lundi 31 décembre 2018

All Them Witches : « ATW »



Depuis que l'on avait été proprement estomaqué par leur formidable album inaugural, on garde un œil curieux et avisé sur la formation de Nashville qui, sans jamais démériter, n'a pas vraiment réussi a retrouver un tel niveau d'inspiration. Du moins jusqu'ici. Car, sobrement intitulé ATW, soit les initiales du groupe, la formation rebat les cartes, une nouvelle donne pour renverser la table, bref une réinvention de leur son tout en gardant intacte une partie de leur identité. La période stoner/doom du groupe semble ainsi révolue, mais le métal est toujours là, rampant dans le fond, prêt à sortir les crocs (cf. «1st vs. 2nd », « Fishbelly 86 Onions »). Ainsi le groupe mais la pédale douce sur la distorsion et le gros son sans pour autant renoncer au guitares. Une baisse générale du niveau des amplis au profit d'une démarche plus intime (le formidable « Half-Tongue ») et qui n'a jamais été aussi proche du blues dans l'esprit (« Workhorse »). Un idiome auquel vient se greffer une culture psychédélique le temps de morceaux au long cours (cf. les dix minutes magistrales d' « Harvest Feast ») qui voient l'auditeur passer par toutes les couleurs suivant le fil d'une démarche volontiers expérimentale (« Diamond », "HTJC"). Un grand disque !

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dimanche 30 décembre 2018

The Buttertones : « Midnight in a moonless dream »



C'est l'histoire d'un petit grain de sable, un invité surprise, un instrument que l'on a assez peu l'habitude d'entendre dans le contexte d'un groupe de rock n'roll, bref, c'est l'histoire d'un saxophone. Certes, des Stooges à Morphine, le rock n'est pas totalement étranger aux souffleurs. Mais en l'espèce, le saxophone propulse à lui seul le groupe dans une autre dimension conférant à l'affaire un charme suranné instantané. Car l'influence de la Californie des années 1950, comme issue d'un décor de film noir, plane sur cet album. Entre fulgurances, rock n'roll, twang surf, punk, un je ne sais quoi évoquant étonnamment la new/cold wave des années 1980 et un feeling barré issu du blues (voire du jazz dans une certaine mesure) l'univers du groupe est plein de surprises, particulièrement riche mais toujours d'une remarquable cohérence. A écouter à fond la caisse dans un roadster dévalant à toute blinde une avenue californienne bordée de palmiers géants longeant l'océan. Ça fait du bien. 

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vendredi 28 décembre 2018

Frenzy Frenzy



La nostalgie est devenue, au fil du temps, une valeur motrice de la scène rock actuelle. En ce qui les concerne, les membres de Frenzy Frenzy ont décidés d'abattre la carte vintage selon leurs propres critères personnels et avec originalité (sans bassiste par exemple). Ici point d'influences garages ou psychés mais plutôt une approche pop et dansante perceptible dans les arrangements de synthés discrets (cf. « Keep it up ») et dans le beat disco de Frédéric, le batteur. Le groupe évolue ainsi, sur le fil, jamais avare de gros son et de guitares rock et saturées (cf. « Diggin Up ») mais avec mesure, sans jamais tomber dans la violence ou la décharge de décibels excessive. Au contraire, le groupe met toute sa fougue au service d'un répertoire pop frais (en dépit des influences assumées et identifiables des années 70 et 80) et accrocheur (« Into it all », « Try and catch you »), qui va comme un gant de velours au chant aussi mélodique que charmant du chanteur Ludovic. Et le tout avec une patte vintage et quelque peu surannée de bon aloi. Charmante découverte. 

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mercredi 26 décembre 2018

Liquid Bear : « Unwind »



Rester traditionnel tout en faisant preuve de modernité telle est la gageure réussie par ce premier EP impressionnant de maturité. En surface, tous les ingrédients sont réunis, orgue, batterie, basse et guitare. Sommes-nous partis pour une énième resucée psychédélique recyclant les influences des années 60 et 70 ? D'évidence non tant l'intention de la bande des quatre est moderne. Passant lesdites influences par le shaker de l'époque, le groupe fait preuve d'une créativité débridée : la musique explose dans tous les coins, les guitares rageuses font la spirale, alors que la section rythmique part dans de brusques et indomptables accélérations, les aiguilles des potards à fond dans le rouge (« Jug O'Jack »). Arrivé à ce point, l'auditeur se dit que la pochette, à mi-chemin entre la vague et la tornade, représentant un déchaînement d'éléments naturels (le visuel peut également être regardé la tête en bas) est particulièrement évocateur en l'espèce, tant l'auditeur est tourneboulé par l'expérience d'écoute. A l'inverse de nombreux groupes, Liquid Bear assume sans fard l'influence progressive de sa musique, jouant sur la longueur (le climax étant atteint sur le dernier titre « Harry & Bart ») et c'est là où réside le piège. Multipliant les fausses trappes et autres détours surprenants, les compositions labyrinthiques trimballent l'auditeur par tous les états possibles et imaginables. La voix reste impassible alors que, derrière, les éléments se déchaînent, quelque part entre King Crimson (pour la saturation des guitares aventureuses et bruitistes) et Birth of Joy (pour la production  et la dynamique contemporaine). On en ressort mi-groggy mi-KO. Vous voilà prévenus, ces quatre là sont dangereux ! 

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mardi 25 décembre 2018

Miles Oliver : « Color Me »



Comme son nom ne l'indique pas, Miles Oliver est parisien et, avant de franchir le Rubicon en solo, sa carrière a connu maintes incarnations. Une somme que l'on retrouve dans ce nouvel album. Car si le disque débute avec les arpèges acoustiques délicat du morceau titre, rapidement, l'album envahit de nouveaux champs dominés par la saturation shoegaze (« Saturdaze », « Cheat Happens ») ou la pop atmosphérique (« Synth Marie »). Ainsi ce nouvel effort est plus la somme de différentes incarnations de la même ambiance, ou d'un état d'esprit identique, que l'affaire d'un genre clairement identifié. Le tout tient pourtant la route, l'énergie, la tension sous-jacente, voire la noirceur de l'ensemble restant la même que la guitare soit branchée ou non. Les conditions d'enregistrement, lo fi, électrique ou acoustique, et la voix y sont évidemment pour beaucoup. Ainsi le disque correspond plus à la captation d'un moment de calme, (« Spaceship », « I wander why ») ou de colère (« Nothing to hide ») quand les décibels montent dans le rouge ("Black Fence"), à l'instar d'un polaroid d'autrefois. Un disque qu'il convient d'apprécier sur le moment et qui exige une forme d'abandon de soi de la part de l'auditeur. Voilà une œuvre par laquelle il faut accepter de se laisser bercer, le seul moyen d’accéder à ses rivages où réside une beauté insoupçonnée, cachée dans les interstices laissés libres par ses déflagrations autant éclectiques qu'électriques (« Synth Marie », "Lay lady lay"). 

