mercredi 28 août 2019

Rock en Seine, 23, 24 et 25 Août 2019


Après une édition 2018 bien en-deçà des standards habituels, la programmation 2019 a relevé la barre. 

Vendredi 23 août 2019 

Lee-Ann Curren : Franco-américaine, la fille du légendaire Tom (triple champion du monde de surf) s'est détournée de la compétition pour se consacrer à la musique, sa deuxième passion. Quasi-inconnue avant le festival, un seul clip a été dévoilé en attendant la sortie de son premier EP en solo, la jeune femme se présente sur scène en trio accompagnée d'un batteur et d'un bassiste/claviériste. Son univers entre pop/électro et rock soft laisse apparaître de nombreux possibles bercés par le rythme lancinant des machines qui n'est pas sans rappeler le roulis des vagues s'écrasant sur le rivages. Le batteur survolté dynamite le tout apportant une pointe de puissance rock à l'affaire, si l'ensemble manque encore de maturité, la promesse est néanmoins belle. 

We hate you please die : Un nom pareil ne peut que susciter la curiosité ! Quatuor mixte, deux filles forment la section rythmique alors les garçons se partagent le chant et la guitare. Ambiance survoltée, attaque punk frontale, les jeunes Français forment un groupe qui n'est « ni triste, ni joyeux, simplement une bande de gamins en colère ». Derrière son sourire de façade contrebalancé par son regard triste, le chanteur zébulon laisse apparaître de nombreuses failles et finit le concert exsangue vidée. Belle communion avec le public, le véritable carburant du quatuor sur scène. 

Johnny Marr : « Merci d'être venu plutôt que d'aller là-bas » clame-t-il désignant négligemment du bras l'emplacement de la grande scène où va se produire The Cure une plus tard. Il amusant de constater que l'inimitié entre deux des formations majeures (The Smiths et The Cure) de l'Angleterre des années 1980 perdure encore de nos jours. Beau succès auprès du public, qui s’éclaircit de plus en plus alors que le temps file, l'ex-Smith possède toujours un magnifique touché de guitare mais pas toujours le répertoire en solo à l'avenant. Ce sont encore et toujours les reprises des Smiths qui touchent le public en plein cœur, «Bigmouth strikes again » et autres « This Charming man » ; comme il le chante lui-même : « There is a light that never goes out »… A noter une très surprenante mais réussie reprise de « I feel you » (Depeche Mode). 

The Cure : Trois lointaines silhouettes noires qui s’agitent entre deux branches d'arbres au milieu des feuillages et trois petits bouts de guitares et c'est à peu près tout ce que l'on a vu du groupe mythique. Une foule immense d'environ 40 000 spectateurs (soit l'équivalent de deux Bercys environ) s'est pressée devant la scène pour ne plus en décoller, scotchée par la puissante mélancolie du groupe. Jamais vu un tel rassemblement à Rock en Seine auparavant, même pas pour Iggy Pop ! On est bercés par la musique, le groupe semble plutôt en forme et audacieux (cf. « Burn » extraite de la B.O du film « The Crow ») musicalement parlant, mais aussi par le râle incessant des spectateurs mal placés ne pouvant avancer et les engueulades inhérentes à ce genre de situation (pourquoi t'as autant traîné on ne voit plus rien maintenant!) Nous sommes clairement en présence d'un groupe dont l'immense aura a confisqué, phagocyté et finalement dépassé celle de l'événement. En résumé, le public n'est pas venu assister au festival mais à un concert des Cure. En ce sens c'est une déception. 

Samedi 24 août. 

Catastrophe : Très clairement, cette bande là est faîte d'un bois différent, s’agitant en tous sens, il est autant question de musique que de chorégraphie, en plein cagnard dans leurs costumes colorés, sans afficher le moindre signe de transpiration visible. La musique exhale ce feeling rétro indéfinissable, ne ressemblant à rien de connu, propre aux productions Tricatel. Mais derrière la légèreté primesautière de façade, la pop, mi-joyeuse, mi-mélancolique, de Catastrophe laisse apercevoir un spleen se nourrissant de l'éphémère et obsédé par le temps qui file inexorablement. Très belle découverte. 

