dimanche 29 décembre 2024

Regular Girl

 


Bien qu’originaire de Lyon, il plane comme un petit air du Laurel Canyon chez cette « fille ordinaire », dont le premier album a constitué l’une des excellentes surprises de l’année. Son timbre diaphane évoque Joni Mitchell ou Judee Sill alors que l’ombre de Neil Young plane sur son folk délicat mâtiné de country, notamment grâce à la lap-steel assurée par Raoul Vignal (on note également la présence de Théo Charaf dans son groupe). Que de belles références, qui pourraient se révéler encombrantes, mais que l’artiste embrasse totalement dans un univers personnel. Ses arpèges délicats, à l’unisson de sa voix, constituent la bande originale d’une soirée d’été dans le soleil couchant, ou d’hiver, au coin de la cheminée (« Foolish Wish »). Et même lorsque la musique s’emballe, (cf. « Shelter » qui sonne comme un inédit de Neil Young & Crazy Horse, « Western Lights ») ce n’est jamais sans se départir d’une certaine douceur. Ce n’est pas le moindre accomplissement de ce disque, à la fois désenchanté, nourri par une certaine noirceur (« The End »), et pourtant lumineux, calme et apaisant. Un fort bel album donc, à écouter quelque soit la saison.

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samedi 28 décembre 2024

Théo Charaf & Raoul Vignal : « Two way street »

 


L’un fait partie de la prometteuse jeune garde folk/blues française, l’autre est un fin songwriter pop/folk. Si ce n’est leur amour commun pour la guitare, pièce centrale de l’album, la présence simultanée de Théo Charaf et de Raoul Vignal dans le même studio, tient du hasard si ce n’est de l’accident heureux. Entouré du percussionniste Lucien Chatin et du mystérieux Disque Noir au rôle obscur, le duo a tout enregistré à deux. Trois chansons originales de l’un, trois nouvelles chansons de l’autre et deux reprises. Il est des rencontres heureuses et à la manière des duo de superstars gravés sur disque ces dernières années (Elton John/Leon Russell, Elvis Costello/Allen Toussaint, Wilko Johnson/Roger Daltrey etc.) Théo et Raoul nous en offre le pendant français. L’album grave dans la cire, et pour l’éternité, cette rencontre inattendue. Un moment suspendu, d’une pureté acoustique apaisante, particulièrement roots et serein, que l’on imagine capté dans une cabane en rondins, au fond des bois. Laissez-vous bercer par les arpèges délicats, ils sont d’une beauté irréelle, d’une sérénité définitivement étrangère à notre époque.






mardi 24 décembre 2024

Gaspard Royant : « All the best for Christmas »

 


Gaspard Royant incarne une sorte d’incongruité sur la scène rock française : c’est un crooner ! Une sorte de pendant français de Chris Isaak et de Richard Hawley, une voix remarquable, qui n’hésite pas à mâtiner son timbre de guitares rock’n’roll. Après un album très personnel, touchant mais en demi-teinte, notre homme Gaspard signe son grand retour en forme avec un album de Noël ; reprenant à son compte une tradition bien ancrée dans le showbiz US, mais relativement peu usitée ici. Une prise de risque, donc. De cet exercice pour le moins codifié, Gaspard s’en sort la tête haute et avec les honneurs ! Bien entouré (Bobbie, Aurélie Saada, Nicole Atkins, Maxwell Farrington – qui avait déjà sorti son album de Noël à lui - et le SuperHomard) Gaspard soigne ses mélodies (« Next Train to Memory Lane ») et varie les ambiances, tournant autour du thème imposé, en suivant des angles originaux. A l’exception de deux reprises, l’album propose un répertoire original, clochettes de rigueur, et toutes guitares dehors. Le genre sied à ravir à son timbre de stentor (l’emphase exhalant de sa reprise de « White Christmas »), l’album n’est pas avare, ni en émotions (« Wishing you a Merry Christmas », duo de charme avec Aurélie Saada, l’émouvante « Christmas Prayer » qui ponctue le disque) ni en groove (« Perfect Christmas Song » avec Nicole Atkins). Une excellente collection de chansons folk-rock qui devrait survivre à l’obsolescence programmée qui frappe généralement les albums de Noël dès le 26 décembre.

