l'avait écouté et même aimé ce disque ! Mon bon c'est la vie et comme on le disait au début, le temps passe vite… Mais puisqu'il n'est jamais trop tard pour bien faire et comme le groupe (selon nos informations) s'apprête à remettre le couvert au début de l'automne avec une nouvelle livrée, il est peut être temps de mettre un coup de projecteur sur cet excellente formation. Mesdames, Messieurs, voici Bone Tee And The Slughunters ! Contrairement à ce qu'indique le titre, le quartet n'a pas un pied mais les deux dans les racines, et fort heureusement il est loin de s'agir du même sabot. Racines au pluriel, car elles sont multiples et gravitent autour du blues (cf. « Mr Goodnews »). Bien loin de se contenter de la version Chicagoanne de l'idiome, Bone Tee y ajoute d'autres couleurs, picorant des influences dans le rockabilly, le rhythm and blues (« I'm asking why »), la country (« Grave Crawling ») et un soupçon d'ambiance jazzy pour les titres les plus nocturnes ("I got a gal"). Tout ça grâce à la force des arrangements, qui, au détour d'une ligne de piano boogie bien envoyée sous les doigts experts de Daniel Conqueret, d'une lampée d'harmonica ou d'un glissé de bottelneck (cf. « Because of you ») apportent charme et piment à la chose. Les interventions extérieures sont choisies avec soin, la section de cuivre pêchue (cf. « I'm asking why ») ou le banjo et le violon sont utilisés avec justesse et parcimonie et apportent une diversité d'ambiances tout en restant fidèle à la ligne rétro choisie par le groupe. Nostalgique ? Non, tout simplement intemporel. Et que ça swingue !

samedi 20 août 2016

Kieron McDonald : « Shake that thing »



Voilà le genre de disque, arrivant par surprise et qui, rapidement, se fait une petite place dans notre discothèque au rayon de nos préférés, refusant obstinément de quitter la platine. Kieron McDonald, chanteur Australien de son état, s'est fait une spécialité du rockabilly, le genre d'argument qui, ici, nous touche particulièrement. Tout dans cet album est absolument charmant, de la magnifique pochette pastichant une affiche de film noir des années 50, à la musique bien entendu. Le répertoire est entièrement original, écrit par Kieron, et cela fait toute la différence. Au lieu de reprendre, encore et toujours, les même titres, ce qui finit par constituer un hommage particulièrement stérile, Kieron donne une nouvelle jeunesse à ce style qui entre ses mains expertes jamais ne sonne dépassé mais plutôt intemporel. Magnifique chanteur, sa voix de gorge déborde de charme et de nuances, Kieron s'est construit l'écrin musical parfait pour accueillir son timbre de crooner. Parfois plein de swing (cf. « Go go Girl », « I'm the king of the road »), ou sur un registre plus down tempo (« The Knock on my door ») teinté de country (« Goodbye Lonesome, Hello Baby Doll »). A l'écoute, on imagine sans peine Kieron swingant quelque bouge louche aux murs de briques rouges, portant fièrement sa gomina. Un album dépaysant, charmant et qui nous remonte le moral. Que demander de plus ?

jeudi 18 août 2016

Hugo Race Fatalists : « 24 hours to nowhere »



Installé en Europe depuis plus de 25 ans, l'Australien Hugo Race a longtemps été associé à Nick Cave, guitariste au sein de Birthday Party puis des Bad Seeds. Fatalists est son groupe le plus récent (attention ne pas confondre avec l'album du même nom sorti par Hugo en 2010). Timbre de voix caverneux, ambiance crépusculaire, les points communs entre la musique d'Hugo et celle de son ancien patron sont nombreux et sautent aux oreilles dès la première écoute. Le guitariste livre ainsi un disque qui transpire la poussière et la chaleur écrasante du désert, évoquant autant les grands espaces désertiques de son Australie natale que les Etats-Unis. Nourri à la grande musique étasunienne, l'album s'abreuve à la source du folk, de la country voire du blues, autant d'idiomes dont le guitariste livre son interprétation sombre et habitée, le long de ces 10 plages magnifiques. Recommandé.

mercredi 17 août 2016

Bongo Boy Records : « Gnarly Wave Volume 1 »