Céleste : Magnifique chanteuse entre la soul et le jazz, Céleste mise sur une instrumentation acoustique mettant en valeur sa voix et ses textes. On enrage de n'avoir vu que la fin de sa prestation ! Le coup de cœur de la journée ! 

Louis Cole Big Band : Venu de Californie, Louis Cole agrémente son électro pop d'un big band comprenant neuf cuivres, deux choristes, une basse et un clavier. Sympa mais approximatif, le chanteur se révèle également brouillon à la batterie. 

Mahalia : Venant d'Angleterre, la chanteuse est un très bon exemple de cette nouvelle scène soul infusée à l'électro et au hip hop. Un style difficilement transposable sur scène (elle n'est accompagnée que d'une section rythmique) mais nous sommes emportés par l'enthousiasme de la chanteuse, sa voix et ses textes, profonds, inspirés de son expérience personnelle. Hélas, la guitare acoustique (un autre angle de sa musique), dont elle joue magnifiquement bien, n'a que trop peu servi en cet après-midi. Belle découverte néanmoins. 

Jorja Smith : Magnifique dans sa robe à paillettes, la chanteuse étincelle, sur l'avancée de scène, brillant telle une étoile dans le jour finissant. Entre soul et jazz, à la fois moderne et traditionnelle, entourée d'un groupe de musicien redoutable, l'Anglaise au charme bouleversant sort le grand jeu. C'est beau. 

Dimanche 25 août. 

Cannibale : Alors là, on ne rigole plus ! Après une première apparition sur un podium indigne décoré en garage/station service, les Normands ont les honneurs de la grande scène ! Un magnifique écrin pour le groupe qui se lâche totalement, entre harmonies vocales grandiloquentes et délires de synthés psychédéliques sans jamais sombrer dans le ridicule. Afrobeat, garage et psychédélie constituent le cœur de ce groupe ô combien intriguant mais profondément attachant. 

Le Villejuif Underground : Mené par un chanteur australien dégingandé, les Franciliens sont l'autre fer de lance du label Born Bad du jour (après Cannibale). Faisant fi des difficultés techniques de la basse, le groupe laisse exploser son enthousiasme (et les décibels!) le long de compositions imprégnées de rock garage et psychédélique pour une fois débarrassées des influences des années 1970. Revigorant ! 

The Murder Capital : Révélation annoncée du week-end, les Irlandais, attendus comme le loup blanc, n'ont pas failli. Un concert rageur, mais pas uniquement, emprunt également de mélodie post punk, laissant une place importante au silence et traversé par une émotion palpable. Véritables bêtes de scène, le groupe nous a prodigué la claque attendue. 

Royal Blood : Un groupe de rock sans guitare, ce qui sonnait au départ comme un incongruité ne l'est finalement pas tant le duo (basse et batterie) nous a prodigué notre dose de décibels pour la journée. Mené par un batteur surpuissant et une basse imitant à la perfection le sons des guitares (merci les pédales d'effets) le groupe enchaîne les riffs dévastateurs. Un peu surjoué parfois (le lot commun des grosses têtes d'affiches internationales) mais enthousiaste ! 

Foals : Pas facile d'assurer dans un registre rock en passant juste après les gros bras de Royal Blood. Les Anglais relèvent pourtant le défi haut la main en délaissant les autoroutes du rock et profit de chemins nettement plus tortueux nourris au feu des guitares, des percussions et des synthés expérimentaux. Partant parfois un peu dans tous les sens la formule se révèle imparable lorsque toutes les pièces s'emboîtent dans le bon sens comme sur le sublime « Snake Oil ».

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