vendredi 30 novembre 2012

Nadéah, La Boule Noire, 27 novembre 2012.




Prestation de grande classe de notre Australienne, Française d’adoption sur la scène de la boule noire en ce mardi soir. Superbe, tour à tour aguicheuse, séductrice ou femme fatale, Nadéah fait montre sur scène d’un charisme à toute épreuve. Heureuse tout simplement d’être là, entourée de son groupe de quatre musiciens, Nadéah irradie sur scène d’un bonheur contagieux. Un show aux ambiances très variées, baroque (An aslyum on new year’s eve) parfois rock, parsemé de moments intimes seule à la guitare folk ou au piano, entrecoupé de morceaux très jazzy : une contrebasse pleine de swing avec en renfort quelques vents, un trombone et une clarinette. Le concert est marqué par une intensité de tous les instants, beaucoup plus que sur disque, le public passant par une palette d’émotions assez large, Nadéah se transforme alors en tornade blonde dont les cheveux balayent l’espace. A noter également la présence de Clarika, superbe voix profonde, sur un titre majestueux. Le tout dans le cadre cabaret années 30 de la boule noire qui lui sied particulièrement bien. Une soirée plus que réussie.


Eugene McGuinness : « The invitation to the voyage »



Troisième album pour ce brillant auteur/compositeur. Et si comme son titre l’indique, voyage il y a, c’est à une épopée entre les sons et les époques à laquelle nous sommes conviés évoquant à la fois les années 80, « Joshua » sous influence Smiths, que les années 60, la surf music et le Mersey beat : « Lion » (probablement la meilleure plage du disque). Fin guitariste, qui fut membre un temps du groupe accompagnant l’excellent Miles Kane, Eugene McGuinness a pourtant un peu délaissé son instrument de prédilection, fignolant ses arrangements pour accoucher de cet effort luxuriant déroulant tantôt un tapis de cordes, la très classique « Concrete Moon » tantôt des cuivres percutants : « Harlequinade ». Bricolant avec les outils de son époque, Eugene tâte de l’électro avec « Videogame » ou recycle le thème ultra efficace de « Peter Gunn » le temps d’un « Shotgun » qui fait depuis le bonheur d’une certaine radio rock qui programme le titre en rotation. Un disque de songwriter en somme mais aussi d’interprète, Eugene s’adaptant à tous les contextes, fort variés, composant l’album, tour à tour crooner ou rocker. Jeune, 27 ans, Eugene McGuinness a logiquement une belle carrière devant lui. Une belle promesse pour l’avenir. 
www.eugenemcguinness.net 
www.facebook.com/eugenemcguinnessmusic
En tournée française en janvier et février 2013 (le 9 février à Paris la maroquinerie)

 
Eugene McGuinness - Sugarplum par domino

dimanche 25 novembre 2012

Shuggie Otis, La Bellevilloise, 24 novembre 2012.





C’est la résurrection de l’année, Shuggie Otis, fils du fameux bluesman Johnny Otis, de retour sur scène, pour son premier concert depuis plus de vingt ans et à Paris pour la première fois (il était déjà venu accompagner son père mais il s’agît de sa première en tête d’affiche), quelle chance avons-nous ! C’est bien à la Bellevilloise qu’il fallait être en ce samedi soir. Shuggie Otis, donc, l’homme qui a osé dire non à Keith Richards qui souhaitait l’embaucher au sein des Rolling Stones et l’auteur de trois albums au tout début des années 1970, qui s’apprête à rompre l’année prochaine un silence discographique qui dure depuis 1974 ; un autre évènement en perspective. En attendant la sortie de son nouvel album, Shuggie reprends la route ce qui lui donne l’occasion de promouvoir la réédition de son classique « Inspiration Information ». Shuggie, multi-instrumentiste et guitariste virtuose, œuvre dans une genre de soul music mâtinée de blues et de jazz free vraiment très cool, laidback, lounge. L’originalité étant que Shuggie met la guitare en avant, ce qui est assez rare finalement dans ce style, les six cordes étant plutôt associées aux registres blues et rock. Shuggie est l’un des rares guitar-heros de la soul music. Les sept musiciens qui composent son groupe (claviers, cuivres, basse et batterie), sont tous excellents et affichent une moyenne d’age respectable, assurément nous avons affaire à des vieux routiers qui connaissent par cœur toutes les ficelles du métier. La section rythmique groove à point, un pianiste excellent, aux interventions toujours fort à propos, et des cuivres qui donnent des petits coups de pêches des lors que cela s’avère nécessaire. C’est bien entendu la guitare de Shuggie, par ailleurs un bluesman plus que crédible, qui tire les marrons du feu gratifiant le public de soli impeccables et inspirés (à noter cette étrange habitude pour Shuggie le droitier de jouer sur un modèle pour gaucher, étonnant…). Malheureusement, on ne peut pas en dire autant de sa voix, qui s’est bien étiolée avec les années, Otis, qui semble aussi parfois un peu perdu, ayant bien du mal à chanter juste et à placer sa voix correctement, à sa décharge des soucis techniques n’arrangeront rien à l’affaire. Tout cela aurait été parfait si cela n’avait pas été aussi court. Trente euros pour un concert d’à peine une heure et quart, cela fait très juste…

samedi 24 novembre 2012

The Hyènes, La Boule Noire, 21 novembre 2012.

(c) Richard Aujard



Quelque chose nous disait, à l’écoute du premier album de The Hyènes, que ce groupe était taillé pour la scène… Impression largement confirmée par la prestation du quatuor sur la petite scène de la boule noire en ce mercredi soir. The Hyènes donne dans l’efficacité brute, deux guitares, basse et batterie, rien que du très classique mais jusqu’à preuve du contraire, on n’a jamais trouvé mieux. La section rythmique dépote (au passage magnifique basse Gibson firebird) normal, c’est celle des anciens Noir Désir. C’est carré, solide et sans fioritures excessives, en résumé, les bases sont parfaites pour qui entends « rocker ». Le terrain est alors suffisamment solide pour bâtir un mur de guitares (magnifique Gretsch demi-caisse, soit dit en passant) d’inspiration punk. Car c’est à travers ce prisme qu’il convient d’apprécier les Hyènes : chansons courtes (trois, quatre minutes) encore une fois, c’est l’efficacité qui est privilégiée même si Vincent, le chanteur/guitariste, s’amuse à faire le Jimi Hendrix, genre solo la guitare derrière la nuque avant de mordre les cordes avec les dents. Hormis les titres du premier album et quelques autres raretés on peut noter quelques reprises de choix, « Ace of Spade » de Motorhead et une très exaltante version du « I wanna be your dog » des Stooges. En résumé, une belle soirée riche en électricité.
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Sallie Ford and The Sound Outside, Le Trianon, 19 novembre 2012.




