Cela commence par une nappe, une sorte de strate sonore. En
écoutant « Onlooker », le premier album « physique » du duo
AVGVST, l’auditeur plonge la tête première dans un tunnel dont il ressortira
une quarantaine de minutes plus tard, forcément un peu différent. Si il y a des
groupes qui répètent à l’envie les formules du passé et d’autres qui érigent la
créativité en vertu première, alors AVGVST fait obligatoirement partie de la
seconde catégorie. AVGVST c’est Aurélie (basse et claviers) et Aurélien
(guitares et claviers) et on imagine facilement le duo enfermé dans un studio
de longues heures tripotant convulsivement instruments et boutons afin de
trouver la formule parfaite. Celle qui ferait le lien entre abstractions
électro et chansons pop. Entre instruments organiques et traitement
électronique sonore. Entre chansons et instrumentaux. Dans ses meilleurs
moments « Onlooker » n’est pas sans rappeler des musiques plutôt
sombres, on pense aux Cure, époque « Pornography », sur le superbe
morceau titre « Onlooker », à My Bloody Valentine et plus
généralement à ces groupes qui emballent l’auditeur dans un tourbillon sonore
basé sur la répétition de motifs sonores entêtants. Certes, on peut reprocher à
AVGVST, un manque général de simplicité (toutes les guitares et les voix sont
« ultra traitées »), une démarche qui privilégie, volontairement ou
non, l’électro et qui pourra désarçonner le fan de rock ou même la longueur des
morceaux (généralement sept minutes). De fait, « Onlooker » est un album
rare, dont la beauté ne s’offre qu’à celui qui est prêt à l’accueillir, et qui
révèle ses trésors à force d’écoutes tant les recoins à explorer sont nombreux.
En résumé, c’est un disque qu’il faut ECOUTER.
samedi 29 décembre 2012
jeudi 27 décembre 2012
Hula Baby
(c) Chusmi |
Trois titres seulement mais une bonne décharge qui nous
rappelle à chaque minute ce pourquoi on aime ce bon vieux rock n’roll. En
résumé, de l’énergie et de l’électricité, autant d’ingrédients dont Hula Baby
n’est pas avare. Entre rock garage, swing et surf music, le tout sous haute
inspiration 1960s, Hula Baby se trace un chemin qui, en toute logique, devrait
mener le groupe très loin, très haut. Rythmes endiablés, soli de guitare au
cordeau, section rythmique alliant avec maestria swing et vélocité et des
chansons n’excédant pas, ou si peu, les trois minutes comme autant de petits
shoots rock n’roll. Et pour achever le tableau ajoutez une pointe de latinité
en plus (le chant dans la langue de Cervantès). Et voilà, trois titres et le
tour est joué. Accro en moins de dix minutes. Une excellente surprise venue
d’Espagne. Espérons un album du même niveau.
mercredi 26 décembre 2012
The Soul Immigrants
Nouveau 45 tours pour ce groupe Anglais qui œuvre dans une
soul/funk particulièrement efficace puisant sa source, comme c’est la grande
mode en ce moment, dans les sons des années 1970. Assez habiles de leurs
instruments, The Soul Immigrants parsèment leur funk de passages jazzy à force
de soli (cuivres, orgues, piano électrique) très maîtrisés. La section
rythmique est également assez impressionnante. Le tout n’est pas sans rappeler
les productions Daptone en général et le Menaham Street Band en particulier. A
conseiller sans modération aucune à tous les amateurs de soul vintage.
www.thesoulimmigrants.com
mardi 25 décembre 2012
The Pepper Pots : « Waiting for the Christmas Light »
Les Pepper Pots sont un trio de chanteuses, aux harmonies
vocales renversantes, originaires de Barcelone. Assez renommées, elles ont
collaboré avec des personnalités marquantes de la scène soul étasunienne telles
que Binky Griptite (le guitariste des Dap-Kings) ou Eli « Paperboy »
Reed. Une réputation, qui a, hélas, bien du mal à passer les Pyrénées puisque
aucun de leurs albums n’est disponible ici. Dommage. En attendant on peut
toujours se consoler en allant sur visiter leur site internet et télécharger
leur EP de Noël, « Waiting for the Christmas Light ». Excellent petit
EP de trois titres, dans un esprit très girls group sixties, qui fait des
Pepper Pots les dignes héritières des Ronettes et autres Crystals, les vedettes
vocales de l’album « A christmas gift for you » de Phil Spector. La
production est très soignée à grand renfort de cuivres, cordes et le chant des
trois demoiselles est aussi magnifique que leur plastique. Bref, voici
l’occasion rêvée pour découvrir les Pepper Pots et mettre un peu de Soul vintage
dans votre journée de Noël.
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Christmas Album,
The Pepper Pots
Olympic Cyclone Band : « Season’s Greetings »
Dans la longue litanie des albums de Noël, voici le plus
original (et le plus rythmé) qu’il m’ait été donné d’écouter ces dernières années. L’Olympic
Cyclone Band, puisque ce sont eux les coupables, est un groupe funky anglais qui
a enregistré un album à son image : funky et dansant, parfois à la limite
du disco. Le résultat est particulièrement étonnant surtout sur les classiques
de Noël tel que « Little drummer boy » ou « Jingle Bells ».
Groupe live réputé à Londres, l’idée de cet album leur est venue une fin de
nuit après l’une de leurs résidences un matin de Noël, cela ne s’invente pas. Majoritairement
instrumental, l’album bénéficie toutefois des participations des chanteuses
Stéphanie Davies et Fiona Egan (2 titres chacunes). Sur les quelques originaux
enregistrés pour l’occasion, on s’éloigne un peu de l’ambiance Noël pour aller
vers quelque chose de plus classiquement soul/funk parfois teinté de jazz
(l’excellente « Away in a Manger »). Un album de saison, assez
amusant.
https://soundcloud.com/olympic-cyclone-band
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Olympic Cyclone Band
dimanche 23 décembre 2012
Macy Gray : « Talking Book »
Le nouvel album de Macy Gray à une forme assez original. En
effet cette dernière a décidé de réenregistrer intégralement le « Talking Book », apparemment son album préféré, de Stevie Wonder (sorti à l’origine
en 1972). Il ne s’agit ni d’un album hommage à l’ensemble de la carrière de
l’immense Stevie, ni d’un tribute album où différents artistes reprennent
Stevie mais bel et bien d’un concept original, une sorte d’équivalent
discographique d’un remake hollywoodien qui dans une sorte d’effet miroir donne
un statut iconique à l’œuvre originale, qui par la même entre dans une nouvelle
dimension. Le mot « hommage » semble d’ailleurs être banni du projet,
dans l’esprit de Macy il s’agit plus d’une « lettre d’amour à Stevie, une
carte de remerciement sur disque ».
Les chansons sont donc les mêmes, présentées dans le même ordre mais
pour un résultat assez différent. Il est tout d’abord amusant de comparer les
durées respectives des deux disques. 43 minutes pour l’original de 1972, 39 minutes
pour la version Macy Gray. Résultat un album plus court, donc plus concentré,
plus direct où le « gras » semble avoir été éliminé. De fait Macy
Gray présente un album bien dans l’air du temps, il ne s’agit en aucun cas d’un
disque rétro. Gray a réussi cette gageure, faire un album en tout point
respectueux de l’esprit originel, absolument soulful tout en conservant son
esprit d’innovation, à l’époque de sa sortie, les claviers de Stevie étaient
révolutionnaires, sans pour autant partir dans un délire électro. On découvre
ainsi de nouveaux aspects, « Maybe your baby » par exemple prends à
l’occasion des allures un peu rock. Mais la transformation la plus
spectaculaire est celle subie par « Superstition », transformée ici
en ballade jazz lounge à l’exact opposé de l’original, tube funk dansant.
Superbe. Le style convient à merveille à Macy et à son timbre de voix si
particulier, Billie Hollyday n’est jamais très loin. Une belle réussite mais
qui aura peut-être un peu de mal à trouver son public en dehors des fans des
deux artistes.
samedi 22 décembre 2012
Macy Gray, Le Cabaret Sauvage, 17 décembre 2012.