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lundi 24 décembre 2018

Elisapie : « The ballad of the runaway girl »



Trois minutes et vingt-cinq secondes. C'est la durée d' « Arnaq » le titre qui ouvre ce troisième album, mais le premier à être distribué de ce côté-ci de l'Atlantique, de la chanteuse inuit Elisapie Isaac. Trois minutes et vingt-cinq secondes d'un blues aride, d'un garage rock fiévreux et, déjà, la chanteuse est prise en flagrant délit d'excellence. Trois minutes divines, certes, mais trompeuses. Car, ailleurs, sur la majorité des titres à vrai dire, l'album développe des climats acoustiques rêveurs et délicats, inspirés par les paysages de neige à perte de vue de son grand nord canadien natal (« Wolves don't play by the rules »). En ce sens, l'album est intrinsèquement américain (le continent, pas le pays) c'est à dire ancré dans les idiomes, le blues, le folk (« Ikajunga », « Call of the moose », "The ballad of the runaway girl"), traditionnels du continent. Mais avec une perspective inuit, chanté (trop peu à notre goût) en langue vernaculaire (« Una »), passé au tamis de la dream pop (cf. « Don't make me blue »), oscillant entre luminosité et noir profond (« Rodeo ») à l'image de sa région natale, froide, aride et dure à vivre au quotidien. Enfin, placée en clôture, la magnifique et bouleversante « Darkness bring the light », incarne le tour de force du disque, son morceau le plus long (six minutes et treize secondes) et son climax émotionnel dont on ne ressort pas indemne. Un voyage sublime. 

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dimanche 23 décembre 2018

Natalia Doco : « El Buen Gualicho »



Des années de galères au Mexique ou dans son Argentine natale, il aura fallu en surmonter des obstacles pour Natalia Doco avant d'arriver à cet album alors que la belle chanteuse ne parlait pas un mot de français. Mais plusieurs anges gardiens se son penchés sur le destin de l'artiste, « El buen gualicho », l'incantation bienfaisante comme l'indique le titre. C'est tout d'abord le regretté Rémy Kolpa Kopoul, animateur sur Radio Nova et infatigable passeur de la world music dans l'hexagone qui a assuré la mise en contact avec Axel Krygier, le producteur de l'album. Quelques auteurs français, Belle du Berry (Paris Combo), le duo Yepa ou Flo Delavega sont ensuite venu donner un coup de main sur les textes en français. Le reste tient de l'alchimie miraculeuse. A mi-chemin entre deux continents, chanté dans la langue de Molière ou celle de Cervantès, l'album est fidèle à la musique de sa terre natale et de ses ancêtres, mais Natalia en donne une vision fraîche, où les clichés embarrassants ont été remplacés par des influences folk et pop. L'ensemble dépeint un univers à l'acoustique généreuse et ensoleillée, exotique (enfin vu d'ici) ou plane un air mystico-chamanique, hippie, un soupçon jazz, un soupçon baroque qui sied particulièrement bien à sa voix charmeuse. Il ne reste plus à l'auditeur qu'à se laisser bercer, écouter les yeux fermés pour voyager loin en restant immobile. 

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samedi 22 décembre 2018

Guillaume Perret, La Maroquinerie, 20 décembre 2018.


Un concert de jazz à la Maroquinerie ? Voilà une idée surprenante, dans cette salle habituellement dédiée au rock rock’n’roll, à la soul ou au blues, mais pas tant que cela finalement tant Guillaume Perret, saxophoniste de son état, n'a de cesse depuis des années de sortir le jazz de sa chapelle tout en lui restant fidèle d'une manière détournée et oblique. On l'a, par le passé, senti influencé par le metal au point d'aborder son instrument tel un guitariste armé d'une ribambelle de pédales d'effets. Ce nouveau projet, dans la foulée de la BO du documentaire « 16 levers de soleil », consacré à l'aventure du spationaute Thomas Pesquet, se veut plus sous influence électronique. Ainsi, la musique de Perret se drape d'atours tantôt funky (c'était d'une certaine manière attendu) tantôt planants et progressifs. Une dichotomie se fait ainsi jour dans le groupe de Guillaume, d'un côté la section rythmique qui part à toute berzingue (le batteur en particulier) de l'autre les nappes atmosphériques de claviers, qui, dans la lumière bleutée enveloppant la salle d'une atmosphère onirique évoquant l'espace, parfaitement raccord avec le film, font décoller le spectateur. A d'autres moments le doigté magistral du clavier évoque le jazz-funk des années 1980 sans pour autant tomber dans le cliché (une gageure). Lorsque la créativité a les moyens techniques de ses ambitions, lorsque cette dernière est utilisée avec intelligence comme ce fut le cas ce soir, alors, la musique en ressort grandie et le spectateur heureux de sa soirée. 






mercredi 19 décembre 2018

Vera Sola : « Shades »



La pochette, d'un splendide noir et blanc profond, dit finalement beaucoup. On y voit l'artiste poser dans ce qui fut une cuisine, délabrée. Une session urbex, témoignage nostalgique de la fuite du temps évoquée au travers de lieux abandonnés, un sentiment prégnant dans la musique de Vera. Multi-instrumentiste, Vera a enregistré ce premier album seule, une gageure, une performance devant laquelle on ne peut que s'incliner tant le spleen, la mélancolie, qui se dégage de l'ensemble est profonde. Entre ballades et torch song, suivant une trame minimaliste, voire jouée en sourdine (« Circles », « Small minds »), Vera sort l'album idéal pour le chien-loup. Ni triste, ni dépressif mais pas vraiment primesautier non plus. L'évidence mélodique de la chose est rare et accroche immédiatement l'oreille alors que sa voix s'élève au-dessus de la mêlée avec un petit quelque chose gospelisant de Karen Dalton dans le fond de la gorge. Un album simple et délicat, d'une beauté dépouillée, ou les guitares jouées en arpèges, le son chaud des orgues et les basses dont le battement évoquent un cœur, tiennent le haut du pavé tout en laissant un peu de place à l'expérimentation de récupération : des bris de verre, de chaînes, de classeurs à tiroirs, des marteaux, des planches, sont ainsi utilisés par l'artiste pour densifier la musique, tout en composant des rythmes inclassables plongeant l'auditeur dans une abîme d'étrangeté baroque contrastant avec une instrumentation somme toute assez classique. Un album qui évoque les grands espaces poussiéreux à l'heure du crépuscule. Magnifique. 

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mardi 18 décembre 2018

Bodie : « Où va-t-on dormir ce soir ?»



C'est pendant les rencontres d'Astaffort que Emilie Marsh, Cécile Hercule et Joko, toutes trois auteurs, compositrices et interprètes se sont rencontrées. Un nouveau trio, Bodie, est alors né, mais surtout, au-delà, un univers monté de toutes pièces, qui démontre toute l'ambition de la nouvelle formation. Dans leur imaginaire, les trois musiciennes se sont évadées de la geôle californienne de Folsom. L'auditeur est ainsi directement plongé dans une ambiance de film noir (cf. l'électro funk assez irrésistible de « Genre Humain ») et une angoisse lancinante chez nos fugitives : « Où va-t-on dormir ce soir ? » qui donne son titre au disque. Chantant dans la langue de Molière, Bodie mélange habilement pop et chanson le temps de titres touchants (« Où est la lune ? », « Taxi ») voire sexy à l'occasion (« Lentement », notre préférée). Elegant et soigné, l'EP donne surtout envie de prendre la fuite en compagnie du trio. On part quand ? 