Grande révélation rockabilly de l’année, c’est sur la sublime scène du Trianon que l’on a retrouvé l’Américaine Sallie Ford et son groupe The Sound Outside. Alors que la sortie de son nouvel album est prévue pour le 19 février 2013, ce passage au Trianon fût pour Sallie l’occasion de tester en live ses nouvelles compositions et notamment cet inattendu instrumental d’inspiration western qui a ouvert la soirée, ce qui ne fait que confirmer l’enracinement de Sallie Ford dans les musiques traditionnelles américaines, le rockabilly bien sur mais aussi le gospel que son chant évoque parfois et le blues. Sur scène, le Sound Outside fait preuve d’un swing à toute épreuve, grâce à son batteur l’excellent Ford Tennis et au son un peu « rond » de la contrebasse (Tyler Tornfelt) qui confère à l’ensemble une coloration un peu jazzy. De part son attitude, « Howdy » lancé à la cantonnade à son arrivée sur scène et surtout par son jeu, le guitariste Jeffrey Munger est lui à rapprocher de la musique country, assurément l’ancrage « terrien » du groupe vient de lui. Et puis il y a Sallie Ford, une voix incroyable, rauque et beaucoup plus mature que ce que laisse supposer sa jeune vingtaine, à rapprocher des grandes chanteuses de blues et de jazz. Sur scène Sallie a pris beaucoup d’assurance, comparée à ses premiers passages au divan du monde, l’ensemble est moins gauche tout en gardant intacte une certaine fraîcheur (« J’adore Paris »). A coup sur, Sallie et son petit monde n’en revient pas de cette incroyable aventure qui a pris forme il y a quelques mois et qui, dans un monde parfait, ne devrait pas s’arrêter de sitôt…

jeudi 22 novembre 2012

Comme un lundi...

Quelques réflexions, saisies au vol, alors que me rendant à un concert, je suis passé à pieds devant la Samaritaine...
 
Quand il filme (dans "Holy Motors") à l'intérieur du grand magasin désaffecté, à quel point Leos Carax met-il en scène sa propre nostalgie ?
 
Il est facile de mettre en parallèle le destin de La Samaritaine, magnifique magasin d'inspiration art-déco et art nouveau, ancien haut lieu de la vie parisienne aujourd'hui tombé en désuétude, fermé depuis 2005, et l'itinéraire propre du cinéaste, ex-enfant prodige du cinéma français, génie déchu de la pellicule (seulement cinq films et demi depuis 1984) qui n'a finalement pas eu la carrière que tout le monde lui prédisait. Alors qu'il frôle le demi-siècle, Leos Carax se livre ici à une sorte de bilan.
 
En outre la proximité géographique fait que l'on peut rapprocher cette séquence de la Samaritaine des "Amants du Pont-Neuf" à la fois film maudit et pièce maîtresse de l'oeuvre de Leos Carax.
 
Du Pont-Neuf à la Samaritaine, grandeur et presque décadence. Presque parce qu'"Holy Motors" c'est quand même un chef d'oeuvre.

dimanche 18 novembre 2012

Nadéah : « Whatever Lovers says »




Jeune Australienne installée en France, Nadéah a une philosophie de vie tout simple : « Positivons » ! Autant dire que « Whatever Lovers says », son nouvel EP, déborde de bonnes vibrations. Ces quatre titres, nourris d’influences assez marquées par les Etats-Unis, qui vont du folk (« Ain’t got time ») au jazz (« Humdrum ») peuvent ainsi s’écouter comme la bande son de l’existence nomade de Nadéah, un peu comme un voyage qui remonterait les racines de la musique étasunienne. Quelque soit le contexte, le chant de Nadéah emporte la mise. Une voix grave, avec un coffre digne d’une chanteuse jazz, on craque devant tant de charme. Un petit mot pour finir sur l’intrigante « Humdrum », morceau jazzy avec un je ne sais quoi d’un peu foutraque dans son final qui n’est pas sans rappeler Tom Waits. De la belle œuvre.

Interview avec les Popopopops




Les Popopopops sont un groupe prometteur venu de Rennes et quand ils s’ennuient, ils sortent les guitares acoustiques et jamment. C’est ainsi qu’on les a trouvé, juste avant une interview, chacun sa guitare folk et on chante à l’unisson dans une sorte de réminiscence hippie. Il ne manque plus que le feu de bois. On a connu des interviews qui commençaient plus mal…

Comment a débuté l’aventure des Popopopops ?
P. : On s’est rencontré au lycée à Rennes. On était trois dans la même classe. Après on a rencontré Vincent (guitare, ndlr). Au début c’était un passe-temps, on répétait plutôt que de jouer au foot. On est devenu de plus en plus « professionnels », on a fait les transmusicales assez vite en 2008. Ca a été un gros boost pour nous. On a enchaîné pas mal de concerts, notamment à l’étranger. En 2009 est sorti notre single « Dance tonight ». On a sorti notre premier EP « A quick remedy » cette année.

En découvrant le nom du groupe, Popopopops, sur la pochette, j’ai pensé que vous alliez être un groupe pop assez catchy avec des chansons de deux minutes. Finalement ce n’est pas tellement ça… Comment vous est venu le nom du groupe, qui est très difficile à orthographier, je tiens à le dire (rire général) ?
P. : Ca, on en a fait l’expérience, souvent sur les loges, le nom du groupe est mal écrit, on nous appelle, les popos, le pos et j’en passe (rires). C’est une référence à NTM.

Oui, mais justement, l’influence du rap ne s’entend pas du tout dans votre musique…
P. : C’est vrai. Au tout début on faisait de tout et de rien mais pas de hip hop. On faisait du blues, de la pop, du rock… On trouvait amusante l’antinomie entre le nom du groupe, un hommage au hip hop, et notre style musical. On aime beaucoup NTM cependant.

