vendredi 3 mai 2013

Interview Smoking Smoking



Audrey Ismaël, la moitié de Smoking Smoking, nous a reçu avec beaucoup de gentillesse chez elle afin de répondre à quelques questions…

Au début quand j’ai découvert Smoking Smoking, j’ai tout de suite trouvé la formule, avec un seul piano pour deux chanteuses/pianistes, unique en son genre. Vous avez débuté comment ?
Audrey (piano/voix) : C’est assez naturel. Vanessa et moi on se connaît depuis très longtemps, des années. Un jour on était en train de discuter, comme deux super potes qui refont le monde autour d’un verre. Et puis on a commencé à chantonner. On faisait toute les deux de la musique, mais chacune de son côté. On a décidé d’essayer d’en faire ensemble. On s’est enregistré. Le lendemain on s’est revu pour réécouter ce qu’on avait fait la veille et qui est ensuite devenu le refrain d’Are we lucky ? On a trouvé ça pas mal ! On s’est retrouvé chez Vanessa où il n’y avait qu’un seul piano. Je me suis assise à gauche, Vanessa à droite et on a commencé à jouer. Je faisais les accords alors que Vanessa arrangeait en direct le morceau. La formule n’était ni pensée ni conceptualisée. On s’est juste retrouvée toutes les deux avec un seul piano et une énorme envie d’en jouer (rires).

Vos voix se marient très bien, les harmonies vocales c’est quelque chose que vous travaillez particulièrement ?
Audrey : Sur l’album on n’est pas automatiquement en harmonie ni à l’unisson. C’est vraiment au service de la chanson. Parfois l’unisson donne de la force, on chante la même chose, nos voix se confondent. Quand on est parties sur des harmonies, elles n’ont jamais été travaillées au sens classique. Tout vient de la mélodie, une fois qu’on avait trouvé le bon mariage, ça restait.

Il y a quand même un côté très mélancolique sur l’album je pense à un titre comme « dancing » par exemple…
Audrey : Oui, c’est un album très personnel. « It’s all about love », le titre est clair. Après, il y a d’autres titres plus épiques. En tout cas, on n’a jamais voulu faire une chanson triste, on essaye plutôt de mettre un état d’âme en musique. On s’inspire autant de nos histoires personnelles que de personnages fantasmés. Ceux qu’on retrouve dans le clip : Marilyn, Elvis, l’astronaute, la diva désespérée en fin de carrière qui attends le retour de son homme… Ces personnages, on a le sentiment de les porter en nous, ils nous ont inspirés. Vanessa et moi on est très proches, on est vraiment très amies dans la vie, ça nous a permis d’écrire des textes qui nous sont très personnels à nous deux, ce qui est assez particulier quand même. Tu parlais de Dancing, c’est l’histoire d’une danse entre moi (ou Vanessa) et un marin et du souvenir de cette danse. Mais bon tu vois, ce n’est pas si personnel que ça, car la chanson ne parle pas d’un marin en particulier mais plutôt de l’image du marin en général. Ces personnages romantiques, le cow-boy, le marin… Ces personnages qui nous permettait de parler de nos histoires personnelles mais de manière très imagée.

L’album est très bien produit et même parfois très arrangé, « Hold my hand », « Don’t let me down » qui est un peu jazzy. Comment vous transposez tout cela sur scène ?
Audrey : Parfois on est toutes les deux, comme quand on est parties en tournée avec Aaron, avant la sortie de l’album. Maintenant on a un percussionniste avec nous, ce qui donne un côté tribal qu’on retrouve sur « in circles ». On est parfois très proche de ce qui se passe sur l’album même si on a seulement un piano et des percussions. On est en train de travailler sur une tournée pour 2013, idéalement on aimerait que Jérémy, qui a fait tout les arrangement de cordes sur l’album, et Thomas, qui s’est occupé des cuivres, nous rejoignent.
  
