Faire de la pop anglo-saxonne tout en chantant en français
n’est pas impossible. La preuve avec les quatre garçons de Marshmallow.
Rencontre…
Comment vous avez commencé le groupe ?
Marshmallow : On est des amis d’enfance. Quand on a
commencé au départ c’était pour s’amuser. C’est vraiment devenu sérieux il y a
quatre ans quand on a rencontré Pierre (le batteur, ndlr). Il nous manquait le
batteur, véritable. Quand Pierre est arrivé, paf, c’était parti.
C’est à ce moment là que vous avez commencé à
composer ?
M. : On avait commencé avant…
J’ai lu dans votre bio que vous avez donné environ 300
concerts…
M. : 300 cette année (rires). Non, 300 depuis que
Pierre est arrivé.
Ca fait une belle petite expérience de la scène…
M. : Oui mais il y a de tout là-dedans, des salles, des
cafés concerts et même des bars miteux. De tout !
La scène c’est un exercice que vous abordez comment ?
Fred (chant) : Au départ ça me stressait beaucoup. Une
semaine avant j’étais chez moi à me demander comment j’allais faire et pourquoi
jouer en public. Et finalement à force d’en faire beaucoup, c’est l’effet
inverse. Ca me stimule et j’ai envie d’y aller !
Pierre (batterie) : C’est un peu les deux. Il y a
toujours une appréhension pour la première note, après le plaisir reprend le
dessus.
On pense beaucoup aux Beatles à l’écoute de l’EP. Vous avez
d’autres influences ?
M. : Beaucoup les années 60, les Kinks, les Zombies… Sinon
pour les groupes récents, Supergrass mais eux aussi viennent des Kinks et des
sixties. Donc, en fait, c’est toujours pareil !
A votre avis elle vient d’où cette fascination que tout le
monde a pour les sixties (et moi le premier d’ailleurs) ?
M. : On vient d’Egletons, une petite ville de Corrèze.
On n’avait pas internet alors on écoutait la radio, nostalgie. Et sur nostalgie
c’était les Beatles ou Jean-Jacques Goldman. On a préféré les Beatles. Les
groupes qui sont arrivés dans les années 60 avaient tout à inventer, aucune
barrière. C’était génial ! De nos jours, c’est super difficile d’inventer
quelque chose. Les sixties étaient très riches.
Et quand on fait de la musique, cette idée que tout a déjà
été fait avant, ce n’est pas un peu frustrant ?
M. : Tout n’a pas été fait. Nous on fait de la pop
anglaise chantée en français. Les professionnels n’arrêtent pas de nous mettre
dans une case, c’est donc que notre cocktail n’a jamais été proposé avant.
Préserver la mélodie, c’est le challenge de Marshmallow. Pendant très longtemps
on a composé des mélodies sympas. Mais le manque de savoir-faire au niveau des
paroles, parce qu’on tenait à chanter en français, rendait les choses bancales.
Ca nécessite un apprentissage. C’est pas mal de travail. Au départ on écrivait
des paroles et puis on chantait le truc et on ne retrouvait pas la mélodie initiale.
On s’est aperçu qu’il fallait une pratique de l’écriture pour arriver à faire
sonner les mots et préserver l’aspect mélodique. Si on n’y prends pas garde, le
français à tendance à donner une couleur chanson française ou éventuellement
rock français mais on arrivait pas à garder ce côté anglais des mélodies.
Téléphone y arrivait bien mais dans un autre registre, c’était plus rock. On
voulait aussi faire un vrai groupe à l’anglo-saxonne. Pas un chanteur et ses
musiciens. On voudrait que tout le monde sache que nous sommes quatre.
Le chant en français c’était un peu perdu ces dernières
années. Comment les textes vous viennent ?
M. : C’est un long chemin, savoir pourquoi tu écrit tel
truc et tout ça… Au départ, on se basait sur le sens du texte. Et ce peut être
pour ça que l’on n’arrivait pas à préserver nos mélodies. Et au fil du temps ça
évolue. Le sens est moins apparent, il faut plus fouiller, parfois je ne
pourrais même pas dire comme ça de mémoire de quoi j’ai voulu parler.