Macy Gray était de retour lundi soir dernier dans le
magnifique chapiteau en bois style années 1930 du Cabaret Sauvage. Macy Gray,
grande star du R N’B et de la soul au début des années 2000, avant que cette
dernière n’entame un grand virage rétro qui semble être aujourd’hui devenu la
norme. Macy Gray n’entre pas vraiment dans cette catégorie et a livré un show à
son image : groove toujours, superbe section rythmique batterie, basse et
percussions latines, mais aux ambiances variées : parfois très roots grâce
à l’orgue hammond B3 et à d’autres moments extrêmement moderne teinté de
hip-hop et d’électro. Dans la première catégorie, nous avons été gratifié d’un
excellent medley intimiste où Macy a chanté avec dans le premier temps le
bassiste en solo, puis avec l’orgue et enfin accompagnée par le guitariste en
acoustique. Superbe passage mettant en valeur sa voix si particulière à la fois
profonde, éraillée mais de tête, assez aïgue. Ce timbre qui fait d’elle une
interprète à part. Seule ombre au tableau, le show semble être rythmé par les
changements de tenues successifs (trop nombreux pour être comptés) de Macy et
de ses choristes. Conséquence directe, les musiciens sont souvent mis à
contribution pour meubler, le plus mal à l’aise étant très probablement le
guitariste qui chante assez maladroitement. Certes Macy arbore des tenues
extravagantes, robes à paillettes, boa à plumes, magnifiques qui lui vont à
ravir, elle est aussi très belle ce qui ne gâche évidemment rien, mais le
concert se trouve de fait un peu haché. Enfin bon, on fait un peu la fine
bouche, car la soirée fût très belle.
Hot Shot Mama, Marché de Noël, Créteil, 16 décembre 2012.
Voici venu le temps de Noël, des sapins et des guirlandes
et, pour ce qui nous concerne en ce dimanche, de la pluie là où tout le monde
attend de la neige. Alors que l’univers se transforme peu à peu en un immense
paquet cadeau géant, il y a au moins une raison de se réjouir dans cette morne
banlieue (Créteil) : l’ouverture du mini marché de Noël et, surtout, de
son chapiteau blanc provisoire où vont se succéder pendant une dizaine de jours
concerts et animations diverses. L’atelier sushi terminé, c’est le sextet Hot
Shot Mama, que l’on retrouve sur scène avec un plaisir certain, il est vrai
qu’au rythme d’un concert tous les deux ans environ, on ne risque pas de se
lasser. Donc, Hot Shot Mama, groupe de reprises, toujours choisies avec
beaucoup de soin, et qui mise sur l’énergie (excellente section rythmique) et
une pointe d’originalité (la présence du saxophone) pour se distinguer du tout
venant baloche prétendument rock n’roll. Oh certes ce n’est pas la révolution
musicale du siècle, il n’empêche, réentendre « Come Together » des
Beatles en live, gratifié en plus d’un superbe solo de guitare d’Alain, ça fait
toujours du bien à l’amateur de rock n’roll nostalgique. Notons également « Singing
the blues on reds » des méconnus Patto (quand on parlait des reprises
choisies avec soin) ; l’indispensable intermède blues avec l’enchaînement
sans temps mort « All your love » (John Mayall) / « A fool for
your stockings » (ZZ Top) ; une version de « Summertime Blues »
(Eddie Cochran) revisité à grand shoot d’énergie façon Who ; un reggae à
moitié improvisé pour la note groovy et une pointe de rockabilly pour finir et
voilà on a passé, mine de rien, une chouette après-midi. En espérant qu’il ne
faille pas attendre deux ans pour revoir les gaillards sur une scène.
dimanche 16 décembre 2012
Lisa Portelli, La Maroquinerie, 15 décembre 2012.
La soirée a commencée de manière originale, avec un mini
ciné-concert dans la maroquinerie transformée pour l’occasion en salle de
cinéma. Le film s’appelle « Prises de vie », un court-métrage, muet,
réalisé par Pierre Guenoun. C’est une sorte de journal filmé nous racontant la
vie de son réalisateur, l’installation à Paris, la naissance de l’amour puis
celle d’un enfant avec force d’image poétiques issus du quotidien, la pluie, la
neige, les feuilles d’automne… Installés de part et d’autre de l’écran, Lisa
Portelli et son guitariste Yann Féry, armés de leurs guitares, accompagnent les
images en direct.
Place ensuite au concert avec Lisa Portelli, que l’on
découvre à l’occasion en live après avoir beaucoup aimé son album « Le
Régal » l’année dernière (chronique ici). Accompagnée par une formation
originale, deux guitares (Lisa et Yann) et un batteur, Benjamin, sans basse,
Lisa a livré une prestation variant les atmosphères et les plaisirs. Parfois
atmosphérique, à force d’effets et parfois complètement déchaînée. De la partie
sauvage on retiendra surtout une version du « régal » qui restera
dans les mémoires grâce à l’ajout d’une deuxième mini-batterie (quelques tomes
et une caisse claire en fait), cela apporte une sacrée pèche et un côté tribal
quasi-mystique. C’est fort ! Il est amusant d’observer les deux batteurs
échanger et se répondre mutuellement, beau dialogue. Parfois seule avec sa
telecaster (son clair), Lisa s’offre ainsi quelques escapades folk électrique
réveillant le fantôme de Jeff Buckley. Autre création intéressante,
« Animal K », Lisa seule à la guitare est entourée d’une chorale
d’adolescentes venues de Chessy, « des tigresses » d’après elle, on
le confirme bien volontiers. Les chorégraphies sont amusantes et la chanson
prend du volume. Beaucoup de nouveaux titres furent joués. C’était en effet la
dernière date de la tournée pour Lisa Portelli, elle est désormais prête pour
de nouvelles aventures qui passeront par un nouveau disque. Une belle soirée de
rock féminin, version française.
www.facebook.com/lisa.portelli.officiel
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Pierre Guenoun
samedi 15 décembre 2012
Duel : Vertiges #1
Afin de fidéliser son public, le duo Duel, composé de Julien
Boulfray et Brieuc Carnaille, adopte une démarche originale : proposer un
nouvel ep inédit tous les trimestre. Voici donc le premier volume, le deuxième
est prévu pour février alors que le groupe est actuellement en studio pour
enregistrer le troisième. Pour en revenir à cet EP, Vertiges #1, le disque est
composé de cinq titres tous dans la langue de Molière, c’est assez rare pour
être souligné, d’autant que le groupe porte une attention particulière à la
qualité de ses textes. D’un point de vue musical, le duel en question est
fondamentalement pop, tendance ouvragée. L’affaire commence même sur
d’excellentes bases grâce aux charmants arpèges de guitare de
« Caramel » ou « Hey tu ne me manqueras plus ». Citons
également « Mourir au combat », qui s’appuie sur de beaux
arrangements de cordes. Malheureusement, la suite déçoit un peu, un peu trop de
synthés, un peu trop ancrés dans les années 80 (« La grâce des acrobates »),
du moins pour les oreilles de votre serviteur. Néanmoins prometteur et de toute
façon à suivre avec attention. Le volume deux arrive très prochainement.
lundi 10 décembre 2012
Il Buio
Deux ans après son remarquable album « Walking »
où elle se réappropriait le blues, Chloé Mons continue son exploration des
musiques telluriques étasuniennes, s’intéressant cette fois au rockabilly et à
la country, sans toutefois accoucher d'un disque purement et uniquement basé sur ces styles. Ainsi est né Il Buio (l’obscurité) ou Chloé est associé au
guitariste Xavier Boussiron. La paire a de nouveau accouché d’un excellent
album, minimaliste, obligatoirement sombre et fantomatique à souhait où l’écho
des guitares résonne dans le vide bien après la fin de son écoute. Faisant fi
d’une approche moderne ou le soin apporté à la production apparaît comme une
valeur cardinale, Il Buio fait tout le contraire. Un disque, cru, sans effet de
manche mais où les émotions apparaissant à vif. Il y a comme une sorte de
vérité qui ressort de son écoute. Une lumière aussi. L’album est composé de
reprises choisies avec soin, mention particulière pour « I’ve loved and
lost again » ; « I can tell » et le « Dancin’ »
de Chris Isaak. Faisant honneur à son patronyme, Il Buio est marqué du sceau de
l’italianité ("Ciao Ragazzi", "Amado mio"), personnalisée ici par Adamo venu en ami prêter main forte sur la
reprise de « La notte ». Un très bel album.
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Il Buio,
Xavier Boussiron
dimanche 9 décembre 2012
Little Bob Blues Bastards, New Morning, 5 décembre 2012.
Nouvelle orientation dans la carrière de Little Bob. Après
avoir porté, pendant plus de trente ans, la bonne parole rock n’roll dans notre
hexagone, Little Bob retourne à la source de ses premières amours, le blues. Un
nouveau groupe, les Blues Bastards, dans lequel on retrouve le contrebassiste
Bertrand Couloume, l’harmoniciste Mickey Blow, le guitariste Gilles Mallet et
le neveu de Bob, Jérémie Piazza derrière la batterie. Une belle collection de gueules
cassées (mention particulière pour Mickey) qui portent en eux les années au
service du rock n’roll. La toute nouvelle formation a sorti un excellent album
un peu plus tôt cette année et se retrouve maintenant sur les routes pour
diffuser la note bleue. Le blues de Little Bob reste cependant très marqué par
le rock n’roll, régulièrement les Blues Bastards piochent dans l’ancien
répertoire, celui de Little Bob Story (qui n’est pas séparé, soit dit en
passant) désigné sous le vocable d’ « autre groupe ». Ajoutez à
cela quelques reprises bien senties, Howlin Wolf semblant être le préféré de
Bob, un message positif (« faîtes-vous du bien ») et la générosité
naturelle de Bob (pratiquement deux heures de show) et tous les ingrédients
étaient réunis pour passer une excellente soirée. Un petit pour finir sur un
invité bien particulier de Bob pour cette soirée, un jeune et extraordinaire
pianiste d’à peine 10 ans, Raffi Arto, qui joue le blues et le rockabilly comme
un vieux routier. Bluffant ! L’affection que lui porte Bob est touchante.
http://www.littlebob.fr/littlebob_pagesHTML/littlebob_BluesBastards.html
samedi 8 décembre 2012
Django Django, Le Trianon, 3 décembre 2012.
