vendredi 14 août 2009

Cortex : Troupeau Bleu


Le retour d’un groupe culte. Cortex, formation jazz fusion française, a longtemps fait figure d’étalon. La redécouverte de l’album « troupeau bleu » (sorti en 1975), via cette réédition, permet de mieux comprendre pourquoi. Cortex évolue entre la pop, la chanson française et le jazz. Alain Gandolfi et Jean Grevet, respectivement batteur et bassiste, sont impressionnants de swing, écoutez « Mary et Jeff »… Les mélodies sont dominées par les claviers d’Alain Mion, qui évoquent par moments Stevie Wonder, aujourd’hui Air et consorts tueraient pour avoir un son pareil. Le saxophoniste Alain Labib apporte l’indispensable touche free jazz. Et pour finir la chanteuse Mireille Dalbray est toute sauf une chanteuse de jazz classique. Ses vocaux sont légers comme l’air, on pourrait même dire qu’elle manque de coffre mais dans ce contexte c’est impeccable, sa voix s’envole au dessus des mélodies (déjà) planantes. Les notes de la pochette nous apprennent que l’album a été enregistré en deux jours seulement les 15 et 16 juillet 1975, c’est fort ! Longtemps cet album a été disponible dans une version cd, copiée d’après le vinyle, honnie des vrais amateurs. Le 33 tours d’époque était ainsi devenu une pièce de collection assez recherchée. Cette nouvelle réédition est la première d’après les bandes masters originales, cela change tout le son n’a plus rien à voir. Enfin Cortex a le cd que son talent méritait depuis longtemps. On a enfin le loisir d’apprécier cette musique d’un temps révolu, celle où dans la lignée d’un « Melody Nelson » de Gainsbourg (auquel on pense parfois à l’écoute de Troupeau bleu), la France savait oser avec classe et élégance. Enfin, puisqu’une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, la sortie de ce cd coïncide avec la reformation du groupe sans Mireille Dalbray et Jean Grevet, hélas décédés.

jeudi 13 août 2009

Candi Staton : « Who’s hurting now ?»


Découvertes pour partie lors du concert de l’Alhambra, en avril dernier, les nouvelles compositions de Candi Staton sont désormais disponibles sur ce nouvel album « Who’s hurting now ? ». Autant le dire de suite, l’état de grâce de Candi Staton, commencé avec la superbe compilation des enregistrements Fame, se poursuit avec ce nouveau disque et c’est amplement mérité vu que cette véritable Madame en a bavé pour en arriver là. Pour le blogueur, la chronique du disque s’avère être un exercice délicat, comment trouver les mots pour décrire avec justesse la sérénité et la beauté qui se dégage de cet enregistrement ? L’album se situe à peine un cran au dessous de l’age d’or « fame » (à la fin des années 60) et, comme « his hands », le disque précédent, continue d’explorer cette veine country/soul typiquement sudiste. Candi chante admirablement bien avec cette sensibilité, cette petite fêlure au fond de la gorge. L’accompagnement est à la hauteur des cordes mélancoliques aux cuivres tranchants. Le morceau titre « Who’s hurting now ? » répond en écho au « Best thing you’ve ever had » des années 60. La tonalité d’ensemble est plutôt calme et posée, on a connu Candi plus funky, mais qu’importe après tout c’est un disque de coucher de soleil. J’aimerais cependant finir cette chronique avec un léger regret qui n’intéressera personne à l’heure où la musique se dématérialise et s’écoute en MP3. La pochette rouge/orange est hideuse et, assurément, Candi méritait mieux…
http://www.candi-staton.com/
www.myspace.com/candistaton

mercredi 12 août 2009

Noisettes : Wild Young Hearts

La métamorphose ! Quand nous avions quittés les Noisettes, ces derniers étaient un trio pratiquant un mélange furieux entre punk et soul dans la lignée des Bellrays. C’était en 2007. Aujourd’hui ils nous reviennent avec ce nouvel album « Wild Young Hearts », et, ne serait-ce que pour la toujours aussi jolie voix de la chanteuse Shingai, on doit se pincer les oreilles pour se persuader que l’on a toujours affaire au même groupe. Là où le premier disque débutait dans un déluge de décibels, ce nouvel opus commence avec « Sometimes », une jolie lullaby acoustique. Faut-il s’en réjouir ? En tout cas ce que le groupe perd en puissance brute il le regagne en groove, cf. le discoïde premier single « Don’t upset the rythm ». Le jazzy swinguant « Wild young heart » se charge de nous rappeler que les Noisettes savent toujours faire du bruit même si cela paraît bien léger rapport aux enregistrements précédents. Les très new-wave « 24 hours » et « beat of my heart » laissent par contre légèrement perplexe, un peu à l’image du disque dans son ensemble finalement. Tout cela est très charmant mais sans aspérités. Et si finalement ce nouvel album était tout simplement trop « clean » pour être honnête ?
http://www.noisettes.co.uk/

lundi 10 août 2009

Willy de Ville (1953-2009)


