samedi 26 novembre 2022

Red Beans & Pepper Sauce : « 7 »

 


A bien des égards, cette attachante formation, synthétise à elle seule tout ce que l’on aime. Des guitares saturées, au-dessus desquelles plane l’ombre du hard rock des années 1970 (on pense particulièrement à Led Zeppelin) et un groove lancinant, servi sur un plateau par la voix gorgée de soul de la chanteuse Jessyka Aké, les vénérables BellRays ne sont jamais bien loin. Ce nouvel album, le septième, ne déroge pas à la règle et vaut son pesant de décibels, d’attaques de pédales wha-wha dévastatrices (Jimi sort de ce corps!), de grandes lampées d’orgue soul à la Deep Purple et de blues (« Lonely »). Un cocktail fort éprouvé par le passé mais qui n’empêche pas la prise de risques et voit le quintet chercher, expérimenter et, aussi, voyager. Ainsi tout l’album est parsemé d’intro psychédéliques et de descentes d’orgues baroques venant contraster avec bonheur la puissance des guitares. Cerise sur le gâteau ce nouvel effort se divise en deux disques. En effet, aux huit titres enregistrés à la maison se rajoute, un EP bonus composé de trois pistes capturées aux mythiques studios Rockfield (Stone Roses, Oasis, Robert Plant, Black Sabbath). Une institution de légende nichée au cœur de la campagne du Pays de Galles (le voyage évoqué plus tôt). L’ambiance se veut plus bucolique et l’occasion était trop belle pour reprendre « Rock and Roll » du grand modèle Led Zep.

En concert le 1er décembre au Zèbre de Belleville.

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Mike Andersen : « Raise your hand »

 


Que les talents lèvent la main ! Il suffit parfois de quelques accords de guitare folk pour saisir la rareté d’un album. A l’instar de nombreux talents nordiques (cf. Jesper Lindell) le Danois Mike Andersen réussit à se glisser dans ce mince interstice entre folk, blues et soul, le tout emprunt de ces sonorités americana plus vraies que nature. Quelques cordes de guitares donc, arpégées, glissées ou brossées avec feeling, qui suffisent à dépeindre des espaces immenses, de la neige aux marais, servies par la voix éraillée du chanteur, crooner à l’occasion (la sublime torch song « If I fall again ») où l’émotion pointe à fleur de peau. Nous pouvons donc affirmer, sans prendre trop de risques, que l’émotion procurée par ce neuvième album est aussi rare que précieuse, vous auriez tort de vous en priver.

En concert le 15/12 au Jazz Club Etoile – Le Méridien

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jeudi 24 novembre 2022

Amythyst Kiah, Point Ephémère, 22 novembre 2022

 

Seule sur scène et avec en tout et pour tout trois instruments, une guitare électrique, un banjo et une guitare acoustique, Amythyst Kiah a fait une démonstration de grande classe sur la scène du Point Ephémère. Nous retiendrons d’elle tout d’abord son charisme, sa présence envahit l’espace, sa voix puissante résonne et remue les émotions. Son jeu empreint de feeling extirpe du blues partout et même là où on ne l’attends pas (cf. la reprise de « Love will tear us apart » de Joy Division, si, si…) Et c’est bien là que réside la grande découverte de ce concert, si, sur disque, l’artiste n’hésite pas à partir dans une direction néo-soul tout à fait contemporaine, le rendu sur scène reste brut et traditionnel, une voix et une guitare. Outre ses propres compositions, Amythyst Kiah revisite aussi ses influences, suivant un sceptre assez large allant de la pop (« Sugar » de Tori Amos) au traditionnel « Trouble so hard » (Vera Hall, 1937) popularisée par Moby sous le titre de « Natural Blues ». Quelque soit le contexte, le contraste entre la puissance de sa voix et la délicatesse de son jeu emporte l’adhésion. Grand moment !

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dimanche 13 novembre 2022

Marie Pierre, Walrus, 12 novembre 2022.