Découvert en live sur la scène de la plage durant les
Eurockéennes de Belfort, c’est dans le sublime cadre du Trianon que l’on a
retrouvé Django Django. Décidemment ce groupe, auteur d’un des albums les plus
excitant de l’année, prend l’habitude de jouer dans des endroits plutôt
classes. D’emblée la disposition scénique, plutôt complexe, du groupe
interpelle. Des stores vénitiens, qui font office d’écrans de projection, en
arrière plan, des lumières devant et derrière la scène et d’autres encore
posées au sol. Il est rare de voir un groupe débutant, auteur d’un seul album,
disposer de tels moyens. La marque du succès très probablement. L’impression
première se confirme dès que raisonnent les premières notes d’intro : le
show est étudié sous les moindres coutures, l’aspect visuel fait l’objet d’un
soin très particulier. Le quatuor déboule dans des tenues coordonnées à l’image
des groupes des sixties. Musicalement Django Django est adepte d’une démarche
créative, plutôt que de vouloir à tout crin reproduire une époque et les sons
du passé, le groupe préfère le mélange des genres et des époques. Django Django
ou la rencontre du rockabilly (ma facette préférée personnellement) et de
l’électro (claviers 80s garantis) avec un côté pop particulièrement marqué lorgnant
sur le psychédélisme sixties et les Beach Boys (cf. les harmonies vocales). Sur
scène Django Django est un groupe particulièrement rythmique, bien plus que sur
disque. Les membres du groupes ont une attirance pour les percussions diverses
et variées, improbables voire même un peu étranges, dont ils jouent parfois
tous en même temps. Leurs compositions y gagnent en rythme et sont beaucoup
plus dansantes en version live. Quoi qu’il en soit la formule plaît, la salle
affiche complet. Maintenant qu’attendre d’eux ? Déjà qu’ils confirment le
succès, tant artistique, critique que commercial, du premier album. Ensuite,
Django Django est capable de tout. Un album électro comme un disque de rock
organique, les deux facettes sont exploitées avec un égal bonheur sur scène. En
résumé, le meilleur comme le pire. Un grand groupe ? Pas encore, pas tout a
fait. Mais c’est en bonne voie…
vendredi 7 décembre 2012
lundi 3 décembre 2012
Klink Clock
C’est devenu l’un des lieux communs du rock n’roll façon 21ème
siècle, la formule duo guitare/batterie a le vent en poupe depuis le succès
massif obtenu par les Black Keys et autres White Stripes. Reprenant la formule
à son compte, les français de Klink Clock (que l’on avait découvert sur la
scène de la chapelle des Recollets) sortent leur premier album. Dès la première
écoute, le disque confirme ce que l’on savait déjà, le talent est bien
l’ingrédient essentiel pour réussir un bon disque et ce en dépit d’une
apparente économie de moyen. Et de talent Klink Clock n’en manque pas.
Aurélien, la Gretsch en feu, n’a pas son pareil pour trouver le riff, le son de
guitare qui va vriller le cerveau de l’auditeur (« Mayhem »,
« Wake up »). Le truc évident, original, tout en rappelant des
centaines de précédents qui sont autant de raisons pour lesquelles on aime le
rock n’roll. Debout derrière sa « demi-batterie », Jennie soutient le
tout avec beaucoup d’aplomb, telle une nouvelle Maureen Tucker. Bien évidemment
de garage déglingué et de blues déchirés, il en est beaucoup question tout au
long de ces neuf plages, normal puisque nous sommes en compagnie de gens de
goût. Mais pas seulement. A deux, les Klink Clock révèlent une personnalité
musicale riche qui tend parfois vers le heavy-metal, lorsque Aurélien prend le
micro (« H »). Sur d’autres compositions, le groupe se rapproche des
punkettes / riot girls des années 1990 (« Princess ») avec en plus un
sens de l’ampleur et une science de l’arpège quasi-psychédélique
(« Siamois »). Et n’oublions pas de préciser non plus qu’ils assurent
en acoustique (« Coin Machine »). Au final un disque riche et varié,
qui contentera largement les amateurs de pur rock n’roll.
dimanche 2 décembre 2012
Jukebox The Ghost : « Safe travels »
Troisième album pour ce trio, récemment déménagé de
Philadelphie vers Brooklyn, et dont le précédent EP, nous avait laissé une
excellente impression (chronique ici). Impression largement confirmée par les
13 plages qui composent ce nouvel effort. « Safe Travels » c’est
l’épitomé de l’album plaisir. Le bouton lecture est enfoncé, les bonnes
vibrations coulent des enceintes. Pop est bel et bien le mot d’ordre ici. Même
la gravité se fait dans une certaine légèreté (« At last » ;
« Dead » ; « Adulthood »). Trio à la composition
atypique, guitare, batterie et piano, Jukebox The Ghost n’a pas son pareil pour
composer des petites perles pop, aux mélodies finement ciselées qui restent en
mémoire. Pour la première fois le groupe s’est enfermé de longs mois en studio,
peaufinant les détails. Et cela s’entend. En résulte cet album, ouvragé, très
bien produit et arrangé (claviers, cordes). Enfin les sessions mettent en
valeur le travail du batteur Jesse Kristin, particulièrement à cause de/grâce à
l’absence de basse. Toute la rythmique du disque repose sur lui, et elle
particulièrement dansante. Enjoué, primesautier, voilà un disque qui vous
aidera à passer l’hiver et compenser le manque de soleil et de luminosité.
www.jukeboxtheghost.com
www.facebook.com/jukeboxtheghost
samedi 1 décembre 2012
John Mayall, le new morning, 28 novembre 2012.
Toujours alerte John Mayall, la veille de ses 79 ans (il les
fêtera le lendemain) ! Entouré de son quartet entièrement composé de
musiciens Américains, un section rythmique made in Chicago et un guitariste Texan,
Mayall (qui a rasé sa barbe et arbore désormais une longue crinière blanche lui donnant un air d'ancien hippie) a donné un excellent concert de blues dans la grande tradition,
heureusement qu’il est encore là ! Si John peine un peu à suivre le rythme
à la guitare où patauge, avec beaucoup d’autodérision (« ah
technology ! »), dans la programmation des sons de son clavier, son
talent à l’harmonica est intact. Les poignets toujours aussi véloces sur le
piano, son jeu a beaucoup de swing et sa voix… Un peu à l’image d’un vin qui
vieilli bien avec les années, son timbre est encore plus blues maintenant. Le trio
qui l’accompagne est composé d’excellent musiciens, un bassiste également
soliste, suffisamment rare pour être souligné, dans la veine de Marcus Miller,
le nouveau guitariste Rocky, un peu dans le même style que Buddy Whittington,
son prédécesseur (pourtant une sacrée gageure de se glisser dans ses guêtres)
et enfin un batteur plein de groove. Tout juste peut on regretter une longue
improvisation entre la basse et John vers la fin du concert, certes le niveau
est impressionnant mais la jam aurait gagné en efficacité à être un peu plus
courte. Enfin bon on fait la fine bouche. Profitons de John tant qu’il arpente
encore les scènes.
Goldwave : « Night Lights »
Fréquemment utilisés, les termes de « claque » ou
« grande révélation » font figure de lapalissade lorsqu’il s’agit de
chroniquer tel nouvel album ou tel nouveau groupe dont on est sincèrement
persuadé qu’il restera dans l’histoire. On a beau chercher, on ne trouve pas
vraiment mieux pour évoquer « Night Lights », le premier EP de
Goldwave. Originaire de Normandie, le cœur de la musique de Goldwave se trouve
pourtant de l’autre côté de la Manche, du côté de cette Angleterre froide des
années 1980. Goldwave s’est trompé de nom, le patronyme du groupe aurait dû
s’écrire avec un C à la place du G tant la musique semble s’inscrire dans cette
sombre tradition. Cinq titres donc, d’ambiance sombre et froide, évoquant les
aînés Joy Division, The Cure ou Interpol pour citer un exemple plus récent,
voire les Smiths sur leur versant le plus pop (« Sunshine »). Rien de
vraiment original, mais réellement impressionnant de finesse et de recherche,
et ce jusque dans le moindre détail de production. Cinq titres maîtrisés de
bout en bout, impeccablement produits, rien à redire. Vivement la suite.
www.facebook.com/goldwaveband
http://www.goldwave.bandcamp.com
www.facebook.com/goldwaveband
http://www.goldwave.bandcamp.com
vendredi 30 novembre 2012
Nadéah, La Boule Noire, 27 novembre 2012.
