mercredi 28 août 2024

Rock en Seine, 23, 24 et 25 Août 2024

SAY SHE SHE (c) Roxane Montaron
 
PLEASE (c) Olivier Hoffschir

Vendredi 23 Août.

Elles sont trois et viennent de Brooklyn, les chanteuses de Say She She remportent l’adhésion. Véritable Girl Group des temps modernes, le trio de chanteuses, aux harmonies vocales à tomber, incarne le cœur battant du projet. Dans le fond un solide quatuor soul funk (guitare, basse, batterie et clavier) œuvre dans un registre plein de groove hérité de la fin 70 début 80. Le nom du groupe se prononce « c’est chi chi », un hommage au groupe Chic, tout est dit ! Rendez-vous ensuite vers la scène du bosquet où l’on retrouve les français de Please. Remettant au goût du jour des influences atypiques (Supertramp, Steely Dan), et quelque peu tombées dans l’oubli, le quintet pratique une sorte de pop/rock FM teintée de psychédélisme. Les détails qui tuent : une guitare en plexiglas (comme les Flamin’Groovies en 71) et un Fender Rhodes dont le groupe fait le meilleur usage. A la fois planant et entraînant, dansant à l’occasion, la musique fait aussi résonner la foudre. On a cru voir un bout de baguette de batterie voler dans les airs à la fin du set, preuve de l’engagement sans faille du groupe. Une excellente surprise. On termine la journée avec la soul futuriste de l’anglais Sampha marquée par un parti pris musical assez fort, le groupe n’est composé que de claviers et de percussions. L’ancrage soul est important comme le prouve un titre en piano/voix ainsi qu’un autre au groove plus organique (piano, basse, batterie). Le reste du set nous entraîne dans une autre dimension, dansante et électro. Enfin, on a pu assister à un moment d’anthologie quand la totalité des musiciens s’est réunie en cercle autour de percussions (incroyable, tous les membres du groupe savent jouer de la batterie) nous délivrant une sorte de batucada teintée de sonorités africaines, une véritable transe menée par Sampha qui chante et joue des percussions en même temps.


VOX LOW (c) Louis Comar

BLONDE REDHEAD (c) Olivier Hoffschir


GLASS BEAMS (c) Olivier Hoffschir


SLEATER-KINNEY (c) Olivier Hoffschir

Samedi 24 Août.


Sans contestation possible, la journée la plus dense du week-end et un sacré programme en perspective en dépit de quelques choix cornéliens, typique de l’exercice du festival. A plus d’un titre le reste des agapes réjouira les nostalgiques des années 1990. On commence dans cette veine avec le grunge féminin de Sleater-Kinney qui n’a rien perdu de sa verve même s’il est toujours compliqué d’ouvrir la grande scène en début d’après-midi. En tout cas, voici un groupe entièrement féminin toujours capable de sacrés fulgurances électriques. Place ensuite au groupe le plus énigmatique (et un véritable coup de foudre absolu pour l’auteur de ces lignes), les Australiens de Glass Beams, trio dont on ignore encore à ce jour l’identité des musiciens qui le compose. Groupe masqué (un peu comme Ghost) ornant de sublimes masques dorés de perles scintillant dans le soleil estival, Glass Beams pratique un musique instrumentale sur laquelle souffle un air désertique grâce aux gammes de guitares arabisantes qu’ils affectionnent particulièrement. Hypnotique, envoûtant l’effet ne se fait pas attendre et est proche d’une transe délicate. L’aspect visuel est également très étudié, tous sont vêtus dans les tons sables/marrons et arborent des instruments assortis. Une aura mystérieuse plane au-dessus de ce groupe et participe pleinement de la fascination qu’ils exercent sur la foule. Bien évidemment ils quittent la scène sans avoir adressé un mot au public, qu’ils saluent néanmoins de grands signes affectueux. Autre coup de cœur, nettement plus terre à terre pour les Gallois de CVC. Arborant des fleurs glissées dans les sillets de leurs guitares, les Gallois œuvrent dans un genre de rock’n’roll typique des années 1970, n’ignorant rien de la puissance sonore (duel de guitares à l’ancienne à la clef) que du groove (un saxophone est utilisé sur un titre). A la fois dansant et enjoué, teinté d’un psychédélisme de bon aloi, le groupe n’a pas son pareil pour enchanter la foule et remporter une adhésion massive. Un mot pour résumer le sentiment général tout comme leur influence première : Feelgood ! Enjoué et festif, le groupe nous a fait passer un excellent moment ! Toujours dans la nostalgie des années 90 (sans oublier Offspring et Massive Attack qu’on à peine eu le temps d’apercevoir), le trio Blonde Redhead a envoûté la scène de la cascade à grands coups de synthés lysergiques et de guitares aux pédales d’effets recherchés, un shoegaze post punk assez saisissant, en dépit du look sujet à caution de la chanteuse. On termine enfin cette journée très dense avec les français de Vox Low qui tiennent autant du punk que du krautrock électronique et qui ont littéralement assommé la foule de leur groove synthétique électronique que de leur guitare fulgurante soulignée de lignes de basse étourdissantes. Chose rarissime sur un festival de cette ampleur, à l’organisation minutée, emportés par leur délire, ils ont même dépassés l’horaire prévu ! Ahurissant !