Certains titres « My mind is old » ou « R n’R » ont un côté très répétitif, obsédant, un peu comme des mantras. Comment définiriez-vous votre son ?
P. : On est quand même avant tout un groupe pop, dans le sens où on essaye de se contraindre à un format couplet/refrain. On essaye de trouver une originalité dans ce format là. Il y a certains artistes dans lesquels on se reconnaît beaucoup, Foals par exemple. Pas tellement au niveau du style mais plutôt dans la direction artistique. On essaye d’imaginer notre son toujours dans le même format, une chanson de quinze minutes, ça nous semble impossible. Les trucs trop expérimentaux, pareil. On cherche toujours de nouvelles choses, mais on garde cette rigueur pop. Quand on a commencé les Popopopops, on n’était pas spécialement potes. On n’a pas commencé en se disant on va faire un revival d’un groupe en particulier dont on était tous fans. Chaque membre avait ses propres influences. L’ep ne sort qu’au bout de quatre ou cinq ans parce qu’on a eu beaucoup de mal à trouver notre son à nous et à donner de la cohérence à toutes nos influences individuelles.

Au début je pensais que vous n’aviez pas un songwriting classique mais plutôt quelque chose qui tiendrait plus de l’architecture sonore, puis en arrivant je vous ai vu jammer avec les guitares acoustiques et je me suis dit : « P**** t’as tout faux » ! (rires)
P. : La base des morceaux vient souvent de Simon (basse) ou Victor (chant, clavier). Après, on retravaille les morceaux tous ensemble pendant les répétitions. On travaille souvent la musique avant les textes qui sont écrit par Simon. Beaucoup de groupes écrivent les textes et les mettent en musique, ça nous est arrivé seulement une fois ou deux. La touche finale se fait à quatre. On teste énormément nos chansons en live avant de les enregistrer, on les enrichit beaucoup comme ça. En aucun cas on ne peut se contenter d’une composition personnelle faite sur un ordinateur. On a besoin d’échanger pour faire vivre la chanson. Le titre « R n’R » par exemple a vraiment pris beaucoup d’ampleur, chaque membre du groupe a apporté son truc. Et là pour le coup, il y a un côté classique couplet/refrain mais on l’a enrichit au niveau de la structure avec l’allongement instrumental à la fin. On s’adapte au niveau des chansons quand on voit qu’il y a des ouvertures qui sont possibles.

Donc du coup, une composition à la fin ne ressemble plus du tout à ce qu’elle était au départ…
P. : C’est vraiment variable. Parfois, après les démos, on se rend compte que la seule chose qui change c’est la couleur des instruments, qui joue quoi, qui fait tel riff… Des fois les titres ne bougent pas beaucoup. D’autres fois, on part d’une démo un peu cheap pour arriver à quelque chose beaucoup plus long avec plein de détails. Ce qui est important avant de pouvoir jouer une chanson à quatre, c’est déjà d’avoir une ambiance. Même si après il y a beaucoup de détails qui changent, l’ambiance reste. On doit ressentir un truc tous ensemble. Parfois avec seulement deux accords on arrive à ressentir le truc. Et parfois ça ne colle pas, on ne trouve pas la bonne atmosphère. C’est magique.

J’ai trouvé la production de l’ep très soignée. Comment c’est passé l’enregistrement ?
P. : On vit en colocation avec notre ingénieur du son, Mitch, c’est vraiment le cinquième membre du groupe. On a fait tout un travail avec lui sur l’ep. On était un peu seuls après avoir beaucoup tourné à l’étranger. On était de retour à Rennes avec vraiment l’ambition de sortir quelque chose, on se demandait comment on allait s’y prendre. On s’y est mis en septembre 2011 sans trop savoir si on allait faire un album ou un EP. On a commencé à l’UBU à Rennes, l’EP s’est construit en six mois, dans beaucoup de lieux différents. Au début on avait quinze chansons, on a réduit à dix, finalement il n’en reste plus que quatre. Celles qui nous semblait les plus révélatrices de ce qu’on voulait présenter au public. Notre musique a quand même beaucoup changé. Pour nous cet EP, c’est comme une palette de ce que va être l’album. On a aussi rencontré à Hossegor le chanteur de Pony Pony Run Run qui a signé l’arrangement de « Color ». Les batteries on été faîtes à Nantes et on a fini le tout à la maison dans notre petit studio. Le mixage a été fait par un anglais, Tom Peters, qui a également mixé les Wankin. C’était bien de bosser avec lui, il a emmené cette couleur un peu anglaise, sans compromis, avec des choix artistiques forts. Il a donné une cohérence à l’ensemble des chansons et des prises qui ont été faites un peu partout.

Justement, en parlant de la couleur anglaise, ça vous fait rêver de jouer à Londres ?
P. : Carrément mais ce n’est pas une fin en soi. On a fait quasiment tout les pays limitrophes de la France mais pas l’Angleterre. C’est assez compliqué d’y jouer quand même. C’est une sorte de Graal pour un groupe qui fait de la musique d’inspiration anglo-saxonne. Ce n’est pas un objectif en soi mais ça veut dire beaucoup de choses d’arriver à jouer là-bas. Ca veut dire que t’es vraiment très bon, arriver là-bas, chanter dans leur langue, c’est lourd de sens. Notre EP sonne « anglais » à cause de nos influences, pas forcément par ce qu’on a envie de jouer là-bas. Ca serait une énorme reconnaissance de pouvoir être écouté et apprécié par un public anglo-saxon.

