Faire comme si de
rien était. Oublier la petite boule qui nous tourne discrètement
dans l'estomac depuis une semaine. Faire fi de l'émotion qui nous
saisit quand on passe devant la plaque hommage aux victimes, le petit
pincement au cœur au moment de passer la sécurité. Ce soir on va
au Bataclan. Ce soir on va voir Nada Surf. Et, chose impensable, on a
même songer à se décommander. Et puis on y est allé quand-même.
Parce que la Vie doit continuer, parce que les guitares résonnent
plus fort que les kalachnikovs, parce que le rock n'roll fait plus de
bruit que les bombes. A l'intérieur, l'endroit a finalement peu
changé exception des toilettes et du hall d'entrée, refaits à neuf
et du bar qui est semble aussi différent. Et puis dès que les
lumières se sont éteintes, on a retrouvé nos marques. Un concert
de rock, notre élément naturel. Sur scène, les quatre membres de
Nada Surf, se sont bien gardés d'évoquer les événements tragiques
survenus il y a un an. Mais on sent bien qu'il y a quelque chose de
différent. Que quelque chose à changé. Les applaudissements sont
plus appuyés, le groupe (surtout Daniel le bassiste parfaitement
francophone) semble ému. Entre les chansons, Matthew (le chanteur au
français parfait) évoque des anecdotes personnelles (chose assez
rare) et tient un discours profondément humaniste qui fait chaud au
cœur… Et ce sont des tonnes d'amour qui se sont déversés sur le
groupe via des applaudissements nourris…
Sur scène Nada Surf
a toujours été un groupe ultra-efficace, charismatique, emportant
littéralement le public et évoluant sur une ligne fine entre
mélancolie (« 80 windows », « Weightless »
et les chœurs assurés par le public, très émouvant) et puissance
brute (« Happy Kid », « Hi-speed soul », rare
incursion du groupe en territoire cold wave). Avec l'ajout d'une
deuxième guitare, assurée par l'excellent Doug Gillard, c'est un
véritable mur du son qui se dresse devant nos oreilles. Derrière sa
batterie, le puissant Ira Elliot est le ciment qui tient tout
l'édifice debout. Vêtu de son perfecto à paillettes, ce dernier
fait la fête dans son coin, danse avec ses baguettes. Cela
maintenant près de vingt-cinq ans que ce groupe joue ensemble. Et ce
que l'on entend est la résultante de toutes ces années passées
ensemble sur la route : une cohésion musicale irremplaçable,
une alchimie unique. Ces quatre là savent tout simplement se
trouver. Les lumières se rallument, la musique résonne et on pense
le concert terminé. Et puis surprise, les quatre sont revenus avec
des guitares acoustiques et ont entamé « Blizzard of '77 ».
Comme ça, sans amplis, sans micros, au plus près du public. Les
quatre voix se mélangent harmonieusement, les harmonies vocales sont
magnifiques. Comme un ultime cadeau avant de quitter la scène. Le
Bataclan, finalement, on est content d'y être retournés.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire