mercredi 19 décembre 2018

Vera Sola : « Shades »



La pochette, d'un splendide noir et blanc profond, dit finalement beaucoup. On y voit l'artiste poser dans ce qui fut une cuisine, délabrée. Une session urbex, témoignage nostalgique de la fuite du temps évoquée au travers de lieux abandonnés, un sentiment prégnant dans la musique de Vera. Multi-instrumentiste, Vera a enregistré ce premier album seule, une gageure, une performance devant laquelle on ne peut que s'incliner tant le spleen, la mélancolie, qui se dégage de l'ensemble est profonde. Entre ballades et torch song, suivant une trame minimaliste, voire jouée en sourdine (« Circles », « Small minds »), Vera sort l'album idéal pour le chien-loup. Ni triste, ni dépressif mais pas vraiment primesautier non plus. L'évidence mélodique de la chose est rare et accroche immédiatement l'oreille alors que sa voix s'élève au-dessus de la mêlée avec un petit quelque chose gospelisant de Karen Dalton dans le fond de la gorge. Un album simple et délicat, d'une beauté dépouillée, ou les guitares jouées en arpèges, le son chaud des orgues et les basses dont le battement évoquent un cœur, tiennent le haut du pavé tout en laissant un peu de place à l'expérimentation de récupération : des bris de verre, de chaînes, de classeurs à tiroirs, des marteaux, des planches, sont ainsi utilisés par l'artiste pour densifier la musique, tout en composant des rythmes inclassables plongeant l'auditeur dans une abîme d'étrangeté baroque contrastant avec une instrumentation somme toute assez classique. Un album qui évoque les grands espaces poussiéreux à l'heure du crépuscule. Magnifique. 

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