Cela vous a apporté beaucoup de tourner en dehors de la France, d’être confronté à d’autres publics ?
P. : On était un peu plus jeunes, plus fous. On était dans une dynamique de tournée, on ne se rendait pas vraiment compte. On n’avait rien enregistré de vraiment sérieux, on n’était pas confrontés à la réalité du milieu de la musique tel qu’on le connaît maintenant. C’était plus du plaisir, on partait en Hollande trois jours, on était là-bas… On jouait devant des gens, c’était cool… Le public est quand même très différent d’un pays à l’autre. A Moscou, on s’est retrouvé dans une salle gigantesque, trois-quatre mille personnes, on passait très tôt à 17 heures, du coup il n’y avait quasiment personne mais les gens qui étaient là étaient fous, mais fous genre déchaînés. Au Pays-Bas, les gens étaient très réactifs. En Belgique, ils ne dansent pas du tout mais ils sont à fond dedans, ils crient et applaudissent beaucoup. Sans faire de généralités. Après je ne sais pas si tu apprends beaucoup du fait de jouer devant des publics différents. C’est une expérience enrichissante. Tout ce qu’on a vécu depuis ces trois dernières années a contribué à faire mûrir le projet. Ne serait-ce qu’humainement, on a passé beaucoup de temps ensemble. C’est ce qu’on a voulu traduire dans cet EP, l’aboutissement d’une belle tournée avec des rencontres, des échanges… On début on ne faisait que du live, on était concentré là-dessus et puis on s’est rendu compte qu’il fallait sortir quelque chose pour faire vivre la musique au-delà du concert.

Les Wankin’Noodles m’avaient dit la même chose, mais contrairement à eux vous n’avez pas une approche aussi brute…
P. : C’est lié au style de musique. Et puis eux ont enregistré leur album en live. On avait une expérience du live assez poussée et on n’avait pas envie de refaire la même chose sur cd. Quand on s’est retrouvé en studio, on s’est dit on va profiter de la chance qu’on a d’être en studio pour faire des choses plus recherchées avec plus de pistes ; on va chercher à apporter des petits détails dans le son, dans la production, tout ce qu’on ne peut pas faire en live en fait. C’était aussi pour voir ce qu’on vaut. On n’est pas partisan de refaire en live ce que tu fais en studio et inversement. On est contre l’utilisation des bandes sur scène, au contraire, il faut préserver l’énergie. Pour nous c’est vraiment deux univers différents.

Vos compositions changent beaucoup en live ?
P. : On compose en répète ensuite on étoffe en studio. Ensuite quand on est retourné dans notre local de répète pour préparer les concerts, on a enlevé des choses pour aller à l’essentiel, préserver l’énergie. C’est aléatoire, c’est selon notre feeling, il faut qu’on prenne autant de plaisir à jouer nos chansons qu’on a eu à les enregistrer. Le public doit y retrouver son compte aussi, il cherche quelque chose de plus direct en live, on essaye de s’adapter. Des fois on rajoute des choses spécialement pour le live, ce qui apporte une nouvelle dimension.

Un petit mot sur les années 80…
P. : Les années 80 (ils chantonnent)… On nous pose souvent la question. En ce moment il y a une sorte de revival dans tous les styles de musique. On ne se revendique ni des 80s ni des 90s ni des années 2000. Ca fait partie de nos influences, New Order etc… Mais il y a bien d’autres choses aussi, c’est peut-être ce qui ressort le plus sur cet EP. On est aussi influencé par des groupes eux-mêmes influencés par les 80s. On essaye d’intégrer plein d’autres palettes, le hip-hop sur « R n’R » par exemple. Il y a aussi du rock assez brut. On ne se rend pas vraiment compte, mais c’est possible que la décennie 1980 soit un peu le fil rouge du groupe. On ne se dit pas qu’il faut sonner comme on le faisait dans une autre époque, on préfère que cela reste inconscient et indirect. On ne veut pas se faire enfermer dans un moule.

Et votre album ?
P. : La sortie est prévue pour début 2013.

Propos recueillis le 3 Mai 2012.

samedi 17 novembre 2012

The View : « Cheeky for a reason »




Assez peu connu, hélas, en France, les écossais de The View sortent leur, déjà, quatrième album. Typiquement le genre de groupe méconnu dans notre hexagone qui, quoi que l’on en dise, reste assez fermé aux choses du rock n’roll. Et c’est bien dommage car The View atteint sur ce disque une ampleur nouvelle. Pas toujours facile d’identifier clairement ce groupe, par défaut nous parlerons de pop. Mais une pop qui passe par différents états tout au long de ces 12 compositions. Parfois traversé d’éclairs punk, mélodiques ou power-pop, le groupe a réussi ici la gageure de rendre cohérent tout un agrégat d’influences qui remonte l’histoire du rock depuis les années 1960.  Sans vouloir rentrer dans le détail, mettons quelques piécettes sur le sixties en diable « Anfield Row », la jolie mélodie au piano de « Tacky Tattoo » ou l’agressivité punk de « How long ». Entre autres. Un album solide, les amateurs de rock britannique auront tort de bouder leur plaisir…

vendredi 16 novembre 2012

The Datsuns : « Death Rattle Boogie »




Dix ans de carrière (dèja) et cinquième album pour cette infernale machine à rock n’roll venu de Nouvelle-Zélande. Après des débuts très marqués par le hard et le rock garage des années 1970, c’est encore le cas aujourd’hui, les Datsuns ont au fil des années et des enregistrements considérablement enrichi leur palette intégrant au fur et à mesure beaucoup d’influences venues des musiques rurales étasunienne, notamment le blues (cf. "Fools gold" et « Wander the night » qui sonne, dans sa première moitié, psyché blues jazzy). Tout cela pour arriver à ce nouvel album qui s’il n’apporte rien de fondamentalement révolutionnaire (ce n’est pas le propos de toute manière) n’en procure pas moins beaucoup de plaisir. Le guitariste Christian Livingstone, qui a pris une sacrée ampleur depuis les débuts du groupe, est passé maître dans le maniement de la pédale wha-wha et réhabilite à lui seul la notion de solo (« Shadow looms large »). Un morceau comme « Skull full of bone », et son imparable groove de la section rythmique, montre les progrès réalisé par les Datsuns en tant qu’instrumentistes. « Axethrower », qui les voit flirter avec le genre stoner, met en valeur un groupe qui mise sur l’efficacité avant tout (« Helping hands »). Un peu à l’image de cet album électrique et rock n’roll. Excellent.

jeudi 15 novembre 2012

RNDM : « Acts »