Dimanche 25 Août

On débute sur la grande scène avec le set enthousiaste des Allemands de Giant Rooks qui se donnent beaucoup de mal, dans une grande débauche d’énergie, pour séduire un public clairsemé en ce milieu d’après-midi. De plutôt bonne facture, leur pop reste toutefois un peu trop proche de Coldplay pour les goûts personnels de votre serviteur. Vient ensuite la hype tendance de Zaho de Sagazan sur la scène de la cascade, qui, on l’apprendra à cette occasion, faisait partie du public rassemblé sur cette même scène il y a deux ans à l’occasion du passage de Kraftwerk en 3D (nous y étions aussi !) Personnalité charmante, cette dernière s’exprime dans un français châtié et élégant (ça fait plaisir!) et dégage une véritable transe électronique (effectivement proche de Kraftwerk) à l’aide de ses machines. Les moments au piano sont plus intimes et très émouvants. En dépit de tout le battage fait autour de sa personne elle reste une artiste attachante et à suivre. Les choses sérieuses débutent enfin juste à côté, sur la scène Firestone, avec le quatuor vendéen Dynamite Shakers, dont on avait déjà dit le plus grand bien de leur album il y a peu. Sur scène le groupe tient toutes ses promesses dans un déluge électrique fiévreux tandis qu’un redoutable snakepit se met en place au sein du public. On ne ressort pas tout à fait indemne de ce matraquage de décibels, comme hébété, et le groupe non plus tant il semble habité. Le haut du panier du rock d’ici, définitivement à suivre… On pousse encore un peu plus loin jusqu’à la scène du bosquet où jouent les Anglais de Bar Italia, dans un registre indie influencé par les années 1990, plutôt convaincant et énergique. Le groupe joue habilement des différents voix et de l’alternance du chant partagé, entre chanteuse et chanteur. Dans tout ça, nous avons à peine eu le temps d’apercevoir, et de loin entre deux branches d’arbres, PJ Harvey (la nostalgie des années 90, toujours) en version acoustique, c’est à la fois beau et délicat. Place ensuite au dernier gros morceau du week-end, les Pixies (toujours les années 80 et 90!) Allez avouons-le, si les héros sont vieillissants et arborent désormais des casquettes cache-misère d’une capillarité qui s’estompe, le concert provoque en nous des sentiments contraires. La joie tout d’abord de retrouver un répertoire qui nous accompagne depuis tant d’années, l’absence de surprise d’un groupe en pilotage automatique, mais toujours aussi convaincant, nous frustre un peu. Quelques surprises à noter cependant, une expérimentation étrange de Joey Santiago avec son jack de guitare dont il tire des bruits psychédéliques et « Wave of mutilation » jouée deux fois, en version classique puis ralentie. Plusieurs fois, alors que le groupe attaque la sublime « Hey » ou « Here comes your man » l’émotion nous étreint le cœur, une boule d’émotion nous gonfle dans la gorge, trop de souvenirs à l’écoute de ces chansons, trop de nostalgie. C’est désormais loin tout ça, une nouvelle édition de Rock en Seine s’achève, le temps passe et l’on n’y peut rien…

GIANT ROOKS (c) Louis Comar

Zaho de Sagazan (c) Louis Comar

BAR ITALIA (c) Roxane Montaron

DYNAMITE SHAKERS (c) Roxane Montaron

PIXIES (c) Louis Comar

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