Prestation de grande classe de notre Australienne, Française
d’adoption sur la scène de la boule noire en ce mardi soir. Superbe, tour à
tour aguicheuse, séductrice ou femme fatale, Nadéah fait montre sur scène d’un
charisme à toute épreuve. Heureuse tout simplement d’être là, entourée de son
groupe de quatre musiciens, Nadéah irradie sur scène d’un bonheur contagieux.
Un show aux ambiances très variées, baroque (An aslyum on new year’s eve)
parfois rock, parsemé de moments intimes seule à la guitare folk ou au piano,
entrecoupé de morceaux très jazzy : une contrebasse pleine de swing avec
en renfort quelques vents, un trombone et une clarinette. Le concert est marqué
par une intensité de tous les instants, beaucoup plus que sur disque, le public
passant par une palette d’émotions assez large, Nadéah se transforme alors en
tornade blonde dont les cheveux balayent l’espace. A noter également la
présence de Clarika, superbe voix profonde, sur un titre majestueux. Le tout
dans le cadre cabaret années 30 de la boule noire qui lui sied particulièrement
bien. Une soirée plus que réussie.
Eugene McGuinness : « The invitation to the voyage »
Troisième album pour ce brillant auteur/compositeur. Et si comme son titre l’indique, voyage il y a, c’est à une épopée entre les sons et les époques à laquelle nous sommes conviés évoquant à la fois les années 80, « Joshua » sous influence Smiths, que les années 60, la surf music et le Mersey beat : « Lion » (probablement la meilleure plage du disque). Fin guitariste, qui fut membre un temps du groupe accompagnant l’excellent Miles Kane, Eugene McGuinness a pourtant un peu délaissé son instrument de prédilection, fignolant ses arrangements pour accoucher de cet effort luxuriant déroulant tantôt un tapis de cordes, la très classique « Concrete Moon » tantôt des cuivres percutants : « Harlequinade ». Bricolant avec les outils de son époque, Eugene tâte de l’électro avec « Videogame » ou recycle le thème ultra efficace de « Peter Gunn » le temps d’un « Shotgun » qui fait depuis le bonheur d’une certaine radio rock qui programme le titre en rotation. Un disque de songwriter en somme mais aussi d’interprète, Eugene s’adaptant à tous les contextes, fort variés, composant l’album, tour à tour crooner ou rocker. Jeune, 27 ans, Eugene McGuinness a logiquement une belle carrière devant lui. Une belle promesse pour l’avenir.
www.eugenemcguinness.net
www.facebook.com/eugenemcguinnessmusicEn tournée française en janvier et février 2013 (le 9 février à Paris la maroquinerie)
Eugene McGuinness - Sugarplum par domino
dimanche 25 novembre 2012
Shuggie Otis, La Bellevilloise, 24 novembre 2012.
C’est la résurrection de l’année, Shuggie Otis, fils du
fameux bluesman Johnny Otis, de retour sur scène, pour son premier concert
depuis plus de vingt ans et à Paris pour la première fois (il était déjà venu
accompagner son père mais il s’agît de sa première en tête d’affiche), quelle
chance avons-nous ! C’est bien à la Bellevilloise qu’il fallait être en ce
samedi soir. Shuggie Otis, donc, l’homme qui a osé dire non à Keith Richards
qui souhaitait l’embaucher au sein des Rolling Stones et l’auteur de trois
albums au tout début des années 1970, qui s’apprête à rompre l’année prochaine
un silence discographique qui dure depuis 1974 ; un autre évènement en
perspective. En attendant la sortie de son nouvel album, Shuggie reprends la
route ce qui lui donne l’occasion de promouvoir la réédition de son classique
« Inspiration Information ». Shuggie, multi-instrumentiste et guitariste virtuose, œuvre dans
une genre de soul music mâtinée de blues et de jazz free vraiment très cool,
laidback, lounge. L’originalité étant que Shuggie met la guitare en avant, ce
qui est assez rare finalement dans ce style, les six cordes étant plutôt
associées aux registres blues et rock. Shuggie est l’un des rares guitar-heros
de la soul music. Les sept musiciens qui composent son groupe (claviers,
cuivres, basse et batterie), sont tous excellents et affichent une moyenne
d’age respectable, assurément nous avons affaire à des vieux routiers qui
connaissent par cœur toutes les ficelles du métier. La section rythmique groove
à point, un pianiste excellent, aux interventions toujours fort à propos, et
des cuivres qui donnent des petits coups de pêches des lors que cela s’avère
nécessaire. C’est bien entendu la guitare de Shuggie, par ailleurs un bluesman
plus que crédible, qui tire les marrons du feu gratifiant le public de soli
impeccables et inspirés (à noter cette étrange habitude pour Shuggie le
droitier de jouer sur un modèle pour gaucher, étonnant…). Malheureusement, on
ne peut pas en dire autant de sa voix, qui s’est bien étiolée avec les années,
Otis, qui semble aussi parfois un peu perdu, ayant bien du mal à chanter juste et à placer sa voix correctement, à sa
décharge des soucis techniques n’arrangeront rien à l’affaire. Tout cela aurait
été parfait si cela n’avait pas été aussi court. Trente euros pour un concert
d’à peine une heure et quart, cela fait très juste…
samedi 24 novembre 2012
The Hyènes, La Boule Noire, 21 novembre 2012.
(c) Richard Aujard |
Quelque chose nous disait, à l’écoute du premier album de
The Hyènes, que ce groupe était taillé pour la scène… Impression largement
confirmée par la prestation du quatuor sur la petite scène de la boule noire en
ce mercredi soir. The Hyènes donne dans l’efficacité brute, deux guitares,
basse et batterie, rien que du très classique mais jusqu’à preuve du contraire,
on n’a jamais trouvé mieux. La section rythmique dépote (au passage magnifique
basse Gibson firebird) normal, c’est celle des anciens Noir Désir. C’est carré,
solide et sans fioritures excessives, en résumé, les bases sont parfaites pour
qui entends « rocker ». Le terrain est alors suffisamment solide pour
bâtir un mur de guitares (magnifique Gretsch demi-caisse, soit dit en passant)
d’inspiration punk. Car c’est à travers ce prisme qu’il convient d’apprécier
les Hyènes : chansons courtes (trois, quatre minutes) encore une fois,
c’est l’efficacité qui est privilégiée même si Vincent, le chanteur/guitariste,
s’amuse à faire le Jimi Hendrix, genre solo la guitare derrière la nuque avant
de mordre les cordes avec les dents. Hormis les titres du premier album et
quelques autres raretés on peut noter quelques reprises de choix, « Ace of
Spade » de Motorhead et une très exaltante version du « I wanna be
your dog » des Stooges. En résumé, une belle soirée riche en électricité.
Sallie Ford and The Sound Outside, Le Trianon, 19 novembre 2012.
Grande révélation rockabilly de l’année, c’est sur la
sublime scène du Trianon que l’on a retrouvé l’Américaine Sallie Ford et son
groupe The Sound Outside. Alors que la sortie de son nouvel album est prévue
pour le 19 février 2013, ce passage au Trianon fût pour Sallie l’occasion de
tester en live ses nouvelles compositions et notamment cet inattendu
instrumental d’inspiration western qui a ouvert la soirée, ce qui ne fait que
confirmer l’enracinement de Sallie Ford dans les musiques traditionnelles
américaines, le rockabilly bien sur mais aussi le gospel que son chant évoque
parfois et le blues. Sur scène, le Sound Outside fait preuve d’un swing à toute
épreuve, grâce à son batteur l’excellent Ford Tennis et au son un peu
« rond » de la contrebasse (Tyler Tornfelt) qui confère à l’ensemble
une coloration un peu jazzy. De part son attitude, « Howdy » lancé à
la cantonnade à son arrivée sur scène et surtout par son jeu, le guitariste
Jeffrey Munger est lui à rapprocher de la musique country, assurément l’ancrage
« terrien » du groupe vient de lui. Et puis il y a Sallie Ford, une
voix incroyable, rauque et beaucoup plus mature que ce que laisse supposer sa
jeune vingtaine, à rapprocher des grandes chanteuses de blues et de jazz. Sur
scène Sallie a pris beaucoup d’assurance, comparée à ses premiers passages au
divan du monde, l’ensemble est moins gauche tout en gardant intacte une
certaine fraîcheur (« J’adore Paris »). A coup sur, Sallie et son petit
monde n’en revient pas de cette incroyable aventure qui a pris forme il y a
quelques mois et qui, dans un monde parfait, ne devrait pas s’arrêter de sitôt…
Libellés :
Sallie Ford and The Sound Outside
jeudi 22 novembre 2012
Comme un lundi...