Excellent label multipliant les sorties de haute tenue (le garage rock de ZombieGarden Club, le rock gothique de Secret Lie), Bongo Boy Records se lance dans l'exercice compilatoire. Après des volumes consacrés au blues et au rock garage (dont nous aurons l'occasion de parler prochainement) , le présent disque s'intéresse à un idiome que l'on aime bien dans ces colonnes, totalement estival et donc de saison : la surf music. Née au début des années 1960, la surf music, est indissociable de la Californie, prônant un style de vie à la cool, les pieds dans le sable. Le présent disque dresse un panorama, dans sa version instrumentale, de la scène surf moderne, chaque groupe présent y allant de sa petite originalité tout en restant fidèle aux codes du genre. Ainsi, le disque pourrait s'écouter comme un guide de voyage dressant un liste de spots. Dans cette optique, « Lava Spout » du groupe Blues Wave Theory serait la Jamaïque grâce à des arrangements reggae. « Happy Beach Song » de James and the Enigmatic Light Band représenterait Hawaï par le biais d'un ukulélé, instrument emblématique de l'archipel. Le son rock et puissant, proche du garage, de Jenny & the Felines - « Psychedelic Sea », qui décroche en prime la palme du titre le plus cool - évoquerait plutôt Teahupoo, l'impressionnante gauche de Tahiti. Ces quinze titres forment un ensemble homogène et cohérent et la bande son idéale pour tous les estivants.


mardi 16 août 2016

Zombie Zombie : « Irréprochable OST »



Cultivant depuis de nombreuses années ses accointances avec le milieu cinématographique, le trio électro Zombie Zombie franchit le Rubicon, signant la bande originale du premier film (magnifiquement) réalisé par Sébastien Marnier. L'association tombait en effet sous le sens, Zombie Zombie n'ayant pas son pareil pour souligner le suspense, l'angoisse même procurée par l'histoire de cette femme prête à tout pour retrouver son emploi, sombrant dans la folie. L'ambiance générale du disque baigne dans une atmosphère délicieusement rétro, aux influences 80s, et comme toujours en pareil cas, c'est l'ombre de l'immense John Carpenter (la référence absolue en la matière) qui plane au dessus de cet album (cf. « Runing », le thème de Constance ; « Filature », « Bowling », « Folie furieuse »). Mais le trio ne se contente pas de recycler habilement les années 1980. Ainsi, « l'effondrement » n'est pas sans rappeler les stridences de Bernard Herrmann lorsque ce dernier œuvrait aux côtés d'Alfred Hitchcock, dans une version contemporaine et électro. Dans un registre plus festif, illustrant les scènes de sorties nocturnes, « Tuning » et « Boite de nuit », inventent un nouveau style, hybride, teinté de nu-disco, une sorte de dance music étrangement triste et mélancolique. Même sans l'apport essentiel des images, la bande son tient la route par le seul pouvoir évocateur des sons, évitant l'écueil de nombre BO. Un excellent film et une bande originale à l'avenant.

lundi 15 août 2016

Ty Segall : « Emotional Mugger »




Pas évident de suivre le parcours de Ty Segall, impliqué dans plusieurs groupes en même temps, le Californien tourne au rythme insensé d'un album minimum par an depuis 2007 et encore quand il est en petite forme… Dieu merci, en ce moment Ty se sent bien et quand il est en grande condition, le chef d’œuvre n'est jamais bien loin (l'excellentissime album « Manipulator » sorti en 2014). En matière de rock garage/psyché, difficile de trouver mieux en ce moment. Ce nouvel effort voit Ty défricher de nouveaux territoires tout en restant fidèle à son pré carré garage/psyché, à peine une demie-gageure pour ce funambule du rock. Ce qui ne change pas, les guitares, barrées, dingues et sauvages au risque de sombrer dans le grand n'importe quoi dissonant (cf. la coda de « Californian Hills »). Ça, on adore ! Mais Ty évolue dans son écriture, se penchant sur une forme de pop frappadingue, agrémentée d'arrangements baroques à grands coups de synthés et de guitares triturées on ne sait trop comment (« Baby big man »). Et ça, on adore aussi ! Plusieurs écoutes sont évidemment nécessaires pour apprécier à sa juste mesure cette dinguerie rock caractérisée. Plus d'une fois, l'auditeur risque de se retrouver les bras ballants devant un tel déferlement de décibels (« Diversion », « Breakfast eggs »), ne sachant plus trop à quel saint se vouer. Mais la récompense se trouve au bout de ce disque brillant. Un dernier petit mot pour signaler qu'en ce moment, Ty Segall est accompagné sur scène d'un groupe formidable, appelé The Muggers qui, au début de l'été, a littéralement enflammé la Plage des Eurockéennes de Belfort à une heure du matin.  
http://emotionalmugger.com/