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lundi 17 décembre 2018

They Call Me Rico And The Escape : « Sweet Exile »



C'est une petite note sur la pochette à laquelle on prête à peine attention. Une petite note de rien du tout qui pourtant change la donne : The Escape. Soit le nom de la formation qui accompagne Rico que l'on a toujours connu, jusqu'ici, en one man band. Rico n'est donc plus tout seul et sa musique s'en retrouve transformée. L'horizon s'est élargi, et ne se limite plus au blues et au rock. Ce qu'il perd en intensité, car les décibels ont également baissé d'un cran, Rico le gagne en richesse mélodique, en finesse, en sensibilité, en audace en termes d'arrangements (« Love is a vampire »). L'album s'intitule « Sweet Exile » et on ne saurait trouver une meilleure définition. Rico part en exil, à la conquête des grands espaces, à l'image de ses compositions où les influences venues du folk et de la country s'agglutinent, donnant au disque des faux airs de western, comme une B.O tombée dans l'oubli. Déchargé de ses obligations rythmiques, Rico se concentre sur son instrument, et, surtout, le chant. On redécouvre ainsi sa voix qui n'a jamais été aussi soulful et confère à l'ensemble une nouvelle profondeur. Excellent. 

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dimanche 16 décembre 2018

Automatic City, Le Triton, 15 décembre 2018.


Hier soir, sur la magnifique et intime scène du Triton, le magazine Soul Bag fêtait la sortie de son nouveau numéro en compagnie des excellents Automatic City sur scène. Le quartet n'est décidément pas un groupe comme les autres, aussi expérimental que vintage, autant attiré par les sonorités électroniques rétro-futuristes que les guitares biens senties, et un sens du groove unique en son genre. La composition même du groupe trahit cette dichotomie. D'un côté une guitare acoustique et une contrebasse, d'un classicisme classe et absolu s'il en est, de l'autre un theremine (cf. les sonorités électro rétro-futuristes) et un kit de batterie agrémenté de percussions, de bouteilles vides, un triangle et des clochettes en tout genres : « Un merdier sans fin » dixit Zaza le batteur au groove diabolique. Alors que la reprise, totalement réinventée de « Havana Moon » (Chuck Berry) se charge bien de rappeler l'ancrage dans le rock n'roll des années 1950 de la chose, la guitare part dans des embardées saturées dignes d'un combo garage rock. Seul groupe à l'affiche de la soirée, le groupe prend son temps, étire ses morceaux (la formidable relecture de « Spoonful ») expérimente au passage, le batteur s'éclate dans ce contexte, quitte à mettre par terre la moitié de l'installation quand Manu, le guitariste, est emporté par l'excitation du moment. On a des fourmis dans les jambes, Eric, le chanteur, ne tient pas en place non plus, arpente la salle et encourage les applaudissements du public. Il y a quelque chose d'à la fois très classe dans ce groupe, les percussion afro-cubaines qui nous ramènent au années 1950, mais aussi de très sauvage, les mêmes percussions qui nous évoquent un sentiment vaudou proche de la transe, le howl du chanteur. On s'en est pris plein la tête et les oreilles pendant près de deux heures, le temps qu'a duré ce magnifique voyage dans le temps et dans le son… 

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samedi 15 décembre 2018

L'heure de la sortie, un film de Sébastien Marnier



Une salle de classe. Des élèves du prestigieux collège Saint Joseph, sagement alignés, planchent sur un devoir quand, soudain, leur professeur, ruisselant de sueur, ouvre la fenêtre et se défenestre. Quelques jours plus tard, Pierre Hoffman (Laurent Lafitte), professeur remplaçant, débarque dans l'enceinte feutrée de l'institution. Il se retrouve rapidement en butte avec une frange de sa classe, des élèves surdoués. Ces derniers, défiants, hostiles, questionnent l'autorité et la compétence du professeur (« Êtes-vous de gauche ? Êtes-vous sûr d'avoir les compétences nécessaires ? »), affichent un comportement froid, déshumanisé, erratique ; sont adeptes de méthodes survivalistes limites et borderline. Que trame les élèves, quel est leur funeste projet ? Le malaise s'installe… 


Déjà remarqué avec un excellent premier film, « Irréprochable », le réalisateur Sébastien Marnier s'impose avec ce deuxième long métrage comme le cinéaste du grain de sable, cherchant la poussière sous des dehors (trop) sages et normaux, traquant chez ses personnages le moment de bascule, celui où la folie s'installe et gomme tous les repères. Ainsi à l'instar de Constance, le personnage principal d' « Irréprochable » (interprété par Marina Foïs), Pierre sombre ainsi peu à peu dans la paranoïa. Une grande performance de Laurent Laffite, tout en retenue, dans la lignée de celles livrées par le sociétaire de la Comédie Française dans « Elle » (Paul Verhoeven) et dans « K.O. » (Fabrice Gobert). Cet aspect là est un peu moins assumé que dans le premier film, ce qui tend à rendre la chose encore plus flippante. Le réalisateur fait ainsi preuve d'un véritable talent pour instiller un climat d'angoisse latent dans une ambiance estivale, ciel d'un bleu céruléen et soleil au zénith, et instaurer un sentiment d'angoisse chez le spectateur. Le tout parfaitement souligné par la musique de Zombie Zombie (déjà compositeurs de la partition du premier long du réalisateur) qui, par de subtiles virgules de synthés analogiques vintage, accentue le sentiment, le rendant encore plus prégnant. Moins marqué par la techno, la transe rythmique et le free jazz, que les derniers efforts du trio, l'apport du groupe au film est aussi discret, mais toujours à bon escient, qu'indéniable. Zombie Zombie n'a ainsi jamais aussi proche du modèle John Carpenter. Enfin, dans une volonté d'inscrire ses personnages dans un contexte plus général, jugé déliquescent, le réalisateur souligne son propos par l'utilisation de nombreuses images d'archives, parfois filmées au téléphone portable, de désastres écologiques, du 11 septembre ou d'animaux dans un abattoir. Autant d'images chocs, qui n'ont que peu à voir avec l'intrigue, et qui ont plus tendance à polluer le propos qu'à le mettre en exergue. Une tentative maladroite de décrire un monde au bord de la dystopie qui se prolonge jusqu'au final un peu décevant, pas vraiment à la hauteur des promesses suscitées. Un excellent film néanmoins de la part d'un réalisateur talentueux mais que l'on sent bridé dans ses aspirations, n'assumant pas totalement l'aspect « genre » de son métrage. Un film qui par ses maladresses illustre bien la difficulté de faire vivre le cinéma de genre dans L’Hexagone. 