La silhouette toute de noire vêtue de la chanteuse s’avance sur la scène, accompagnée de son acolyte Alexandre Delmas, chapeau et vêtements noirs également. Alors que les premières nappes sonores s’échappent des claviers, nous sommes immédiatement happés. Marie Pierre sur scène c’est une expérience cérémonieuse, presque hiératique, c’est surfer sur une vague douce, par laquelle il convient de se laisser emporter. La musique de Marie Pierre célèbre la nature : bruits de vagues, chants d’oiseaux et le bruit du vent s’amalgament aux nappes envoûtantes et à la poésie déclamée par la chanteuse entre deux impressionnantes vocalises. La musique est mouvante, voyage, des chants enregistrés dans une église de Riga (Lettonie) et un harmonium indien sont également utilisés. L’ensemble transporte l’auditeur dans un ailleurs imaginaire et fantasmé, inconnu, dans un entre-deux entre vol plané et flottaison. Il nous faut un certain temps pour redescendre… Le set se termine dans un silence impressionnant, l’audience, comme figée sur place, n’ose bouger le petit doigt, de peur de casser la magie du moment. C’est impressionnant.

samedi 12 novembre 2022

Touch of Groove + Lux The Band, La Dame de Canton, 11 novembre 2022.



Prenons le fleuve en ce jour férié dans le cadre exotique et suranné de la Dame de Canton, une jonque chinoise posée sur la Seine, où nous attendent deux formations aux aspirations complémentaires.

On commence par Lux The Band (anciennement Lux), présent ce soir en version acoustique, Angela au chant et Sylvain à la guitare acoustique pour un court set d’une petite demi-heure en prévision de la sortie du nouvel album prévue pour le 9 décembre prochain. Le contexte acoustique sied particulièrement bien à la chanteuse dont la voix épouse à la perfection les contours virtuoses de la guitare et le montre tout en mouvements gracieux sans en faire trop non plus. Un beau voyage en musiques, folk et rock, entre Paris et New York City (la ville d’où est originaire Angela). Car même sans amplification, Sylvain attaque ses cordes et se révèle un maître du solo acoustique.

On change de registre avec Touch of Groove qui, comme le veut la tradition, commence son set avec deux instrumentaux, histoire de faire monter l’ambiance, avant l’arrivée en grandes pompes de la chanteuse Letty M. Nous nous sommes déjà énamourés de sa voix, qui, en live, prend encore une autre ampleur. Lorsque les instruments se mettent en sourdine, comme ce fut le cas au tout début du set, sa voix brille de mille feux, avec une ferveur proche du gospel, quelle claque ! Avec un enthousiasme débordant qui fait plaisir à voir (mention spécial à Sylvain surexcité derrière son clavier) et d’énormes sourires barrant leurs visages les musiciens (Paco à la guitare, Pascal à la basse, Olivier à la batterie) pratiquent une soul/rhythm’n’blues de grande classe. Justesse des interventions, soli pleins de feeling sans démonstration superfétatoire, outre l’intégralité de l’album le concert est ponctué de nombreuses reprises/hommages à Aretha Franklin ou Etta James. Bien plus en avant qu’à l’époque du Blues Power Band, le guitariste Paco fait montre d’une virtuosité discrète, juste et sans ostentation. L’enthousiasme du groupe a vite fait de gagner le public transformant le lieu en piste de danse bon enfant. Le groupe a du mal à quitter la scène, nous aussi !

jeudi 10 novembre 2022

Meskerem Mees : « Caesar »

 


