Alors que l'on débute l'écoute de
l'EP de cette jeune artiste, on plonge de suite dans une ambiance
rêveuse. Pop, électro, douce et cotonneuse, bercé par la voix
tendre de Maïa, le disque n'est pas sans rappeler l'album de Lorde
sorti il y a deux ans. L'ambiance est un peu similaire, sombre mais
pas trop, un peu comme un crépuscule ou un levé de soleil quand la
lumière chasse la noirceur (« The Tide », « The
bed we made »). De cette première livrée de trois titres
(complétée par trois remixes) on retiendra surtout « Bones »,
plus accrocheuse. A suivre...
https://www.facebook.com/maiavidal?vendredi 28 août 2015
jeudi 27 août 2015
Balthazar : « Thin Walls »
En 2012, le quintet Belge Balthazar a
connu un succès immense avec son album précédent « Rats »,
qui l'a mené sur les routes du monde entier. Depuis, la donne a
changée pour le groupe. Fini de se débattre dans les affres de
l'autoproduction, ce nouvel effort a été enregistrée en
Grande-Bretagne, aux studios Yellow Fish en compagnie du producteur
renommé Ben Hillier (Blur, Depeche Mode, Elbow). Ce nouvel album
s'intitule « Thin Walls » (murs minces), une référence
à l'intimité relative des musiciens tournée ; c'est un titre
judicieux et tout trouvé pour un album composé sur la route (une
autre nouveauté). Balthazar c'est avant tout un série d'anomalies
qui misent bout à bout fonctionnent. Un groupe où le violon occupe
part importante des arrangements, faisant au passage de nombreux
clins d'oeil au Velvet Underground circa Venus in Furs, et où le
chant est partagé entre Marteen Devolder et Jinte Deprez. Au final
le disque repose sur un équilibre fragile et délicat, à la fois
sombre et lumineux, tirant un trait d'union entre les années 1960 et
1980. La chose nous réserve quelques bons moments de rock (les
guitares efficaces de « Nightclub », la baroque "I looked for you") et de pop aérienne
(« Wait any longer ») sous influence cold wave. Une belle
réussite, le changement leur va plutôt bien.
En concert le 29 Août (Rock en
Seine)
Zombie Garden Club
Derrière l'alias mystérieux de Zombie
Garden Club, se cache Johnny Douglas, un Canadien exilé à Nashville
(Tennessee). Zombie Garden Club est le vecteur par lequel Johnny
communique son amour du rock n'roll, du garage et des instruments des
années 1960. Et si Johnny n'invente rien, force est de constater que
sa passion est contagieuse. Le premier effort de Zombie Garden Club,
c'est le genre d'album que l'on connaît par cœur tout simplement
parce qu'on prend un plaisir fou à l'écouter. Des guitares bien
grasses entre blues et rock n'roll (« Judgment blues »,
« Evil Baby »), un sens mélodique évident hérité de
la pop 60s (« One step, two steps, three steps gone »)
qui fait de chaque chanson un petit bijou bien troussé (exception faite de "Calling Andromeda" mièvre et hors sujet). Et, enfin, de l'orgue
farfisa pour faire groover la chose (la reprise de « Hey Little
school girl »). Mais derrière ces influences ultra codifiées,
que l'on retrouve avec un plaisir toujours renouvelé, l'univers de
Zombie Garden Club est en fait composé de ramifications larges et
insoupçonnées allant du grunge (« Fuzzface ») au rock
psyché hypnotique (« Ache of love »). Et le groupe nous épate encore un peu plus avec le swing jazzy "Diamond Daze" qui aurait semblé incongru ailleurs mais passe parfaitement bien ici. Bref quarante
années d'histoire du rock n'roll concassées et digérées, avec
efficacité et une touchante passion, par Zombie Garden Club pour le
plus grand plaisir de nos oreilles. Et à la fin un seul amour
subsiste, celui du rock n'roll.
https://twitter.com/zombie_gardenmercredi 26 août 2015
Jaill : « Brain Cream »
Relativement peu connu dans nos
contrées, Jaill est un groupe qui attire spontanément la sympathie.
Il faut dire que leur univers est plutôt séduisant, intrinséquement
californien et fortement ancré dans les années 1960. Contrairement
à nombre de leurs pairs de la scène garage, Jaill ne joue pas
forcément la carte du boucan à tout va. Même si dans le genre le
quatuor se débrouille pas mal, cf. « Just a lovely day »
qui ouvre le bal sur d'excellente bases. Mais bien vite, Jaill prend
la tangeante pour ouvrir en grand la porte psychédélique (« Got
an F », « Slides and slips ») à grandes lampées
de synthés cheap. Ailleurs, le groupe s'imagine en héritiers
ascétiques de la sunshine pop (« Picking my bones »)
tout en réservant une petite place pour une ligne de guitare surf
fuzz (jamais désagréable) ou folk. En réusmé, un album qui ne
révolutionnera pas le genre, certes, mais qui nous permet de
prolonger encore un peu plus l'été d'agréable manière. C'est
toujours ça.
http://www.jailljaill.com/mardi 25 août 2015
Uncle Acid And The Deadbeats : « The Night Creeper »
Groupe culte dans leur Angleterre
natale (relire la folle aventure de leurs deux premiers albums par ici), l'oncle acide est de retour avec un, déjà, quatrième effort.