Sortie au cinéma le 9 janvier 2019.
Sortie de la BO le 11 janvier 2019.

mardi 11 décembre 2018

Guillaume Perret : « 16 levers de soleil »



Pour Guillaume Perret, la musique n'a pas de genre, et, si son instrument de prédilection, le saxophone, le confine dans un style bien particulier, le jazz, il est hors de question pour le musicien de se cantonner à ce seul registre. Ainsi, depuis longtemps, Guillaume expérimente avec son instrument, l'électrifie, l’agrémente de pédales, dans le seul but de sortir des sentiers battus ; mariant le jazz, qui reste tout de même sa base (cf. « Fioul »), à des styles plus extrêmes allant du rap au métal. Ce nouvel effort voit le saxophoniste franchir une nouvelle étape puisque ce nouveau disque est la bande originale du documentaire « 16 levers de soleil » consacré à l'épopée du spationaute Thomas Pesquet (lui-même saxophoniste). La musique de Perret prend ainsi une nouvelle ampleur, jamais aussi proche de l'expérience, du voyage sensoriel (cf. « Peace »). De nombreux sons issus de la navette spatiale, des communication radio mais aussi, plus étonnant, du chant des planètes, ces fréquences émises les astres. Une dimension expérimentale qui confère à l'album son originalité mais aussi sa variété d'ambiances et de climats, tantôt funky, planant ou éthéré, voire franchement sombre et angoissant (« Lost in Space », « Alea Jacta Est »). 

En concert le 20/12 à Paris (La Maroquinerie)
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lundi 10 décembre 2018

Gizmo Varillas : « Dreaming of Better Days »



Derrière le titre utopique et enthousiaste, « Dreaming of Better Days », se cache peut-être bien l'album dont tout le monde a besoin en ce moment, aussi optimiste et coloré de sa pochette. Espagnol de naissance, mais installé en Angleterre, Gizmo Varillas, pratique une pop aussi cosmopolite que son parcours. La base reste teintée de psychédélisme, un genre qui lui va bien au teint et à son grain de voix fluet, reste assez proche des fondamentaux pour ce qui est de la répétition hypnotique (cf. « Feeling Alright », « The truth will be heard », la formidable « fever, fever » la véritable petite bombe de ce deuxième effort). Mais au moment d'arranger et d'orchestrer la chose, Guillermo (Gizmo) embarque l'auditeur dans un tour du monde sonore faisant appel à des percussions cubaines, africaines et autres bâton de pluie et flûtes péruviennes. Un catalogue proprement hallucinant évitant habilement l'écueil du cliché world grâce à une écriture pop solide et, probablement, une grande culture musicale. Un album ouvert sur le monde où les langues (car Gizmo chante aussi un peu dans sa langue natale) et les influences sont à l'unisson d'un ensemble cohérent et parfaitement organisé. Dans ce contexte plus que trouble qui est le nôtre, un tel optimisme est une merveilleuse nouvelle ! 

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dimanche 9 décembre 2018

Ed Motta : « Criterion of the senses »



Le Brésilien Ed Motta est un personnage passionnant. Musicien (évidemment) et producteur, ce dernier est également un digger fou (« J'ai plus de 30 000 Lps dans ma collection » clame-t-il) et, plus étonnant, critique gastronomique et œnologique. En résumé, un hédoniste, amoureux fou de la vie et de ses plaisirs, un feeling prégnant dans sa musique. Son dernier album en date s'intitule « Criterion of the senses » et c'est une perle. Une petite merveille, comme rescapée des 1970s, mélangeant subtilement jazz fusion, rock soft et soul langoureuse. Le cocktail ne vous rappelle rien ? Steely Dan, bien sûr, dont ce nouvel effort pourrait bien être la pièce manquante dans la discographie de l'illustre duo. Produit avec un soin maniaque, joué avec une précision millimétrée par une impressionnante brochette de compatriotes virtuoses, l'album dégage un groove sensuel ravageur, intemporel et donne l'envie folle de siroter des martinis sur une terrasse avec vue dégagée : couché de soleil sur la plage. Cela fait un bien fou ! 

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mercredi 5 décembre 2018

Fidji : « Let the good times roll »



Comme souvent, les influences du passé sont assez facilement identifiables et se situent, dans le cas présent à partir des années 1980. Pour autant il n'est ici nullement question ici de nostalgie, ni de recréation à l'identique mais de la recherche d'une harmonie entre une dynamique moderne et une évocation du passé. Spécialiste du grand écart Fidji, fait ainsi le lien. Un aspect que l'on retrouve dans les compositions du groupe subtil alliage entre puissance rock des guitares, compositions et chant pop, beat disco et riff dansant, dans la lignée du funk 80s, on pense au Bloc Party des débuts. Il se dégage un sentiment d'espace et de grand large de ces cinq titres. Ainsi, comme l'indique le titre, le premier EP de ces nouveaux impétrants nous invite à passer du bon temps. En l'espèce, c'est assez réussi.

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mardi 4 décembre 2018

Delgres + Des Lions Pour Des Lions, Le Café de la Danse, 03/12/2018.


Le plateau, cohérent dans ses couleurs incantatoires teintées de vaudou, réunis en ce lundi soir sur la scène du Café de la Danse est magnifique. 

On commence avec Des Lions Pour Des Lions, formation venue d'Angers au mitan du marching band, de la fanfare louisianaise et du groupe de rock. Bâtie autour d'un squelette rythmique, fait d'une unique et énorme grosse caisse, de clochettes portées aux chevilles par le percussionniste aux pieds nus et de deux cymbales la musique du quatuor alterne entre blues et rock (la guitare typée 50s) et un aspect répétitif, hypnotique et funky en diable (les deux vents, trombones et/ou saxophone). Pour qui connaît l'album, la prestation du soir, 20 minutes, est forcément frustrante car, n'en doutons pas, ce groupe peut emmener l'auditeur très très loin dans la transe. Le set se termine là où on pressent que les choses commencent vraiment, un goût de trop peu forcément frustrant. 