A peine un an après la sortie de son premier album, qui, déjà, nous avait mis à genoux, la jeune Belge est de retour avec ce nouvel EP, assez copieux, de 8 titres. Et force est de constater que la magie fonctionne encore, et ce dès le premier titre, « The City », qui s’enlumine d’une patine vintage (c’est assez nouveau pour elle) plus vraie que nature et qui d’emblée transporte l’auditeur dans une machine temporelle fantasmée. Ayant plus d’un tour dans la caisse de résonance de sa guitare, l’artiste ne se contente pas de jouer cette carte nostalgique mais se concentre sur l’écriture de petites perles où folk, soul, blues et pop s’amalgament dans un ensemble débordant de charme auquel le violon apporte une légère note nostalgique. Le style convient à merveille à son grain de voix mélodique. Une guitare, une voix, tout à l’air tellement simple et évident à l’écouter… Avec simplicité, l’artiste a trouvé son chemin personnel et l’exprime avec émotion dans cet EP intemporel. Dans un monde parfait, Meskerem Mees est faîte pour durer.

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mercredi 9 novembre 2022

Touch of Groove

 


Cette toute nouvelle formation permet de retrouver quelques figures connues telles que le guitariste Pascal « Paco » Guegan (Blues Power Band, Paco Duke) ou le clavier Sylvain Lansardière (Elise & The Sugarsweets) qui entourent la nouvelle venue Letty M, une chanteuse qui jusqu’à présent s’était illustrée loin de chez nous, en Australie ou en Géorgie. Sans vouloir diminuer l’apport des uns ou des autres, cette dernière est la grande révélation du disque ! Impossible de ne pas tomber en amour avec ce grain, ouaté, ourlé et terriblement sexy, avant même la fin de la première piste de l’album ! Cette voix sublime, la chanteuse réussit a en extraire des émotions infinies à donner des frissons. Lui donner un écrin à la hauteur était loin d’être évident. Paco et Sylvain ont opté pour une soul grand teint, digne des classiques où la guitare et l’orgue Hammond s’entremêlent avec bonheur dans un scoubidou groove, qui n’a rien à envier à la scène étasunienne, mettant en valeur les capacités acrobatiques de la chanteuse à l’aise sur tous les tempos (l’enlevée « This summer 21 » ou la tendre « People of the damned »). Enfin, si le groupe s’inspire des années 1960 et 1970, ce dernier garde les yeux ouverts sur les problématiques actuelles telles que la pandémie et autres confinements (« Breathe », « This summer 21 ») ou les enjeux climatiques (« The very last snowflakes »). Un disque de grande classe donc mais aussi un baume musical aussi bon pour les oreilles que le cœur.

En concert le 11/11 (La dame de Canton)

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dimanche 6 novembre 2022

Beechwood : « Sleep without dreaming »

 


Que reste-t-il de New York aujourd’hui ? Ne serait-ce que pour le Velvet Underground et la scène folk de Greenwich Village, dont la figure la plus connue reste Bob Dylan, New York City a toujours représenté quelque chose de spécial pour tout amateur de rock’n’roll. Patti Smith, Garland Jeffreys, Elliott Murphy, Jesse Malin, Sonic Youth, les New York Dolls, Ramones, Television et même Kiss voire Interpol, le casting laisse rêveur et a installé une solide culture rock dans la Grosse Pomme, aujourd’hui réduite à néant. Même le CBGB a fermé ses portes ! Dans ce marasme, un seul groupe a fait son apparition ces dernières années, le quatuor Beechwood dont le quatrième effort est sorti un peu plus tôt cette année. Beechwood excelle dans un genre de chansons courtes et ultra efficaces (avec 12 titres ce nouvel album est plutôt du genre copieux) entre punk et glam dominé par une guitare agressive, où le chanteur Gordon Lawrence, à l’unisson, s’arrache les cordes vocales (« Carved Arm » ; « Friendly Fire »). Et pourtant il y a bien plus de musique en eux, « She broke me » les trouvent particulièrement à l’aise dans un genre de psychédélisme barré et bruitiste (new-yorkais en résumé) parfois mâtiné de folk envoûtant (« Gently towards the light »). Conscients de leur statut, les musiciens se posent en gardiens de la chose rock, qui les voit régulièrement reprendre sur scène les classiques signés Kinks ou Beatles (« Rain » dans le cas présent, qu’ils passent à la moulinette électrique). Un album d’excellente facture signé d’un groupe attachant.