Maintenant on veut surtout créer des climats, une ambiance un peu
cinématographique. Mettre des sentiments en paroles plutôt que de faire passer
un message ou d’expliquer de manière très pédagogique.
Et votre ambiance alors elle serait plutôt estivale (cf. «A
l’heure d’été » ; « Des palmiers sur ton uniforme ») ?
L’été c’est votre saison préférée ?
M. : Printemps/été on va dire… Mais la météo influence
beaucoup nos chansons, soit il y a beaucoup de soleil, soit de la neige comme
dans « le réveillon ». La tonalité générale de l’album va assez « soleil, été et bonne
humeur ». On aimerait qu’il soit reçu comme 35 minutes de bonne humeur.
Pour en revenir à ta question, on faisait tout à l’heure le parallèle avec les
Kinks qui vivaient dans le brouillard anglais et qui composaient des mélodies
super ensoleillées peut-être pour sortir de leur environnement. Nous on était à
Clermont, dans les usines Michelin… C’est peut-être ça, va savoir. Je crois
qu’on chante ce qui nous fait envie, les palmiers, la plage. On n’est pas
originaires de Clermont, où nous sommes arrivés pour les études, mais de Haute
Corrèze, il faisait très froid, c’est encore pire que Clermont-Ferrand.
L’EP a été enregistré en une journée comme une session live.
C’est pour ça que toutes les rythmiques sont à la guitare acoustique, ce qui
donne un petit côté démo ?
M. : On a fait une tournée des Parcs entre juin et
septembre. On jouait dans tous les squares de Paris. Sous le kiosque. Et avec
un matériel très léger : deux enceintes, un micro, une cymbale, une caisse
claire et basta ! Et en fait on voulait retranscrire sur cet EP ce qu’on a
fait pendant deux mois dans les squares. On arrive au studio, on s’installe et
trois-quatre on y va. On met l’accent sur la guitare acoustique, la rythmique
un peu en arrière plan. Mais ça va changer sur l’album à venir, il y aura du
clavier, du piano…
Et les harmonies vocales ? C’est un aspect qui m’a
frappé à l’écoute de l’ep…
M. : Les beach boys font parti des groupes qu’on a
écoutés. Mais on ne s’est pas dit : « tiens on va faire des harmonies
vocales pour copier les beach boys… C’est venu assez naturellement sans poser
vraiment de questions. Eux avaient aussi des voix qui s’y prêtaient bien, ils
pouvaient monter très haut et avaient des timbres qui se mariaient bien
ensemble. C’est à la base une volonté de faire une musique avec des chœurs et
il se trouve que c’est possible avec les voix de chacun. C’est pour ça que l’on
a mis en avant.
Vous avez d’ailleurs fait la première partie des Beach Boys
au Grand Rex l’été dernier…
M. : On leur a mis la pâtée (rires) ! Ils nous
appelé pour une tournée mondiale (rires) ! En tout cas sur l’affiche
c’était rigolo. D’avoir jouer avec les Beach Boys, symboliquement, ça nous
faisait plaisir. Même si ce n’est pas non plus le truc du siècle. La Corrèze
des années 1990/2000 avec la Californie des années 60.
De toute façon ce n’est plus vraiment les vrais Beach
Boys !
M. : Apparemment, ils se relancent en ce moment avec
Brian Wilson.
Le titre « La réalité », reprise d’Amadou &
Mariam, tranche un peu avec le reste…
M. : L’originale avait été enregistrée avec Manu Chao.
A la base la chanson ne ressemble pas du tout à ce qu’on en a fait. On avait
envie de faire une reprise en français. On voulait éviter ceux qu’on admire à
mort genre Gainsbourg. On a essayé bien sur, mais on a vite vu que ce n’était
pas très intéressant pour un groupe comme nous. Ca été entendu mille fois. On a
plutôt essayé de trouver un truc qui était moins évident mais que l’on pouvait
s’approprier. C’est notre éditeur chez Sony qui a pensé à « La
Réalité ». Sur le coup on s’est dit oui effectivement ça tranche, on n’y
aurait pas pensé tout seuls. Et puis on a essayé avec nos guitares. Et on a
réussi tout de suite à vraiment se l’approprier.