Peu à peu l'univers du groupe s'affine pour s'affranchir de Black
Sabbath, la figure tutélaire dont ils ont assuré la première
partie à Bercy en décembre 2013. L'évolution se fait en douceur.
L'amateur d'ambiance noire et interlope sera servi, le groupe évolue
toujours en eaux troubles et malsaines. Les tempos sont lourds et
obsédants, il y a toujours quelque chose de foncièrement hypnotique
chez eux (cf. « Pusher man ») comme une sorte de
psychédélisme sombre et inquiétant qui se développe à grands
riffs de guitares saturées. Au fil des titres, Uncle Acid s'impose
comme la face sombre des Beatles. L'affirmation peut surprende tant
il est vrai que, par le passé, on a catalogué, un peu vite, le
groupe de revivalistes post Black Sabbath. Sur ce nouvel effort,
Uncle Acid ne cache plus son appétance pour les mélodies et la pop
sixties (cf. « Yellow moon », « Downtown »,
« The Night Creeper »). Autant d'influences digérées
par le groupe pour un rendu original et excitant : de jolies
mélodies jouées sur un mode puissant et métallique, cf. la bien
nommée « Melody Lane », quel pied ! A
(re)découvrir.
Sortie le 4 septembre 2015.
En tournée française en octobre (La
flèche d'or, Paris, le 14 octobre)
http://acidcoven.com/
https://www.facebook.com/uncleacid
lundi 24 août 2015
Quarter Street
La pochette, magnifique, laisse planer
l'imagination tout en affichant de manière limpide les intentions du
groupe : l'authenticité avant tout. Quarter Street œuvre dans
un style que l'on évoque peu sur cette page : la salsa. Chers
lecteurs, attention, prenez garde, c'est chaud ! En effet, le
groupe ne s'égare guère en route. Pas de dérive jazzy, pas de
lissage pop destiné à rendre la chose séduisante aux oreilles des
touristes musicaux. Non, Quarter Street joue dur, salsa dura. Les
percussions sont folles (« Los golpes enseñan »),
la contrebasse vrombit tel un moteur surgonflé, les cuivres
explosent et le piano vient pimenter le tout. Bien plus que La
Havane, la formation australienne évoque le New York des faubourgs.
La musique dégage la rage et la rudesse des rues du barrio dans les
années 1970. Ce retour aux racines 70s de la musique n'est pas sans
évoquer le travail des labels de Brooklyn en matière de soul music
(Truth and Soul, Daptone) dont Quarter Street pourrait bien être le
pendant latin. Une curiosité exotique.
Quarterstreet.com
hopestreetrecordings.com/quarter-streetdimanche 23 août 2015
Cécile McLorin Salvant : « For one to love »
Le disque commence par un bourdonnement
puis une voix s'élève, prend de la hauteur, l'émotion nous
submerge. Le doute n'est plus permis, Cécile McLorin Salvant,
américaine de passeport mais de culture francophone (cf. « Le
mal de vivre » reprise de Barbara), est une formidable
chanteuse et « For one to love » est son troisième
album. Dans un monde parfait ce disque sera celui de la consécration
pour cette jeune chanteuse de 25 ans. C'est un petit comité, en
compagnie d'un pianiste et d'une section rythmique (batterie,
contrebasse) qu'a été enregistré ce disque. L'acoustique est douce
et chatoyante, la tonalité générale évoque une ambiance nocturne
et intime. Ce genre d'ambiance que l'on côtoie souvent mais avec un
plaisir toujours renouvelé. Et puis il y a la voix de Cécile.
Aérienne (« Left over »), douce et séductrice (« Wives
and lovers ») mais aussi d'une puissance émotionnelle
insoupçonnée (« Fog »). Une large palette d'émotions à
laquelle s'accroche le trio de musiciens qui swingue en accrobates du
rythme, toujours sur le fil : « The trolley song »
toute en relances ; « Something's coming » un tour
de force dépassant les dix minutes ou le magnifique blues « What's
the matter now ?». Un fort bel album qui va adoucir notre
rentrée...
Sortie le 8 septembre.