C’est avec beaucoup d’émotion que l’on a appris vendredi soir le décès de Willy de Ville emporté par une maladie aussi grave que foudroyante à quelques jours seulement de son 56ème anniversaire. Au départ chanteur de Mink de Ville, groupe apparu dans les remous de la scène punk new-yorkaise, Willy, d’origine portoricaine, avait parfaitement réussi son intégration à la Nouvelle-Orléans, dont il était devenu l’un des fleurons. Le 13 juillet 2006, dans le cadre de festival Jazz à Vienne il avait donné un concert magnifique en trio accompagné d’un pianiste et d’un contrebassiste. Ce concert était une petite partie d’une soirée consacrée à la Nouvelle-Orléans, donnée en soutien à la ville après le cyclone Katrina, avec notamment Dr John et Eddie Bo, un autre grand disparu de l’année qui nous a quitté le 18 mars dernier. Il y a à peine un peu plus d’un an, le 8 juillet 2008, Willy a arpenté pour la dernière fois une scène parisienne, celle de la Cigale, pour un dernier concert avec un nouveau groupe (cliquez ici pour lire le compte-rendu). Le grand public se souviendra de lui pour son étonnante reprise du Hey Joe d’Hendrix en version mariachi. RIP.

dimanche 9 août 2009

Yodelice : Tree of Life




Derrière le pseudo Yodelice, se cache Maxime Nucci personnage jusqu’à présent surtout connu de la presse people comme l’ex de Jenifer. De son propre aveu, son passé musical n’est pas des plus glorieux, puisque jusqu’ici il a surtout œuvré comme arrangeur pour des émissions de téléréalité de M6. La sortie de son premier album va probablement changer la donne et c’est tout le mal qu’on lui souhaite, car il est évident que ce jeune homme a en lui bien plus de musique que ce qu’il a montré jusqu’ici. Mécontent de son sort, Maxime s’est retiré dans la demeure familiale la « Casa Yodelice » où fut composé l’album. Le lieu géographique a son importance. Situé dans le sud de l’Espagne, en face de détroit de Gibraltar et à quelques encablures seulement de l’Afrique, soit au confluent de mondes et d’influences qui apparaissent toutes sur le disque. Les guitares folk hispanisantes de « The Other Side » et « Cloud nine », les rythmes jazzy d’ « Insanity », le single « Sunday with a flu » aux arrangements de claviers légèrement teintés de soul. Il se dégage de ces dix titres une mélancolie nocturne et une chaleur magnifiques. Yodelice pratique un heureux mélange entre folk, rock n’roll et soul. Les cordes apportent elles une touche manouche sur « Cloud Nine » notamment. L’album est parfait pour un soir d’été tant il transpire le sud, le soleil et la poussière par tous les pores.
www.myspace.com/yodelice
http://www.yodelice.skyrock.com/

samedi 8 août 2009

Chris Isaak


Quelle année ! Après sept ans de silence, hormis l’album de Noël, Chris Isaak nous revient cette année avec non pas un mais deux albums !!!!


Live in Australia

On commence donc avec ce « Live in Australia » qui est le premier témoignage live de la carrière de Chris Isaak. Lorsque j’ai eu la chance de le découvrir en « vrai », il y avait un passage vraiment marquant, un long interlude acoustique ou tous les musiciens étaient assis en ligne au bord de la scène. Un véritable régal pour les yeux et désormais aussi pour les oreilles puisque l’on retrouve un passage semblable dans ce cd très précisément entre les plages 10 et 14. C’est là, en plein cœur du disque, que se niche le véritable trésor. Pour le reste, les versions très sages et très proches du studio, peinent à faire autre chose de cet album qu’un best of de plus, en version live, et ce malgré un Chris Isaak plutôt en verve et assez drôle dans ses interventions auprès du public. Notons toutefois les reprises « I’ll go crazy » (James Brown) et « Only the lonely » (Roy Orbinson). Les fans y trouveront toutefois leur compte.