Quelques réflexions, saisies au vol, alors que me rendant à un concert, je suis passé à pieds devant la Samaritaine...
Quand il filme (dans "Holy Motors") à l'intérieur du grand magasin désaffecté, à quel point Leos Carax met-il en scène sa propre nostalgie ?
Il est facile de mettre en parallèle le destin de La Samaritaine, magnifique magasin d'inspiration art-déco et art nouveau, ancien haut lieu de la vie parisienne aujourd'hui tombé en désuétude, fermé depuis 2005, et l'itinéraire propre du cinéaste, ex-enfant prodige du cinéma français, génie déchu de la pellicule (seulement cinq films et demi depuis 1984) qui n'a finalement pas eu la carrière que tout le monde lui prédisait. Alors qu'il frôle le demi-siècle, Leos Carax se livre ici à une sorte de bilan.
En outre la proximité géographique fait que l'on peut rapprocher cette séquence de la Samaritaine des "Amants du Pont-Neuf" à la fois film maudit et pièce maîtresse de l'oeuvre de Leos Carax.
Du Pont-Neuf à la Samaritaine, grandeur et presque décadence. Presque parce qu'"Holy Motors" c'est quand même un chef d'oeuvre.
dimanche 18 novembre 2012
Nadéah : « Whatever Lovers says »
Jeune Australienne installée en France, Nadéah a une
philosophie de vie tout simple : « Positivons » ! Autant
dire que « Whatever Lovers says », son nouvel EP, déborde de bonnes
vibrations. Ces quatre titres, nourris d’influences assez marquées par les
Etats-Unis, qui vont du folk (« Ain’t got time ») au jazz
(« Humdrum ») peuvent ainsi s’écouter comme la bande son de
l’existence nomade de Nadéah, un peu comme un voyage qui remonterait les
racines de la musique étasunienne. Quelque soit le contexte, le chant de Nadéah
emporte la mise. Une voix grave, avec un coffre digne d’une chanteuse jazz, on
craque devant tant de charme. Un petit mot pour finir sur l’intrigante
« Humdrum », morceau jazzy avec un je ne sais quoi d’un peu foutraque
dans son final qui n’est pas sans rappeler Tom Waits. De la belle œuvre.
Interview avec les Popopopops
Les Popopopops sont un groupe prometteur venu de Rennes et
quand ils s’ennuient, ils sortent les guitares acoustiques et jamment. C’est
ainsi qu’on les a trouvé, juste avant une interview, chacun sa guitare folk et
on chante à l’unisson dans une sorte de réminiscence hippie. Il ne manque plus
que le feu de bois. On a connu des interviews qui commençaient plus mal…
Comment a débuté l’aventure des Popopopops ?
P. : On s’est rencontré au lycée à Rennes. On était
trois dans la même classe. Après on a rencontré Vincent (guitare, ndlr). Au
début c’était un passe-temps, on répétait plutôt que de jouer au foot. On est
devenu de plus en plus « professionnels », on a fait les
transmusicales assez vite en 2008. Ca a été un gros boost pour nous. On a
enchaîné pas mal de concerts, notamment à l’étranger. En 2009 est sorti notre
single « Dance tonight ». On a sorti notre premier EP « A quick
remedy » cette année.
En découvrant le nom du groupe, Popopopops, sur la pochette,
j’ai pensé que vous alliez être un groupe pop assez catchy avec des chansons de
deux minutes. Finalement ce n’est pas tellement ça… Comment vous est venu le
nom du groupe, qui est très difficile à orthographier, je tiens à le dire (rire
général) ?
P. : Ca, on en a fait l’expérience, souvent sur les
loges, le nom du groupe est mal écrit, on nous appelle, les popos, le pos et
j’en passe (rires). C’est une référence à NTM.
Oui, mais justement, l’influence du rap ne s’entend pas du
tout dans votre musique…
P. : C’est vrai. Au tout début on faisait de tout et de
rien mais pas de hip hop. On faisait du blues, de la pop, du rock… On trouvait
amusante l’antinomie entre le nom du groupe, un hommage au hip hop, et notre
style musical. On aime beaucoup NTM cependant.
Certains titres « My mind is old » ou « R
n’R » ont un côté très répétitif, obsédant, un peu comme des mantras.
Comment définiriez-vous votre son ?
P. : On est quand même avant tout un groupe pop, dans
le sens où on essaye de se contraindre à un format couplet/refrain. On essaye
de trouver une originalité dans ce format là. Il y a certains artistes dans
lesquels on se reconnaît beaucoup, Foals par exemple. Pas tellement au niveau
du style mais plutôt dans la direction artistique. On essaye d’imaginer notre
son toujours dans le même format, une chanson de quinze minutes, ça nous semble
impossible. Les trucs trop expérimentaux, pareil. On cherche toujours de
nouvelles choses, mais on garde cette rigueur pop. Quand on a commencé les
Popopopops, on n’était pas spécialement potes. On n’a pas commencé en se disant
on va faire un revival d’un groupe en particulier dont on était tous fans.
Chaque membre avait ses propres influences. L’ep ne sort qu’au bout de quatre
ou cinq ans parce qu’on a eu beaucoup de mal à trouver notre son à nous et à
donner de la cohérence à toutes nos influences individuelles.
Au début je pensais que vous n’aviez pas un songwriting
classique mais plutôt quelque chose qui tiendrait plus de l’architecture
sonore, puis en arrivant je vous ai vu jammer avec les guitares acoustiques et
je me suis dit : « P**** t’as tout faux » ! (rires)
P. : La base des morceaux vient souvent de Simon
(basse) ou Victor (chant, clavier). Après, on retravaille les morceaux tous
ensemble pendant les répétitions. On travaille souvent la musique avant les
textes qui sont écrit par Simon. Beaucoup de groupes écrivent les textes et les
mettent en musique, ça nous est arrivé seulement une fois ou deux. La touche
finale se fait à quatre. On teste énormément nos chansons en live avant de les
enregistrer, on les enrichit beaucoup comme ça. En aucun cas on ne peut se
contenter d’une composition personnelle faite sur un ordinateur. On a besoin
d’échanger pour faire vivre la chanson. Le titre « R n’R » par
exemple a vraiment pris beaucoup d’ampleur, chaque membre du groupe a apporté
son truc. Et là pour le coup, il y a un côté classique couplet/refrain mais on
l’a enrichit au niveau de la structure avec l’allongement instrumental à la
fin. On s’adapte au niveau des chansons quand on voit qu’il y a des ouvertures
qui sont possibles.
Donc du coup, une composition à la fin ne ressemble plus du
tout à ce qu’elle était au départ…
P. : C’est vraiment variable. Parfois, après les démos,
on se rend compte que la seule chose qui change c’est la couleur des
instruments, qui joue quoi, qui fait tel riff… Des fois les titres ne bougent
pas beaucoup. D’autres fois, on part d’une démo un peu cheap pour arriver à
quelque chose beaucoup plus long avec plein de détails. Ce qui est important
avant de pouvoir jouer une chanson à quatre, c’est déjà d’avoir une ambiance.
Même si après il y a beaucoup de détails qui changent, l’ambiance reste. On
doit ressentir un truc tous ensemble. Parfois avec seulement deux accords on
arrive à ressentir le truc. Et parfois ça ne colle pas, on ne trouve pas la
bonne atmosphère. C’est magique.
J’ai trouvé la production de l’ep très soignée. Comment
c’est passé l’enregistrement ?
P. : On vit en colocation avec notre ingénieur du son,
Mitch, c’est vraiment le cinquième membre du groupe. On a fait tout un travail
avec lui sur l’ep. On était un peu seuls après avoir beaucoup tourné à
l’étranger. On était de retour à Rennes avec vraiment l’ambition de sortir
quelque chose, on se demandait comment on allait s’y prendre. On s’y est mis en
septembre 2011 sans trop savoir si on allait faire un album ou un EP. On a
commencé à l’UBU à Rennes, l’EP s’est construit en six mois, dans beaucoup de
lieux différents. Au début on avait quinze chansons, on a réduit à dix,
finalement il n’en reste plus que quatre. Celles qui nous semblait les plus
révélatrices de ce qu’on voulait présenter au public. Notre musique a quand
même beaucoup changé. Pour nous cet EP, c’est comme une palette de ce que va
être l’album. On a aussi rencontré à Hossegor le chanteur de Pony Pony Run Run
qui a signé l’arrangement de « Color ». Les batteries on été faîtes à
Nantes et on a fini le tout à la maison dans notre petit studio. Le mixage a
été fait par un anglais, Tom Peters, qui a également mixé les Wankin. C’était
bien de bosser avec lui, il a emmené cette couleur un peu anglaise, sans
compromis, avec des choix artistiques forts. Il a donné une cohérence à
l’ensemble des chansons et des prises qui ont été faites un peu partout.