En concert le 5 septembre à Paris
(Jazz à la Villette)
samedi 22 août 2015
Timo Lassy : « Love Bullet »
Le jazz est une musique universelle et,
en provenance directe du nord de la Finlande, le saxophoniste Timo
Lassy nous en apporte une magnifique preuve. Car, à l'écoute, rien
ne traduit l'origine nordique de la musique. Bien au contraire. La
touche « play » enfoncée, le disque nous transporte
littéralement. Les images se succèdent. Une rue à la nuit tombée,
éclairée à la lumière des lampadaires, qui se reflètent dans des
flaques d'eau. Un club en sous-sol auquel on accède par un escalier.
Des murs en brique rouge. De la fumée et de l'alcool sur les tables
basses. Vous l'aurez compris, le disque est d'un classicisme absolu,
le digne héritier des grands classiques des années 1960. Derrière
ses atours un peu mystérieux, et sa pointe de mélancolie vénéneuse,
« Love Bullet » réussit un petit tour de force :
fondre dans sa base hard bop, une pointe de soul (cf. « Green
pepper strut ») au détour d'un solo de piano électrique à se
damner (« Hip or not »). Sur le morceau titre l'ambiance
se fait langoureuse à souhait, la bande son des amours naissantes.
Le tout est saupoudré d'influences latines aussi discrètes que
séduisantes (« We jazz theme ») et d'orgues dont la
chaleur irradie à travers les enceintes. D'une grande variété
d'ambiances, le disque peut aussi bien s'écouter seul le soir
confortablement installé dans son fauteuil (« Stay Close »)
que dans la décapotable en longeant la côte (« Fast Fabio »).
Un véritable petit bijou. Remarquable.
vendredi 21 août 2015
Christopher Paul Stelling : « Labor against waste »
L'américain Christopher Paul Stelling
fait partie de cette caste de musiciens folk qui s'inscrivent dans
une longue tradition entamée naguère par Woody Guthrie. Ces
musiciens de la vieille école qui écument les routes, avalent la
poussière et qui, soir après soir, remettent l'ouvrage sur le
métier. Tout est dit dans le titre : le travail plutôt que le
gâchis. Ancrée dans le réel, la musique de Stelling est rustique
et âpre. Les amateurs d'arpèges délicats passeront leur chemin.
Chez Stelling, le folk se fait rude, rêche. Parsemé d'influences
country et blues, Stelling applique au folk au traitement radical et
attaque ses cordes comme si il avait un mur du son à disposition
(« Horse », "Death of influence"). Il y a du punk en lui, ce qui va
particulièrement bien à sa voix grave et profonde, un timbre qui
respire le vécu à chaque vers. L'écoute de l'album se révèle
ainsi particulièrement intense. Et pourtant, parfois, lorsque
Christopher se calme, on trouve un peu de douceur dans sa musique
(« Castle »,"Dear Beast") ce qui finit de nous charmer. Un univers
singulier et un artiste à suivre.
jeudi 20 août 2015
Interview avec Forever Pavot.
Eurockéennes de Belfort. Il fait une
chaleur étouffante en ce début juillet alors que la canicule bat
son plein pendant le festival. Confortablement installé (comprendre
à l'ombre) au bord du lac, on est heureux de retrouver Emile Sornin,
leader de Forever Pavot, qui a illuminé, un peu auparavant, la
magnifique scène de la plage de sa pop psychédélique millésimée.
Il est vrai que « Rhapsode », le premier album du groupe,
avait été un de nos coups de cœur de l'année dernière.
Rencontre...
Alors, la plage c'est un endroit
magnifique pour jouer, non ?
Emile Sornin : Ah oui ! C'est
chouette même si on n'est pas face au lac. Mais c'est assez marrant
d'être au-dessus de l'eau. C'est assez étrange comme sensation.
Forever Pavot est-il un projet
nostalgique ?
Emile : Oui forcément. On fait
souvent référence à une certaine époque que je n'ai pas connu
personnellement mais que j'adore voir à travers les films et les BO.
Et puis j'utilise aussi beaucoup de vieux instruments. C'est de la
musique nostalgique.
Tu es passé de la création en groupe
avec Arun Tazieff à Forever Pavot qui est un projet nettement plus
personnel. Comment tu décrirais ces deux expériences ?
Emile : C'est complètement
différent. Avec Arun Tazieff on faisait beaucoup de jams. On se
retrouvait tous ensemble pour répéter et on improvisait beaucoup
d'après des riffs qui était trouvés par deux ou trois personnes.
On restait des heures et des heures en studio. On enregistrait le
tout avec un petit micro et après on réécoutait chez nous. On se
parlait beaucoup et on structurait les morceaux ensuite. Forever
Pavot c'est moi seul qui compose et enregistre dans ma chambre. C'est
beaucoup plus personnel.
