lundi 2 juillet 2012

Eurockéennes de Belfort 2012.



Que retenir de l’édition 2012 des Eurockéennes de Belfort ? Un site magnifique (celui de l’Etang du Malsaucy au pied des Vosges), une journée et demi de beau temps (voire de canicule), de la boue et une programmation exceptionnelle de densité où se sont croisées valeurs sûres (qui n’ont pas déçus) et quelques belles découvertes…

Vendredi 29 juin : On commence avec Los Disidentes Del Sucio Motel, valeur sûre du rock stoner made in Alsace à qui revient l’honneur d’ouvrir les hostilités. Le groupe est accompagné d’un Sheriff qui pointe le public du doigt, droit dans son uniforme. Gros son, énergie communicative du groupe qui démontre un potentiel scénique. Une prestation malheureusement trop courte, une petite demi-heure ça passe trop vite, qui laisse un poil de frustration.

Le temps de traverser l’esplanade et on se retrouve sur la green room pour recevoir la première grosse claque du festival avec Hanni El Khatib. Trois musiciens sur scène, batterie et deux guitares (ou un clavier) qui pratiquent un garage rock suffisamment crade et sauvage pour que le public pète les plombs sous un soleil caniculaire. Excellent.

Une note dépaysante avec Hank Williams III, un artiste country qui a la particularité d’intégrer des éléments heavy metal dans sa musique (chœurs gutturaux, pattern de batterie, quelques guitares saturées). Etonnant, parfois sympa mais un peu roboratif à la longue.

Un peu de douceur dans ce monde de brutes avec Michael Kiwanuka. Le cadre de la scène de la Plage est magnifique où la scène est posée sur l’eau. Le panorama est superbe avec l’étang du Malsaucy en arrière plan. Le soleil couchant ajoute de la magie et le cadre est idéal pour le délicat mélange de soul et de folk de Michael Kiwanuka. Ce dernier est entouré par un important groupe de six musiciens (basse, batterie, percussions, claviers et deux guitares). De longs passages instrumentaux accentuent l’aspect jam, l’ensemble sonne plus free que sur disque. Très belle voix mélodique de Michael et un talent très mature après un seul album.

Rendez-vous ensuite avec The Kooks. Energique et enlevé, le groupe pop fait fondre les filles de l’assistance. Parfait pour la scène d’un grand festival, la connexion s’établit facilement avec le public. Au final un moment plutôt sympa.

Et si la grande révélation du week end était finalement C2C ? Alignés sur la scène, les 4 djs s’approprient le groove et le swing avec une classe folle grâce à de judicieux samples de blues, de jazz voire de gospel qu’ils mélangent avec des sonorités électro. La mise en scène de l’ensemble est impressionnante, les jeux de lumières sont magnifiques (leurs platines sont rétro éclairées), les 4 djs, tout d’abords alignés puis face à face, bougent en cadence. La musique monte en pression tout au long de leur set, le climax est finalement atteint lorsque des cymbales live se mélangent avec l’électro. Par ailleurs, un hommage très touchant sera rendu à MCA (Beastie boys), la séquence émotion du week end.

Samedi 30 juin : Sallie Ford nous transporte aux Etats-Unis avec son rockabilly d’inspiration 50s. Le set semble plus concentré que lors de son passage au divan du monde et aussi plus électrique, pas de contrebasse ce coup-ci mais une basse électrique du début à la fin. Sallie Ford profite de l’occasion pour présenter quelques nouvelles chansons. C’est une artiste attachante qui semble gagner en maturité à chaque prestation.

Précédé d’une grosse réputation naissante, les quatre britanniques de Django Django ont confirmé sur la scène de la plage (noire de monde) les espoirs placés en eux. Le mélange entre pop psychédélique et électro est assez séduisant et le groupe peut se produire aussi bien en configuration tout électro qu’en formation classique guitare, basse, batterie et percussions. En écoutant bien, on trouve même des traces de rockabilly dans leur musique. Leurs harmonies vocales sont particulièrement bien travaillées ce qui les rapproche des Beach Boys. Classique et moderne à la fois.