L’image est une des composantes principales du groupe...
Audrey : Vanessa est également réalisatrice et photographe. C’est d’ailleurs comme ça qu’on s’est rencontrée, elle travaillait comme réalisatrice pour une boîte de production dans laquelle j’étais en stage. L’image c’est vraiment lié à notre univers musical, les musiques nous inspirent des images et inversement. Souvent quand on compose une chanson, on se regarde et on se dit : « T’as vu quoi là ? ».  On va avoir l’image d’un cabaret, d’un quai. Ca inspire directement notre musique. Une fois l’album enregistré, le fait de le mettre en images était totalement évident et naturel. En plus ça pouvait être « fait maison » grâce à Vanessa. Après l’enregistrement on est parties à New York toutes les deux pour faire le clip, la pochette et les photos de l’album. Smoking Smoking, c’est autant la musique que les images et vice-versa.

Il y a un côté à la fois très américain et très cinématographique sur la pochette…
Audrey : Oui cela rappelle les affiches des films de John Cassavetes. C’est le frère de Vanessa, un graphiste, qui a travaillé sur la pochette. Il a complètement compris notre idée d’affiche de film, très 1970s. C’était super, on était très heureuses. Et puis tous les noms sont indiqués sur la pochette, cela permet de mettre en avant les personnes avec qui on a collaboré qui sont partie intégrante du projet et des chansons que l’on retrouve sur l’album.  

Quel genre de film aurait pu être « It’s all about love » ?
Audrey : Dans l’absolu, ces personnages pourraient être dans un film un jour…

Il y a aussi cette ressemblance physique entre vous deux, au début j’ai cru que vous étiez jumelles…
Audrey : On n’est pas jumelles, juste des amies très proches. On se connaît depuis des années et pendant des années personnes ne nous a jamais dit que l’on se ressemblait. Et depuis que l’on a commencé ce projet, on rencontre beaucoup de personnes qui nous demandent si on est sœurs ou jumelles ! Même des personnes qu’on rencontre en vacances en dehors des activités du groupe. Je ne sais pas, c’est peut être naturel vu que l’on collabore énormément. Il y a des mimétismes qui se créent. Cela tient aussi des vases communicants, on s’influence mutuellement. On s’est fait découvrir nos univers respectifs de manière très profonde pour pouvoir travailler ensemble. C’est un côté que l’on n’a jamais cherché à creuser en tout cas. Ca s’est fait tout seul. On n’a jamais cherché à se ressembler, c’est juste la complicité créée avec le temps.

C’est aussi une belle histoire d’amitié…
Audrey : C’est avant tout une belle histoire d’amitié. On avait déjà travaillé ensemble sur le clip et les photos de mon projet solo. Et j’ai toujours suivi de très près les projets de Vanessa que ce soit en matière de musique ou de réalisation. J’ai posé pour elle pour ses photos. On avait déjà un peu l’habitude de travailler ensemble. C’est une amitié très forte.

Un petit mot sur le tournage du clip à New York ?
Audrey : Epique ! On est parties toutes les deux. Encore une fois ce clip à New York cela a été possible parce que on avait déjà un vécu commun très important Vanessa et moi. On avait déjà tout fait toutes les deux ensemble. On n’avait absolument pas peur. Tous les flashs d’images que l’on avait en tête au moment de l’enregistrement on les a trouvé là-bas à New York. Vanessa était toute seule à cadrer, moi je l’assistais, je tenais les lumières. On a rencontré des comédiens là-bas notamment l’actrice qui ressemble à Gena Rowlands. On a eu la chance de tomber sur des comédiens qui ont été très généreux et qui ont joué le jeu. On est parti deux semaines. Cela nous a donné plein d’autres idées, d’autres envies. Vanessa a depuis fait des séances photos qui déclinent l’univers visuel de l’album qui vont donner lieu à une expo photo et à la publication d’un livre.