On parle souvent de l'influence de la
musique de film chez Forever Pavot. Quel film aurait pu être une
chanson comme « Le passeur d'armes » ?
Emile : Un peu comme un Claude
Sautet je pense. « Max et les ferrailleurs ». Ou un film
d'espionnage (sourire).
Il y a un travail un peu particulier
concernant les voix et tu chantes souvent de manière un peu
fantomatique. Sur « Rhapsode » par exemple la voix est
traitée comme un instrument à part entière. Comment tu envisages
le chant ?
Emile : C'est quelque chose que
j'assume de plus en plus. Au début j'utilisais la voix comme un
instrument. J'avais même un peu de mal à m'écouter. Comme beaucoup
de gens je pense. On est jamais trop confiant. Cela a pris un peu de
temps. L'album a été enregistré sur deux ans. Il y a eu une
évolution. Les voix étaient fantomatiques au début et elles sont
mieux mises en avant sur la fin comme sur « Joe & Rose »
ou « Les cigognes nénuphars » qui est en français et ça
aussi c'était nouveau. J'ai plus envie de raconter des histoires
maintenant. Avant j'envisageais la voix d'un point de vue mélodique.
Comme si j'utilisais un autre synthé ou une guitare en plus.
Il y a un peu de français et beaucoup
d'anglais sur le disque. Comment tu juges la qualité musicale de
chaque langue ?
Emile : C'est complètement
différent. Je viens du métal et du punk hardcore. Le chant en
français était assez rare et je détestait ça. Avec le temps, j'ai
découvert beaucoup de pop, de variété et de chansons françaises
des années 1960/1970 qui me parle énormément. Gainsbourg, Brigitte
Fontaine, Dick Annegarn, Bashung... Je n'écoutais pas ça étant
jeune, c'est une découverte qui date de ces dix dernières années.
J'ai beaucoup écouté de musique anglo-saxonne, même du rap, je ne
comprenais rien à ce qui se disait mais cela ne me dérangeait pas
du tout. J'y repensais quand j'ai commencé à chanter, en pensant
que moi aussi je pouvais utiliser l'anglais comme un dialecte un peu
fantôme. C'est très différent mais j'adore les deux.
Un petit mot sur la pochette qui est un
peu naïve...
Emile : C'est Catherine Hershey,
une bonne amie à moi, qui chante également sur l'album qui en est
l'auteur. Elle a été faite aux crayons de couleurs. Ça me faisait
penser à des illustrations de vieux contes. J'aime beaucoup. Je
voyais très bien sa patte pour ma pochette.
Avant l'album il y a plusieurs 45
tours. Que pense de ce retour à la mode du vinyle ?
Emile : C'est plutôt cool, moi je
suis un passionné du vinyle. Maintenant je ne suis pas sur qu'il y
ait une telle effervescence autour du support. Finalement ça ne se
vendait pas tant que ça. Ça reste et cela restera toujours une
niche. Ce qui se vendra le plus c'est le numérique.
Forever Pavot est passé par différents
labels. Tu penses qu'il se passe un truc spécial en ce moment ?
Emile : Ces dernières années
sont apparus de supers labels indés que j'aime beaucoup. C'est
chouette.
Tu te sens à l'aise sur le label Born
Bad ? C'est une esthétique particulière qui va bien à Forever
Pavot...
Emile : JB (Guillot, le patron du
label Born Bad, ndlr) a toujours été fasciné par les trucs un peu
bizarres, les BO de François de Roubaix, Francis Bebey, la musique
française un peu dégénérée des années 60/70. J'ai découvert
des trucs géniaux par le biais de Born Bad. « Le mariage
collectif » (un film érotico-hippie danois de 1969, ndlr), par
exemple, cette BO (signée Jean-Pierre Mirouze, ndlr) est mortelle,
elle a été retrouvée dans des poubelles ! C'est des choses
qui m'ont beaucoup influencées. J'y suis parfaitement à l'aise sur
ce label ! On partage beaucoup d'influences communes.
Et pour finir, de quel groupe tu aurais
aimé faire partie ?
Emile : Aquaserge (rires) !
Propos recueillis le 5 juillet 2015 à
Belfort.
