« Barefoot Bill is coming to town », une antienne sonnant comme le titre d'un western, mais qui décrit bien la condition d'un Bill Pritchard ayant perdu ses « boots » dans les loges et qui se présente pieds nus accompagné de son guitariste Mike. Une petite demi-heure en duo de guitares durant laquelle le Britannique égrène les titres de ses albums, récents ("Midland Lullabies") comme anciens, une configuration légère qui met en valeur le côté intemporel de ses chansons, leur immédiateté pop et leur nostalgie aussi, une fois débarrassées de leurs encombrants oripeaux. Une originalité, Bill au piano, une première depuis « 16 saisons ». Musicien trop rare par nos contrées, dont il parle couramment la langue, on profite de cet instant privilégié dans une salle intime, à taille humaine.
Mais un fantôme plane au-dessus de la scène ce soir, Daniel Darc, descendu de son nuage pour nous faire un coucou depuis l'au-delà, « un ami commun » dixit Bill, qui après avoir enregistré un disque en duo avec lui (« Parce que ») à la fin des années 1980, a connu la renaissance artistique auprès de Frédéric Lo qui a produit le disque du come-back (« Crève cœur ») au début des années 2000. Il est, quelque part, beau de voir les deux artistes collaborer ensemble le temps d'un album (« un truc fou » d'après Frédéric) qui sortira dans le courant de l'année, formant une sorte de trilogie prolongeant les deux albums cités précédemment.
Pour l'heure, nous redécouvrons Frédéric Lo, producteur côté mais chanteur méconnu, dont le troisième album et le premier depuis des lustres, « Hallelujah » est sorti ce printemps. D'emblée on est frappés par sa voix, ses intonations, son parlé/chanté quelque part entre Daho et Daniel Darc. Ce soir Frédéric est accompagné d'un groupe de musiciens prodigieux, un merveilleux batteur, Christophe Deschamps, aux descentes redoutables dont l'association avec la basse au bourdonnement énorme fait des étincelles, un guitariste à la classe rock rock’n’roll, clavier et violoncelle pour la note classique et la mélancolie contagieuse. Ainsi accompagné la musique fait des allers retour entre pop et chanson, un soupçon de cold wave également, le tout constitue un univers des plus séduisants surlignés par plusieurs duos de prestige (Alex Beaupain, Florent Marchet et Alain Chamfort en invités). Quelques sommets d'émotions atteints lors des différentes reprises de Daniel Darc effectuées par les deux principaux protagonistes (« La pluie qui tombe », « Pauvre Petite » etc.) qui ont présenté en exclusivité, et en guise de rappel, trois chansons de l'album à venir. On en ignore encore le titre à l'heure actuelle, mais le morceau final est extraordinaire dans sa version live, on attends la suite avec impatience !