Pour Delgres, le passage au statut de tête d'affiche a changé la donne. Et si les choses sérieuses ne faisaient que commencer pour le trio ? Le changement est perceptible dans la disposition même de la scène, son décor, le portrait du Colonel Louis Delgrès affiché dans le fond de la scène, le groupe joue entouré d'ampoules à filament fixées à des bouts, une ambiance marine rappelant les navires négriers. Le trio profite à plein du temps qui lui est offert, expérimentant davantage avec son matériau, chaque musicien à le droit à son solo, l'investissement physique des musiciens, ruisselant de sueur, est maximal. A la batterie, puissante de Baptiste, s'ajoute une boîte à rythme discrète mais utilisée à bon escient, solidifiant la structure rythmique, et par conséquent le groove, du groupe, un aspect fondamentale de leur musique entre blues et Caraïbes. En lieu et place de la basse on retrouve Rafgee et son soubassophone, un cuivre énorme teintant la musique d'un peu de jazz mais surtout faisant le lien avec le funk de la Nouvelle-Orléans et des marching bands. Le jeu de guitare de Pascal se résume en deux aspects : un jeu aux doigts, sans médiator, précis, délicat et d'une grande finesse. Et, deuxième angle, un bottelneck pour le blues. Enfin, la semi-reprise, à leur sauce, du « Whole Lotta Love » de Led Zeppelin, se charge bien de recadrer les racines rock de la chose. Mais la musique de Delgres est d'une telle ferveur communicative, il suffit de voir le public se trémousser, chanter en cœur et frapper des mains, qu'elle ne peut se résumer à ces quelques aspects techniques. Festif mais lourd de sens (« Mo Jodi », « Mr President » aux paroles réactualisées par rapport aux événements récents) le blues de Delgres, aux vertus de résistances et de combat, fait travailler le corps et les esprits. Les émotions sont telles, qu'elles transcendent la barrière de la langue (ah oui on a oublié de le préciser mais la chose est chantée en créole), « Sere mwen pli fo » (Serre-moi plus fort) et « Pardone mwen » (pardonne-moi) dégagent une émotion palpable qui prend au cœur évoquant avec des mots simples et une grande délicatesse les épreuves de la vie, le deuil, la difficulté de se dire au-revoir, adieu, ou de demander pardon. Le concert s'achève par un rappel acoustique (Baptiste au ukulélé, une nouveauté) et une seconde version, squelettique et près de l'os (preuve de leur registre étendu) de « Mr President ». Un concert de Delgres est toujours émotionnellement très fort. Emouvant. 

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dimanche 2 décembre 2018

Johnny Mafia + Black Boys On Moped + Blue Orchid, La Maroquinerie, 30/11/2018


Riche programme à la Maroquinerie en ce vendredi soir. On commence par le, tout jeune, duo Blue Orchid en première partie, dans un registre rock'n'roll garage accrocheur pas foncièrement original, certes, mais plein d'enthousiasme. Le public accroche et la méconnaissance du répertoire n'empêche nullement de le manifester bruyamment. Visiblement c'est chaud ce soir et ça commence fort. 

On franchit encore un cran supplémentaire avec le duo rennais des Black Boys On Moped, dans un genre encore plus brutal où le son est traité comme une masse oppressante entre vocaux déchirés, marqués par le punk, guitare agressive et un martellement inconsidéré de la batterie. Ce dernier point est encore aggravé lorsqu'un second batteur se joint aux agapes, les deux musiciens sur le même instrument offrant une spectaculaire chanson de gestes dans un vacarme assourdissant. Le set s'achève dans la confusion la plus totale, le kit démonté le batteur tentant de crever la peau du tome basse à grands coups de baguettes, en vain. Rock'n'roll quoi. 

Deux mots, plus vite, plus fort. Encore plus vite et encore plus fort. Dans un premier temps, on est électrisé, physiquement, par la basse, et on réalise alors que les deux groupes précédents avaient décidés de se passer des quatre cordes. Puis les quatre jeunots goofy faces de Johnny Mafia attaquent, brutalement, leur set dans une Maroquinerie pleine comme un œuf. On constate alors que la bande a définitivement passé un cap, le groupe est à la fois compact et soudé comme jamais, les progrès sont spectaculaires. Alors que l'on pensait jusqu'ici que Johnny Mafia était un groupe garage, vaguement psychédélique, le concert nous fait revoir notre jugement. Le rendu scénique est brutal, agressif. Et s'il reste quelque chose de psyché/surf dans l'écho de la guitare rythmique, tout cela est compensé par une batterie et une deuxième guitare entre punk et grunge. Bref cela secoue sévère et on est content d'être sur la terre ferme et non pas sur une de ces salles posées sur la Seine ! Il n'en faut guère plus pour faire sombrer le public dans le chaos total, pogos dans les premiers rangs, crowd surfing incessant et verres de bières, pas toujours vides, qui volent dans tous les sens ! Ce fût une chaude soirée ! 
Facebook Blue Orchid

samedi 1 décembre 2018

Sarah McCoy, l'Européen, 26 novembre 2018

(c) Cathimini

Après plusieurs années de flottement, et en dépit de prestations lives remarquées, notamment aux Nuits de l'Alligator, la carrière de Sarah McCoy, désormais installée en France, s'apprête à prendre un nouvel élan avec la sortie de son premier album l'année prochaine. En attendant cet excitant événement, Sarah a présenté ce nouveau répertoire, seule au piano, sur la scène de l'Européen lundi dernier. Alors que le noir se fait dans la salle, l'artiste se présente entourée de faibles lumières émanant d'ampoules à filament, comme autant d'étoiles brillantes dans la nuit. Une présence fantomatique que l'on remarque à son maquillage vif-argent, fait de paillettes scintillantes dans la pénombre. Et pourtant quasiment invisible dans le noir, la présence de la chanteuse est forte, son rire est sonore, son français presque parfait. Et la lumière se fait. En dépit de moyens réduits la salle déploie des trésors d'ingéniosité lumineuse pour mettre l'artiste en lumière ou en clair obscur. Une ambiance lumineuse à l'unisson de sa musique alternant le calme, les notes en sourdine, le silence et la tempête, le clavier frappé avec force dans un torrent de notes. La joie et la peine quand l'émotion afflue à fleur de peau en dépit de ses nombreux éclats de rires désabusés. Le jazz baroque, le blues et les torch songs restent le cœur de ses chansons qu'elle interprète d'un timbre puissant où le vécu ruisselle à flots. Grâce à son charisme, sa personnalité Sarah, absolument seule, nous a tenu en haleine pendant près d'une heure et demie. Il est magnifique de pouvoir faire autant voyager l'auditeur avec seulement 88 touches d'ivoire… 

https://fr-fr.facebook.com/SingerSarahMcCoy/
http://sarahmccoymusic.com/

samedi 24 novembre 2018

The Amazing Keystone Big Band : « We love Ella »



D'hommage à Django Reinhardt aux adaptations des œuvres de Camille Saint-Saens (« Le Carnaval Jazz des Animaux ») ou Prokofiev (« Pierre et le Loup et le Jazz »), les dix-sept musiciens de l'Amazing Keystone Big Band se font fort d'explorer le patrimoine du jazz (et du classique aussi) tout en remettant au goût du jour les saveurs incomparables des big bands d'autrefois. Mission réussie au-delà de toutes les espérances avec ce nouveau disque consacré à Ella Fitzgerald (elle-même un pionnière en la matière en compagnie des orchestres de Duke Ellington et Count Basie). Pour mener à bien un tel projet, la présence d'une vocaliste d'exception était la condition sine qua non. Bonne pioche, la chanteuse Celia Kameni endosse le rôle avec charme (« Old Devil Moon », « Born to be blue ») et autorité au point de voler la vedette aux musiciens comme sur le magnifique « Blues in the Night »). Une gageure compte-tenu du niveau affiché derrière les pupitres par les musiciens qui comptent quelques sérieuses pointures dans leurs rangs. Une virtuosité de façade qui n'altère en rien le swing puissant de l'hommage rendu à cette Grande Dame de L'Histoire du jazz. 