En concert à Paris le 29 Août (Rock en Seine)
Jeff The Brotherhood : « Wasted on the dream »
Attention, groupe dangeureux ! A
force de tirer la corde dans tous les sens, Jeff the brotherhood,
formation hautement sympathique par ailleurs, nous désarçonne. Pas
évident en effet de trouver une ligne directrice dans ce nouvel
album. Enfin si il y en a une, la guitare. Pour le reste... Est-ce du
garage rock, de la power pop ou du metal ? Rien de tout cela et
tout en même temps. L'attaque est toujours là, intacte, pas de
doute, le duo de Nashville sait toujours envoyer les watts. Le
problème viendrait plutôt de ce qu'il y autour, des soli de
guitares comme on en avait plus entendu depuis les années 1980
(« Mystified Minds »), la tonalité assez kitsch de l'ensemble (« In my mouth ») ou la flûte (oui vous avez bien lu, de la flûte) de Ian
Anderson (Jethro Tull) sur « Black Cherry Pie » qui
arrive comme un cheveu sur la soupe. Bref, tout un tas d'artifices
masquant un manque d'inspiration flagrant et une écriture plutôt
flaibarde (« Karaoke TN », « In my dreams », "Coat Check Girl" sous influence Weezer mal dégrossie). Un album sympathique
néanmoins, trois ou quatre titres se chargeant de relever le niveau
et se détachant du lot. On s'attendait à mieux.
mercredi 19 août 2015
Refused : « Freedom »
Héros (terme probablement honni par le
groupe) punk hardcore des années 1990, les Suédois de Refused
mettent cette année un terme à un silence discographique entamé en
1998 avec la sortie de ce nouvel effort intitulé « Freedom ».
On le sentait un peu venir à vrai dire. Porté disparu, le groupe
avait ressurgi de nulle part en 2012 le temps d'une tournée
inoubliable (cf. le concert du Bataclan). La sortie de ce nouvel
album, le quatrième du groupe, n'est finalement que la dernière
étape officialisant le retour du groupe. Mais cela ne fût pas sans
douleur et le guitariste Jon Brännström y a laissé quelques plumes
puisqu'il a quitté le quatuor avec pertes et fracas. Ancré dans une
époque à jamais révolue, aussi efficace soit-il le mélange techno
punk de new noise apparaît aujourd'hui un peu daté, le son de
Refused a évolué. Autrefois étiqueté hardcore, Refused est
maintenant un groupe rock n'roll. Et c'est plutôt un motif de
satisfaction. Le son est clair, tranchant, le groupe ne s'éparpille
plus en cherchant des mélanges improbables avec le jazz par exemple.
L'accent est mis sur les guitares. Pour résumer ça envoie du début
à la fin, le quatuor prend un malin plaisir à nous envoyer des
gnons dans les oreilles sans discontinuer, flirtant avec les
classiques heavy old school (les cuivres de « War on the
palace », « Servants of death »). Le groupe ose
même jouer la carte mélodique (le mélange guitares acoustique et
électrique de « Old friends/new war ») et le chanteur
Dennis Lyxzen met la pédale douce sur les hurlements pour mieux
placer sa voix (« Useless Europeans »). Sans temps
faible, « Freedom » se révèle être un album cohérent,
efficace et consistant œuvre d'un groupe qui n'a rien perdu par
ailleurs de sa force revendicatrice (« Françafrique »).
En concert le 1er décembre
à Paris (le Trianon).
mardi 18 août 2015
Mavis Staples : « Your Good Fortune EP »
Contrairement à d'autres chanteuses de
sa génération qui se posent en gardiennes du temple sacré (cf.
Bettye LaVette), Mavis Staples préfère apporter de nouvelles
couleurs à son gospel old school. Après avoir beaucoup collaboré
avec Jeff Tweedy ces dernières années (notamment sur le disque posthume de Pops Staples), c'est au tour du
producteur électro Son Little d'être invité au bal. Quatre
chansons émanent de ces séances deux inédites « Your good
fortune », « Fight » ainsi que deux titres souvent
associés au répertoire des Staple Singers « See that my grave
is kept clean » et « Wish i had answered »
présentées dans des versions rénovées. Et le résultat n'a rien
d'infamant. Car Son Little a le bon goût de rester assez discret et
réussit à se fondre dans l'univers de Mavis plutôt que de
transformer cette dernière en queen du dancefloor. Son influence se
fait principalement sentir au niveau rythmique. Pour le reste, on
retrouve un disque soul/gospel classique mais avec une dynamique
contemporaine. Mavis chante toujours merveilleusement bien, et
transmets mille émotions au fil de sa voix. Les guitares bleusy sont
inspirées, le tout est très prometteur.
lundi 17 août 2015
The Bohicas : « The making of »
Mené par Dominic McGuinness les
Bohicas sont, en grande partie, composés d'anciens musiciens de
scène d'Eugene McGuinness (le grand frère de Dominic). Difficile à
croire, car à l'écoute les Bohicas évoluent dans des eaux assez
éloignées de celles de l'auteur de « Chroma ». Nourris
au gros son rock US, les Bohicas explosent les compteurs dès le
morceau d'ouverture « I do it for your love », le groupe
est originaire de l'Essex au nord est de Londres, vraiment ? On
les imaginait plutôt répéter dans un garage quelconque au fin fond
d'une banlieue américaine (cf. « Red raw » qui rappelle
un peu Nirvana sur ses titres les plus apaisés). Ouvertement
débridé, les Bohicas lâchent les chevaux (et les guitares!) tout
au long des onze titres de cet effort inaugural jusqu'à flirter avec
les limites du métal (« Girlfriend », « To die
for »). Et c'est dans ce registre que l'on préfère le groupe,
quand les chansons s'apparentent à une explosion de décibels,
portées par un joie communicative et énergisante (« Where you
at », l'urgente « Swarm ») dopées par une batterie
en survoltage permanent (« Upside down and inside out »).