La grosse affaire du week end, a été le concert de The Cure que l’on a retrouvé avec un plaisir non dissimulé quatre ans après sa dernière tournée : c’est l’événement du week end, retardé de longues minutes après des orages aussi violents que soudains. Dès les premières notes de claviers de « Plain song », qui ouvre la soirée, un frisson parcours le public. On retrouve cette atmosphère de grand-messe grâce à une alternance entre morceaux atmosphériques, « Pictures of you », « Love song », « Want », « 100 years » et une attaque plus rock, « From the edge of the deep green sea » où le groupe sort les guitares. Avec en sus une bonne dose de pop : « The walk », « Why can’t i be you », « Close to me », « Boys don’t cry ». Le line up est renforcé pour l’occasion : deux guitares et clavier. Le bassiste Simon Gallup est en grande forme et saute dans tous les sens. Sa basse est énorme. En dehors de toute promotion ou actualité, le groupe se produit en roue libre et présente une nouvelle chanson avec Robert Smith à l’harmonica pour la première fois. Après plus de trente ans de carrière, The Cure est encore capable de procurer des émotions rarement expérimentées par d’autres à la fois hypnotiques (les intros sont très longues) et euphorisantes sur le versant pop rock. Plus de deux heures de show, grandiose.

Dimanche 1er juillet : changement radical d’ambiance après les orages de la veille et la pluie diluvienne qui n’a de cesse de s’abattre sur Belfort depuis le matin, on troque les lunettes de soleil pour les bottes. Si la vision des spectateurs déclarant forfait, quittant le site sous les trombes d’eau en nous souhaitant bonne chance, n’incite guère à l’optimisme, la journée s’avérera comme la plus excitante sur un strict plan musical.

Cela commence avec un énorme coup de cœur pour les Buttshakers, un groupe venu de Mâcon et mené par une chanteuse Afro Américaine. Mélangeant énergie rock et feeling soul, le groupe n’est pas sans rappeler les Bellrays en plus rhythm n’blues grâce à l’apport de deux cuivres. Groovy ! A suivre de très près…

Le concert de Brian Jonestown Massacre a été retardé de plusieurs longues minutes à cause de difficultés techniques, une autre conséquence des intempéries. Cependant Anton Newcombe, que l’on a connu franchement plus atrabilaire, s’en amuse et prends la pose des guitaristes de métal ou des rappeurs pour distraire le public. Une fois lancé, rien n’arrête ce groupe, pas même la pluie apparue à mi-show. Trippant (un grand merci au batteur), rock n’roll, psychédélique tendance Californie années 60, le groupe tisse une impressionnante toile grâce à ses quatre guitares et aux claviers. Brian Jonestown Massacre c’est la grande classe !

Les Alabama Shakes rappellent quant à eux le rock n’roll sudiste des années 70 intégrant de nombreux éléments soul (excellente chanteuse guitariste) et blues. En un sens c’est le groupe (rural) idéal pour être écouté les pieds dans la boue. La relève des Allman Brothers et de Creedence Clearwater Revival est assurée. Excellent.

Attendu comme le Messie (presque à égalité avec les Cure) Jack White a passé une soirée agitée. Tout d’abord une coupure générale d’électricité a coupé Jack dans son élan après une petite demi-heure. Ce dernier ne se laisse pas démonter et continue son set en acoustique, chante sans micro pour les premiers rangs (pour notre part nous sommes trop loin pour l’entendre). Un petit détour par les backstage et le concert peut reprendre, le courant revenu. C’est alors qu’un spectateur complètement dérangé s’est invité sur scène pour prendre Jack dans ses bras. La sécurité débarque, le détraqué s’enfuit en courant… Concentré sur son sujet White reste imperturbable et revisite la totalité de son répertoire, « Steady as she goes » des Raconteurs, « Seven nation army » des White Stripes ce dernier titre repris en chœur par la foule. Soutenu  par son groupe féminin, Jack White plonge dans entrailles de la grande musique Américaine prenant des détours du côté de la country et du blues. Mais c’est dans le bon vieux rock garage que son énergie se fait la plus communicative. Une performance forte dont on se souviendra longtemps.

On termine enfin le marathon du week end en compagnie de Miles Kane qui incarne la relève de la brit pop. Beaucoup plus convaincant que l’an dernier à Rock en Seine (peut-être est-ce dû à la configuration plus intime de la scène de la Plage), Miles Kane est complètement déchaîné. Arc bouté derrière sa guitare demi-caisse, bondissant dans tous les sens, Miles et son détonnant cocktail de rock 60s psychédélique typiquement british à mis le public à genoux. Miles Kane peut bien brandir sa guitare au dessus de sa tête en signe de victoire, en termes d’ambiance et d’interaction avec le public, il a livré la prestation la plus solide du week end.

Je terminerai avec un petit regret, celui de n’avoir vu qu’un tout petit bout de la prestation des mythiques Refused qui semblait être en tout point remarquable. Mais c’est la dure loi des festivals qui impose des choix parfois cornéliens…

   

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