Justement, en parlant de la couleur anglaise, ça vous fait
rêver de jouer à Londres ?
P. : Carrément mais ce n’est pas une fin en soi. On a
fait quasiment tout les pays limitrophes de la France mais pas l’Angleterre.
C’est assez compliqué d’y jouer quand même. C’est une sorte de Graal pour un
groupe qui fait de la musique d’inspiration anglo-saxonne. Ce n’est pas un
objectif en soi mais ça veut dire beaucoup de choses d’arriver à jouer là-bas.
Ca veut dire que t’es vraiment très bon, arriver là-bas, chanter dans leur
langue, c’est lourd de sens. Notre EP sonne « anglais » à cause de
nos influences, pas forcément par ce qu’on a envie de jouer là-bas. Ca serait
une énorme reconnaissance de pouvoir être écouté et apprécié par un public
anglo-saxon.
Cela vous a apporté beaucoup de tourner en dehors de la France,
d’être confronté à d’autres publics ?
P. : On était un peu plus jeunes, plus fous. On était
dans une dynamique de tournée, on ne se rendait pas vraiment compte. On n’avait
rien enregistré de vraiment sérieux, on n’était pas confrontés à la réalité du
milieu de la musique tel qu’on le connaît maintenant. C’était plus du plaisir,
on partait en Hollande trois jours, on était là-bas… On jouait devant des gens,
c’était cool… Le public est quand même très différent d’un pays à l’autre. A
Moscou, on s’est retrouvé dans une salle gigantesque, trois-quatre mille
personnes, on passait très tôt à 17 heures, du coup il n’y avait quasiment
personne mais les gens qui étaient là étaient fous, mais fous genre déchaînés.
Au Pays-Bas, les gens étaient très réactifs. En Belgique, ils ne dansent pas du
tout mais ils sont à fond dedans, ils crient et applaudissent beaucoup. Sans
faire de généralités. Après je ne sais pas si tu apprends beaucoup du fait de
jouer devant des publics différents. C’est une expérience enrichissante. Tout
ce qu’on a vécu depuis ces trois dernières années a contribué à faire mûrir le
projet. Ne serait-ce qu’humainement, on a passé beaucoup de temps ensemble.
C’est ce qu’on a voulu traduire dans cet EP, l’aboutissement d’une belle
tournée avec des rencontres, des échanges… On début on ne faisait que du live,
on était concentré là-dessus et puis on s’est rendu compte qu’il fallait sortir
quelque chose pour faire vivre la musique au-delà du concert.
Les Wankin’Noodles m’avaient dit la même chose, mais contrairement
à eux vous n’avez pas une approche aussi brute…
P. : C’est lié au style de musique. Et puis eux ont enregistré
leur album en live. On avait une expérience du live assez poussée et on n’avait
pas envie de refaire la même chose sur cd. Quand on s’est retrouvé en studio,
on s’est dit on va profiter de la chance qu’on a d’être en studio pour faire
des choses plus recherchées avec plus de pistes ; on va chercher à
apporter des petits détails dans le son, dans la production, tout ce qu’on ne
peut pas faire en live en fait. C’était aussi pour voir ce qu’on vaut. On n’est
pas partisan de refaire en live ce que tu fais en studio et inversement. On est
contre l’utilisation des bandes sur scène, au contraire, il faut préserver
l’énergie. Pour nous c’est vraiment deux univers différents.
Vos compositions changent beaucoup en live ?
P. : On compose en répète ensuite on étoffe en studio.
Ensuite quand on est retourné dans notre local de répète pour préparer les
concerts, on a enlevé des choses pour aller à l’essentiel, préserver l’énergie.
C’est aléatoire, c’est selon notre feeling, il faut qu’on prenne autant de
plaisir à jouer nos chansons qu’on a eu à les enregistrer. Le public doit y
retrouver son compte aussi, il cherche quelque chose de plus direct en live, on
essaye de s’adapter. Des fois on rajoute des choses spécialement pour le live,
ce qui apporte une nouvelle dimension.
Un petit mot sur les années 80…
P. : Les années 80 (ils chantonnent)… On nous pose
souvent la question. En ce moment il y a une sorte de revival dans tous les
styles de musique. On ne se revendique ni des 80s ni des 90s ni des années
2000. Ca fait partie de nos influences, New Order etc… Mais il y a bien
d’autres choses aussi, c’est peut-être ce qui ressort le plus sur cet EP. On
est aussi influencé par des groupes eux-mêmes influencés par les 80s. On essaye
d’intégrer plein d’autres palettes, le hip-hop sur « R n’R » par
exemple. Il y a aussi du rock assez brut. On ne se rend pas vraiment compte,
mais c’est possible que la décennie 1980 soit un peu le fil rouge du groupe. On
ne se dit pas qu’il faut sonner comme on le faisait dans une autre époque, on
préfère que cela reste inconscient et indirect. On ne veut pas se faire
enfermer dans un moule.
Et votre album ?
P. : La sortie est prévue pour début 2013.
Propos recueillis le 3 Mai 2012.
samedi 17 novembre 2012
The View : « Cheeky for a reason »
Assez peu connu, hélas, en France, les écossais de The View
sortent leur, déjà, quatrième album. Typiquement le genre de groupe méconnu
dans notre hexagone qui, quoi que l’on en dise, reste assez fermé aux choses du
rock n’roll. Et c’est bien dommage car The View atteint sur ce disque une
ampleur nouvelle. Pas toujours facile d’identifier clairement ce groupe, par
défaut nous parlerons de pop. Mais une pop qui passe par différents états tout
au long de ces 12 compositions. Parfois traversé d’éclairs punk, mélodiques ou
power-pop, le groupe a réussi ici la gageure de rendre cohérent tout un agrégat
d’influences qui remonte l’histoire du rock depuis les années 1960. Sans vouloir rentrer dans le détail, mettons
quelques piécettes sur le sixties en diable « Anfield Row », la jolie
mélodie au piano de « Tacky Tattoo » ou l’agressivité punk de
« How long ». Entre autres. Un album solide, les amateurs de rock
britannique auront tort de bouder leur plaisir…
vendredi 16 novembre 2012
The Datsuns : « Death Rattle Boogie »
Dix ans de carrière (dèja) et cinquième album pour cette
infernale machine à rock n’roll venu de Nouvelle-Zélande. Après des débuts très
marqués par le hard et le rock garage des années 1970, c’est encore le cas
aujourd’hui, les Datsuns ont au fil des années et des enregistrements
considérablement enrichi leur palette intégrant au fur et à mesure beaucoup
d’influences venues des musiques rurales étasunienne, notamment le blues (cf. "Fools gold" et « Wander the night » qui sonne, dans sa première moitié, psyché blues
jazzy). Tout cela pour arriver à ce nouvel album qui s’il n’apporte rien de
fondamentalement révolutionnaire (ce n’est pas le propos de toute manière) n’en
procure pas moins beaucoup de plaisir. Le guitariste Christian Livingstone, qui
a pris une sacrée ampleur depuis les débuts du groupe, est passé maître dans le
maniement de la pédale wha-wha et réhabilite à lui seul la notion de solo
(« Shadow looms large »). Un morceau comme « Skull full of
bone », et son imparable groove de la section rythmique, montre les
progrès réalisé par les Datsuns en tant qu’instrumentistes.
« Axethrower », qui les voit flirter avec le genre stoner, met en
valeur un groupe qui mise sur l’efficacité avant tout (« Helping
hands »). Un peu à l’image de cet album électrique et rock n’roll.
Excellent.
jeudi 15 novembre 2012
RNDM : « Acts »
Vétéran du grunge et rock star mondiale, en tant que
bassiste de Pearl Jam, Jeff Ament n’en reste pas moins, comme tous les
musiciens, avide de nouveauté et de collaborations. Ainsi est né RNDM
(prononcez Random, traduction française : au hasard), nouveau groupe,
fruit de son association avec le songwriter Joseph Arthur et le batteur Richard
Stuverud. Nouvellement formée la petite troupe investit un studio du Montana et
enregistre en quatre jours la bagatelle de 20 titres dont 12 constituent le
présent album. Si l’association entre Ament et Arthur ne semble pas, de prime
abord, la plus naturelle, la rencontre fait pourtant des étincelles, ce qui
pour le coup ne doit finalement rien au hasard. Vieux de la vieille avec près
de deux décennies d’expérience, il ne faut pas attendre de ces musiciens une
quelconque révolution. Juste un bon vieux disque de rock, tendance un peu
roots, à l’ancienne. Les conditions d’enregistrement, quatre jours
rappelons-le, constituent la principale qualité de cet album. Une cession
détendue (cela s’entend), point de posture ici, juste le plaisir de jouer. Ca
semble peu et c’est pourtant énorme. Un excellent disque qui brille par son
apparente modestie et qui, soyez-en sûrs, vieillira dignement et que l’on
écoutera encore avec beaucoup de plaisir dans quelques années…
mercredi 14 novembre 2012
Valerie June + Ben Kweller, La Maroquinerie, 12 novembre 2012.