Cependant, conscient de son statut d'anomalie sur la scène
britannique actuelle, The Bohicas intègrent également beaucoup
d'éléments mélodiques, typiquement british, afin de modérer le
tout. « Only you » est une jolie ballade, pas mielleuse,
et le registre convient particulièrement bien au grain de voix
éraillé de Dominic. Peut-être pas l'album de l'année, mais ne
serait-ce que pour l'électrisante pépite post punk « XXX »,
le groupe vaut largement le détour. Un premier effort des plus
honorables, écourageant pour la suite quand le groupe saura mieux
canaliser sa formidable énergie. Sinon la pochette est très cool.
En concert le 21 octobre à Paris (Point Ephémère)
https://www.facebook.com/TheBohicasEn concert le 21 octobre à Paris (Point Ephémère)
dimanche 16 août 2015
Banane Metalik : « The Gorefather »
Entre zombies et gangsters (cf. la
sublime pochette), c'est peu dire que les français de Banane Metalik
ont développé au fil des années un univers cinématographique
singulier, qu'ils ont eux-mêmes baptisé gore n'roll. Soit un
subtil mélange entre punk et musique de film orchestrale, quelque
chose d'assez inédit pour nos oreilles. Après deux albums, le
groupe affine encore son univers sur ce nouvel EP de six titres en
forme d'apéritif (sanglant forcément) avant le nouvel album et les
âmes sensibles sont priées de s'abstenir. En décalage constant, le
groupe s'avère suffisamment irrevérencieux pour faire de la musique
du Parrain une cavalcade punk (« The Gorefather ») ou
transformer la Poupée de son du duo Serge Gainsbourg/France Gall en
Poupée de sang. Agrémentant ses assault punk d'arrangements de
cordes (« Gore n'roll clan »), influence directement
venue de la musique de film, Banane Metalik possède cette petite
originalité qui attire l'oreille et distingue le groupe du tout
venant punk, le plaçant directement dans le haut du panier. Le
résultat est à la fois excellent et décalé. Vivement l'album !
Sortie le 4 septembre 2015.
http://www.bananemetalik.com/preorder.htmlSortie le 4 septembre 2015.
samedi 15 août 2015
Jason Isbell : « Something more than free »
Peut-être bien l'un des secrets les
mieux gardés de l'Americana moderne. Cinq albums au compteur et
quasiment inconnu de ce côté-ci de l'Atlantique, Jason Isbell,
probablement trop américain (hélas) pour l'auditeur français
lambda, est de retour avec un nouvel effort en tout point
remarquable. Armé de sa guitare folk, Jason nous ballade le long de
routes imaginaires, entre poussière et cactus, sous un soleil de
plomb et un ciel d'un bleu céruléen. Ses influences vont du folk à
la country, avec, lorsque Jason se décide à brancher sa guitare,
une note blues ou rock n'roll (« Children of children »),
électrique, tout ce qu'il y a de plus agréable Une musique profondément authentique dont les paroles sont ancrées dans les rudes réalités du quotidien. Au petit jeu des
influences, on pourrait citer pèle-mêle un Steve Earle assagi ou
Gram Parsons. Classique ? Oui dans une certaine mesure, mais
surtout d'une beauté intemporelle. La ballade vous tente ?
Jetez-vous sur cet album vous ne serez pas déçus...
https://www.facebook.com/jasonisbellmusicvendredi 14 août 2015
Dimoné : « Bien hommmé mal femmé »
Alors que la musique sort des
enceintes, on se rends compte, au fil des titres, que c'est à un
bien étrange voyage que nous invite Dominique Terrieu, aka Dimoné,
le long de ce quatrième effort. Les textes, sont de prime abord un
peu abscons, à double sens, au point que l'on n'est jamais trop sur
de ce que l'on écoute. Dimoné à le chic pour nous plonger dans un
abîme de perplexité (« Venise »). La langue est
utilisée avec une telle liberté qu'elle semble être totalement
réappropriée par l'artiste (cf. le titre de l'album) avec quelques
détours vers l'anglais (« Chutt chutt shut up ») ou
l'espagnol (« Soiñons
nos rêves »). Le doute n'est plus permis, Dimoné possède un
véritable univers, personnel dans lequel il nous guide par la main.