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lundi 23 décembre 2024

Jeanne Rochette : « Live au Gesù »

 


Reine de la démultiplication, Jeanne Rochette, a, à la fois, un pied dans le théâtre, l’autre dans la musique où elle se partage entre chant lyrique, chanson jazz et pop. Entre sa France natale et le Québec, où elle a vécu de nombreuses années, Jeanne Rochette fait le point sur sa carrière avec cet album live, enregistré à Montréal, revisitant ses trois disques studio : « Elle Sort » (2010), « Cachée » (2016) et « La Malhonnête » (2021). Les petits plats sont mis dans le grand sur cet album, enregistré avec le (grand) Orchestre National de Jazz de Montréal, regroupant la crème des musiciens québécois, avec force cordes, bois et cuivres, piano, batterie et contrebasse. La richesse des arrangements, entre jazz et classique, va à ravir à la chanteuse qui peut ainsi déployer toute l’expressivité de son interprétation, ses intonations rappelant au passage l’actrice qu’elle est également. Elégant et soyeux, l’album n’est pas exempt de swing (« L’escalier » ; « Coup de bol ») mais ménage aussi de longues envolées tantôt mélancoliques (« Etre là »), tantôt lyriques et primesautières (« Ce Mec ») au-dessus desquelles plane l’ombre des bandes originales signées de l’immense Michel Legrand. Une soirée de prestige gravée sur disque, cela ne se refuse pas ! Une réussite !

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dimanche 22 décembre 2024

Shades : « Witchcraft »

 


Il est de ces albums qui offrent des parenthèses, des moments suspendus, et dont l’écoute relève autant de la pause primesautière que du la faille temporelle dans laquelle on tombe avec délectation. Ainsi va, le deuxième album du sextet Shades, intitulé « Witchcraft » (sorcellerie), un titre bien trouvé tant il se dégage une sorte de chimie magique née de l’addition des talents conjugués de ces six musiciens. Shades, c’est d’abord et avant tout une composition atypique. Seulement deux instruments en composent la musique, une guitare (Antoine Laudière), qui swingue aussi fort que celle de Django, et une clarinette basse (Etienne Quezel), assez peu usitée dans les genres musicaux qui nous préoccupent habituellement. Le reste du groupe se compose de trois chanteuses (Elora Antolin, Marion Chrétien et Ellinoa) et d’un chanteur (Pablo Campos). Dans ce contexte, les voix ne se contentent pas de chanter mais crée également la mélodie par le biais d’harmonies vocales particulièrement élaborées. Elles sont le cœur battant du groupe. L’approche se révèle ainsi particulièrement humaine, l’ensemble dégage un sentiment de proximité et d’intimité assez prégnant et redonne un coup de jeune à un répertoire essentiellement pioché dans le Broadway des années 40 et 50 (à noter un détour par le blues « Saint James Infirmary Blues » et un titre en français « La Tendresse »). Le swing de Shades est imparable !

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samedi 21 décembre 2024

March Mallow : « The Silence »

 