En concert à Paris (Salle Pleyel) le 16 mars 2019.
https://www.keystonebigband.com/
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vendredi 23 novembre 2018

Bigger : « Tightrope »



Loin de n'être qu'un projet parallèle dans leurs discographies respectives, les membres de Bigger sont de retour avec un deuxième EP. Si la première écoute désarçonne un peu, c'est justement parce que le groupe a décidé de faire honneur à son patronyme. Non pas, comme on pouvait l'imaginer, en jouant du « gros » son saturé, mais en « grossissant » le son grâce à des arrangements soignés et assez inattendus. Si la saturation est au rendez-vous (la baroque et excellente « Circus ») le groupe a plutôt décidé de la jouer fine ménageant de surprenants tiroirs pop, et autant de changements de direction dans ses compositions. Quelque soit le contexte, le chanteur Kevin Twomey (Monsieur Pink) charme de son timbre de crooner alors que le guitariste Damien Félix (par ailleurs moitié du duo Catfish) dévoile une nouvelle facette de son talent, tout en retenue et au service d'un répertoire délaissant (un peu cf. « Home ») le blues/garage pour la pop britannique délivrant au passage cinq titres aux allures de classiques instantanés (cf. « Who is right ? » ; « Lucky Lucy », « Glimmer and Glamour »). 

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Invigo : « Feel »



Inspiré par les affres du cœur et de ses passions amoureuses, le producteur parisien Invigo, Venceslas Catz pour l'état civil, décline le thème vénusien en trois couleurs et autant de clips : le bleu pour « Blueness », le rose (californien) dans « LAtely », et pour finir le violet de « Feel ». Sur une électro cotonneuse et soignée flirtant avec la pop 80s (la magnifiquement funky « LAtely »), qui convient parfaitement à son timbre de voix mélodique et un tantinet mélancolique, Invigo plonge l'auditeur dans un état second, rêveur et extatique. 
https://www.invigomusic.com/





mercredi 21 novembre 2018

Rise People, Rise ! : « … And Rise People, Rise ! »



C'est une petite note en bas de pochette, une petite phrase de rien du tout, qui aurait dû attirer notre attention : « Ceci est un disque de rock'n'roll : montez le volume ! ». Bon, parfait, l'affaire s'annonce plutôt pas mal. Et au final ? Et bien une pointe de déception. Armés des meilleurs intentions du monde et fournissant de louables efforts, en dépit de compositions solides et pleines de nuances entre douceurs et déflagrations (« Salvation », « Rise Song 3 », les touchantes « The Widow », « Playing your song ») et d'une section rythmique redoutable. Un genre qui demande des moyens de production aux standards élevés. Et c'est précisément là où le bât blesse, le groupe semble se débattre à contre courant entre maladresses vocales, d'un chant nettement plus convaincant en français que dans la langue de Shakespeare, et une production qui peine, hélas, à s'élever. Symptomatique d'un groupe qui n'a pas (du moins pour l'instant) les moyens de ses ambitions. Reste le message positif du groupe et une jolie pochette inspirée d'un tableau de Monet, « La Rue Montorgeuil ». Mais peut-être vont-ils nous mettre une claque sur scène et nous dédire un de ces jours prochains, c'est tout le mal qu'on leur souhaite, et, franchement, dans le fond on n'attend que cela. 

https://risepeoplerise.bandcamp.com/
https://fr-fr.facebook.com/risepeoplerise/

mardi 20 novembre 2018

Shoefiti : « Fill the silence with your desires »



Remplir le silence avec ses désirs, c'est un beau programme auquel nous convie Shoefiti sur ce nouvel EP, assez copieux, de sept titres. Chez Shoefiti l'invite prend la forme d'un rock racé et nerveux, inspiré par la scène indie des années 1990. Mais point de nostalgie chez eux qui ont réussi a transcender l'influence, prégnante, en un résultat frais et contemporain, conforme à notre époque. Le résultat est vertigineux, réussi quelque soit la facette, celle tendre et délicate (« She Undress », « Catcall addiction ») ou le revers, plus dur, prenant la forme d'un tourbillon de guitares addictives (« Victorious »). Mais le plus impressionnant reste le soin porté au rythme, l’enchevêtrement parfait de la basse et de la batterie emporte l'auditeur dans un tourbillon hypnotique sans fin (« Maura1982 »). Soignant le fond (l'écriture) autant que la forme (la production) réussit à rejoindre les deux extrêmes, une pop aussi lumineuse que dissonante dans son expression la plus expérimentale. Une réussite. 

Www.shoefiti.net
www.facebook.com/shoefiti


lundi 19 novembre 2018

Kristina Bazan : « EPHV1 » (Honey and Venom 1)



Son nom évoque une destination lointaine et mystérieuse, une plaine désolée balayée d'un vent glacial, quelque par à l'Est. La pochette aux larmes de sang, quant à elle, fait planer une aura dangereuse sur le disque. Pour le moins intrigante, la chose la chose est intitulée « Honey and Venom », fait plutôt honneur à son nom et résume finalement assez bien toute cette inquiétante affaire. Honey, le miel, comme la pop qui se révèle finalement le cœur véritable de la musique et de son écriture. Venom, le venin, l'enrobage létal qui « enlumine » les arrangements, les nappes de synthés glaciales et angoissantes dignes de la cold wave des années 1980 (« Rush »), le timbre plaintif et dark de la chanteuse qui n'aurait pas dépareillé dans la décennie goth. Même si l'on peut regretter par moment la grandiloquence baroque un peu lourde qui a tendance à plomber les intros, un accent métal mal maîtrisé sur le dernier titre (« The Devil ») et un aspect dance parfois trop marqué, il n'en reste pas moins que ces six plages réservent quelques moments de grâce pure et intime (cf. le piano de « Old soul », « Killer »). 

En concert à Paris (Le Piaf) le 21/11.

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samedi 17 novembre 2018

Dirty Deep : "Tillandsia"



Devenu un power trio, Dirty Deep a décroché la timbale en embauchant le vénérable Jim Jones comme producteur de ce cinquième album. C'est lors de l'excellent festival Les Nuits de l'Alligator que les musiciens ont fait connaissance et c'est tout bénef pour le groupe qui, depuis ses débuts, se fait fort de délocaliser le bayou en Alsace mélangeant les influences blues et garage sur un mode déglingué. Bien qu'Anglais, Jim Jones partage les mêmes obsessions comme le prouvent les expériences rythmiques menées aussi bien avec la Revue qu'avec Righteous Mind et c'est donc sur ce plan que l'influence du producteur se fait le plus sentir. Il se dégage ainsi une sorte de transe voodoo, perceptible dans les patterns de batterie, de ces nouvelles compositions qui, mélangée au guitares cradingues, à l'harmonica inspiré et au chant écorché, la marque de fabrique du trio, fait des merveilles sur ce copieux album de 14 titres joué avec une fougueuse passion. Attention, le résultat est contagieux.
En concert le 03/12 à Paris (La Boule Noire)


mardi 13 novembre 2018

Marlon Williams + Ryan Downey, Le Nouveau Casino, 10 novembre 2018.