Valerie June |
La soirée comme de fort belle manière en compagnie de la
belle Valerie June, toute de rouge et vert vêtue, chanteuse folk originaire du
Tennessee. La première chose qui frappe chez Valerie, c’est sa voix, assez haut
perchée, véhiculant beaucoup d’émotions. Entourée par sa guitare et son banjo,
la belle alterne morceaux folk et country teintées de fortes incantations
gospel. Alors que ses doigts caressent délicatement les cordes, on se prend à rêver
d’une traversée vers le sud, c’est un beau voyage. Il paraît qu’elle est
également très influencée par le rock et le blues, ce qui ne transparaît pas
vraiment dans sa prestation du soir en solo intégral. Une belle découverte dont
nous aurons sûrement l’occasion de reparler bientôt…
Ben Kweller |
Vint ensuite, un musicien que l’on avait un peu perdu de vue
mais que l’on retrouve avec un plaisir non feint, le texan Ben Kweller. Soirée
chargée en émotions pour l’auteur de ces lignes puisqu’il s’agît,
personnellement de mon premier concert de Kweller depuis mai 2009, trois ans et
demi, c’est (trop) long… Fidèle à son habitude, Ben arrive sur scène en bondissant tel
un cabri entouré de ses nouveaux musiciens, un batteur et un bassiste. Pour son
retour, Kweller renoue avec la formule du power trio qui était la sienne
lorsqu’on l’avait découvert en 2002, il y a déjà dix ans. La section rythmique
est assez discrète et quitte rapidement la scène, laissant Ben assurer tout
seul ce qu’il fait à la perfection. Alternant entre ses deux instruments de
prédilection, la guitare ou le piano, le set fait transparaître les influences
de Ben Kweller écartelée entre la power pop des années 1990 (Weezer, Ben Folds,
Elliott Smith etc…) et des styles nettement plus terriens (la country, le
folk…). Quelque soit le style, Ben l’attaque avec la même énergie. Peu importe
que la guitare soit électrifiée ou non, Kweller envoie et frappe ses cordes
avec la même puissance. Son charisme et son sens de l’humour (Où est mon
harmonica ? Il faut que je trouve mes piles ? « C’est cool »
son expression préférée en français) permettent ainsi d’éviter l’apathie,
défaut récurent des performances acoustiques. Le solo met aussi en valeur la
qualité d’écriture de Kweller dont on peut affirmer sans choquer grand monde
qu’il est l’un des meilleurs songwriter de sa génération, un type talentueux
tout simplement, capable à chaque fois de trouver la mélodie imparable. Dans un
monde parfait un mec comme lui devrait avoir beaucoup de succès.
dimanche 11 novembre 2012
Smoking Smoking : « It’s all about love »
Duo formé par Vanessa Filho et Audrey Ismaël, Smoking
Smoking avait déjà été repéré il y a un an lors de la parution de leur premier EP. La base de Smoking Smoking reste le piano, instrument de prédilection de
ses deux membres, cependant ce premier album marque un indéniable pas en avant
sur le plan de la production. Les nombreux arrangements de cordes ou de cuivres
emmènent la pop des Smoking sur des terrains plus aventureux tirant vers le
jazz (« Don’t let me down ») ou la musique classique. Et puis il y a
les deux voix de Vanessa et d’Audrey qui se répondent et se complètent à
merveille. Mais c’est lorsque les lumières s’éteignent et que les deux amies se
retrouvent autour d’un piano que la mélancolie diffuse des Smoking fait des
ravages, « Dancing » ; « Tiny hope » vous reverseront
le cœur. Citons également entre autres réussites le potentiel tubesque évident
d’ « Are we lucky ? ». Superbe album, véritable coup de
coeur « sous influence ».
SMOKING SMOKING " ARE WE LUCKY ? " MUSIC VIDEO par SMOKING-SMOKING-OFFICIEL
Stubborn Heart
Au rayon des musiques électroniques, le duo anglais Stubborn
Heart s’est crée sa petite niche bien à lui. Ici point de breakbeat enfiévré,
d’expérimentations extrêmes et autres petites bombes propres à enflammer les
dancefloor du samedi soir. Sur ce premier album, Stubborn Heart revisite en dix
titres l’électro sur un mode mélodique, lounge et down tempo. Dans sa
Grande-Bretagne natale, le duo composé de Ben Fitzgerald et Luca Santucci fait
déjà beaucoup de bruit et de nombreuses comparaisons, avec The XX notamment,
ont déjà été faites. Il est certain que les deux groupes ont un héritage commun
descendant, entre autres, de la new wave des années 80. Mais Stubborn Heart
possède, en la personne du chanteur Luca Santucci, un atout de charme indéniable,
ce dernier ayant une voix aussi suave que celle d’un soul man. Un très bel
album de soul électronique qui n’est pas sans rappeler le premier Massive
Attack.
mercredi 7 novembre 2012
Zebra & Bagad Karaez
Miser sur l’identité régionale pour sortir du sempiternel
carcan anglo-saxon étouffant le rock d’ici. Riche idée mise en pratique en
l’espèce par les Bretons de Zebra & Bagad Karaez avec des résultats assez
mitigés. Si Zebra n’a pas son pareil pour tailler de petits hymnes entre rock
et funk fédérateurs et qui accrochent l’oreille (les excellentes « Plus
rien ne m’arrête », « Zebreizh » et « The Unknown
Soldier ») grâce à une guitare qui démange bien comme il faut, les
arrangements à base de cornemuses posent problème. Le tout sonne comme si les
cornemuses en question avaient été rajoutées à la dernière minute, à l’arrache.
L’amalgame ne se fait dès lors qu’imparfaitement. D’autant plus que lesdits
arrangements sont assez répétitifs. Cela aurait pu passer sur un titre mais sur
la longueur d’un album… Dommage…
lundi 5 novembre 2012
Steve Miller Band, L’Olympia, 2 novembre 2012.
Immense rock-star dans les années 1970 (cf. le tube
« The Joker »), le guitariste Steve Miller vivote de nos jours dans
un relatif anonymat qui fait que ce soir, les travées de l’Olympia sonnent un
peu vide. Il faut dire que la politique de tarif, ultra prohibitif, n’aide pas
non plus en l’espèce. Et c’est bien dommage car Miller a toujours ancré en lui
le feu sacré. Guitariste fin et précis, Miller n’à que faire de tout ce qui est
flashy et privilégie le feeling à la démonstration brute. Au terme de deux
heures de show (ou presque), Miller, sans faire de chichis, a revisité
l’ensemble de son répertoire du rock psychédélique des débuts aux tubes pop
(mais dignes) des années 1970. En passant bien évidemment par le blues qui l’a
forcément influencé (il est originaire de Chicago), genre auquel il rend un
vibrant hommage ainsi qu’à ses héros, Otis Rush en tête. Bien entouré par un
excellent groupe, un peu trop ostensiblement professionnel à l’américaine
toutefois, Miller a voyagé bien au-delà de ses influences habituelles reprenant
« Tiptina », le grand classique de la Nouvelle-Orléans du Professor
Longhair. Ce fût un bien beau voyage au cœur de la grande musique américaine.
Tout juste peut-on regretter quelques incartades malheureuses, heureusement
fort brèves, incarnées par des synthés kitsch, sur la facette 1980 de son
répertoire. Pour le reste, c’était une excellente soirée.
Scarecrow : « Evil & Crossroads »
Originaire de Toulouse, Scarecrow se propose de boucler la
boucle de la musique Noire Américaine en mélangeant blues et hip hop. Alliage
de tradition et de modernité les scratches et guitares ternaires ou slidées se
mixent tout comme le chant (en anglais) et le flow hip hop et parfois proche du
slam (souvent en français). La formule, bien qu’assez peu pratiquée, n’est pas
forcément neuve et rappelle des sons déjà entendus chez G. Love and the special
sauce durant les années 1990 ou plus récemment chez Wraygunn (l’exceptionnel
album ecclesiates 1.11). En l’espèce le tout sonne encore un peu vert. Le
résultat est assez souvent probant (« Boy »), parfois plus laborieux.
Quoi qu’il en soit Scarecrow mérite d’être écouté et surtout suivi. Dès qu’elle
aura trouvé sa vitesse de croisière, la formule promet d’être irrésistible.
EN CONCERT LE 8 NOVEMBRE AU PETIT BAIN (Paris)
samedi 3 novembre 2012
Interview avec Thea Hjelmeland
Originaire de Norvège, la très jolie et talentueuse
chanteuse folk Thea Hjelmeland revient sur son parcours fait de voyages,
d’exils et bien sûr de musiques…
Comment as-tu commencé la musique ?
