Alors que l'on s'apprête à découvrir le nouvel album de Teleferik et que les premières notes s'échappent des enceintes, une évidence se fait jour. Ce deuxième disque du duo, à la période de maturation assez longue, est un album où le groupe s'affirme et assume son identité, en résumé, tout le sel qui fait le charme, la magie et la fraîcheur du groupe. Pour ce deuxième effort, Teleferik a mis les petits plats dans les grands, est allé chercher Kenzi Bourras (Rachid Taha) et Rizan Saïd (Omar Souleyman), deux musiciens de haut vol qui ont arrangé le disque et a confié sa réalisation à Azzedine Djelil, afin de renforcer le côté oriental et arabisant de la musique, un aspect déjà esquissé sur le premier album. L'ambition était élevée, bâtir un pont entre l'Orient et l'Occident, car soit dit en passant, l'album n'a pas oublié d'être un disque de rock'n'roll, un vrai, pur et dur, aux racines ancrées dans le blues et la psychédélie des années 1970 (cf. « Just a woman », la baroque « You are poetry », « Queen of the harem »). Et cela donne des choses formidables lorsque la guitare, inspirée et abrasive, d'Arno engage une dynamique positive en se frottant aux arrangements faisant la part belle aux sonorités orientales (« Believe », « De l'autre côté ») ; l'amalgame fonctionne au-delà de toutes les espérances, la sauce monte au point de transformer la chanteuse Eliz (à l'aise dans trois langues, arabe libanais, français et anglais) en punkette prête à tout arracher sur son passage (« Hell in your arms », « Sarr Lezim »). Preuve de la polyvalence du duo, les musiciens n'hésitent pas à sortir de leur pré carré pour aborder d'autres rivages, new/cold wave (« Many Lovers ») ou franchement funky, dansant et festif (le formidable single « Khalifa n'shouf »). Mais la brillance musicale de l'album ne doit surtout pas occulter le fond de l'affaire, à savoir la profonde humanité qui anime le duo. Comment ne pas être ému par les paroles « De l'autre côté » ? Comment rester insensible à son message de paix, d'amour, de tolérance, que le groupe sait faire passer sans jamais être lourd ou plombant ? Et si vous alliez écouter ce qu'il se passe de l'autre côté ?
En concert à Paris (Black Star) le 11 avril.
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