Pensé comme un hommage au jazz des années 1940/1950, March Mallow se veut le chantre d’une approche acoustique et intimiste. Ainsi, le mal nommé « The Silence », tant on voudrait que le groupe n’arrête jamais de jouer, deuxième album du groupe, offre un pause rétro tout autant qu’il coince l’auditeur dans une véritable bulle intemporelle salvatrice et charmante. La formation restitue parfaitement l’ambiance de ces années, grâce au charme vocal, vénéneux et irrésistible, de leur chanteuse Astrid Veigne, et à une orchestration volontairement restreinte (guitare, piano et contrebasse) qui d’emblée nous plonge dans l’ambiance d’une soirée dans un cabaret rétro. Précisons qu’également qu’à l’exception de deux reprises (dont un petit détour vers le blues avec « I put a spell on you ») l’album se compose d’un répertoire entièrement original, ce qui place d’emblée le groupe au-dessus de la mêlée et signe une véritable ambition artistique, renforcée par des arrangements ambitieux sur quelques titres. Une batterie et un saxophone, renforcent le swing sur l’irrésistible et dansant « Fools’train », alors qu’à l’opposé, un quatuor à cordes donne du corps à la mélancolie se dégageant de leur reprise de « Mr Bojangles ». Quelques titres en français (« Les Couleurs », « Simplement ») complètent le programme avec bonheur. Une réussite !

En concert le 28/02/2025 au Barbizon (Paris 13)

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vendredi 20 décembre 2024

Wendy Pot : « Poppy Field »

 


Le quintet montpelliérain poursuit un fantasme bien ancrée dans l’histoire du rock d’ici, celui du groupe français de pop anglaise. Ce nouvel avatar, regroupé autour du chanteur/guitariste Sylvain Grout prolonge l’aventure de son groupe précédent (Grout/Grout) avec un line-up féminisé, la chanteuse/claviériste Pauline Montels, et une réussite certaine à la clef. La chose s’intitule « Poppy Field », que l’on pourrait traduire, de manière hasardeuse, par « champ pop ». Et dans le fond, l’écoute de l’album s’apparente un peu à cela, une balade dans un champ, autrefois arpenté par les Beatles et autres Kinks, soit un chemin bien connu mais que l’on retrouve avec un plaisir à chaque fois renouvelé. Il en faut peu pour tomber sous le charme à vrai dire. Harmonies et mélodies se mélangent au fil de chansons chatoyantes, douces et chaudes. L’omniprésence de la guitare acoustique procure un sentiment d’intimité immédiate. Un album qui, sous des atours humbles, révèle bien des trésors, concoctés avec un amour véritable de la pop intemporelle, nous ne sommes pas prêts de nous en lasser !

https://wendypot.bandcamp.com/album/poppy-field

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mardi 17 décembre 2024

October Drift, Point Ephémère, 16 décembre 2024.

Il est de coutume pour les groupes de rock de répéter avant les concerts. Chez October Drift, on répète bien sûr, mais on agrémente l’exercice d’un petit tour au mur d’escalade, histoire d’être prêt à grimper poteaux et autres échafaudages des salles de concert avant de se laisser tomber dans la foule ! Faisant ainsi honneur à la photo ornant la pochette de leur dernier album, les Anglais nous ont gratifié d’un show monumental et électrisant. Et c’est peu dire que l’on a en vu de toutes les couleurs ! De l’énergie, des musiciens qui sautent dans tous les sens au rythmes de guitares infernales, mais également de la pop aux accents cold dont les arrangements passent beaucoup mieux sur scène que sur leur dernier album à la réussite aléatoire. Ce fut un grand moment de partage terminé en duo au milieu de la fosse sur une note quasi folk (à l’esthétique totalement opposée à celle du début du concert) et tout le monde qui chante en cœur au son d’une guitare électrique non saturée. Des émotions en pagaille et une énorme générosité de la part du groupe qui n’hésite pas à briser le quatrième mur au contact direct du public, visitant régulièrement la fosse. Quelle soirée, quel groupe !

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samedi 7 décembre 2024

Vera Sola + Anthony da Costa, La Maroquinerie, 6 décembre 2024

Un peu avant de le retrouver jouant de la guitare au sein du groupe accompagnant Vera Sola, c’est en solo que le chanteur/guitariste Anthony da Costa a ouvert la soirée. Prenant le contre-pied d’un chanteur folk classique, c’est à la guitare électrique qu’Anthony da Costa s’est accompagné durant son set. Un instrument au spectre large, grâce aux pédales d’effets, que le musicien utilise dans sa totalité passant de passages éthérés, comme autant de vagues hypnotiques, à de brusques éclairs aussi électriques que brutaux. Sa voix, plutôt de tête, s’accommode de tous les registres, pourvoyant les émotions. Une belle première partie, en attendant de le revoir, espérons-le, une fois son album, qu’il vient à peine d’achever, sera sorti.