Vétéran du grunge et rock star mondiale, en tant que bassiste de Pearl Jam, Jeff Ament n’en reste pas moins, comme tous les musiciens, avide de nouveauté et de collaborations. Ainsi est né RNDM (prononcez Random, traduction française : au hasard), nouveau groupe, fruit de son association avec le songwriter Joseph Arthur et le batteur Richard Stuverud. Nouvellement formée la petite troupe investit un studio du Montana et enregistre en quatre jours la bagatelle de 20 titres dont 12 constituent le présent album. Si l’association entre Ament et Arthur ne semble pas, de prime abord, la plus naturelle, la rencontre fait pourtant des étincelles, ce qui pour le coup ne doit finalement rien au hasard. Vieux de la vieille avec près de deux décennies d’expérience, il ne faut pas attendre de ces musiciens une quelconque révolution. Juste un bon vieux disque de rock, tendance un peu roots, à l’ancienne. Les conditions d’enregistrement, quatre jours rappelons-le, constituent la principale qualité de cet album. Une cession détendue (cela s’entend), point de posture ici, juste le plaisir de jouer. Ca semble peu et c’est pourtant énorme. Un excellent disque qui brille par son apparente modestie et qui, soyez-en sûrs, vieillira dignement et que l’on écoutera encore avec beaucoup de plaisir dans quelques années… 

mercredi 14 novembre 2012

Valerie June + Ben Kweller, La Maroquinerie, 12 novembre 2012.

Valerie June

La soirée comme de fort belle manière en compagnie de la belle Valerie June, toute de rouge et vert vêtue, chanteuse folk originaire du Tennessee. La première chose qui frappe chez Valerie, c’est sa voix, assez haut perchée, véhiculant beaucoup d’émotions. Entourée par sa guitare et son banjo, la belle alterne morceaux folk et country teintées de fortes incantations gospel. Alors que ses doigts caressent délicatement les cordes, on se prend à rêver d’une traversée vers le sud, c’est un beau voyage. Il paraît qu’elle est également très influencée par le rock et le blues, ce qui ne transparaît pas vraiment dans sa prestation du soir en solo intégral. Une belle découverte dont nous aurons sûrement l’occasion de reparler bientôt…

Ben Kweller
Vint ensuite, un musicien que l’on avait un peu perdu de vue mais que l’on retrouve avec un plaisir non feint, le texan Ben Kweller. Soirée chargée en émotions pour l’auteur de ces lignes puisqu’il s’agît, personnellement de mon premier concert de Kweller depuis mai 2009, trois ans et demi, c’est (trop) long… Fidèle à son habitude, Ben arrive sur scène en bondissant tel un cabri entouré de ses nouveaux musiciens, un batteur et un bassiste. Pour son retour, Kweller renoue avec la formule du power trio qui était la sienne lorsqu’on l’avait découvert en 2002, il y a déjà dix ans. La section rythmique est assez discrète et quitte rapidement la scène, laissant Ben assurer tout seul ce qu’il fait à la perfection. Alternant entre ses deux instruments de prédilection, la guitare ou le piano, le set fait transparaître les influences de Ben Kweller écartelée entre la power pop des années 1990 (Weezer, Ben Folds, Elliott Smith etc…) et des styles nettement plus terriens (la country, le folk…). Quelque soit le style, Ben l’attaque avec la même énergie. Peu importe que la guitare soit électrifiée ou non, Kweller envoie et frappe ses cordes avec la même puissance. Son charisme et son sens de l’humour (Où est mon harmonica ? Il faut que je trouve mes piles ? « C’est cool » son expression préférée en français) permettent ainsi d’éviter l’apathie, défaut récurent des performances acoustiques. Le solo met aussi en valeur la qualité d’écriture de Kweller dont on peut affirmer sans choquer grand monde qu’il est l’un des meilleurs songwriter de sa génération, un type talentueux tout simplement, capable à chaque fois de trouver la mélodie imparable. Dans un monde parfait un mec comme lui devrait avoir beaucoup de succès.



dimanche 11 novembre 2012

Smoking Smoking : « It’s all about love »




Duo formé par Vanessa Filho et Audrey Ismaël, Smoking Smoking avait déjà été repéré il y a un an lors de la parution de leur premier EP. La base de Smoking Smoking reste le piano, instrument de prédilection de ses deux membres, cependant ce premier album marque un indéniable pas en avant sur le plan de la production. Les nombreux arrangements de cordes ou de cuivres emmènent la pop des Smoking sur des terrains plus aventureux tirant vers le jazz (« Don’t let me down ») ou la musique classique. Et puis il y a les deux voix de Vanessa et d’Audrey qui se répondent et se complètent à merveille. Mais c’est lorsque les lumières s’éteignent et que les deux amies se retrouvent autour d’un piano que la mélancolie diffuse des Smoking fait des ravages, « Dancing » ; « Tiny hope » vous reverseront le cœur. Citons également entre autres réussites le potentiel tubesque évident d’ « Are we lucky ? ». Superbe album, véritable coup de coeur « sous influence ».



SMOKING SMOKING " ARE WE LUCKY ? " MUSIC VIDEO par SMOKING-SMOKING-OFFICIEL

Stubborn Heart




Au rayon des musiques électroniques, le duo anglais Stubborn Heart s’est crée sa petite niche bien à lui. Ici point de breakbeat enfiévré, d’expérimentations extrêmes et autres petites bombes propres à enflammer les dancefloor du samedi soir. Sur ce premier album, Stubborn Heart revisite en dix titres l’électro sur un mode mélodique, lounge et down tempo. Dans sa Grande-Bretagne natale, le duo composé de Ben Fitzgerald et Luca Santucci fait déjà beaucoup de bruit et de nombreuses comparaisons, avec The XX notamment, ont déjà été faites. Il est certain que les deux groupes ont un héritage commun descendant, entre autres, de la new wave des années 80. Mais Stubborn Heart possède, en la personne du chanteur Luca Santucci, un atout de charme indéniable, ce dernier ayant une voix aussi suave que celle d’un soul man. Un très bel album de soul électronique qui n’est pas sans rappeler le premier Massive Attack.

Zebra & Bagad Karaez




Miser sur l’identité régionale pour sortir du sempiternel carcan anglo-saxon étouffant le rock d’ici. Riche idée mise en pratique en l’espèce par les Bretons de Zebra & Bagad Karaez avec des résultats assez mitigés. Si Zebra n’a pas son pareil pour tailler de petits hymnes entre rock et funk fédérateurs et qui accrochent l’oreille (les excellentes « Plus rien ne m’arrête », « Zebreizh » et « The Unknown Soldier ») grâce à une guitare qui démange bien comme il faut, les arrangements à base de cornemuses posent problème. Le tout sonne comme si les cornemuses en question avaient été rajoutées à la dernière minute, à l’arrache. L’amalgame ne se fait dès lors qu’imparfaitement. D’autant plus que lesdits arrangements sont assez répétitifs. Cela aurait pu passer sur un titre mais sur la longueur d’un album… Dommage…
  

lundi 5 novembre 2012

Steve Miller Band, L’Olympia, 2 novembre 2012.




