samedi 23 août 2025

Alex Henry Foster : « A Nightfall Ritual, Live in Köln, July 27, 2024 »

 


Episode 3/3. Dans le long processus de guérison d’Alex, après sa lourde opération chirurgicale, il restait une dernière étape à franchir : retrouver sa voix, son chant. Après avoir laissé la chanteuse Momoka Tobari (l’album « Kimiyo ») incarner ses chansons et un album instrumental (« A Measure of Shape and Sound ») sorti dans la foulée, il lui fallait retourner derrière le micro. Une tâche dont le Québecois s’acquitte avec un album live (son deuxième après un disque enregistré dans le cadre de festival de jazz de Montréal), enregistré en Allemagne en 2024 (hélas, il ne passe plus par la France depuis 2022). A l’instar des musiciens de jazz, qui ont la réputation de jamais jouer une chanson de la même façon, Alex n’a de cesse, sur scène, de réinventer, encore et toujours, son répertoire. Ainsi, ce nouvel effort se révèle particulièrement épique, seulement 4 titres, oscillant entre 9 et 16 minutes. Une odyssée sonore au long cours alternant le calme et la tempête, la transe et la répétition hypnotique, creusant très loin pour faire ressortir des émotions enfouies. Quiconque à déjà vu Alex Henry Foster et son groupe en concert savent que ces derniers ont pour habitude de sortir de scène exsangues et en nage après trois heures de concert. Des performances intenses, parfaitement documentées sur ce nouvel album.



vendredi 22 août 2025

Nesles : « Barocco »

 


Si l’on en croit le communiqué de presse accompagnant la sortie de ce nouvel album, Nesles « décide de revenir aux sources : la chanson. La chanson qui doit tenir toute seule comme une grande ». Et pourtant, paradoxalement, avec ce nouvel effort, Nesles nous offre un album particulièrement complexe, aux arrangements ambitieux, à l’instar de ce « Beckett » d’ouverture à la ligne synthétique hypnotique. Mais une écoute attentive de la chose, nécessaire pour en saisir tout le nectar, permet de cerner les ambitions de l’artiste à propos de ce nouvel album. S’il s’agit bien d’une collection de chansons, joliment arpégées, il n’est point question de faire un disque simple et intimiste (« Antilope », « Quelque chose brille »). La grande variété d’arrangements permet ainsi d’en colorer les contours à l’image du sublime « Quelque chose brille » dont la violence subreptice de la guitare électrique traverse et électrise le titre tels les éclairs lézardant un ciel lourd et orageux. Signe de l’éclectisme de l’artiste, ses mélodies se font volontiers primesautières et légères à l’occasion, en totale dichotomie avec ses textes plutôt sombres, tel ce « Anatomie (rien à foutre) » enluminé par les chœurs assurés par le duo BlauBird/Gabriela Etoa. Assurément, une réussite.

https://www.facebook.com/NESLES/






jeudi 21 août 2025

Tami Neilson : « Neon Cowgirl »

 


Depuis sa Nouvelle-Zélande d’adoption, la Canadienne Tami Neilson construit, album après album, un corpus des plus attachant dont la nouvelle itération est sortie au début de l’été. Solidement ancrée dans une tradition musicale séculaire typiquement étasunienne, qui va du country & western au rockabilly, Miss Neilson ne se prive pas de quelques pas de côté vers la pop (« Borrow my boots ») ou la soul music (« Love Someone »). C’est ainsi, chez elle, la musique est considérée comme un tout indivisible, peu importe les considérations de style, rien ne compte plus que l’émotion véhiculée et la justesse de l’interprétation. En l’espèce, l’auditeur sera plus que servi et ce nouvel effort s’écoute comme un grand huit émotionnel, émouvant (« Keep On », « Foolish Heart », « Loneliness of love ») ou euphorisant (« Heartbreak City, USA » ; « You’re gonna fall » en duo avec l’excellent JD McPherson). Le talent vocal exceptionnel de Tami Neilson trouve ainsi l’écrin parfait, propre à faire briller de mille feux l’aspect protéiforme de sa voix. Un nouvel album hélas enregistré sans son frère, fidèle guitariste, auquel le disque est dédié alors « qu’il était endormi ».

https://www.facebook.com/tamineilsonmusic

https://www.tamineilson.com/





dimanche 17 août 2025

RIT : « Hobo Blues »

 


Enregistrer un bon album de blues est avant tout une question d’authenticité. Prenez Rit par exemple plutôt que de tenter d’émuler le style du Delta, qu’il n’arrivera jamais à égaler, le musicien préfère adapter le style à ce qui lui correspond et qui, au final, lui permet d’accéder à une forme de sincérité honnête, désarmante, et profondément touchante (« Je n’ai que le blues »). En l’espèce, Rit plutôt que de baragouiner en anglais préfère le chant en français quitte à flirter avec un flow quasi hip-hop (« Huckleberry Finn Blues ») ou à se rapprocher d’une esthétique proche de la chanson. Dans le même ordre d’idée, Rit fait tout et tout seul. Les guitares sont tantôt slidées, tantôt folk, où se lancent dans le grand bain électrique avec une abrasivité juste et mesurée. Le battement est réduit à sa plus simple expression, une grosse caisse, une cymbale mais cela suffit pour procurer ce feeling entre groove et transe hypnotique (« Le fond et la forme »). Mettant en avant cette rugosité qui n’appartient qu’à lui, Rit joue le blues comme personne. C’est un vrai artiste.