Thea Hjelmeland : Mes parents sont musiciens. Bien que
la musique ne soit pas leur métier, on a toujours eu beaucoup d’instruments à
la maison. J’avais beaucoup de cassettes, j’écoutais beaucoup de musiques.
Depuis que je suis petite, j’ai toujours beaucoup chanté. Je pense que la musique
m’est venue assez naturellement. J’ai commencé le piano vers 6 ou 7 ans. Et
avant ça, quand j’écoutais une chanson, j’écrivais de nouvelles paroles.
C’était un hobby sympa (rires) ! Après ça j’ai joué de la batterie pendant
cinq ou six ans et j’ai commencé la guitare à 13 ans. C’est à ce moment là que
j’ai commencé à écrire des chansons. J’ai appris toutes les chansons des
artistes que j’aimais. Je jouais des heures par jour… J’ai intégré une école de
musique vers 16 ans. Depuis j’ai toujours été impliquée dans la musique.
C’est vrai que tu as écrit ton premier morceau à trois
ans ?
TH : En fait je ne savais pas écrire à cet age là. J’ai
retrouvé une vieille cassette que ma mère avait enregistrée sur laquelle on
l’entend dire : « S’il te plaît Thea, chante la chanson que tu viens
de trouver ». J’avais à peu près trois ans, je pense. Pour être honnête,
c’était un peu nul. Mais depuis cet age, j’aime faire de la musique. J’étais
dans une chorale, j’essayais d’écrire mes propres chansons. Mais bon ces titres
là, je ne les joue pas en live (rires)…
Tu joues beaucoup d’instruments différents et tu enregistres beaucoup toute seule. Est-ce que tu peux m’expliquer ta méthode de
travail ?
TH : Je joue de beaucoup d’instruments, c’est vrai mais
pour moi les chansons et les paroles, c’est ce qu’il y a de plus important.
J’ai un home studio et comme je joue de beaucoup de choses, je suis capable de
m’enregistrer avec un seul instrument. Quand on travaillé sur l’album, j’avais
beaucoup de titres accumulés depuis des années. Avec les producteurs on s’est
concentré sur que je faisais toute seule. Moi et un seul instrument. Après on a
construit autour de cette base. On a parfois rajouté d’autres musiciens. Mais
si je suis multi instrumentiste, c’est par ce que je suis curieuse, je
recherche les sons. Ma façon de jouer n’est pas traditionnelle, je ne joue pas
du banjo comme les musiciens country. Je joue de tout comme une guitare, avec
des accords.
C’est amusant par ce que j’ai trouvé en écoutant ton disque
que tout ces instruments à cordes, mandolin, banjo, ukulele, guitare, donnaient
à l’album une couleur country…
TH : Oui mais je fais avec le son des instruments. Le
son des instruments à cordes m’attire beaucoup. C’est très folk.
Est-ce que tu peux nous parler de ta ville natale,
Forde ?
TH : C’est une petite ville d’environ 10 000
habitants. J’y ai grandi jusqu’à l’age de quinze ans. C’est un endroit
magnifique à l’intérieur d’un grand fjord. C’est situé entre deux grandes
montagnes, un peu comme une vallée. Il y a énormément de nature. Mais en même
temps, c’est une de ces villes que tu traverses en voiture, en allant vers deux
plus grandes cités. Il y a aussi beaucoup de voitures, de centres commerciaux.
C’est un mélange étrange. Je suis heureuse de pouvoir passer du temps à Paris.
Ma ville natale, c’est tout petit, très local, au milieu de la nature. Et après
je viens à Paris qui est très urbaine.
Tu es plus anonyme à Paris ?
TH : Oui, absolument.
Pourquoi tu éprouves le besoin de voyager ?
TH : J’ai toujours beaucoup voyagé. Mes parents
voyageaient. Ils nous emmenaient, mes frères et sœurs, avec eux. Après l’école,
j’ai passé six mois à Cuba, juste pour être ailleurs, voir quelque chose de
différent. J’étais dans des groupes à l’époque et j’en avais marre du business
de la musique. Il fallait que je me trouve. Cuba a tout empiré, j’étais encore
plus confuse après. C’était la première fois que je voyais mon pays et la
culture occidentale depuis l’extérieur. Cuba est très pauvre mais il y a
tellement de musiques et de culture là-bas. J’y ai trouvé une nouvelle énergie
musicale. A Cuba, tu claques des doigts et les gens commencent à danser !
C’est vraiment excitant ! Après ça, j’ai rencontré un groupe parisien et
ils m’ont emmené ici. Je les ai rencontré à un festival folk dans ma ville.
J’ai passé des moments très sympas avec eux. Ils m’ont invité à venir jouer
ici. J’ai rencontré des nouveaux gens, je suis restée.
Penses-tu que les voyages ont influencé ta musique ?
TH : Je suis curieuse, j’aime explorer. Je voyage seule
ou avec des amis. Je rencontre de nouveaux gens, de nouvelles histoires.
J’observe. Tout ça se reflète dans ma musique, dans mes paroles. Cet album,
c’est comme une compilation des dix dernières années de ma vie. Alors oui, je
pense que les voyages se sentent dans ma musique, absolument.
Tu as eu de nombreuses expériences très variées dans la
musique, rock, jazz, folk et même hip hop…
TH : Oui, j’ai fait deux albums avec un artiste hip
hop. Je faisais les chœurs. C’est le plus gros rappeur de Norvège. C’était un
projet sympa.
Est-ce que cela a changé quelque chose dans ta
musique ?
TH : En fait, ces albums de rap, je les ai fait après
mon propre album. Le hip hop, c’était un vrai challenge pour moi. Je chantais
en norvégien, quelque chose que je n’aurais jamais osé autrement.
Pourquoi chantes-tu en anglais ?
TH : En France, vous avez la culture de l’écriture et
du chant en français. Il y a une tradition de la chanson française. En Norvège,
pendant des années, toute la culture populaire était en anglais. On apprend
l’anglais très tôt, dès le CP vers 6 ans. Et les films ne sont pas doublés,
tout est sous-titré. Tu entends de l’anglais tout le temps. J’écris beaucoup de
chansons en norvégien mais je n’arrive pas à les chanter.
Par timidité ?
TH : Peut-être. C’est tellement honnête, je ne me sens
pas prête. Dans une autre langue, j’arrive à jouer avec les sons. Quand
j’écris, au départ, je pose des mots qui ensuite deviennent des paroles. En
anglais, c’est un peu une façon de cacher la vérité. Je peux être très honnête
et faire des métaphores en même temps. Avec le rappeur, c’était ok pour moi de
chanter en norvégien par ce que c’était les paroles de quelqu’un d’autre. Mais
cela m’a donné l’envie d’écrire plus en norvégien. On verra…
Quelques mots sur ta chanson « Candyman » ?
Lutter c’est important pour toi…
TH : Cette chanson parle de dix dernières années où on
déménageait tout le temps. A un moment donné, j’avais l’impression de vivre
dans une valise. Tu sais, pendant dix ans, je n’ai pas eu d’endroit à moi.
C’était une année ici, une année là… J’ai passé des mois à dormir sur les
canapés des copains. J’ai été très nomade pendant dix ans. La chanson parle du
fait que, normalement, les gens voyagent pour se sentir libres, ce qui n’était
pas mon cas. Voyager, ça fait partie de mon boulot mais c’est aussi une
échappatoire. J’ai du mal à rester en place, il faut que je bouge. La chanson
parle de moi, c’est aussi une plaisanterie sur moi. Peut-être que je lutte avec
l’idée de rester en place ? Alors peut-être que j’aime bien lutter. Je
blaguais en chantant : « all i want is to struggle » (tout ce
que je désire c’est lutter, ndlr).
Tu aimes Paris ?
TH : C’est marrant par ce qu’en Norvège, tout le monde
me dit : « Paris, c’est tellement beau, tellement romantique »…
Mais bon, tu sais, il y a une différence entre rester pour un long week-end et
vivre quelque part. Paris, c’est magnifique, c’est vrai. Et il y a tellement de
culture, tellement de gens d’horizons différents. Et tellement d’opportunités
pour les concerts. D’habitude, je reste quelques semaines puis je rentre en
Norvège ou bien alors je pars en tournée. Donc j’ai l’opportunité de voir le
côté romantique mais tout le reste aussi. Mon français est bien meilleur
maintenant. Je comprends mieux ce que les gens disent, votre politique ou
contre quoi les gens doivent lutter. C’est intéressant de voir la vie de tous
les jours.
Tu connaissais un peu la scène française avant de
déménager ?
TH : Je connaissais Edith Piaf. Justice était vraiment
énorme en Norvège, ils passaient tout le temps à la radio. Daft Punk également,
David Guetta. La musique française n’est pas tellement diffusée en Norvège. Le
nom Serge Gainsbourg m’était familier mais je ne l’avais jamais écouté. Mais la
Norvège c’est tellement petit tu sais. Il faut bouger si tu veux survivre…
Propos recueillis le 16 avril 2012.
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