Place ensuite à la magnifique Vera Sola, qui a publié son magnifique deuxième album (« Peacemaker ») un peu plus tôt cette année, six longues années après un premier effort (« Shades », 2018) qui avait déjà marqué les esprits à l’époque, entourée d’un groupe de haut vol dans lequel on retrouve, et c’est à peine croyable, le « legendary » Elvis Perkins à la basse ! Toute de noir vêtue, Vera Sola marque les esprits par sa beauté magnétique, que l’on découvre à l’occasion, elle qui a plutôt l’habitude de se cacher sur les pochettes de ses albums. Petite brunette, coiffée de nattes et au regard clair, la chanteuse est totalement habitée sur scène et impressionne par son regard fixe, comme absent, totalement absorbée par la musique. Quand elle ne s’accompagne pas à la guitare folk, instrument dont elle joue magnifiquement grâce à une impressionnante technique d’arpège de la main droite, Vera danse et bouge beaucoup sur scène comme si la musique transperçait totalement son corps. La prestation hypnotise tout autant que sa voix, grave dans tous les sens du terme, habitant ses compositions entre folk, rock et americana, aux accents vintage sans ostentation, non dénués d’éclairs violents, dans lesquels se retrouve le guitariste Anthony da Costa, lui aussi totalement habité, dans la foulée d’une batterie au jeu atypique. Magnifique concert.

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dimanche 1 décembre 2024

Nada Surf + Elephant, Le Bataclan, 29 novembre 2024.

Déjà auteur de deux albums, les Hollandais d’Elephant seront de retour au cours du premier trimestre 2025 avec un nouvel effort. En attendant, le quartet s’échauffe en première partie de Nada Surf et, à ce titre, vient honorer la scène du Bataclan pour la première partie du soir. Et alors que les premières notes résonnent, on en vient à penser immédiatement que ce groupe était le choix parfait pour coller à l’univers mélodique des New-Yorkais. Evidence mélodique des compositions, groove ouaté tout en douceur, les chansons d’Elephant possèdent ce petit je ne sais quoi qui les rends inoubliables. Servi avec un chant doucereux, accentuant la douceur mélancolique du répertoire, le quatuor nous a gratifié d’un set impeccable d’un bout à l’autre. 45 minutes suspendues dans le temps…

Depuis 20 ans, l’auteur de ces lignes n’a jamais assisté à un mauvais concert de Nada Surf et ce n’est pas la prestation du soir qui nous fera mentir ! Depuis deux décennies le trio fait à peu près la même chose, explorant le côté mélodique, mélancolique, de la pop à coups de délicats arpèges de guitares. Chose impensable par ailleurs, ils n’ont jamais ni lassés, ni ennuyés, alignant les albums impeccables et son lot de chansons mémorables. L’ajout d’un quatrième membre, Louie Lino aux claviers et à la guitare, permet d’accentuer la texture sonore du groupe, toujours mené par le groove puissant du batteur Ira Elliott, en très grande forme sous sa chapeau. Parfaitement francophones, depuis leurs années au Lycée Français de New York, la paire Matthew Caws (guitare/voix) et Daniel Lorca (basse) n’a pas son pareil pour créer une connexion unique avec le public français et se sent « comme à la maison » dès lors qu’ils jouent en France partageant avec le public, qui répond bruyamment et avec enthousiasme, de grands moments de partage et d’émotion. Le sommet est atteint lors de l’ultime rappel « Blizzard of 77 » joué entièrement débranchée, guitare folk et voix, écoutée dans un impressionnant silence de cathédrale. Un merveilleux moment.