dimanche 14 août 2016

Richard Ashcroft : « These People »



1997. Grâce à une poignée de titres ravageurs (« Sonnet », « Bitter sweet symphony », « Weeping Willow ») « Urban Hymns », le troisième album de The Verve, se hisse au sommet des charts. Après des années passées dans l'antichambre du rock anglais, la formation menée par « Mad » Richard Ashcroft accède enfin à la célébrité. Un succès bien mal digéré par le groupe de Wigan, les relations entre Ashcroft et son guitariste (le génial Nick McCabe) se détériorent peu à peu et mènent à la dissolution inexorable du quatuor. Richard n'en a cure et entame une série de trois excellents efforts en solo (remember « Check the meaning »?). S'en suivra une reformation de The Verve au résultat mitigée (l'album « Forth » qui sonne comme si la magie s'était évaporée) puis une tentative de cross over (un groupe nommé United Nations of Sound) passée inaperçue. 2016. Dix ans après son dernier effort en solo, Richard Ashcroft revient aux affaires avec ce nouveau disque. Il s'en est passé des choses depuis l'âge d'or de The Verve. Bien décidé à ne pas se laisser distancer, Ashcroft reprends les choses là où il les avait laissées, comme sa collaboration avec l'arrangeur Wil Malone (un homme clé dans le succès d' « Urban Hymns »), tout en tentant de nouvelles expériences. Soit mélanger son songwriting, typiquement british, à base de guitare folk à une production moderne et des beats électro (on note la participation de Mirwais). Bien mal lui en a pris tant la démarche s'accorde mal avec la nostalgie intrinsèque de ses compositions. On a ainsi l'impression que l'émotion qui se dégagent des chansons est systématiquement plombée par un martèlement dance, aussi fin que la démarche d'un mammouth, un peu comme si un éléphant débarquait dans un magasin de porcelaine (« Out of my body », « Hold On »). Pourtant, parfois, le génie mélancolique d'Ashcroft réapparaît, par intermittence, voire par accident (« They don't own me », « These People »), particulièrement en fin d'album (« Picture of you », "Black Lines"). De quoi laisser des regrets…

samedi 13 août 2016

Thomas Howard Memorial : « In Lake »



Une nappe synthétique s'élève et sort des enceintes, avant qu'une guitare au glissé fantomatique n'entre dans le mix. Thomas Howard Memorial, qui tire son nom d'un pseudonyme utilisé par Jessie James sort son premier album et, disons-le tout de go, c'est une petite merveille post-rock. THM étire le temps, livre un disque suspendu où les longues plages succèdent aux coups de butoir avec une élégance jamais démentie. Aérien mais puissant (cf. « Bad Things »). A la tête du groupe, on retrouve un musicien que l'on aime bien dans ces colonnes, Yann Ollivier, également batteur des excellents Craftmen Club, dans un rôle différent, celui du chanteur/guitariste, qui lui sied à merveille. Nourrie par une tension et une angoisse sous-jacente, allant crescendo, THM ne baigne pas spécialement dans l'optimisme et pose la question de l'avenir de la condition humaine… Vaste programme. La sortie du disque est accompagnée d'un film, « Live a Guerlédan », réalisé par Nicolas Charles et tourné dans le site du lac asséché du même nom. Un film-concert, sans public, en forme de clin d’œil/hommage au mythique « Live in Pompei » de Pink Floyd (1972).

mardi 9 août 2016

Backyard Folk Club : « The Broken Spoon »



