Au départ conçu pour
être le pendant californien du festival de Woodstock, le concert
gratuit d'Altamont, qui a eu lieu sur le circuit automobile du même
nom à quelques encablures de San Francisco à viré à la
catastrophe. La date du 6 décembre 1969 restera à jamais comme
l'une des journées les plus noires de l'histoire du rock n'roll qui
s'est soldée par la mort de Meredith Hunter, jeune fan (18 ans)
Afro-Américain assassiné par les Hells Angels chargés de la
sécurité de l'événement. En sus, trois autres personnes ont
également perdu la vie ce jour là de manière accidentelle. Comble
de l'ignominie, le concert a été filmé (il s'agissait de
concurrencer Woodstock, sur tous les plans) et à fait l'objet d'un
documentaire morbide « Gimme Shelter » sorti en 1970. Un
jour honni, qui, sans coup férir, a soldé en une seule fois les
illusions hippies et le summer of love mettant un terme tragique aux
années 1960. Avec le recul on peut également y voir la naissance du
punk de la décennie suivante, un mouvement nettement plus violent
voire nihiliste, comme annonciateur d'une histoire du rock qui
s'écrira dorénavant dans le sang entre meurtres (John Lennon),
suicides (Ian Curtis, Kurt Cobain) et autres tragédies diverses,
généralement survenues à l'age de 27 ans...
Formé en 1999,
l'excellent groupe garage rock The Lords of Altamont s'est pourtant
inspiré du concert tragique pour trouver son patronyme usant de
raisons restées obscures et que l'on suppose un tantinet
provocatrices voire dérangeantes. Ce cinquième effort de la
formation marque le 15ème anniversaire du groupe lequel s'offre pour
l'occasion un album tribute au concept étrange puisqu'il ne s'agit
ni de rendre hommage à un groupe ou à une œuvre en particulier
mais au festival d'Altamont, reprenant pour l'occasion plusieurs
chansons jouées ce jour là. Soit des reprises des groupes présents
à savoir les Rolling Stones (les têtes d'affiches qui étaient
absentes de Woodstock, rappelons-le), le Jefferson Airplane, Crosby
Stills and Nash, Santana et les Flying Burrito Brothers. Également
prévus à l'affiche le Grateful Dead a préféré se décommander à
la dernière minute, sentant les événements tourner au vinaigre. Ce
disque marque également le retour au bercail de plusieurs anciens
membres puisque tous ont été invités (soit une vingtaine de
personnes) à participer à l'enregistrement.
Entre guitares
survoltées et giclées d'orgue acides, les Lords of Altamont ont
toujours su se créer une identité sonore facilement identifiable
faite d'agressivité mais aussi de groove. Un trait d'union entre
rock, blues et soul music. Si la confrontation avec le répertoire
des Stones est convenue (« Stray Cat blues », « Gimme
Shelter »), elle n'en n'est pas moins savoureuse, les Lords
poussant un peu plus loin le bouton de volume. Il est par contre
franchement curieux, mais délectable, de voir comment le gang de
bikers s'est approprié le folk psychédélique, féminin et délicat,
du Jefferson Airplane. « 3/5 of a mile in 10 seconds »
est méconnaissable. Idem pour « Black Queen », à
l'origine une blues acoustique signé Stephen Stills. Un excellent
album, conforme aux standards, élevés, du groupe, mais aussi une
manière ludique de revisiter le répertoire des années 1960 comme
on traverse l'histoire du rock n'roll...
En concert le 30/10 à
Paris (Batofar)
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