Martin Courtney,
leader de Real Estate, fait un petit pas de côté dans sa carrière
avec ce premier effort en solo. « Many moons » est un
album comme il en tombe un par décennie, un disque qui, tel un
poison insidieux, s'installe dans les oreilles de l'auditeur pour ne
plus le quitter. Alors, certes, il n'y a rien de révolutionnaire
ici, des guitares, folk ou électriques, doucement arpégées, une
section rythmique, quelques claviers pour enrober la chose, évoquer
le fantôme des Beatles (« Northern Highway ») ou la
scène psyché (« Asleep »). Mais on oublie là l'essentiel :
les chansons. Des petites merveilles pop acoustiques, doucement
électrifiées, avec un savoir faire mélodique évident, dont on
s'étonne encore de les découvrir pour la première fois tant elles
nous semblent familières (« Focus »). Derrière ses
atours simples et modestes, « Many moons » est un disque
tortueux qui réussit l'exploit de ne jamais se perdre en route. La
balance parfaite entre immédiateté et couloirs mélodiques
labyrinthiques (« Airport Bar »). Avec sa jolie pochette
automnale, Martin Courtney nous offre un disque hors-saison, que l'on
prend plaisir à écouter, quelle que soit la lune, et vers lequel on
revient toujours en quête d'apaisement. Le natif du New Jersey
s'inscrit ici dans une lignée qui partirait de Nick Drake, pour la
mélancolie (l'instrumental « Many Moons »), à Big Star
pour le sens mélodique. Contrairement à d'autres, Martin Courtney
ne cherche pas particulièrement la caution vintage, cette dernière
vient toute seule, la qualité des compositions inscrivant derechef
ces dernières dans la catégorie des classiques instantanés.
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