Musicalement la chose est au croisement de plusieurs influences. Si
la base reste la chanson, Dimoné infuse dans ses compositions un
soupçon de fièvre rock, trahissant son passé punk, au détour de
riffs de guitare bien envoyés. Un peu de piment qui le place
largement au-dessus du tout venant de la variété et agrémenté
d'arrangements baroques (piano jouet ou bastringue). Un chemin assez
tortueux dans lequel on croise quelques fantômes, Alain Bashung ou
Serge Gainsbourg pour les parties parlées. Original et donc,
forcément, digne d'intérêt.
jeudi 13 août 2015
Hot Chip : « Why make sense ?»
Trois ans après leur dernier effort le
quintet britannique est de retour. Dans le paysage actuel, Hot Chip
fait figure d'électron libre. En effet, le groupe ne semble jamais
se contenter ni d'une instrumentation électronique ni de sonorités
complètements organiques (la torch song « White wine and fried
chicken »). C'est quelque part dans l'entre-deux que la bande
menée par Alexis Taylor trouve son bonheur avec suffisamment de bon
goût, d'ingéniosité et d'efficacité pour nous faire avaler ce qui
apparaît insupportable par ailleurs (le vocodeur, la disco cheap, la
house et on en passe). Funky en diable (« Started Right »,
« Huarache Lights » le redoutable morceau d'ouverture)
Hot Chip est pourtant composé d'une bande de grands sensibles
(probablement) en manque d'affection. Il en résulte un disque pas
aussi festif qu'il n'y paraît de prime abord. A ce titre, le track
listing est assez éloquent : « Need you now »,
« Cry for you » et autres « Love is the future »...
Bien plus qu'une simple machine à danser, Hot Chip apparaît au fil
des titres comme une formation électro pop, la digne héritière des
années 80/90, animée de sentiments à fleur de peau. Hot Chip nous
invite à la fête sachant pertinemment que l'on repartira seul, les
mains dans les poches, le regard vissé au sol et le cœur brisé.
En concert le 30/08 (Rock en Seine)
mercredi 12 août 2015
Bob Moses : « All in all »
Derrière l'alias trompeur de Bob
Moses, se cache un duo Canadien. Sorti à l'occasion du disquaire day
(pour la version vinyle) « All in all » regroupe
l'intégralité des enregistrements du duo soit deux Eps et un single
deux titres, de quoi patienter gentiment en attendant la sortie de
leur premier véritable album prévu pour septembre prochain. Dans le
paysage des musiques électroniques, Bob Moses se distingue par son
écriture. Les chansons, car le groupe se soucie d'écrire de
« vraies » chansons, s'articulent autour d'un beat
omniprésent, jamais fracassant mais plutôt léger et empreint de
mélancolie. La voix traînante, au timbre légèrement soul,
participe également de cette sensation un peu neurasthénique. C'est
sur la longueur que la musique de Bob Moses s'exprime le mieux,
dépassant régulièrement les cinq minutes, Bob Moses entraîne
l'auditeur dans une spirale sombre et hypnotique grâce à la
répétition fréquente des thèmes. A n'en point douter c'est une
écoute nocturne et solitaire qui sied le mieux à Bob Moses, bien
loin des dancefloor enflamés. Bob Moses invente plutôt la bande son
d'après la fête, quand les lumières sont éteintes et les danseurs
rentrés chez eux. Enfin, la version acoustique de « Hands to
hold », avec une simple guitare folk pour accompagnement, soit
à l'opposé exacte du reste de leur production, prouve que Bob Moses
peut explorer la même gamme de sentiments avec une instrumentation
organique. Voilà bien la preuve que le duo place la musicalité et
l'écriture au cœur de sa démarche.
http://bobmosesmusic.com/vendredi 7 août 2015
Fiona Walden + Bikini Machine, Festival Vers les arts, Saint-Hilaire-de-Riez, 6 Août 2015
Dans la grosse armada à laquelle ressemble parfois un festival d'été, Vers les arts fait un peu figure d'exception. Un festival gratuit, à taille humaine, rafraîchissant par son apparente simplicité et son côté humble. Le site est magnifique, placé en lisière de la foret, les jeux de lumière et autres éléments décoratifs plongent le spectateur dans un univers onirique où la fantaisie règne. Pas uniquement centré sur la musique, Vers les arts donne l'occasion pendant trois jours de découvrir de nombreux spectacles, du théâtre de rue au nouveau cirque, où toutes les générations se croisent. Et après 22 heures, lorsque les familles sont parties, les concerts commencent et on envoie le son sous le chapiteau.
