dimanche 14 juillet 2013

Eurockéennes de Belfort 2013.



Jeudi 4 juillet : Comme chaque année, le spectacle commence dès la navette qui nous mène au superbe site du Malsaucy, entre lacs et sous bois, où se tiennent les eurockéennes de Belfort, gorgé de soleil pour cette édition 2013 qui marque le 25ème anniversaire du festival. Les hostilités commencent avec Gary Clark Junior, bluesman digne représentant d’un style généralement assez peu mis à l’affiche sur les gros festivals rock en plein air. Si Clark Junior respecte à la lettre l’idiome ternaire, son art consommé du riff et ses guitares sont suffisamment puissantes pour contenter le nombreux public de la grande scène (et faire hurler les puristes). On file ensuite dans le superbe écrin de la scène de la plage profiter de la pop onirique et rêveuse des anglais d’Alt-J. Chœurs dignes des Beach Boys, délicats arpège de guitare, la pop d’Alt-J est également très rythmée. Le travail du batteur est assez original, sans cymbales mais avec une profusion de percussions. Avec le lac en toile de fond, le coucher de soleil et la lumière du jour finissant, c’est magique.

Vendredi 5 juillet : Retour sur la plage pour découvrir en live la nouvelle sensation rock du moment le duo féminin Deap Vally, nouvelles chouchous de Marilyn Manson. Verdict assez mitigé, c’est plutôt entraînant et bien fait à défaut d’être original. La formule du duo guitare/batterie devient peu à peu un cliché du rock des années 2000. On prend ensuite la direction de la Green Room retrouver le barbu Matthew E. White. Songwriter élégant, entre pop, soul et folk, il y a quelque chose de profondément délicat dans la musique de Matthew E. White, à tel point que sa présence peu sembler anachronique dans un festival ou le lâcher de décibels est légion. Et pourtant ça fait du bien ! Batterie, percussions, lap-steel, claviers vintage, Matthew E. White sort les grands moyens pour séduire le public, peu nombreux au début mais qui s’agglutine vite. Les chansons sont entrecoupées de longs passages instrumentaux où les musiciens entrent comme en transe. A noter une très belle reprise de « Are you ready for the country » (Neil Young), le site du Malsaucy s’est trouvé un nouvel hippie. Changement d’ambiance pour finir avec The Smashing Pumpkins. Soyons honnêtes, un an après la sortie d’ Oceania, un album très largement en dessous des standards habituels du groupe, c’est surtout par nostalgie que l’on s’est rendu sur le site de la grande scène pour admirer les citrouilles de Chicago. Et là surprise c’est groupe totalement régénéré que l’on (re)découvre. Le guitariste Jeff Schroeder semble enfin avoir trouvé sa place dans cette nouvelle formation, et le concert montre une véritable collaboration entre lui et Billy Corgan. Les guitares discutent entre elles, et, fin instrumentiste, Schroeder émaille les chansons de soli injectant ainsi une nouvelle jeunesse dans les compositions. Le groupe ne nous avait pas habitué à cela. Les compositions gagnent en substance, en texture, en profondeur. Le résultat est un hybride parfait entre psychédélisme et lourdeur. Notons au passage une magnifique reprise de « Space Oddity » (Bowie). Billy Corgan aurait-il retrouvé le feu sacré ? C’est quoi qu’il en soit une merveilleuse nouvelle.   