Acoustique et champêtre, The Backyard Folk Club porte son nom comme un charme. Originaire d'Alsace, mais biberonné au folk et à la country, le Backyard Folk Club réussit à créer son petit bout d'Amérique à l'est de la France. Rien ne manque, sifflement western (« My King »), banjo, harmonica, chant choral et bottelneck sur guitare nationale métallique. Sans parler de l'entregent du quartet qui ne manquera pas d'interpeller les fans de' rockabilly (« The Broken Spoon »). Ce petit EP (cinq titres seulement) possède le charme de l'artisanat et on imagine sans peine ces chansons bricolées dans une grange isolée. Un peu court pour devenir un disque de route, cet EP plein de charme constitue néanmoins un magnifique voyage en musique. L'écouter c'est l'adopter, on souhaite vivement au groupe de passer au format long dans un avenir proche.

lundi 8 août 2016

Dirty Deep : « What's flowin' in my veins »



Autrefois one-man band devenu duo, Dirty Deep ajoute un nouveau membre à chaque disque. Troisième album donc, le groupe est devenu un power trio, logique, cela tombe sous le sens ! Cela tombe surtout bien dans les oreilles. « Plus on est de fous, plus on rit » comme le dit le vieil adage qui trouve ici une parfaite illustration musicale. Dirty Deep n'a jamais pratiqué une musique aussi fine, creusé aussi profondément le sillon du blues racinien. La différence se fait sentir dès le premier titre « Holy Pocket Boogie » qui commence par une fantastique ligne de basse, le genre de choses qui était bien évidemment impossible auparavant. Un peu plus loin, une ruade de batterie apporte un groove imparable à « Goin' down south », une fois encore les bienfaits du trio se font ressentir. Dirty Deep, déjà excellent par le passé, est clairement passé à la vitesse supérieure ! Au chant, à la guitare et à l'harmonica, Victor Sbrovazzo fait montre de son implication habituelle, son chant est intense, habité et c'est l'ensemble du groupe (l'auditeur aussi par la même occasion) qui se retrouve les pieds dans la boue, en plein marais. Au menu du blues, oui, mais dopé par une énergie rock qui dévaste tout sur son passage (« Can i kick it ? », « How i ride », à la lisière du métal). Ce qui n'empêche nullement Victor et ses comparses de se montrer tendre à l'occasion d'un passage acoustique (cf. « Light and Blue »). Mais qu'est-ce qui coule dans mes veines ? Du bon son tiens, pardi !

vendredi 5 août 2016

The Chikitas : « Wrong Motel »



Si l'on en croît le titre de l'album, les Chikitas se sont trompées de motel. Une chose est certaine cependant, les amateurs de rock n'roll seront, eux, à la bonne adresse. Enregistré par Jim Waters (Sonic Youth, The Jon Spencer Blues Explosion, cela vous classe le bonhomme) en Arizona, ce troisième disque voit le duo Genevois s'essayer pour la première fois aux vertus de l'enregistrement analogique. Parfaitement canalisé, inspiré par les lieux, le duo grave ainsi un album faisant la part belle à l'aspect primaire du rock n'roll. Vocaux déchirés, batterie nerveuse et guitare abrasive en sont les principaux ingrédients : simple et direct, aussi efficace qu'un uppercut ! Pourtant, grâce à la diversité des influences qui l'anime, l'album se révèle particulièrement varié, alternant les plaisirs entre pop/rock garage (les fantastiques « My Playground » et « Spin around you », les grandes réussites de ce disque), punk (« Sucker Creep ») et grunge (« Oh greed », « Watch Yourself ») tout en restant cohérent et fidèle à leur esthétique 100 % rock n'roll. Trente ans de rock bruitiste et noisy condensés en une demi-heure : une certaine idée du bonheur…

jeudi 4 août 2016

Martinguerre : « Mount Joie »



Premier EP pour ce jeune artiste français au patronyme inspiré par une affaire judiciaire d'usurpation d'identité datant du XVIeme siècle. Produit par Peter Von Poehl (quand même!) la chose est particulièrement ouvragée, rustique et moderne à la fois. Songwriting pop, guitare arpégée, acoustique et chatoyante, et de discrets arrangements à base de nappes synthétiques (« New Hope ») sont les différents ingrédients de cet EP étonnant par sa capacité à faire le lien entre différents univers à priori contradictoires. Charmant.