Immense rock-star dans les années 1970 (cf. le tube « The Joker »), le guitariste Steve Miller vivote de nos jours dans un relatif anonymat qui fait que ce soir, les travées de l’Olympia sonnent un peu vide. Il faut dire que la politique de tarif, ultra prohibitif, n’aide pas non plus en l’espèce. Et c’est bien dommage car Miller a toujours ancré en lui le feu sacré. Guitariste fin et précis, Miller n’à que faire de tout ce qui est flashy et privilégie le feeling à la démonstration brute. Au terme de deux heures de show (ou presque), Miller, sans faire de chichis, a revisité l’ensemble de son répertoire du rock psychédélique des débuts aux tubes pop (mais dignes) des années 1970. En passant bien évidemment par le blues qui l’a forcément influencé (il est originaire de Chicago), genre auquel il rend un vibrant hommage ainsi qu’à ses héros, Otis Rush en tête. Bien entouré par un excellent groupe, un peu trop ostensiblement professionnel à l’américaine toutefois, Miller a voyagé bien au-delà de ses influences habituelles reprenant « Tiptina », le grand classique de la Nouvelle-Orléans du Professor Longhair. Ce fût un bien beau voyage au cœur de la grande musique américaine. Tout juste peut-on regretter quelques incartades malheureuses, heureusement fort brèves, incarnées par des synthés kitsch, sur la facette 1980 de son répertoire. Pour le reste, c’était une excellente soirée.

Scarecrow : « Evil & Crossroads »



Originaire de Toulouse, Scarecrow se propose de boucler la boucle de la musique Noire Américaine en mélangeant blues et hip hop. Alliage de tradition et de modernité les scratches et guitares ternaires ou slidées se mixent tout comme le chant (en anglais) et le flow hip hop et parfois proche du slam (souvent en français). La formule, bien qu’assez peu pratiquée, n’est pas forcément neuve et rappelle des sons déjà entendus chez G. Love and the special sauce durant les années 1990 ou plus récemment chez Wraygunn (l’exceptionnel album ecclesiates 1.11). En l’espèce le tout sonne encore un peu vert. Le résultat est assez souvent probant (« Boy »), parfois plus laborieux. Quoi qu’il en soit Scarecrow mérite d’être écouté et surtout suivi. Dès qu’elle aura trouvé sa vitesse de croisière, la formule promet d’être irrésistible.
EN CONCERT LE 8 NOVEMBRE AU PETIT BAIN (Paris)

samedi 3 novembre 2012

Interview avec Thea Hjelmeland




Originaire de Norvège, la très jolie et talentueuse chanteuse folk Thea Hjelmeland revient sur son parcours fait de voyages, d’exils et bien sûr de musiques…

Comment as-tu commencé la musique ?
Thea Hjelmeland : Mes parents sont musiciens. Bien que la musique ne soit pas leur métier, on a toujours eu beaucoup d’instruments à la maison. J’avais beaucoup de cassettes, j’écoutais beaucoup de musiques. Depuis que je suis petite, j’ai toujours beaucoup chanté. Je pense que la musique m’est venue assez naturellement. J’ai commencé le piano vers 6 ou 7 ans. Et avant ça, quand j’écoutais une chanson, j’écrivais de nouvelles paroles. C’était un hobby sympa (rires) ! Après ça j’ai joué de la batterie pendant cinq ou six ans et j’ai commencé la guitare à 13 ans. C’est à ce moment là que j’ai commencé à écrire des chansons. J’ai appris toutes les chansons des artistes que j’aimais. Je jouais des heures par jour… J’ai intégré une école de musique vers 16 ans. Depuis j’ai toujours été impliquée dans la musique.

C’est vrai que tu as écrit ton premier morceau à trois ans ?
TH : En fait je ne savais pas écrire à cet age là. J’ai retrouvé une vieille cassette que ma mère avait enregistrée sur laquelle on l’entend dire : « S’il te plaît Thea, chante la chanson que tu viens de trouver ». J’avais à peu près trois ans, je pense. Pour être honnête, c’était un peu nul. Mais depuis cet age, j’aime faire de la musique. J’étais dans une chorale, j’essayais d’écrire mes propres chansons. Mais bon ces titres là, je ne les joue pas en live (rires)…

Tu joues beaucoup d’instruments différents et tu enregistres beaucoup toute seule. Est-ce que tu peux m’expliquer ta méthode de travail ?
TH : Je joue de beaucoup d’instruments, c’est vrai mais pour moi les chansons et les paroles, c’est ce qu’il y a de plus important. J’ai un home studio et comme je joue de beaucoup de choses, je suis capable de m’enregistrer avec un seul instrument. Quand on travaillé sur l’album, j’avais beaucoup de titres accumulés depuis des années. Avec les producteurs on s’est concentré sur que je faisais toute seule. Moi et un seul instrument. Après on a construit autour de cette base. On a parfois rajouté d’autres musiciens. Mais si je suis multi instrumentiste, c’est par ce que je suis curieuse, je recherche les sons. Ma façon de jouer n’est pas traditionnelle, je ne joue pas du banjo comme les musiciens country. Je joue de tout comme une guitare, avec des accords.

C’est amusant par ce que j’ai trouvé en écoutant ton disque que tout ces instruments à cordes, mandolin, banjo, ukulele, guitare, donnaient à l’album une couleur country…
TH : Oui mais je fais avec le son des instruments. Le son des instruments à cordes m’attire beaucoup. C’est très folk.

Est-ce que tu peux nous parler de ta ville natale, Forde ?
TH : C’est une petite ville d’environ 10 000 habitants. J’y ai grandi jusqu’à l’age de quinze ans. C’est un endroit magnifique à l’intérieur d’un grand fjord. C’est situé entre deux grandes montagnes, un peu comme une vallée. Il y a énormément de nature. Mais en même temps, c’est une de ces villes que tu traverses en voiture, en allant vers deux plus grandes cités. Il y a aussi beaucoup de voitures, de centres commerciaux. C’est un mélange étrange. Je suis heureuse de pouvoir passer du temps à Paris. Ma ville natale, c’est tout petit, très local, au milieu de la nature. Et après je viens à Paris qui est très urbaine.

