Cette année, le festival Sons d'Hiver met le cap sur l'Espagne et une tradition musicale séculaire, celle du Flamenco dont plusieurs versions modernes, et ouvertes à d'autres sonorités, seront délivrées tout au cours de la soirée.
Nino de Elche dont le spectacle s'intitule sobrement "Flamenco" et s'ouvre tel un film au cinéma, livre une interprétation brute de décoffrage de l'idiome. Entouré de deux guitaristes et de deux autres chanteurs, Nino de Elche livre une performance à vif, où les émotions sont livrées sans masque, ne s'exonérant pas de la douleur. Comme le sous-titre l'indique "Mausoleo de Celebration Amor y Muerte", l'amour et la mort se côtoient, le chanteur se livre corps et âme, les guitares expriment à la fois une grande douceur mais aussi une puissance phénoménale, proche, aussi invraisemblable que cela puisse paraître, du heavy-metal. On ne sort pas totalement indemne d'une telle décharge émotionnelle, creusant profondément au fin fond de l'âme, celles des musiciens mais aussi des spectateurs.
Ancien compagnon de route de Paco de Lucia, auquel le spectacle rend hommage, Jorge Prado a à coeur de sortir le flamenco des sentiers battus pour l'emmener sur des chemins autres, suivants d'autres influences. Lui-même, saxophoniste et flûtiste, présente un profil atypique pour ce genre musical, basé sur les guitares et les percussions "palmas". C'est donc une grande formation qui prend possession de la scène. Un bassiste électrique, des percussions (cajon, cymbales, caisses), une guitare électrique et la flûte traversière de Jorge Prado, en constituent les éléments les plus surprenants. Mais la tradition est tout de même respectée. Une guitare classique, la sublime chanteuse Bego Salazar et la danseuse Karen Lugo (rappelant au passage la transversalité de cet art qui se joue, se chante et se danse) complètent le line-up. Nous constatons donc que deux formations se superposent dans le même ensemble, une classique et une autre plus aventureuse. Si aucun musicien n'a été présent sur la totalité du set, cela ne signifie en rien que le groupe manque de cohérence. Il s'agit plutôt de voyager entre plusieurs influences, sons et couleurs et d'adapter la composition musicale suivant le besoin de l'instant. Ainsi le groupe varie les plaisirs se rapprochant du jazz, du blues ou de la soul, avec un swing prononcé, se situant au confluent du jazz latin (on pense parfois au Brésil) ou manouche. Une longue dérive instrumentale à la guitare électrique flirte avec le free jazz et le blues, à certains moments la magnifique chanteuse Bego Salazar fait montre d'un coffre digne d'une chanteuse soul. Une sublime divagation.
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