Marlon Williams (c) Cathimini


Marlon Williams et Ryan Downey (c) Cathimini

Chouette plateau, très cohérent, de valeurs montantes venues des Antipodes. On commence par l'Australien. Au vu de sa prestation dépouillée il est bien difficile de jauger du potentiel du chanteur : une voix et une guitare (électrique ou folk). Il est certain que tout cela doit prendre une autre ampleur sur disque. On peut néanmoins affirmer qu'il possède une voix, grave et quelque part lourde de sens, magnifique qui a scotché tout le monde en moins de trente secondes. Il se dégage quelque chose intrinsèquement émouvant de ce chanteur. 

(c) Cathimini

On continue dans une veine similaire avec le Neo-Zélandais Marlon Williams que l'on avait quitté sur une magnifique impression aux dernières Eurockéennes de Belfort. Le set commence tranquillement par deux titres en piano solo. D'emblée, pris par la douceur de sa voix, le public est sous le charme. Ce type possède une faculté incroyable, celle d'imposer le silence. L'émotion est forte, on entend les mouches voler entre les notes. Lorsque le reste du groupe arrive, guitare, basse et batterie, tous excellents, la chose prend une autre tournure. Marlon est un crooner, son univers baigne dans les années 1950, le fantôme de Roy Orbison n'est jamais bien loin. Mais pas question cependant de succomber à une quelconque mode vintage car la musique de Marlon est bien d'aujourd'hui, traversée de visions psychédéliques (cf. les arrangements de synthés baroques et bizarres) et de violents éclairs garage lorsque les guitares ferraillent ensemble (cf. "Party Boy"). Mais que cela soit en acoustique (cf. le rappel inédit « a simple blues song » comme il le dit lui-même) ou dans un contexte plus électrifié l'émotion reste palpable dans son chant angélique. Et, pour ne rien gâter, Marlon dégage sur scène un charisme rare, la grande classe même fringué comme un sac et affublé d'un atroce mulet digne du pire des années 1980. Enfin, pour finir, soulignons le magnifique moment d'émotion que fut la reprise de « Jealous Guy » (John Lennon) en duo avec Ryan Downey où les voix des deux chanteurs s'emboîtent à la perfection. Magnifique. 

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lundi 12 novembre 2018

Cash Savage and The Last Drinks : « Good Citizens »



Déjà le nom nous attire, évoquant à la fois le titre d'un vieux western, le bourbon d'après minuit et les comptoirs enfumés à l'heure où les « bons citoyens » sont couchés depuis longtemps. Autant d'images, de flashs, confirmés à l'écoute de ce savoureux mélange entre torch song countrysante (« February ») et de rock garage savamment tourné. Dans son versant le plus sombre, la chanteuse, telle une Nick Cave au féminin, nous entraîne dans les tréfonds de l'âme humaine à grandes lampées de violons stridents et de vocaux écorchés (« Sunday », « Good Citizens »). Mais il y aussi quelque chose intrinsèquement rock rock’n’roll dans la démarche et l'attitude cette Australienne. Le groupe ne joue pas tant sur le volume, les watts et la distorsion sur les guitares, mais sur l'intention, la puissance et l'engagement. Chaque note pèse son poids dans ce paysage, cette plaine désolée se révèle entraînante, addictive, tourne en boucle dans l'oreille de l'auditeur pour mieux le tournebouler (cf. « Sunday », « Collapse »). Dans un contraste saisissant avec sa pochette bariolée, l'album est un sommet de noirceur, un disque éminemment nocturne qui n'a pas fini de tourner sur la platine les soirs de débâcle insomniaque. On adore. 

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dimanche 11 novembre 2018

Whodunit : « Memories from a Sh*t Hole »



En allant chercher le légendaire Jim Diamond, désormais installé dans notre Hexagone, pour lui confier la production de leur nouvel effort, les quatre « frères » de Whodunit ont eu le nez creux. Avec tact et un indéniable savoir-faire, le producteur a su magnifier la musique du groupe. Au départ il était un quatuor garage/punk fort en décibels et c'était déjà magnifique. Loin d'arrondir les angles, ce nouvel effort les redessine. Une ambition musicale revue à la hausse, des influences blues clairement assumées (« Devil Blues », « Waiting ») et un soin particulier porté aux arrangements, de l'harmonica (le blues déglingué « You fuck my wine »), du piano électrique, des claviers autant de petites touches, discrètes mais fondamentales, permettant au groupe de varier sa palette vers des sonorités surf (« Jungle Fever ») ou, plus généralement, psychédéliques (« Because you're mine »). Le groupe aurait pu se prendre en route. Bien au contraire, en maintenant intacte la puissance brute du groupe (« Room 204 »), Diamond a su le faire évoluer sans pour autant le dénaturer (« Redrum »). Il en résulte une petite merveille de garage rock addictive et attachante (« Salvation »). La déclinaison scénique de ce nouveau répertoire promet d'être explosive. 

En concert le 17/11 à Paris (Black Star)
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https://www.reverbnation.com/whodunittheband





samedi 10 novembre 2018

The Jones : « Silver Faces »



On dira pudiquement de The Jones qu'ils ont de la bouteille. Comprendre que ces musiciens ont suffisamment vécu pour avoir connu, en direct, un certain âge d'or du rock'n'roll que l'on datera vers les années 1970. Suffisamment vécu pour s'être pris en pleine poire la déferlante Rolling Stones et Dr Feelgood, deux influences majeures planant au-dessus de ce nouveau disque. Et aujourd'hui assez nostalgiques et (surtout) passionnés pour sortir les guitares de l'étui, monter le son de l'ampli et y aller. Franchement. On ne dira pas de ce nouvel album qu'il va révolutionner le genre. Mais la chose a été concoctée avec tellement de soin (une ligne de basse au groove irrésistible ici, un saxophone élégant là, « Shake ») que tout amateur de bon vieux rock'n'roll ne peut rester insensible au feu intérieur consumant The Jones. Et tant pis si la chose semble un peu passéiste, tant le plaisir est immédiat. Un album fait à l'ancienne, des chansons solides, jouées avec soin et passion, quelques influences venues du blues et, dans une certaine mesure du jazz, pour la note élégante, un groove constant du début à la fin (l'orgue et le piano) et des guitares rudement bien troussées un peu partout et voilà de quoi nous faire la journée. L'Angleterre n'aurait pas fait mieux, merci. 

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vendredi 9 novembre 2018

Rumble un film de Catherine Bainbridge et Alfonso Maiorana.



