La soirée commence
avec la superbe Suzie Stapleton. Toute de noir vêtue, Suzie
Stapleton dispense un charme vénéneux par le biais de compositions
hantées. Sa voix tout d'abord, grave et profonde, son timbre est
absolument inoubliable. Sa guitare ensuite, fantomatique, évolue
dans un contexte assez dark et électrique où des relents de blues
et d'americana se télescopent. Même si la formule guitare/voix ne
semble pas la meilleure pour rendre justice à ses compositions, nous
sommes happés une grosse demi-heure durant par le charme de Suzie.
Une artiste à suivre.
A la veille de
sortir leur premier album sous ce nom, Jim Jones & The Righteous
Mind, est revenu nous rendre une petite visite, l'occasion de
revisiter ce paysage rock n'roll et viscéral. Bien évidemment
personne n'a oublié le groupe précédent The Jim Jones Revue,
désormais dissolu mais the Righteous Mind relève le gant avec
classe et un son furieux. Le lien entre les deux formations existe,
les influences venues à la fois du punk et du rock n'roll des années
50, le piano, et certains compositions de The Righteous Mind auraient
facilement pu trouver leur place dans le répertoire de la Revue.
Mais ce nouveau groupe se distingue par une approche, toujours aussi
déglinguée mais dérangée par quelques sons venus d'ailleurs, la
pedal-steel tout d'abord, saturé, trituré, le son de cette dernière
n'évoque en rien la country (style dont cet instrument est
l'emblème) mais un truc un peu bizarre et inédit rarement entendu
auparavant. Les claviers ensuite, car dans ce nouveau groupe, le
piano n'est plus exclusif mais laisse parfois la place à des
sonorités indéfinissables. Pour le reste on retrouve la rage et
l'intensité qui est la marque de Jim Jones à travers un cocktail
détonnant de six cordes, demi-caisse, Gretsch et Gibson. Gavin Jay,
le bassiste, a, pour sa part abandonné la contrebasse, avec laquelle
il expérimentait lors des premiers concerts du groupe, pour se
recentrer sur son instrument de prédilection, la basse électrique,
dont il use avec une intensité peu commune, occupant l'espace de ses
lignes saturées et bourdonnante. Derrière sa batterie, Phil Martini
tient la baraque avec autorité, alors que ses comparses sombrent à
tour de rôle dans l'expérimentation bruitiste, à genoux ou la
guitare brandie en l'air. Certains titres reposent uniquement sur lui
quand les autres instruments se taisent, réduisant les chansons à
un squelette rythmique, inédit et intéressant. L'influence des
années 50 s'efface dans ce nouveau groupe au profit d'un climat plus
dark mais reste assez présente, on aura par exemple pu se régaler
d'un boogie façon Jim Jones, c'est à dire déglingué mais
transpercé par le punk. Une très belle soirée, l'album s'annonce
prometteur !