lundi 12 mars 2007

Michel Polnareff, Palais Omnisports de Paris Bercy, 11 mars 2007.




Drôle de personnage que ce Polnareff, fils d’un pianiste russe qui fut le musicien d’Edith Piaf, son père, selon la légende, lui faisait pratiquer le piano huit heures par jour, corrigeant ses erreurs à coups de ceinture. A 11 ans, il décroche le premier prix du conservatoire. Epris de liberté, il apprend en autodidacte la guitare acoustique, dort dans le métro et chante au pied de la butte Montmartre. Puis c’est la gloire et l’exil. Avec Serge Gainsbourg, il est le seul à avoir su marier avec autant de brio pop et chanson française. Son influence est aujourd’hui encore perceptible, écoutez Air ou Bertrand Burgalat. Michel Polnareff, c’est le fantôme de l’Opéra. On ne le voit nulle part, mais on l’entend partout. Des sonneries de téléphones portables, des spots de publicité et la star academy (enfin d’après ce que j’ai entendu dire parce que moi, perso, je ne regarde pas). Même l’affiche du concert est une synecdoque, on y voit une paire de lunettes noires à monture blanche et une crinière fluorescente, son nom n’est indiqué nulle part, pourtant on ne risque pas de se tromper. Polnareff en concert la France n’avait plus vu ça depuis 1973. C’est dommage mais c’est à Bercy que ça se passe. Grande salle de 17000 places, décors post moderne/industriel, strapontins rouges. C’est grand, immense même, froid et impersonnel. Même l’architecture très 80s toute en angles de ce bidule porte pelouse est hideuse. Ah bordel, je déteste Bercy !

A défaut de nouvel album, les stands de produits dérivés sont biens garnis : strings et boxers siglés « tout pour ma chérie », kit lunettes + perruque (30 €). On peut se faire prendre en photo « polnarisé » et envoyer la photo par SMS, je n’ai pas vérifié mais je suis à peu près certain que le sus-mentionné SMS est surtaxé, qui est ensuite diffusée sur l’écran géant en forme de lunettes au dessus de la scène. Bon je n’ai pas envie d’être méchant, mais tout ce déballage mercatique me met mal à l’aise en même temps qu’il me saoule. Et sans parler des tarifs exorbitants, Michel a beau remplir dix bercys de suite je suis à peu près persuadé que beaucoup n’ont pas eu les moyens de venir.


Bon j’arrête là, il est temps maintenant de parler de musique. Les premiers accords de « la poupée qui fait non » version guitare électrique se font entendre, Michel fait son apparition en ombre chinoise. Le rideau s’abaisse et IL EST LA, sobrement vêtu chemise blanche, pantalon et gilet noirs, les bras en V comme un boxeur sur le ring : « les polnaretrouvailles, épisode 8 ». Croyez-moi des concerts, j’en ai vu, mais ça jamais. 17000 personnes saisies à la même seconde par l’émotion. 17000 personnes qui applaudissent, hurlent MICHEL à l’unisson. Il n’est pas déraisonné de penser que la grande majorité des spectateurs le voit pour la première fois, pas de doute, le moment est énorme. Michel entame son premier morceau « Je suis un homme ». Sept musiciens l’accompagnent batterie, percussions, basse, deux claviers, deux guitares sans oublier les choristes. Les musiciens, américains, sont des monstres de virtuosité. Mais l’ensemble est très humain, le groupe est soudé, cohérent. Ce n’est pas la star et son backing band de requins sans âme. Le batteur, le percussionniste auront droit à leur solo. Michel présenta une à une les choristes qui feront l’effort de dire quelques mots en français. Ce qui se passe est tout bonnement incroyable qu’importe le mega show, les écrans géants, les lumières, les néons, Michel réussit à créer une véritable connexion avec le public se produisant comme si il était dans un club. Au milieu de « l’amour avec toi », Polnareff s’exclame « je veux faire l’amour à chacun d’entre vous, ça risque d’être long » ! Là tu prends des risques, Michel, il y en a quelques unes qui vont tourner de l’œil dans l’assistance ! L’émotion est à son comble quand il s’installe au piano, « lettre à France », chant d’exil et hymne de la diaspora, « love me please love me », « qui a tué grand maman », « l’homme qui pleurait des larmes de verre » jouée deux fois. Les morceaux ont été pleinement repensés, les arrangements sont différents comme le laissait imaginer l’album « live at the Roxy ». Une chanson inédite, plutôt jazzy, est ajoutée aux nombreux tubes. Michel assis sur un tabouret se transforme en jazzman. Scoop : Polnareff a introduit la chanson en annonçant son nouvel album pour « 2047 selon les prévisions les plus optimistes » ! C’est donc officiel, Michel l’a dit, il y aura un nouvel album !

Après plus de deux heures de concert, une pluie de confettis brillants en forme de lunettes s’abat sur le public au milieu de « On ira tous au Paradis ». Les lumières se rallument mais Michel reviendra en pleine lumière, seul au piano et reprendra une dernière fois « l’homme qui pleurait des larmes de verre », superbe chanson extraite de son album éponyme de 1974. Je n’ai qu’un regret j’aurai aimé l’écoutez seul à la guitare acoustique, car on a tendance à l’oublier mais ses débuts on été très influencés par le folk. Quoi qu’il en soit, oubliez la « nouvelle star » il reste, à 62 ans, ce que la chanson française a de mieux à offrir.

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