Et avant ce clip à New York, il y avait eu une autre vidéo pour la même chanson réalisée par Mark Maggiori. Que s’est-il passé, c’est assez rare deux vidéos pour le même titre ?
Audrey : Mark c’est une très belle rencontre, on est très heureuses de ce clip. On avait envie d’avoir le point de vue d’un réalisateur. Un regard masculin. Ensuite l’évolution du projet a fait que l’on a eu envie d’autres images. On avait envie de faire un nouveau clip nous-mêmes.

Les deux vidéos sont très différentes, l’une est en noir et blanc, l’autre est en couleur. Le clip à New York est beaucoup plus long et ressemble plus à un court métrage…
Audrey : C’est vraiment quand on a enregistré l’album, des images nous sont venues alors qu’on était en studio à La Frette. On a eu envie de noir et blanc. C’est l’évolution du projet…

L’album est sous-titré : « 11 chansons sous influence ». Quelle influence ?
Audrey : C’est un petit clin d’œil à Cassavetes, au film « une femme sous influence ». On l’a laissé au singulier de manière volontaire.

« The man who crashed my heart left for the moon », c’est un peu mystérieux comme titre…
Audrey : Tout ça c’est des personnages. Le cow-boy, l’appel à la liberté, ça nous parle, ça nous fait fantasmer. L’astronaute c’est aussi un personnage. C’est le début du clip, une histoire un peu absurde : « après cinquante ans d’hibernation sur la lune, l’astronaute revient sur terre ». La lune, le ciel, les étoiles, c’est des appels à l’absolu, la liberté. Tant qu’à se faire briser le cœur, autant que cela soit par un homme qui part sur la lune. C’est plus romanesque. C’est un album très absolu et donc du coup très romantique.

On dit souvent que pour les jeunes groupes français, l’album sert de carte de visite pour décrocher des concerts (je précise que ce n’est pas du tout ce que j’ai ressenti en l’écoutant). Qu’en penses-tu ?
Audrey : Le live et le studio c’est deux choses très différentes. C’est comme de comparer le théâtre et le cinéma. L’enregistrement d’un album c’est quelque chose de très intime. C’est très minutieux, microscopique. On réécoute beaucoup tout ce qu’on a fait. On cherche si une note de plus ne va pas apporter quelque chose. On a passé des heures et des heures à enregistrer les voix avec Vanessa. On a pleuré, on a été émues… C’était très fort et dense. Sur scène, on est en contact avec le public. On n’est pas sur soi, on essaye de partager quelque chose avec le public. C’est un travail complètement différent. Les chansons ne sont pas véhiculées de la même manière. C’est complémentaire. Moi, personnellement, j’ai très envie de faire des concerts.

Tu parlais de l’enregistrement comme d’un moment d’intimité, comment est-ce que le groupe s’est senti quand le disque est sorti dans le commerce ?
Audrey : C’était un peu fou. Pour Vanessa et pour moi, c’est notre premier disque qui sort dans le commerce. Quand on a vu notre album à la fnac la première fois, c’était l’euphorie. C’est tellement de travail… Après le sentiment se dématérialise, on ne se rend plus vraiment compte. On a reçu beaucoup de messages assez touchants. On avait quand même hâte de le sortir cet album, c’est comme un accouchement après une gestation. On n’avait pas peur.

« Are we lucky ? », vous êtes chanceuses finalement ?
Audrey : Ah oui ! Mais ce n’est pas la question soulevée par cette chanson. Notre destin ne dépend pas de la chance. Chanceux ou pas, il faut se décider, vaincre ses peurs et se lancer dans un chemin qui nous correspond. Après la chance elle vient ou pas. En l’occurrence, sur ce projet on a plutôt été chanceuses. Tout ce qui se passe depuis deux ans, nous fait dire que l’on est sur le bon chemin.
www.facebook.com/smokingsmoking 
Propos recueillis le 12 décembre 2012.
En concert au café de la danse (Paris) le 4 juin.
Un grand merci à Audrey, Vanessa et Jérémy !


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