Mr Lucky

On continue ensuite avec « Mr Lucky », le nouvel album studio tant attendu et le véritable évènement de cette double sortie. De plus en plus, Chris Isaak s’apparente à un cuisinier qui sert chaque nouvel album comme on sert un plat. C’est à chaque fois différent, mais comme les ingrédients sont les mêmes et on a l’impression de toujours manger la même chose. Certes « Mr Lucky » ne manque pas de charme, ne serait-ce que par ce Chris Isaak s’y entends toujours autant en matière de songwriting : « Mr Lonely Man » est un rock n’roll efficace, «We’ve got tomorrow » est joliment teintée de country « Best i ever had », « summer holiday », "take my heart", le jazzy "big wonderful world". Cependant la production est vraiment trop propre et tends à lisser le son qui, de fait, manque de personnalité. Chris, tu devrais écouter le récent album de Kitty Daisy & Lewis. L’album est homogène mais aucun titre ne se détache vraiment, à l'exception du blues poisseux "very pretty girl". Les chansons sont bonnes mais pas vraiment mises en valeur, le son n’est pas assez « roots » et ces arrangements de claviers à l’arrière plan ne lui vont vraiment pas. Alors oui le disque est agréable, mais bon il n’y a rien là-dedans que Chris Isaak n’ait jamais fait avant et en mieux. Même remarque donc que pour l’album précédent les fans y trouveront leur compte mais il y a fort à craindre que malheureusement ils soient les seuls…
http://www.chrisisaak.com/

www.myspace.com/chrisisaak



vendredi 7 août 2009

Cadillac Records de Darnell Martin


Réalisé par la jeune réalisatrice Darnell Martin, « Cadillac Records » a pour toile de fonds la scène blues de Chicago après-guerre et en particulier sur le label Chess. La sortie française du film en salle a été purement et simplement annulée mais grâce à mon super pote Mister J, qui a toujours un œil qui traîne sur les écrans outre-Atlantique, j’ai pu voir le film malgré tout. Le film a des qualités cinématographiques certaines, les acteurs sont attachants et la musique n’y est, ma foi, pas si mauvaise que cela même si tout cela est bien en dessous de l’intensité dramatique qui se dégageait de Black Snake Moan (de Craig Brewer). Ainsi servi avec le plateau télé, Cadillac Records nous a permis de passer une soirée sympa. Le défaut principal du film c’est son genre cinématographique : le docudrame. Ce n’est ni une fiction, ni un biopic mais un peu les deux à la fois. La recette est simple, on prend des personnages réels, des situations fictives et on mélange le tout jusqu’à obtenir un espèce de grand n’importe quoi en guise de résultat. Pratiquement tout ce que raconte le film est pure fiction : de l’absence de Phil Chess (le cofondateur du label avec son frère Leonard) aux relations ultra-tendues entre Howlin Wolf et Muddy Waters en passant par la mort de Leonard Chess et à l’amourette entre ce dernier et Etta James, le film enchaîne les libertés avec la véritable histoire et sert le tout comme des faits avérés. Tout cela prend de telles proportions que Marshall Chess se réserverait, paraît-il, le droit de porter l’affaire devant les tribunaux et Etta James (décrite ici comme une prostituée avec une belle voix) et Chuck Berry seraient absolument furieux. Etta James aurait promis de botter les fesses de Beyoncé (qui l’interprète dans le film) et Chuck Berry aurait « chargé son fusil »… Quoi qu’il en soit, après Dreamgirls, voici un nouveau ratage : un film divertissant mais incapable de saisir le véritable esprit du Blues. Décidément, Hollywood, et ses coupes de champagne rosé bues au bord de la piscine, sied bien mal au blues…
Et un grand merci à Mister J pour la projection privée...



jeudi 6 août 2009

Anthony Joseph, le Cabaret Sauvage, 3 Août 2009.