https://www.instagram.com/rithommequintet/




vendredi 15 août 2025

Ronan One Man Band : « A piece of life »

 


Plus qu’un album, une tranche de vie signée en, solo intégral (exception faîte de quelques renforts pour les chœurs) par Ronan, sa voix rauque immédiatement identifiable, et sa guitare. Et rien d’autre. Et pourtant, pour peu que les planètes s’alignent, ce qui est le cas ici, il n’est besoin de rien de plus. Le talent exceptionnel du musicien explose ainsi aux oreilles de tous les chanceux qui auront l’occasion de l’écouter. Ecouter, réellement écouter, est bien le verbe qui convient en la circonstance, pour saisir toute la finesse de son jeu de guitare, la délicatesse de son picking, la virtuosité délicate de ses arpèges. Une démonstration de virtuosité, discrète, guidée par le feeling plus que la technique. Et puis il y a la voix, grave, rauque, profonde propre à faire ressentir toutes les nuances du blues. S’il est possible que certains n’adhèrent pas à ce timbre, il est pour autant inoubliable et ne laissera personne indifférent. Et, pour finir, la dernière pièce du puzzle, le répertoire de Ronan, ancré dans le blues mais qui ne s’interdit pas quelques pas de côté vers le folk (« Compagnon de bordées » seul titre en français), l’électricité (« I won’t let you go »), la working song ("Misery and Pain") ou la soul (« I Raise my head » ; "Trouble (I'm in)"). Un accident heureux, de la magie captée sur bande, plus qu’un album, une tranche de vie.




jeudi 14 août 2025

Lone Wolf & Rice Fab

 




Tout, de la pochette au son très roots du disque, pourrait faire penser que l’on a affaire à un duo venu du Delta. Il n’en est rien et, né entre Nantes et Rennes en plein Covid, le duo est bien de chez nous. Ils sont donc deux partenaires dans le crime : Lone Wolf (guitare acoustique et percussions) et Rice Fab (harmonica). Leur premier album, 13 titres, sent bon le whisky frelaté et la déglingue. Il y est bien entendu question de blues, la frappe rythmique rudimentaire combinée à la voix écorchée et profonde de Lone Wolf, particulièrement impressionnante sur « No More Water », procure un étrange sentiment hypnotique (« Crossroad Sign » ; « Last night Dream ») alors que l’harmonica, très présent, ne se contente pas de petites phrases mais se lance dans des lignes aussi longues qu’une odyssée. Le dossier de presse nous apprend que, pendant l’enregistrement, le duo réussissait souvent son coup dès la première prise. Et c’est peut-être de là que vient le caractère intemporel, frais et spontané de cet impeccable premier album. L’écouter, c’est partir en virée dans le Delta sans bouger de son siège !





vendredi 8 août 2025

Jessie Lee & The Alchemists : « Legacy »

 




Voici le troisième album de Jessie Lee & The Alchemists qui aura rarement aussi bien porté son nom que sur ce nouvel effort. En effet, enregistré à l’ancienne, prise live en groupe et matériel d’époque labellisé, ce nouvel effort revient à l’essence même de la musique : jouer, s’écouter mutuellement, laisser les accidents heureux arriver et le destin faire son œuvre. La manœuvre est risquée et, bien souvent, est une porte ouverte à la catastrophe sous forme d’albums ennuyeux et inécoutables. Mais lorsque l’on a affaire à des musiciens aussi talentueux, l’alchimie est fabuleuse ! Le groupe prend soin de laisser les compositions s’épanouir, toutes tournent autour de cinq à sept minutes, pas de quoi tomber dans l’emphase mais il y a suffisamment de matière pour laisser la place aux détours surprenants, du gros riff rock qui tue au break soulful et groovy. Si la musique des années 70 est une toile, le groupe s’amuse à glisser dessus d’un genre à l’autre, parfois au sein du même morceau. On y trouve du rock, du blues et de la soul, autant d’influences dont le groupe s’empare, sans plagier, mais fait siennes et y apporte une touche contemporaine, sans passéisme aucun. Grande classe !

https://www.facebook.com/jessieleeandthealchemists





jeudi 7 août 2025

Alex Henry Foster : « A Measure of Shape and Sound »

 


Episode 2/3. Nous avions quittés Alex, au sortir de sa chirurgie cardiaque, dans l’incapacité de chanter. Après avoir fait appel à la chanteuse japonaise Momoka Tobari de le suppléer, le temps de l’album « Kimiyo », Alex continue sa reconstruction, cette fois-ci sur un mode totalement instrumental. Ce qui résulte en une évolution significative de sa proposition musicale ! A l’écoute de cet album, qu’il semble loin le temps des guitares saturées, indé post grunge, de Your Favourite Enemies (son ancien groupe) ou même l’époque des Long Shadows aux explorations progressives. D’exploration il est pourtant question ici. Point de chansons, mais de longues plages sonores, planantes, concoctées en compagnie de son complice Ben Lemelin. Une extrapolation musicale, en apesanteur, poussant encore plus loin le curseur de l’expérimentation, débarrassée de toute influence rock, le duo accoucherait plutôt d’une bande sonore ambiante pour accompagner une séance de méditation. Il appartient alors à l’auditeur d’accepter cette sorte d’abandon de soi que réclame un tel disque pour en apprécier la substantifique moelle. Il faut plusieurs écoutes répétées et attentives pour en saisir les subtilités et accéder à sa beauté qui ne se révélera pas de manière immédiate. Un album exigeant.

https://www.facebook.com/alexhenryfosterofficial

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