Tout a commencé avec trois accords. Saturés et terriblement addictifs, trois accords qui ont façonnés l'avenir, rendu envisageables le punk et le métal. Trois accords qui ont scellés le changement d'époque. Derrière la guitare se tient Link Wray, un pionnier du garage/surf, tout de cuir noir vêtu et, d'un coup d'un seul, c’en est fini des chemises à fleurs hippies. Le titre instrumental s'appelle Rumble et donne aujourd'hui son nom à un remarquable documentaire consacrés à l'apport, considérable, des musiciens amérindiens dans les musiques populaires étasuniennes. Car Link Wray était amérindien et, hélas, bien peu de gens s'en souviennent… Quel est le point commun entre Jimi Hendrix, le bluesman Charley Patton, la chanteuse de jazz Mildred Bailey, le batteur de métal Randy Castillo, le remarquable guitariste Jessie Ed Davis, Buffy Sainte-Marie et Robbie Roberston (The Band) ? Tous sont amérindiens, et tous sont portraiturés, ainsi que quelques autres, dans ce film à vocation panoramique. Et il s'agît là peut-être du seul reproche que l'on peut adresser au métrage, ce côté un peu patchwork, sautant du coq à l'âne, d'une époque à l'autre. Un défaut récurrent de ce genre de productions transversales mais un défaut bien maigre au regard du reste. Richement documenté en images d'archives, fort de témoignages émouvants évoquant d'ubuesques destins (Jessie Ed Davis, Randy Castillo), nous découvrons ce film comme on feuillette un livre d'Histoire en redécouvrant des chapitres totalement occultés. Une véritable plongée dans une facette cardinale mais méconnue de la culture populaire. Et pour finir on avoue un petit faible pour le chapitre consacré à la Nouvelle-Orléans (sur ce point précis on peut également conseiller un autre remarquable documentaire « Black Indians » au sujet parallèle, actuellement en salles). Saluons enfin en guise de conclusion la mémoire de John Trudell, interviewé dans le film et, hélas, décédé en 2015, à qui "Rumble" est dédié.

http://www.rumblethemovie.com/accueil

jeudi 8 novembre 2018

Fragments Folk un film de Thomas Lincker



Renz
Le métrage s'ouvre par un plan panoramique sur la plage et l'océan. Par ce qu'elle est le tenant d'une tradition séculaire, qu'elle peut se jouer n'importe où sans amplification, la musique folk a toujours été associée à la nature. Ce que ne manque pas de souligner le documentaire, multipliant les travellings le long des routes, les plans ou vues aériennes sur la forêt et les étangs et les rivières ; faisant régulièrement l'aller-retour entre la France et les Etats-Unis. Une dizaine de musiciens, tous émergeant ou en développement, sont ainsi interviewés et tentent d'expliquer ce lien intime et invisible qui relie l'environnement immédiat et la musique, l'influence de l'un sur l'autre en soulignant l'héritage politique et social du genre depuis que Woody Guthrie et quelques autres en ont posés les bases au siècle dernier. Enfin, et il s'agît peut-être là du trésor de ce film, chaque entrevue est entrecoupée par de magnifiques séquences live où le genre acoustique et dépouillé apparaît dans toute sa splendeur et son intimité. Un ravissement et un film précieux qui ravira tous ceux qui, à l'instar de l'autre de ces lignes, ont toujours envisagé la musique comme un voyage immobile. 

Sortie en VOD et DVD le 10/11/2018

http://fragmentsfolk.com/
https://fr-fr.facebook.com/fragmentsfolk/

FRAGMENTS FOLK - BANDE ANNONCE from Thomas Lincker on Vimeo.

mercredi 7 novembre 2018

Miegeville : « Longue Distance »



De l'art du rebond inattendu, jamais là où on pourrait l'attendre Matthieu Miegeville s'adonne à la fois au punk (PSYKUP, My Own Private Alaska) ou au jazz au sein des Black Painters. C'est donc autant par goût du risque et de la diversité que par nécessité que Matthieu s'est (un peu) éloigné des guitares pour son tout premier projet en solo. Entre la chanson française et l'électro, Matthieu garde en lui la puissance de son chant, tout en la modulant pour rendre justice à ses textes, justes et cryptiques et tout en évocations émouvantes apportant ainsi un vécu tourneboulant l'auditeur. On pensait la connaître par coeur mais la voix est ainsi la grande révélation de ce premier EP solo révélant une nouvelle facette (de plus) inattendue. 

https://twitter.com/milkamiegeville
https://www.facebook.com/miegeville

En concert le 27/11 à Paris (Supersonic)

lundi 5 novembre 2018

Yoann Minkoff et Kris Nolly : « Leaving Home »



Ils sont deux, et si la pochette les présente dos à dos, c'est bien main dans la main que le duo avance. Si le duo guitare/beatbox n'est pas une nouveauté (cf. Heymoonshaker) le présente duo s'impose comme un double en négatif du groupe britannique. Là où les anglais ont une approche électrique et assez dark (parfois proche du dubstep), Yoann et Kris font l'inverse : leur EP est acoustique, aérien et planant. De vrais faux jumeaux. En plus d'une occasion leur musique, entre folk et blues, très roots, évoque l'Afrique. Question de rythme, d'ambiance, de chaloupement. Et les rythmiques, finement exécutées à la bouche, de Kris apportent un soupçon d'étrangeté (comment sort-il ces sons qui évoquent l'électro ?) contrastant avec le jeu, naturaliste, de guitare acoustique. Tout est pourtant parfaitement naturel, organique mais ne sonne pas toujours comme tel, grâce au beatbox, un plus incontestable en matière d'originalité. Le résultat est frais, ensoleillé, enjoué… 

https://www.facebook.com/yoannminkoffmusic/
https://yoannminkoff.bandcamp.com/releases

samedi 3 novembre 2018

Etienne Jaumet : « 8 Regards Obliques »



Le regard oblique du titre est celui que pose le musicien sur son idiome de toujours, le jazz. Influence matrice, qu'Etienne ne se prive jamais de propager dans les compositions de son propre groupe Zombie Zombie. Et une excellente occasion de retrouver son instrument de prédilection, le saxophone. Partant du principe qu'il ne sert à rien de refaire ce qui existe déjà, et très bien par ailleurs, Etienne a basé son disque sur un choix esthétique fort : celui d'un enregistrement quasi-solitaire entre machines, saxophone et boîtes à rythmes obtenant des sonorités électro pas si éloignées de celles de Zombie Zombie. Se privant de batterie, et donc de swing organique, une composante fondamentale du genre, Jaumet prend un risque, celui de s'aliéner une partie du public puriste qui ne manquera pas de pousser des cris d'orfraie à l'écoute du résultat. A tort très certainement tellement le disque intrigue : une toile progressive, expérimentale et électronique, mi-ambiante, mi-anxiogène, pratiquant le grand écart entre angoisse et zénitude (« Ma révélation mystique ») et se révèle même ludique et rigolote à l'occasion (« Theme from a synphony ») développant un groove étrange en maîtrisant à perfection les possibilités offerte par la boîte à rythmes (l'excellente « Nuclear War », l'envoûtante « Shh Peaceful »). Un regard oblique, certes, mais ensorcelant.

En concert le 27/11 à Paris (New Morning)