C'est un plateau, made in Born Bad Records, d'une grande qualité et d'une cohérence remarquable que l'on a pu admirer lundi soir dernier à La Maroquinerie.
Pour s’extirper hors de la masse, le duo Cyril Cyril, mise sur une orchestration atypique, un banjo, en lieu et place de la guitare, sur la majorité des titres (une configuration assez rare dans le rock'n'roll) et un kit de batterie sortant de l'ordinaire au son très mat, l'accent est mis sur la grosse caisse et le tome basse, et très peu de cymbales mais une collection hétéroclite de percussions accentuant l'aspect voodoo de la musique de Cyril Cyril. Les premiers titres sont chantés « en charabia libanais » d'après Cyril, le chanteur guitariste/banjoïste (« une grande partie de mes origines avec lesquelles j'ai un compte à régler ») alors que le beat imprimé par Cyril (l'autre, le batteur) hypnotise et emporte. De fait, Cyril Cyril est le genre de groupe par lequel il faut en quelque sorte accepter de se laisser bercer, une forme d'abandon est ainsi exigée de l'auditeur. L'utilisation de boucles, sur les voix, les riffs de banjo ou de guitare, accentue la répétition hypnotique, renforçant la psychédélie rampante de la chose. Etre à deux permet des choix artistiques forts et de créer véritablement un univers. Mais le duo peut être aussi un frein au dépassement desdites frontières artistiques, ainsi, à terme, les compositions souffrent d'une sorte de linéarité. C'est néanmoins un bon moment et la preuve qu'il est possible de rendre hommage au rock des années 60/70 (prog, psyché) sans tomber dans la redite stérile.
Dans le même ordre d'idée, Cannibale fait fort depuis quelques années et même encore plus avec la sortie d'un deuxième album ces jours-ci sur le label Born Bad bien aimé. « Vive le cheval » nous annonce le chanteur, une analogie bien trouvée tant la musique de Cannibale s'imprime sur le rythme d'une cavalcade effrénée revisitant tant l'afro beat (l'illusion est parfaite) que le rock progressif, qui s'invite brutalement à la table le temps d'une nappe de claviers planante, alors que la basse, ronde, énorme, nous ramène immanquablement à la scène psychédélique. Une fois encore, il est question des années 60/70, mais sans nostalgie aucune, décennies sur lesquelles le groupe pose un regard oblique, créatif, visant l'intemporalité plutôt que l'illusion de la re-création. La grande affaire de Cannibale reste néanmoins le rythme à telle enseigne que la seule batterie ne suffit pas au groupe pour assouvir sa quête de groove. Ce dernier se propage partout, dans les percussions qui régulièrement viennent renforcer la batterie mais aussi dans l'attaque de la guitare. Moins linéaire que la première partie, Cannibale a réussi à se créer un son, une identité déclinée à l'envi dans les compositions qu'elles soient d'obédience africaine, rock'n'roll ou progressive.
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