Tu es plus anonyme à Paris ?
TH : Oui, absolument.


Pourquoi tu éprouves le besoin de voyager ?
TH : J’ai toujours beaucoup voyagé. Mes parents voyageaient. Ils nous emmenaient, mes frères et sœurs, avec eux. Après l’école, j’ai passé six mois à Cuba, juste pour être ailleurs, voir quelque chose de différent. J’étais dans des groupes à l’époque et j’en avais marre du business de la musique. Il fallait que je me trouve. Cuba a tout empiré, j’étais encore plus confuse après. C’était la première fois que je voyais mon pays et la culture occidentale depuis l’extérieur. Cuba est très pauvre mais il y a tellement de musiques et de culture là-bas. J’y ai trouvé une nouvelle énergie musicale. A Cuba, tu claques des doigts et les gens commencent à danser ! C’est vraiment excitant ! Après ça, j’ai rencontré un groupe parisien et ils m’ont emmené ici. Je les ai rencontré à un festival folk dans ma ville. J’ai passé des moments très sympas avec eux. Ils m’ont invité à venir jouer ici. J’ai rencontré des nouveaux gens, je suis restée.

Penses-tu que les voyages ont influencé ta musique ?
TH : Je suis curieuse, j’aime explorer. Je voyage seule ou avec des amis. Je rencontre de nouveaux gens, de nouvelles histoires. J’observe. Tout ça se reflète dans ma musique, dans mes paroles. Cet album, c’est comme une compilation des dix dernières années de ma vie. Alors oui, je pense que les voyages se sentent dans ma musique, absolument.

Tu as eu de nombreuses expériences très variées dans la musique, rock, jazz, folk et même hip hop…
TH : Oui, j’ai fait deux albums avec un artiste hip hop. Je faisais les chœurs. C’est le plus gros rappeur de Norvège. C’était un projet sympa.

Est-ce que cela a changé quelque chose dans ta musique ?
TH : En fait, ces albums de rap, je les ai fait après mon propre album. Le hip hop, c’était un vrai challenge pour moi. Je chantais en norvégien, quelque chose que je n’aurais jamais osé autrement.

Pourquoi chantes-tu en anglais ?
TH : En France, vous avez la culture de l’écriture et du chant en français. Il y a une tradition de la chanson française. En Norvège, pendant des années, toute la culture populaire était en anglais. On apprend l’anglais très tôt, dès le CP vers 6 ans. Et les films ne sont pas doublés, tout est sous-titré. Tu entends de l’anglais tout le temps. J’écris beaucoup de chansons en norvégien mais je n’arrive pas à les chanter.

Par timidité ?
TH : Peut-être. C’est tellement honnête, je ne me sens pas prête. Dans une autre langue, j’arrive à jouer avec les sons. Quand j’écris, au départ, je pose des mots qui ensuite deviennent des paroles. En anglais, c’est un peu une façon de cacher la vérité. Je peux être très honnête et faire des métaphores en même temps. Avec le rappeur, c’était ok pour moi de chanter en norvégien par ce que c’était les paroles de quelqu’un d’autre. Mais cela m’a donné l’envie d’écrire plus en norvégien. On verra…


Quelques mots sur ta chanson « Candyman » ? Lutter c’est important pour toi…
TH : Cette chanson parle de dix dernières années où on déménageait tout le temps. A un moment donné, j’avais l’impression de vivre dans une valise. Tu sais, pendant dix ans, je n’ai pas eu d’endroit à moi. C’était une année ici, une année là… J’ai passé des mois à dormir sur les canapés des copains. J’ai été très nomade pendant dix ans. La chanson parle du fait que, normalement, les gens voyagent pour se sentir libres, ce qui n’était pas mon cas. Voyager, ça fait partie de mon boulot mais c’est aussi une échappatoire. J’ai du mal à rester en place, il faut que je bouge. La chanson parle de moi, c’est aussi une plaisanterie sur moi. Peut-être que je lutte avec l’idée de rester en place ? Alors peut-être que j’aime bien lutter. Je blaguais en chantant : « all i want is to struggle » (tout ce que je désire c’est lutter, ndlr).

Tu aimes Paris ?
TH : C’est marrant par ce qu’en Norvège, tout le monde me dit : « Paris, c’est tellement beau, tellement romantique »… Mais bon, tu sais, il y a une différence entre rester pour un long week-end et vivre quelque part. Paris, c’est magnifique, c’est vrai. Et il y a tellement de culture, tellement de gens d’horizons différents. Et tellement d’opportunités pour les concerts. D’habitude, je reste quelques semaines puis je rentre en Norvège ou bien alors je pars en tournée. Donc j’ai l’opportunité de voir le côté romantique mais tout le reste aussi. Mon français est bien meilleur maintenant. Je comprends mieux ce que les gens disent, votre politique ou contre quoi les gens doivent lutter. C’est intéressant de voir la vie de tous les jours.

Tu connaissais un peu la scène française avant de déménager ?
TH : Je connaissais Edith Piaf. Justice était vraiment énorme en Norvège, ils passaient tout le temps à la radio. Daft Punk également, David Guetta. La musique française n’est pas tellement diffusée en Norvège. Le nom Serge Gainsbourg m’était familier mais je ne l’avais jamais écouté. Mais la Norvège c’est tellement petit tu sais. Il faut bouger si tu veux survivre…

Propos recueillis le 16 avril 2012.

Interview with Thea Hjelmeland (english edition)






Hailing from Norway, young beautiful and talented folk singer Thea Hjelmeland is a fascinating character. With a fascinating life story made of travels, exiles and, of course, music…

How did you start playing music ?
Thea Hjelmeland : My father is a musician, my mother plays too. Eventhough it wasn’t their job, we always had a lot of instruments at home. I had a lot of tapes, i was listenning a lot of music. Since i was a little child, i used to sing a lot. So i think i came to music very naturally. I started to play piano when i was about six or seven and before that i used to listen to song and write new lyrics (laughs). That was a nice hobby. After that i played drums for five or six years and after that i learned guitar at 13. At that point i started to write songs. I’ve learned all the songs from the artists that i knew and liked. I’ve played for so many hours each day. I went to music school when i was 16/17. And since then i’ve always been working in the music field.