On commence avec la toute jeune Fiona Walden qui a sorti son premier EP un peu plus tôt cette année. Curieux mélange que la musique de Fiona. Tout semble partir du rock et de la new wave, influences premières que la jeune femme se charge de propulser dans le futur en intégrant dans l'ensemble une guitare aux intonations country/western et une dynamique électro tout à fait contemporaine. Mais c'est au final la voix de Fiona, grave, rauque et pour tout dire assez masculine qui étonne, surprend et, finalement, séduit. C'est arrivé à la fin de son set que sont balancés les titres les plus costauds, on n'est plus très loin alors d'un mini Black Strobe. Hélas, le projet souffre un peu dans sa représentation live du manque de musiciens. Pas évident de retranscrire une telle richesse sur scène à deux (Fiona et son guitariste). Un groupe au complet rendrait le concert encore plus passionnant mais il s'agit toutefois d'une très belle découverte.
Changement d'ambiance par la suite avec le sextet Bikini Machine, un groupe dont on avait perdu la trace depuis environ cinq ans. Originaire de Rennes, Bikini Machine fait partie de la fine fleur du rock n'roll d'ici, le genre de groupe a ressortir les amplis hiwatt. Au départ donc Bikini Machine était donc un pur groupe de rock, racé possédant une force de frappe admirable d'un point de vue rythmique. Mais l'intégration d'un deuxième clavier d'appoint, aux interventions aussi ponctuelles que judicieuses, a changé la donne orientant la chose vers plus de psychédélisme sans jamais renier tout à fait les racines rock, fortement ancrées dans les sixties et le rock garage, du groupe. Aussi efficace en Anglais que dans la langue de Molière Bikini Machine évoque aussi bien le Jacques Dutronc des sixties que les Sonics et autres Seeds. Excellent.
lundi 3 août 2015
FFS
Depuis quelques années, l'alliance
entre artistes est devenue monnaie courante (cf. Elton John et Leon
Russell, Elvis Costello et The Roots etc...) le temps d'un album
commun. Dans un registre beaucoup plus pop c'est aujourd'hui Franz
Ferdinand et les Sparks qui unissent leurs forces derrière l'alias
FFS. Plutôt bien pensé ce mariage entre le savoir-faire rythmique
des ex-jeunes loups écossais et le grain de folie kitsch propre aux
survivants des 70s. On pouvait s'en douter, la rencontre fait des
étincelles, le choc des générations a bien lieu, et donne
naissance à de petites perles pop qui rivalisent d'énergie (cf.
l'excellente « Dictator's son », la dansante « The
man without a tan », « Police encounters », « Save
me from myself »). A contrario, le duo brille aussi dans le
registre opposé mid tempo délicat et (un peu plus) sombre (cf.
« Little guy from the suburbs »). D'une manière
générale, l'album est très marqué par le son des synthés des
Sparks qui prend beaucoup de place (l'électro pop 80s « So
Desu Ne ») au détriment des guitares réduites à un rôle
rythmique. Au final tout le monde est gagnant, Franz Ferdinand montre
sa capacité d'évolution et les Sparks, un peu oubliés de ce
côté-ci de l'Atlantique, reviennent sur le devant de la scène.
« Collaborations don't work » clôture le disque sur une
note sarcastique et pleine d'humour.
En concert le 28 Août (Rock en Seine)samedi 1 août 2015
Space Captains : « Seen from the moon »
Acteur récurrent de la scène
blues/soul hexagonale, Damien Cornelis a succesivement mis ses
claviers au service de l'harmoniciste Greg Zlap, du Blues Power Band
ou plus récemment de Malted Milk. Après ces années de formations
Damien présente son projet personnel, Space Captains dont cet EP de
six titres est la première sortie. Et surprise, le résultat est
très différent de ce à quoi le musicien nous avait habitué
jusqu'içi, beaucoup plus funky, et l'ombre de Stevie Wonder plane
sur le clavinet fréquemment utilisé par le musicien. L'écriture
étonne, assez déconstruite, tout en ruptures et en relances, en
forme de clin d'oeil à Sly and the family stone. En compagnie de son
frère Jérôme et de quelques compadres croisés ça et là (Toma
Milteau, Greg Zlap, Arnaud Fradin, Hervé Joachim etc...) Damien varie les
plaisirs tout en versant un bonne louche de piment funk dans la
soupe. « Be Cool » est un blues plutôt réussi, « New
Orleans » un hommage cuivré à la Cité du Croissant (James
Copley d'Electro Deluxe au chant) alors que « Space Captain »
et « Soul Food » (Juan Rozoff derrière le micro)
lorgnent vers le funk électro des années 1980. Qu'importe le flacon pourvu que le groove
soit au rendez-vous, c'est un peu le leitmotiv de cet attachant
projet.