Alors que le beau monde se prélasse au soleil sur des plages brûlantes, je continue d’arpenter les couloirs du métro à la recherche du son. Recherche qui me mènera ce soir aux confins du parc de la Villette dans le superbe chapiteau de bois du Cabaret Sauvage où nous attends la « Science of Poetry / Voodoo funk technology » from Trinidad d’Anthony Joseph. Et même si ces derniers temps il semble impossible d’avoir deux jours de beau temps de suite, qu’importe parce qu’Anthony Joseph et ses percussions latino-africaines se charge bien de nous donner de bons coups de soleil. Gros coup de chaleur, grosse insolation, pendant toute la soirée. Et une sacrée dose d’énergie en prime. Comparativement à la prestation de février dernier, dans le cadre du festival sons d’hiver, le Spasm band est amputé du tromboniste Joe Bowie, réduisant la section de cuivres au seul saxophone, assez free dans le jeu. Pour le reste le rendu est toujours aussi intense et exaltant, Anthony Joseph n’est d’ailleurs pas le dernier à payer de sa personne et enchaîne les sauts et autres contorsions. Le guitariste me paraît particulièrement bien inspiré, la pédale wha-wha groove et certains passages au gros son saturé donne une orientation plus rock inattendue et plutôt bienvenue. Et puis il y a le reste cette section rythmique la basse (super solo sur un « Cutlass » d’anthologie) et les trois percussions. C’est tout simplement irrésistible et c’est très dur de tenir en place. D’ailleurs Anthony a fait un tabac devant un public qui ne le connaissait pas très bien encore. Une petite précision pour finir, Anthony, Cutlass en français cela se dit « machette », « ma chatte », c’est autre chose et c’est assez différent !!!
http://www.anthonyjoseph.co.uk/
www.myspace.com/adjoseph

dimanche 2 août 2009

Demis


Voici l’album improbable de l’an 2009, le disque d’un artiste dont personne n’attendait plus rien, le nouvel opus de Demis Roussos. Oui, oui, Demis Roussos, jamais je n’aurai imaginé chroniquer un album de Demis Roussos, si on m’avait dit cela au moment où j’ai commencé ce blog, je serai certainement parti dans un fou rire. Et j’aurai été vraiment con, tellement ce disque est une excellente et inattendue surprise. La démarche n’est pas sans rappeler celle du regretté Nathaniel Mayer sur son ultime album : pour se relancer Demis a fait appel à la relève du rock britannique avec notamment l’excellent Lewis Wharton (le bassiste de Little Barrie) et le guitariste Sébastien Martel. Pour la musique Roussos revient aux fondamentaux, le blues, la soul et les chœurs gospel. Les guitares sont grasses et les mélodies, avec cuivres en renfort sur quelques titres, sont bien écrites et se retiennent sans difficulté dès la première écoute. Et voilà, le tour est joué, l’affaire est faîte, le disque enchaîne les perles pendant une grosse demi-heure sans temps mort ni filler avec la précision d’un chrono suisse. Demis s’amuse et y prend du plaisir, c’est communicatif et cela s’entend. Et en plus cela va comme un gant à la voix éraillée de Demis Roussos, je crois bien que je ne l’avais jamais entendu chanter comme cela, en fait son grand modèle s’appelle Otis Redding. Et un dernier conseil avant de vous quitter, ne ratez pas la tournée puisqu’il sera, paraît-il, accompagné par Little Barrie au grand complet (et j’en profite pour appeler de mes tous mes vœux un nouvel album de ce groupe).
http://www.demisroussos.net/
www.myspace.com/demisroussosmusic


samedi 1 août 2009

Demi Evans : « My America »


D’origine texane, Demi Evans est installée en France depuis plusieurs années et fût la chanteuse du groupe de Jean-Jacques Milteau. « My America » est son deuxième album en solo. Alors que son pays natal entre dans une profonde mutation, suite à l’élection présidentielle, Demi Evans prend du recul et évoque sa vision de cette Amérique qu’elle a quittée. Le premier opus de Demi « Why do you run ? » était un objet soul tirant vers le jazz, classieux et séduisant. Le changement est radical sur ce deuxième disque qui si il n’en oublie pas les bases, n’hésite pas à oser le pari d’un son plus moderne -notamment sur la chanson qui donne son titre à l’album- élaboré par Jean-Michel Kadjan à base de programmations et de séquences. Mais le jazz n’est jamais bien loin « The next one is a train », « Too bold to be ashamed », le blues non plus « Speak the truth », « Trouble in mind » sans oublier l’indispensable touche soul. C’est d’ailleurs dans la voix grave, chaude et suave de Demi que cette dernière est la plus présente. Demi chante avec son cœur et son âme et c’est particulièrement touchant. On avait remarqué tout au long de son travail avec JJ Milteau sa capacité à accélérer le débit et cela sied particulièrement bien à l’approche quasiment rap de certains morceaux. Il en résulte cet album, un superbe exercice soul moderne et classique à la fois, audacieux par moments, et porté par une chanteuse au talent unique en son genre.
http://www.demievans.com/