Samedi 6 juillet : On commence avec The Strypes, la première claque du week-end. Des gamins de seize ans qui jouent déjà (et prennent aussi la pose) comme des pros, c’est bluffant. Le batteur en particulier ressemble à un bébé. The Strypes c’est un peu comme des gosses qui jouent la musique de grand-papa. Un rock n’roll, racé, d’inspiration sixties d’où transpirent des influences blues et rhythm n’blues. On pense aux Who, aux Kinks, aux La’s où à la scène garage/Mersey Beat d’une manière générale. C’est jeune, c’est frais et enlevé, tant qu’il y aura des musiciens prêts à le servir avec une telle ferveur, le rock n’roll ne mourra jamais. Et pour les avoir croisé dans la coulisse, on peut affirmer qu’ils sont déjà également étonnamment pros pour leur age dans leur attitude. Un groupe à suivre. On reste sur l’esplanade green room le temps d’admirer la magnifique Valerie June, qui nous emmène en voyage en suivant le tempo de son Tennessee time. Un savoureux mélange évoquant tantôt la country et le folk lorsqu’elle s’accompagne seule (guitare, banjo ou ukulélé) ou bien la soul music et le blues lorsque son groupe joue avec elle. Le tout servi avec la superbe voix de Valerie… Direction la plage pour retrouver les mythiques Dinosaur Jr, les vétérans de la scène grunge, qui ont l’air un brin blasés. Le power trio, délivre son répertoire avec une puissance équivalente à celle des débuts, ça joue fort mais hélas des problèmes techniques et la perte soudaine de la basse clôturera l’affaire de manière un peu abrupte et en avance sur l’horaire. Néanmoins, un très bon moment, nostalgique en diable. Une petite pause pour se reposer les oreilles plus tard et retour sur la grande scène retrouver les Irlandais de Two Door Cinema Club, sensation hype de la rentrée dernière. Surprise la pop parfois un peu surproduite du groupe prend une toute autre dimension sur scène, le ton s’est durci, les guitares se font plus fortes, c’est une révélation, Two Door Cinema Club peut aussi faire du rock. Débarrassé des oripeaux de la production, le live permet de mettre en valeur un songwriting pop de grande valeur. Chouette groupe. Un mot pour finir afin de souligner l’excellente prestation de Phoenix en clôture de la soirée sur la grande scène.

Dimanche 7 juillet : Et c’est déjà le dernier jour, le temps passe décidément trop vite. Le dimanche s’annonce prometteur avec un enchaînement The Black Angels / Tame Impala, assez malin et bien vu. Hélas un son absolument catastrophique (trop de basses qui avalent complètement les mélodies) gâche totalement la prestation des Black Angels (Black Rebel Motorcycle Club et Blur souffriront également du même mal). Désolé de le dire, mais c’est indigne d’un grand festival à vocation internationale comme les Eurockéennes. Passons… Reste Tame Impala qui fera preuve d’une classe psychédélique sans pareille sur l’esplanade green room. Savant condensé du rock des années 60 et 70, Tame Impala évoque pèle mêle les Beatles (époque Sgt Pepper), Pink Floyd ou les Beach Boys pour les voix. Les morceaux les plus heavy (« Elephant », « Mind Mischief ») ont un petit je ne sais quoi de Black Sabbath, le cocktail est détonnant. Le batteur apporte une dynamique qui propulse les compositions dans une autre dimension. Et comme Kevin Parker fait l’effort de s’exprimer en français, l’après-midi ne peut qu’être réussie. C’est la résurrection de l’année, My Bloody Valentine est de retour après quelque 22 ans d’attente. Véritable laboratoire sonore ambulant, My Bloody Valentine pratique un rock-noise bien éloigné des standards habituels couplets/refrains où l’expérimentation prime sur tout le reste. Le savant empilage d’amplis, au bas mot une bonne dizaine, à la gauche du guitariste Kevin Shields, les yeux rivés au sol dans la plus pure attitude shoegaze, est à ce titre assez évocateur. C’est un véritable mur du son qui se dresse devant les spectateurs, le tout joué à un volume bien au-delà du raisonnable. Ahurissant ! De la folie furieuse ! Hélas, un mixage approximatif gâche un peu la prestation de MBV, il est difficile d’entendre le chant, que se soit de Kevin Shields ou de Bilinda Butcher, sauf à être dans le deux premiers rangs devant la scène. Est-ce pour cela que le public, assez peu nombreux à la base, a déserté l’esplanade green room ? C’est quoi qu’il en soit grâce à des groupes comme My Bloody Valentine que le rock sort parfois de ses clichés et va de l’avant. Le concert de My Bloody Valentine a été pour ce qui nous concerne, la grosse claque du week-end.



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