Quand je l’ai écouté j’ai vraiment senti le contraste entre
la mélodie, assez joyeuse comme les autres d’ailleurs, et les paroles plus
sombres…
Fred (chant) : Ce qui me plaisait aussi, c’est que je
pouvais chanter tous les mots sans me poser de questions. Ce qui n’était pas
forcément le cas avant. Sur les autres reprises qu’on a essayé il y avait
parfois des tournures qui me gênaient… Par pudeur. Des mots que je n’aurais pas
écris moi-même et que je n’aurais pas oser chanter. Genre : « Oh mon
Amour… » à tue-tête. J’ai du mal à déclarer mon amour dans un micro. Sur
l’ep il n’y a que trois chansons à nous et c’est vraiment le soleil, le soleil,
le soleil. Mais sur l’album il y aura quelques chansons un peu moins joyeuses.
Plus sombres mais sans aller chercher la torture mentale non plus.
C’est aussi peut-être un inhibant de reprendre quelqu’un
dont on est très fan. On n’ose pas trop modifier…
M. : Ca c’est sur. C’est moins bloquant de déstructurer
une chanson que l’on connaît moins bien. Avant de la jouer, je n’étais pas chez
moi en train d’écouter « la réalité » tous les jours. Même si
l’original est vachement bien. Je la connaissais vaguement de la radio. On se
lâche plus facilement.
Est-ce qu’il y a une forme de pression quand on est un jeune
groupe qui sort son premier disque ?
M. : C’est quand même la crise du disque et nous on a
envie que ça marche et la pression se situe là. On ne veut pas louper le coche.
On n’est plus dans les années 60 où t’as des mecs que te disent :
« on vous produit 14 albums ! ». On ne veut pas foirer notre
entrée. C’est ça la pression. On est conscient que le consensus n’est pas
possible et ce n’est pas forcément très bon de rassembler tout le monde.
Diviser ça peut être pas mal aussi. On s’affirme dans un style et on sait que
cela ne peut pas plaire à tout le monde. Malgré tout on a très envie qu’un
maximum de monde se joigne à nous.
C’est quand même dur un premier album. D’un côté il faut que
ça marche mais de l’autre tu n’as pas encore la maturité pour faire un chef
d’œuvre du premier coup…
M. : C’est sur. Néanmoins, on est content de ce qu’on a
fait et des gens avec qui on l’a fait. C’est un processus qui s’est bien passé
du début jusqu’à la fin. C’est encourageant. Certaines séances de studio
peuvent être très compliquées si les gens avec qui tu travailles n’ont pas la
même façon de fonctionner. Les journées peuvent très longues. Tu commences à te
prendre la tête et tout. Alors que des fois en cinq minutes tu as une chanson.
Là, tout s’est passé naturellement. On a réussi à garder de la fraîcheur. J’ai
réussi à tout chanter en une ou deux prises. Ce qui n’est pas forcément
évident. On a travaillé avec Yarol Poupaud et Fred Jimenez. Yarol sentait très
bien que si l’un d’entre nous était prêt à faire un truc, il ne passait pas
quatre heures à brancher un micro. C’était, vas-y et on verra après. Il a
vraiment préservé la fraîcheur du groupe. C’était vraiment très bien. Le studio
c’est plus un photo finish de ce qui existe déjà. C’est plus comme dans les
années 90 où tu pouvais booker un studio quatre mois pour composer en studio. Nous
on était prêt avant. Pour en revenir à la pression, on essaye de ne pas se
poser trop de questions, ça ne fera pas avancer les choses de toute façon.
Restons de bonne humeur. De toute façon nous on est à fond dedans, on a tout
donné pour que ça marche.
Propos recueillis le 2 février 2012.
Sortie de l’album « A l’heure d’été » le 4 juin
2012.
En concert à Paris le 30 avril (le lautrec) et le 18 juin
(nouveau casino), à Clermont-Ferrand le 6 juin (Coopérative de mai) et aux
francofolies de la Rochelle les 13 et 14 juillet.
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