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samedi 5 novembre 2022

Tedeschi Trucks Band : « I am the moon I. Crescent »

 


A bien des égards, la musicalité du Tedeschi Trucks Band est imprégnée des années 1970. Une chose relativement commune de nos jours où les doigts des deux mains ne suffiraient pas à compter le nombre de formations nostalgiques. A ceci près que chez le couple Susan Tedeschi / Derek Trucks, la démarche semble plus profonde et loin de se résumer à une posture et à une collection d’instruments et de fringues vintages. Non, Tedeschi Trucks Band est un groupe comme il n’en existe plus que dans nos souvenirs. Une formation XXL, douze musiciens, une incongruité égale à celle de l’époque où Joe Cocker, Leon Russell ou Eric Clapton réunissaient une bande de musiciens cintrés pour accoucher de chef d’œuvres qui ont écrit la légende des années 1970. La comparaison avec Clapton est d’autant plus pertinente que ce nouvel effort prend sa source dans le poème perse « Layla et Majnûn », le même que celui qui a inspiré l’opus magnum « Layla and assorted love songs » de Derek and The Dominos. D’ailleurs peut on encore parler d’album tant la démarche du groupe assomme par son gigantisme : un coffret de 4 cds, dont voici le premier volume. Qui d’autre peut se targuer de tenir cette distance sans lasser, de proposer un cocktail de musiques, ancrées dans l’americana, qui du rock à la soul, du blues au psychédélisme, du folk à la country en passant par le jazz, propose une diversité d’ambiances pour aboutir à un résultat d’un rare cohérence finale. Une qualité d’écriture rare magnifiée par une virtuosité, sans esbroufe et dénuée d’ambages, tout à l’air si simple, coulé et naturel à l’écoute. Sans aucun doute, le signe des très grands !

En concert les 12 et 13/11 (Le Trianon) et le 15/11 (Bataclan).

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mardi 1 novembre 2022

JE T’AIME : « Passive / Aggressive »

 



Le trio parisien a été particulièrement ambitieux, présentant son nouvel album en deux temps. Le premier disque, « Passive » est sorti le 14 février dernier, jour de la Saint-Valentin, et le deuxième disque « Aggressive » sort ce 1er novembre, jour de la fête des morts. Amour et mort sont donc intimement liés à ce corpus de vingt chansons. Symboliquement nommé « Je t’aime », le trio fait preuve d’un romantisme à toute épreuve. Mais sa vision est loin du romantisme béat. Tortueuse et parfois violente, la vision de l’amour, mise en musique par le groupe, se révèle plutôt tourmentée. Une vision assez subtile en vérité. Battement implacable d’une boîte à rythme digne des Sisters of Mercy, échos de Robert Smith (The Cure) dans le chant, sons de basse énorme (coucou Simon Gallup!) s’intégrant parfaitement dans le mix de guitares et de synthés : du punk à la cold wave, l’écho des années 1980 sonne partout dans le disque, le trio se révélant le parfait héritier de la mouvance froide et noire de l’époque. Il n’est pourtant nullement question de nostalgie à l’écoute. D’abord parce le groupe sait faire preuve d’audace, intégrant subtilement quelques rythmes reggae/dub à l’occasion (cf. « Unleashed »), ensuite parce que le trio appartient définitivement à notre époque, faisant également sien l’électro clash (cf. « Stupid Songs ») ou le post punk. Symboliquement, c’est avec le son d’un orage enregistré que se clôture « Passive », le premier disque. Signe de la déflagration à venir, le deuxième album « Aggressive » fait honneur à son titre et se révèle à la fois nerveux, tendu et électrique, dopé par l’amertume en parfait complément du premier disque. Une sublime doublette d’albums intemporels.

En concert le 17/12 à La Maroquinerie

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