Is that true that you wrote your first song at age 3 ?
T.H : Actually i couldn’t write at that age. But i found an old tape that my mother recorded, she says Thea please sing the song that you’ve made. I was about three years old. It was just rubbish, to be honest. But since that age i’ve enjoyed making music. I used to be in a choir and i tried to make songs for myself. I’m not playing those songs live though (laughs).  


You’re playing a lot of instruments and you’re doing a lot of things by yourself, all alone. Could you tell me how do you work ?
TH : I’ve started by learning a lot of differents instruments but the songs, the vocals have always been the most important thing for me. I have an home studio and i play a lot of different things so i’m able to record myself just with a single instrument. When we recorded the album i’ve already had many songs and many demos from many years. With the album producer we focussed on what i do alone, just me and an instrument. We start to build around that. Sometimes i add musicians after that. But, i think the reason i’m playing so much different instruments is because i’m curious. I’m going after sounds. My playing is not traditionnal, i don’t play banjo like country musicians do. I play everything like a guitar, with chords.

That’s funny because i thaught that the extensive use of string instruments like guitar, ukulele, mandolin, banjo gave to the album a little country touch…
TH : Yes. I go with the way the instrument sounds. The sound of string instruments really attract me, it’s very folk.

Could you tell us a few words about your hometown, Forde ?
TH : It’s a small town, about 10 000 people lives there. I grew up there until 15 years old. It’s a very beautiful place inside in one of the bigger fjord. It’s in between tall mountains, like a valley. There is so much nature over there. But on the other hand, it’s like a city you drive through when we go to two bigger cities. There’s a lot of malls, cars… It’s a strange mix. I’m glad to be able to go from this place to Paris. It’s a small place, very local, in the nature. And then i’m in Paris, which is very urban.

Are you more anonymous in Paris ?
TH : Yes, absolutely.

At some point you said that you need to travel. Why is that ?
TH : I’ve always been travelling. My parents used to travel a lot, they brought us me and my siblings with them. After i finished school, i’ve stayed 6 months in Cuba, just to be someplace else, study, see something different. I was playing with bands and i got tired of the music industry. I needed to find myself. Cuba made everything worst, i was even more confused after that. It was the first time i saw my own country from the outside. The western culture. Cuba is very poor, but there is so much music and culture. I really got a new energy about the music. In Cuba, you just clap your fingers and people start dancing. It’s really exciting. Afterwards i met some musicians from Paris, they brought me here. I met them at an international folk music festival in my town. I’ve spent some nice days with them, they invite me here to play and i’ve met some new people. So i’ve stayed.

Do you think that travelling improved your music ?    
TH : I’m curious, i like to explore. I’m travelling alone or with friends to meet new people, new strories, observing. It reflects itself in my music, in my lyrics. This album is like a compilation of the last ten years of my life. So i think the travels shows in the music, absolutely.

You had a lot of different experiences in music so far jazz, folk, rock even hip hop…
TH : Yeah, i’ve made two albums with an hip hop artist. I did backing vocals. He’s the biggest rapper back in Norway. It was a nice project.

Did it change anything in your own songs ?
TH : The hip hop project was after i finished my own album. Working with a rapper was very challenging. I was singing in norwegian, something i would never dare to do.


Why do you sing in english ?
TH : In France you have such a big culture of singing in french, french songs. In Norway, for many years, the popular culture was in english. In Norway we start speaking english very early, like in the first grade at 6 years old. And the movies are not dubbed. Everything has subtitles. So you hear english all the time. For writing songs, i write a lot in norwegian, but i don’t get myself to sing it.

Are you shy about singing in your mother tongue ?
TH : Maybe. It’s because it’s so honest, i’m not ready yet. In another language i can kind of play with the way it sounds. When i write a song, in the beginning and i just put words and suddenly it turns into lyrics. In english it’s kind of a way of hiding the truth. Eventhough i can be very honest, i can make metaphors. With that rapper it was ok to sing in norwegian because that was somebody else’s lyrics. But it really inspires me to write more in norwegian, so we’ll see…

Tell me about your song « Candyman ». Why is struggle so important to you ?
TH : The song is about the last years when we moved a lot, at some point i felt like i was living in a suitcase. For ten years i didn’t really have a place you know. It was one year here, one year there… I’ve spent, two or three months sleeping on friend’s couches. I have been very nomad for ten years. So the song is about the fact that people normally travel to feel free. I wasn’t. Travelling was part of my job, it was also an escape. I had trouble staying in one place. I need to move. The song is about me, joking with myself. Maybe i’m struggling with staying in one place. So maybe i like to struggle. I was teasing myself singing : « all i want is to struggle ».

How do you like Paris ?
TH : It’s interesting because when i’m in Norway people tells me : « Paris is so beautiful and romantic ». Well, there is a big difference between staying for a long week-end and staying for a long time period… Paris is very beautiful, that’s true. And there is so much, culture and different kind of people. And so much opportunities of shows. I usually stays here for few weeks and then i go back to Norway or i start touring. So i feel that i get to see the romantic part but also all the other sides too. My french is much better now. So i can understand what people says. I understand the political system here or what people are struggling with. It’s interesting to get to know the daily life…

Did you know anything about the french scene before moving here ?
TH : I knew Edith Piaf, Justice was really big, on the radio all the time. Daft Punk too. David Guetta. French music is not really promoted in Norway. I knew the name Serge Gainsbourg but i’ve never listen to him. But Norway is so small, you have to go out to survive.

vendredi 2 novembre 2012

Shiko Shiko : « Aquapark »




Contrairement à ce que son nom laisse supposer, Shiko Shiko n’est pas un groupe nippon mais des petits gars originaires de Lille. Mesdames et Messieurs, voici Shiko Shiko le premier, du moins à ma connaissance, groupe de rock « mutant ». C'est-à-dire assez éloigné du « roll » et qui mise autant sur les guitares et une énergie parfois presque métallique que sur l’électro et les claviers un peu kitsh. Le résultat est assez frappadingue. Aquapark est leur premier single, mais la chronique de l’album arrive bientôt. L’aventure ne fait que commencer…